C'est aujourd'hui l'aboutissement de plusieurs mois de travail et de concertation avec mon collègue Naegelen. Le démarchage téléphonique à domicile est un sujet important. Il concerne chacun d'entre nous. Nous avons tous vécu cette désagréable expérience d'être un jour importuné chez nous par un appel que nous n'avions pas souhaité. Nous avons tous ressenti de l'agacement et parfois de la colère à devoir répondre plusieurs fois aux mêmes appels, à des heures tardives. Les Français le vivent et le ressentent.
Plus de neuf Français sur dix jugent le démarchage téléphonique trop agaçant et trop fréquent. C'est la raison pour laquelle la loi du 17 mars 2014 a démocratisé le registre d'opposition au démarchage téléphonique appelé Bloctel. Au-delà de cette perception, le démarchage téléphonique est un problème complexe, car nous devons arbitrer et trouver la juste mesure entre des consommateurs désireux de quiétude et des entreprises souhaitant se développer.
Nos travaux ont cependant permis de mettre en lumière un phénomène jusqu'ici insuffisamment identifié : les arnaques aux numéros surtaxés. Elles comptent pour 43 % des signalements de Bloctel. Je rappelle qu'aucun dispositif connu, que ce soit le registre d'opposition Bloctel ou les systèmes d'opt-in, ne protège de ce type d'appel. Je le précise aux collègues qui souhaitent interdire tout type de démarchage par téléphone.
Ces appels incitent le destinataire, sous divers prétextes, à rappeler un numéro surtaxé. L'affaire Viva Multimedia, où les sommes en jeu sont estimées à 38 millions d'euros, montre que ces démarches abusives peuvent être très lucratives. À l'origine, désormais, de la majorité des appels qui nous importunent, elles portent surtout préjudice aux plus vulnérables, vous l'avez dit, notamment aux personnes âgées.
C'est pourquoi le groupe La République en marche est favorable à la proposition de loi de notre collègue. Ses deux objectifs sont louables : encadrer le démarchage téléphonique et lutter contre les appels frauduleux.
Il faut en effet encadrer le démarchage téléphonique, car des abus et des défaillances ont été constatés. Comme dans tout secteur, il existe des entreprises vertueuses, qui ont accepté les règles. Il y en a d'autres qui se permettent encore des pratiques de démarchage téléphonique inexcusables. C'est pourquoi nous avons voté en commission un renforcement des sanctions financières, en particulier de celles visant les professionnels qui contreviendraient aux obligations de Bloctel : l'amende applicable sera ainsi portée de 15 000 à 375 000 euros.
La majorité a également souhaité, en commission, étendre la saisine du gestionnaire de Bloctel par les professionnels qui exercent habituellement une activité de démarchage téléphonique. Cela est nécessaire, car les bases de données sont rarement mises à jour.
Je suis également favorable à un meilleur encadrement du démarchage téléphonique dans le cadre de relations contractuelles préexistantes. Concrètement, si vous êtes inscrit sur Bloctel et avez acheté une table auprès d'une entreprise, elle ne pourra pas vous démarcher pour vous proposer un autre produit.
Le dispositif Bloctel, après deux ans d'existence, reste largement perfectible. Nous avons souhaité qu'un rapport gouvernemental soit remis au Parlement sous douze mois. Il évaluera la gestion du service Bloctel et les possibilités d'amélioration de notre droit. Je pense en particulier au traitement des données personnelles et aux droits des consommateurs.
Nous avons aussi longtemps débattu de l'opportunité d'inscrire dans la loi l'obligation d'une charte de bonnes pratiques. Je considère qu'il est de la responsabilité des entreprises, mais aussi dans leur intérêt, de la mettre en place. À titre personnel, je souhaite que les pratiques de démarchage téléphonique des professionnels et l'intérêt d'une charte soient évalués dans le rapport gouvernemental. Les professionnels doivent être responsables de leurs pratiques. Inscrire cette charte dans la loi est, selon moi, superfétatoire.
Mieux lutter contre les pratiques frauduleuses est également un impératif. Pour les raisons que j'ai déjà évoquées, il s'agit de créer de nouveaux outils pour cette lutte. La proposition de loi crée un cadre juridique stable pour les opérateurs de téléphonie. Ils pourront suspendre plus facilement les numéros surtaxés ou les blocs de numéros utilisés à des fins frauduleuses. Les sommes dues à l'éditeur frauduleux du numéro surtaxé seront reversées aux consommateurs. Le groupe La République en marche est favorable à ces mesures et les votera.
Nous partageons les positions adoptées dans l'essentiel du texte. Je reste toutefois réservée sur certaines dispositions introduites par notre rapporteur. J'appelle à la prudence quant à l'obligation pour les éditeurs de presse de s'inscrire sur Bloctel. Les difficultés de la presse écrite sont connues, ne prenons pas le risque de les aggraver.
Je partage le même avis pour les instituts de sondage. Réduire le nombre de personnes pouvant être appelées pourrait déformer la mesure de l'opinion des Français. À l'heure où les sondages sont, on le sait, très utilisés, ce serait préjudiciable au débat public.
Si je devais conclure, je dirais que la majorité partage l'esprit du texte. Il a trouvé un juste équilibre entre la protection du consommateur et la lutte contre les fraudes téléphoniques. Cet équilibre est le fruit d'un travail en commun avec le rapporteur, conduit dans un climat constructif. Ce texte est ainsi à l'image de la volonté de notre majorité de donner la priorité à la concertation et à la coconstruction avec l'opposition, quand l'intérêt collectif doit primer. C'est pourquoi mon groupe votera cette proposition de loi.