En m'exprimant sur l'article 42, je me suis félicitée, madame la ministre, que vous ayez étendu, dans le code de procédure pénale, le mécanisme de compétence universelle aux crimes contre l'humanité et aux crimes de génocide. Malheureusement, l'amendement que vous proposez ajoute des conditions qui ne figurent pas dans les conventions de Genève, dont est pourtant directement tiré le principe de compétence universelle : la condition de résidence habituelle n'y figure pas, évidemment, non plus que celle de double incrimination.
Je vais vous donner un exemple qui remonte à la fin des années 1990 : alors qu'il suivait un stage dans une école militaire française, un criminel de guerre mauritanien a été reconnu par plusieurs de ses anciennes victimes. Réfugiées en France, celles-ci ont pu saisir le procureur de ces crimes. Si l'on avait alors appliqué la condition de résidence habituelle, ce monsieur n'aurait pas été inquiété et aurait pu, ni vu ni connu, repartir en Mauritanie – ce qu'il a finalement fait, du reste, bénéficiant de complicités pour récupérer le passeport qui lui avait été brièvement confisqué.
Ce qui me gêne, avec votre amendement, est que vous mettiez la France en contradiction avec les obligations qui lui incombent aux termes des conventions de Genève.
J'en viens à l'hypothèse d'une utilisation politique de la compétence universelle. Il est tout à fait vrai que la suppression de la condition de résidence habituelle permettrait à toute personne de réclamer des poursuites à l'encontre d'un chef d'État étranger qui ne serait que de passage sur le territoire français. Mais en l'espèce, il s'agirait d'un criminel – pas n'importe lequel, du reste : l'auteur de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité ou de génocide.