Intervention de Philippe Gosselin

Séance en hémicycle du lundi 19 novembre 2018 à 16h00
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Motion de rejet préalable (projet de loi ordinaire)

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Gosselin :

Chacun sait qu'il faudrait au moins 11 000 places de prison pour garder la tête hors de l'eau. Des études sérieuses, menées fin 2016 et début 2017, l'ont démontré : la création de 7 000 places supplémentaires ne permet ni l'encellulement individuel ni la modernisation nécessaire des établissements existants. D'ailleurs, que signifient les 7 000 places à l'horizon de 2022 ? Elles incluent 2 000 places en milieu ouvert. C'est beaucoup. Je suis favorable au milieu ouvert mais 2 000, c'est beaucoup, trop sans doute dans cette première vague. Il ne reste alors que 5 000 places plus classiques. À ce stade du quinquennat – les travaux ne commenceront évidemment pas avant 2019 – , on voit mal comment ces 5 000 places pourraient être livrées, même en accélérant ou en simplifiant, comme vous l'avez souligné, quelques procédures. Les contraintes sont nombreuses : peu de maîtrise foncière, certains PLU – plans locaux d'urbanisme – ne sont pas purgés de tous recours des riverains, les délais d'établissement des cahiers des charges peuvent traîner, des appels d'offres doivent être lancés. Bref, beaucoup de fumée masquant la réalité.

On souhaiterait, par ailleurs, voir plus de mesures – il y en a déjà quelques-unes, j'en conviens – permettant de faire de la prison non plus une école de la récidive mais plutôt, sans angélisme, une école de la deuxième chance.

Pour rompre ce cercle vicieux, il est important de donner, en prison, une place beaucoup plus forte à l'activité, celle-ci n'ayant pas vocation seulement à occuper les détenus mais incluant la formation et le travail. Cette exigence doit être au coeur de l'action de l'État et des régions – pour la formation – , en lien avec le tissu économique local et les donneurs d'ordres, dans leur diversité, car c'est elle qui permet de prévenir la récidive, dans l'intérêt des prisonniers, bien sûr, mais tout autant, sinon beaucoup plus, dans celui de la société et de nos concitoyens.

Le Gouvernement nous affirme, la main sur le coeur, qu'il veut une justice de proximité. Comme nos concitoyens, je ne demande qu'à le croire – je ne vous ferai pas de procès en sorcellerie, madame la garde des sceaux. Mais la réforme des institutions judiciaires que vous nous présentez est-elle de nature à rapprocher les citoyens de leurs tribunaux ? Quid de la proximité dont ils ont besoin ? La fusion à venir des tribunaux de grande instance et des tribunaux d'instance en un tribunal unique pose bien des questions : des questions de logistique, de personnels, de répartition des compétences permettant à nos concitoyens de s'y retrouver, bref, des questions dans tous les sens.

Êtes-vous si sûre, comme vous l'affirmez, que, in fine ou à moyen terme, tous les lieux de justice seront maintenus ? Même si vous nous le dites, rien n'est moins sûr pour nous !

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