Avec cet article, madame la ministre, vous cherchez à régler un problème mais vous ne faites que le déplacer. En cherchant à régler un problème d'engorgement des juges aux affaires familiales, vous n'allez qu'engorger davantage les CAF, lesquelles le sont déjà notablement.
Nous comprenons bien que vous cherchez ainsi à faire apparaître la justice comme étant plus fluide, plus rapide et plus efficace mais cela n'apportera aucune amélioration concrète au quotidien pour le justiciable. À cela s'ajoute un problème de principe que mes collègues Emmanuelle Anthoine et Thibault Bazin viennent de souligner : cette disposition porte atteinte à la séparation des pouvoirs. On ne peut pas demander au directeur d'une CAF de revenir sur la décision d'un juge aux affaires familiales. Ce n'est juste pas pensable dans notre droit aujourd'hui.
Vous nous objecterez qu'un directeur de CAF a du recul sur les situations qui lui sont soumises. En réalité, il ne prendra pas forcément en considération les mêmes éléments que le juge pour réviser le montant de la pension alimentaire, tout simplement parce qu'il a à sa disposition des éléments auxquels le juge n'a pas accès ou que celui-ci ne demande pas pour prendre sa décision. Et si l'on pense que le directeur de la CAF statuera seul, on se trompe profondément : comme s'il avait le temps de se pencher sur chaque cas ! Il va confier les dossiers à des collaborateurs, qui seront le plus nombreux possible pour que la procédure aille le plus rapidement possible. Et pour encadrer tout cela, on établira des barèmes et, finalement, on se retrouvera avec un traitement à la chaîne de situations individuelles qui nécessitent une attention particulière.