Madame la garde des sceaux, nous l'avons déjà dit, si vous souhaitez augmenter les moyens de la justice, et nous en prenons acte, ils restent à ce point insuffisants que vous avez envie et besoin de transférer certaines tâches vers d'autres organismes. C'est parfaitement légitime pour un certain nombre d'entre elles, qui relèvent de la constatation ; cela ne l'est pas dès lors qu'elles exigent une décision judiciaire. Entre la constatation et la décision, il y a une grande marge, que l'article 6 ignore.
Il est vrai que c'est sous forme expérimentale – et, pour ma part, je suis rarement opposé aux expérimentations – mais nous souhaiterions que cette expérimentation se fasse sous conditions, à commencer par celle de l'accord entre les parties.
Le filet de sécurité que vous proposez n'est pas suffisant, madame la garde des sceaux. Il n'est pas satisfaisant de recourir au tribunal au cas où, éventuellement, si cela se présentait, quelqu'un constatait, imaginait, évaluait ou pensait qu'il pourrait y avoir manifestement un déséquilibre excessif. Après qu'un magistrat aurait évalué la situation individuelle des personnes, son jugement pourrait être modifié par quelqu'un qui n'est ni formé, ni mandaté, ni légitime pour cela, le directeur de la CAF. Ce ne serait finalement qu'à titre d'exception qu'un juge pourrait intervenir s'il était amené à penser qu'existe un déséquilibre excessif ! Franchement, je pense que ce n'est pas de bonne méthode.
Nous proposons qu'en cas d'accord entre les parties, on ne dérange par le magistrat : c'est une forme de conciliation. C'est ce qui se pratique, ou presque, pour le divorce par consentement mutuel, où le rôle du magistrat se réduit à constater l'accord et à vérifier qu'il n'y a pas de déséquilibre excessif. Ce n'est pas ce que vous proposez.