Intervention de Philippe Gosselin

Séance en hémicycle du jeudi 17 janvier 2019 à 9h30
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Article 6

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Gosselin :

Certains se réjouissent de voir l'État devenir modeste, voire humble. Je n'en fais pas partie. Les tâches liées à sa souveraineté me semblent toucher au régalien. La justice appartient par excellence au socle fondamental de notre État de droit, de notre démocratie et de notre République. Par touches successives – elles ne datent pas d'aujourd'hui, mais vous accélérez le mouvement au point que ce qui faisait notre justice est en passe d'être dénaturé – , on confie ses missions au privé, à l'extérieur, à des organismes respectables, comme les CAF, qui emploient des gens certes compétents, animés des meilleures intentions et désireux de travailler au service des familles, mais qui ne peuvent rendre la justice au sens où on l'entend habituellement. Les CAF, même si elles sont chargées de missions de service public, sont en effet des organismes privés, pas des structures déconcentrées de l'État – les juristes le savent, cela fait partie des bases du droit administratif, ces faisceaux d'indices qui permettent de reconnaître telle ou telle qualité. Quoi qu'il en soit, je le répète, par touches successives, comme avec la fusion entre le tribunal de grande instance et les tribunaux d'instance de son ressort, prévue à l'article 53, on fait évaporer la justice de notre pays.

C'est une véritable question de fond, à laquelle s'ajoute une interrogation sur les moyens, j'en ai longuement parlé tout à l'heure. Il semble que, pour fixer les territoires d'expérimentation, les choix s'effectueront sur la base du volontariat, voire sur des critères spécieux. Dans ces conditions, je crains que celle-ci ne soit totalement biaisée.

Ou alors, chiche, madame la garde des sceaux : choisissez, pour la mener, des territoires déjà en souffrance parce qu'ils manquent de moyens et de personnels, choisissez des caisses ultramarines ! Vous verrez que l'expérimentation ne se fera pas au service des familles ! Or c'est le désir de rendre un meilleur service à nos concitoyens qui devrait nous motiver, faute de quoi l'expérimentation n'aura aucun intérêt.

Pour ces raisons, mon groupe s'oppose à l'article 6 et votera contre.

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