Intervention de Annaïg Le Meur

Réunion du mercredi 21 novembre 2018 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnnaïg Le Meur :

Les questions d'urbanisme en zone littorale laissent rarement indifférent. Elles suscitent des passions, parfois des tensions et bien souvent des compromis. La loi Littoral, adoptée en 1986, est le fruit de ces compromis. Elle permet un développement harmonieux de nos côtes et la préservation de notre littoral malgré la pression foncière existante depuis les années 1970.

Récemment, lors des débats sur la loi ELAN, nous avons aménagé certaines dispositions de la loi littorale afin de maintenir des activités agricoles sur les côtes. Sur cette question, je rappelle que nous avons effectué un travail de co-construction avec le Gouvernement, entre parlementaires de sensibilités politiques différentes, pour trouver un équilibre entre la préservation du littoral et son nécessaire aménagement.

La proposition de loi de notre collègue Jimmy Pahun se place dans la continuité de nos travaux sur la loi ELAN, en visant principalement à mieux protéger l'activité conchylicole et agricole exercée dans les communes littorales. J'approuve les objectifs de ce texte qui répond à une urgence : les exploitations conchylicoles disparaissent progressivement de nos paysages. La conchyliculture, qui comprend l'élevage des moules, huîtres, palourdes et coques, est pourtant un secteur économique essentiel de notre pays. Elle représente près de 800 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel. Deuxième pays conchylicole européen, la France produits 200 000 tonnes de coquillages par an. Au-delà de l'aspect économique, la conchyliculture est essentielle pour le maintien de la biodiversité sur notre littoral : elle constitue une protection contre l'érosion du trait de côte ; elle permet de mesurer la qualité des eaux ; elle capte les émissions de CO2.

Ce secteur dynamique est pourtant menacé par les pratiques spéculatives de certains propriétaires. La pression foncière, qui s'exerce sur les territoires littoraux, a pour effet de transformer de manière illégale des sièges d'exploitations conchylicoles en lieu de résidence. La disparition d'exploitations à proximité immédiate de l'eau cause un fort préjudice à l'ensemble de la profession et remet en cause son avenir à long terme. Il nous revient donc de protéger ce savoir-faire traditionnel, notamment sur les côtes bretonnes.

Des outils existent pour lutter contre le changement de destination des exploitations conchylicoles ou agricoles, en particulier, le droit de préemption exercé par les SAFER. Malheureusement, ce droit de préemption est applicable uniquement dans les cas où l'activité agricole a cessé depuis moins de cinq ans ; ce délai est trop court. Nous souhaitons le porter à vingt ans afin de garantir l'efficacité du droit de préemption, dont il n'est du reste fait application que dans moins de 10 % des acquisitions des SAFER.

Par souci de mieux prendre en compte la diversification des activités des conchyliculteurs, le groupe La République en Marche (LaREM) souhaite également introduire les cultures marines – aquaculture et pisciculture – dans ce nouveau dispositif.

Nous souscrivons également à l'élargissement du droit de préemption dans les zones naturelles et agricoles des communes littorales qui connaissent une urbanisation trois fois plus importante que les autres territoires. Cette urbanisation s'effectue, rappelons-le, essentiellement sur des terrains agricoles qui perdent ainsi leur vocation. Il s'agit de préserver l'agriculture de notre pays, un enjeu que le groupe LaREM souhaite rappeler et défendre.

Nous appelons cependant à la prudence sur l'extension de cette disposition aux terres de montagne. Ces territoires ont leurs propres besoins en termes d'aménagement, qu'il convient de prendre en compte au niveau local. Sur ce point très précis, il nous semble hasardeux d'appliquer de manière uniforme une règle à des territoires aussi différents. Les problématiques des territoires de montagne sont très particulières et diffèrent d'un massif à l'autre. Il m'apparaît plus opportun que la question du foncier agricole en zone de montagne soit traitée dans le cadre de la mission d'information conduite par mon collègue et ami Jean-Bernard Sempastous.

Pour le reste, il ne nous semble pas nécessaire d'étendre les dérogations à la constructibilité des bâtiments agricoles, ce qui est pourtant prévu par l'article 4 de la proposition de loi. Un grand pas a été franchi avec la loi ELAN, sous le contrôle attentif du juge constitutionnel ; je suggère de nous en tenir là.

Nous faisons nôtre l'objectif de ce texte dont nous approuvons les dispositions principales. C'est pourquoi le groupe La République en Marche soutiendra cette proposition de loi.

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