Monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, comme Mme Sarles vient de l'expliquer fort justement, le dédoublement des classes de CP et de CE1 en REP et REP+, avec un seuil de douze élèves par classe, a entraîné l'explosion des effectifs de certaines autres classes, qui ont dépassé la barre des trente élèves. C'est une réalité dans nos territoires périphériques et ruraux. Lorsque nous vous interrogeons sur ce sujet, nous avons souvent droit à une réponse, ou plutôt à une non-réponse, qui consiste à citer des chiffres démographiques ou des seuils très globaux, exprimés au niveau départemental, mélangeant les REP et les zones périphériques et ne permettant pas une lecture réelle de la situation.
Aujourd'hui, je souhaite concentrer ma question sur quelques points afin de souligner les iniquités scolaires et sociales qu'engendre une telle réforme.
Tout d'abord, à cause des fermetures de certaines écoles rurales, certains enfants se retrouvent très éloignés de leur école. Dans ma circonscription, du fait des horaires des tournées de bus, ils passent parfois plus de deux heures par jour dans les transports. C'est autant de temps en moins pour les activités familiales, périscolaires, culturelles et sportives. Ce temps de transport génère énormément de fatigue et nuit à la capacité de concentration et d'apprentissage des élèves. Ces derniers passent plus de temps hors de leur foyer que des ouvriers ou des employés.
Deuxième chose tout aussi révélatrice, alors que vous parlez des difficultés dans certains quartiers : un rapport de France Stratégie, un organisme lié au Gouvernement, a montré que les enfants des zones rurales ont aujourd'hui 15 % de chances de moins que les enfants des quartiers de connaître une ascension sociale par rapport à la situation de leurs parents. Ma question est très simple, monsieur le secrétaire d'État : comment appréhendez-vous ces inégalités graves qui condamnent certains enfants et contribuent à condamner nos territoires ?
J'en viens à la réforme des lycées, qui paraît aujourd'hui illisible. Elle complexifie le système, dévalorise certaines disciplines et suscite des inquiétudes légitimes chez les enseignants, les parents et surtout les élèves. Elle entraîne aussi des iniquités géographiques pour les lycées ruraux et des difficultés pour les enfants des milieux populaires.
En premier lieu, il y a moins d'options disponibles dans les lycées de la périphérie et de la ruralité que dans les grandes villes. Certains lycées de ma circonscription du Sud-Mosellan n'offrent même pas les sept options sur douze promises par le ministre pour chaque lycée. Finalement, l'offre globale est moindre.
S'agissant ensuite de l'apprentissage des langues, alors que la Moselle est un département frontalier, proche de l'Allemagne, à peine six lycées offrent l'option et la spécialité « allemand ». Chez moi, dans le Sud-Mosellan, il n'y en a même aucun ! Pas un enfant de ma circonscription ne peut accéder à cette spécialité.
Quant à l'enseignement du numérique, il est disponible dans très peu de lycées – en tout cas, il n'est proposé dans aucun établissement du Sud-Mosellan. On parle de fracture numérique et on regrette que les enfants habitant dans les zones rurales aient moins accès que les autres à la connectivité, mais cette situation sera aggravée par l'impossibilité d'accéder à la spécialité « numérique et sciences informatiques », qui sera pourtant, dans les prochaines années, un important facteur d'insertion professionnelle.
Enfin, en conséquence de tout cela, certains enfants issus de familles du Sud-Mosellan voulant suivre des spécialités très précises auront des temps de trajet d'une heure ou une heure et demie par jour pour se rendre dans les lycées des grandes villes. Souhaite-t-on vraiment que nos jeunes de 15 ou 16 ans partent chaque semaine en internat ou passent autant de temps dans les transports chaque jour ?
Monsieur le secrétaire d'État, au sein de l'école de la République, tous les enfants n'ont-ils pas le droit aux mêmes chances ? Nous considère-t-on comme une variable d'ajustement pour les écoles des villes et des quartiers ?