Intervention de Cécile Untermaier

Séance en hémicycle du mardi 11 décembre 2018 à 21h30
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCécile Untermaier :

Nous avons dernièrement voté un texte relatif au droit à l'erreur : si les membres de la conférence des présidents en avaient fait usage, un vote solennel aurait pu être organisé. Vous voyez donc que vous êtes vous aussi contraints par des règlements que vous ne parvenez pas à alléger, car se priver d'un tel vote pour un texte de cette nature est extrêmement regrettable.

Les observations que je fais au nom du groupe Socialistes et apparentés portent d'abord sur la méthode : non seulement l'agenda a été bouleversé et le rythme a été bousculé, mais l'opposition comme le Sénat ont été exclus du débat. Au bout du compte, ce texte d'administration, dépourvu d'âme, creuse le sillon de ce que nous avions fait en 2015 et 2016, retenant certes parfois quelques éléments positifs mais aussi, hélas, ceux auxquels nous aurions aimé mettre un frein. Je pense en particulier à la médiation que nous avions envisagée de manière facultative et à laquelle vous donnez un caractère obligatoire.

Vous étendez par ailleurs les déserts juridiques. Si on ne les voit encore, les dispositifs que vous avez adoptés en dépit de nos mises en garde permanentes conduiront à terme à la suppression d'un TGI sur deux dans les départements concernés ainsi qu'à la disparition de chambres détachées. Cela transparaît dans ce texte et c'est ce qui nous inquiète.

Contrairement à ce que vous prétendez, ce projet de loi écarte du juge les justiciables, particulièrement les plus modestes, et éloigne de la justice les citoyens, en remplaçant la cour d'assises par la cour criminelle. Quelle erreur, au moment même où les citoyens expriment dans la rue leur volonté de participer à la vie publique !

Nous aurions aimé voter ce texte mais nos espérances se sont brisées sur plusieurs éléments sur lesquels vous n'avez pas voulu bouger. Le premier d'entre eux est la CAF : vous avez creusé le sillon qui sépare le justiciable du juge en organisant la possibilité d'une décision administrative en cas de désaccord entre deux parties. C'est là un point de départ vers une justice qui s'éloigne du justiciable.

Nous regrettons le recours au notaire pour des actes payants qui pouvaient trouver leur sens auprès de greffes renouvelés. Là aussi, nous avions fait en 2016 une erreur que nous aurions aimé vous voir corriger.

Enfin, nous déplorons la dématérialisation sans véritable garantie, en dépit de nos demandes, d'une présence humaine alternative.

Au pénal, plus grave encore est l'extension des techniques exceptionnelles d'enquête aux délits et aux crimes punis de trois ans de prison. Le référent des chantiers de la justice sur ce point, procureur général honoraire, proposait plutôt un seuil de cinq ans. Nous sommes sur cette ligne, mais vous avez refusé de nous suivre.

Je citerai encore le recours à la visio-conférence sans l'accord du détenu, l'élargissement du champ de la composition pénale et le hiatus entre la volonté de proposer d'autres possibilités au juge et l'absence de moyens suffisants pour lui garantir d'y recourir rapidement.

Ce texte déstructure l'organisation de la justice.

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