La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures trente.
La parole est à M. Loïc Dombreval, pour exposer sa question, no 572, relative à l'étiquetage du bien-être animal.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Le 5 décembre 2018, une enseigne de distribution bien connue et trois associations welfaristes ont lancé un étiquetage informant les consommateurs sur le niveau de respect du bien-être animal et portant sur le naissage, l'élevage, la collecte, le transport et l'abattage de l'animal.
Son objectif est d'informer le consommateur du degré de bien-être dont a bénéficié l'animal tout au long de sa vie jusqu'à son abattage. Cette information prend la forme d'une vignette allant de la lettre A pour un niveau dit « supérieur » jusqu'à lettre D pour un niveau affiché comme « standard ». Les niveaux A, B et C attestent ainsi d'une amélioration significative du bien-être animal.
Les étiquettes sont délivrées à la suite d'un audit qui repose sur près de 230 critères techniques et scientifiques. L'éleveur, le groupement d'éleveurs, le couvoir, le transporteur et l'abattoir sont contrôlés. Chacun des opérateurs est audité tous les ans. Les acteurs de cette démarche espèrent ainsi améliorer la transparence sur les conditions d'élevage, de transport et d'abattage des animaux et, à terme, améliorer le niveau global de respect du bien-être animal.
Je tiens à saluer cette ambition volontaire, qui ne concerne pour l'instant que les poulets de chair. À ce stade, même s'il convient d'être prudent sur la possibilité de généraliser ce dispositif, il faut reconnaître que celui-ci a d'ores et déjà le grand mérite d'exister.
Je sais que les conditions d'élevage des animaux, la bientraitance et le bien-être animal sont des sujets que M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation prend à coeur. Pouvons-nous espérer qu'un étiquetage dédié au bien-être animal, ou que l'intégration du bien-être animal dans un étiquetage multicritère soit enfin normalisés en France, comme c'est le cas avec succès au Danemark ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Monsieur le député, vous m'interrogez à l'occasion du lancement, par un distributeur, d'un nouveau label visant à évaluer le niveau de respect du bien-être animal.
Alors qu'ils méconnaissent souvent la réalité des modes de production animale ou végétale, les consommateurs se déclarent de plus en plus attentifs au bien-être animal. Des inquiétudes se font jour, notamment car certaines associations dénoncent régulièrement des pratiques de maltraitance en élevage ou à l'abattage qui discréditent l'ensemble de la filière, alors même que ces pratiques n'en sont heureusement pas représentatives. Les consommateurs perdent ainsi progressivement confiance dans les produits qui leur sont proposés et expriment un besoin d'être rassurés auquel les distributeurs tentent maintenant de répondre.
Dans ce contexte, il devient essentiel de prendre en compte l'attente des consommateurs, tout en leur apportant une information objective sur le bien-être animal et sa déclinaison en élevage, en cours de transport ou encore à l'abattage.
Les travaux conduits lors des états généraux de l'alimentation ont notamment permis de mieux cerner les attentes des consommateurs en termes de bien-être animal et de transparence sur les modes d'élevage des animaux. C'est dans ce cadre qu'a été confiée au Conseil national de l'alimentation – CNA – une mission de réflexion pour une expérimentation plus large de l'étiquetage des modes d'élevage, comme celle que vous appelez de vos voeux.
Cette mission s'attachera à dresser un état des lieux des règles européennes et nationales existantes, à définir le champ de l'expérimentation – filières, animaux, denrées et modes d'élevage visés, modalités de différenciation des produits d'origine animale et manière de la faire apparaître sur l'étiquetage – et à fixer les conditions de mise en oeuvre d'une telle indication pour garantir au consommateur la délivrance d'une information claire, compréhensible et sans risque de tromperie.
Le CNA proposera avant la fin de l'année une méthode d'expérimentation, ainsi que des outils d'analyse de cette expérimentation.
La parole est à Mme Bénédicte Taurine, pour exposer sa question, no 564, relative aux violences pendant les manifestations.
Monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur, ma question est en réalité celle de gilets jaunes de l'Ariège, que je me suis engagée à vous poser.
Votre gouvernement et vous-même ne cessez de dénoncer la violence des manifestants, mais sans jamais vous demander d'où elle vient. Citer Hélder Câmara me permet de remettre les choses dans l'ordre : « Il y a trois sortes de violence. La première, mère de toutes les autres, est la violence institutionnelle, celle qui légalise et perpétue les dominations, les oppressions et les exploitations, celle qui écrase et lamine des millions d'hommes dans ses rouages silencieux et bien huilés. La seconde est la violence révolutionnaire, qui naît de la volonté d'abolir la première. La troisième est la violence répressive, qui a pour objet d'étouffer la seconde en se faisant l'auxiliaire et la complice de la première violence, celle qui engendre toutes les autres. Il n'y a pas de pire hypocrisie de n'appeler violence que la seconde, en feignant d'oublier la première, qui la fait naître, et la troisième qui la tue. »
Au lieu de traiter les causes de la violence, vous choisissez d'en réprimer les conséquences. Vous fustigez la violence à l'encontre de biens matériels pour mieux passer sous silence la violence de votre politique. Et vous savez que vous avez une part de responsabilité dans la violence que vous dénoncez.
Si certains brisent des vitrines, votre politique, elle, brise des vies. Ces vies brisées ne datent pas du mouvement des gilets jaunes, qui n'est que la partie émergée de l'iceberg des violences quotidiennes, subies dans un silence qui parfois conduit au suicide.
Les gilets jaunes sont bien plus violentés qu'ils ne sont violents – violentés par une vie trop chère pour être vécue.
De quoi s'agit-il ? De la violence subie par une retraitée qui ne survit plus avec ses 365 euros par mois. Violence qui s'exerce sur une mère de famille isolée qui peine à payer les études de sa fille aînée. Infirmière à temps plein, elle travaille de nuit pour gagner quelques euros supplémentaires, ce qui l'oblige à mettre son fils de 11 ans en internat. Elle perçoit 1 700 euros par mois avec 1 250 euros de charges incompressibles, ce qui l'oblige à faire des repassages pour essayer de s'en sortir.
Violence qui s'abat sur un homme de 60 ans, ancien cadre bancaire actuellement au RSA, qui ne peut pas de remplir sa cuve à fioul. Violence qui redouble lorsqu'il ne peut pas assurer quelques heures d'intérim parce que sa voiture est en panne et qu'il n'a pas les moyens de la réparer. Sans voiture, en milieu rural, on ne peut pas travailler. Violence qu'il y a dans la honte que ressentent ces travailleurs à se tourner par exemple vers le Secours populaire, ou à vivre dans leur voiture car leur salaire ne leur permet pas de se loger.
Alors, quand, depuis Paris, ils sont traités de « fainéants », cela ne peut que les mettre en colère. Je le répète : les gilets jaunes ne sont pas violents, mais violentés. Vos forces de l'ordre ont tiré sur des manifestants qui avaient les bras en l'air en signe de non-violence.
Non seulement la violence de votre répression est injuste et injustifiée, mais vos forces de l'ordre deviennent celles du désordre lorsqu'elles ne respectent plus la loi qu'elles sont censées faire appliquer.
Est-il utile, monsieur le secrétaire d'État, de vous rappeler qu'il est illégal d'éborgner les gens ? C'est en mutilant des innocents que vous poussez les gens à devenir violents. Votre gouvernement est en train de succomber à une violence illégitime.
Des experts de l'ONU dénoncent d'ailleurs des restrictions graves aux droits de manifester. Dans un communiqué datant du 14 février dernier, ils indiquent que « Les restrictions imposées aux droits ont également entraîné un nombre élevé d'interpellations et de gardes à vue, des fouilles et confiscations de matériel de manifestants, ainsi que des blessures graves causées par un usage disproportionné d'armes dites "non-létales" ».
Si vous voulez une réponse, ma chère collègue, il va falloir laisser un peu de temps au Gouvernement !
Monsieur le secrétaire d'État, quand allez-vous mettre fin à cette dérive autoritaire et vous attaquer enfin aux causes du mal-être des gens ? La question des gilets jaunes est simple : quand allez-vous démissionner ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur.
Madame la députée, les manifestations des gilets jaunes ont fait émerger des revendications légitimes auxquelles le Gouvernement et le Président de la République ont répondu en organisant un grand débat et en prenant des mesures exceptionnelles visant à augmenter le pouvoir d'achat des Français.
Dans le cadre du grand débat, plus de 850 000 contributions ont été enregistrées et 3 000 réunions locales se sont tenues, ce nous devons aux maires, facilitateurs essentiels du débat démocratique.
Une revendication légitime s'est exprimée et elle a été entendue. Le débat se poursuit, mais je crois qu'aucune revendication ne peut justifier l'escalade des violences perpétrées par certains manifestants. Chaque samedi, les forces de l'ordre sont prises à partie par des individus ultra-violents qui bafouent le droit de manifester.
Ceux qui adoptent ce comportement ne sont pas des manifestants pacifiques. Il y a des pillages, des exactions, des atteintes graves à nos institutions. Je note que cette violence, madame la députée, vous la légitimez. Pire : vous accusez les forces de sécurité intérieure, à mots non couverts, de violences volontaires, en les qualifiant de « forces du désordre ». À mon tour, je vous pose une question : comment pouvez-vous tenir de tels propos ? Comment pouvez-vous continuer à les tenir après les graves incidents de ce week-end ?
Loin de vouloir remettre en cause le droit de manifester, le Gouvernement, Christophe Castaner et moi-même sommes déterminés à garantir la liberté de manifester, que le texte de loi en discussion, qui sera bientôt adopté en lecture définitive, rendra plus facile. Celui-ci vise en effet à écarter des manifestations les casseurs, et uniquement les casseurs. Soyez assurée que nous sommes tout à fait déterminés à poursuivre le maintien de l'ordre public lors des manifestations.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour exposer sa question, no 566, relative aux quartiers de reconquête républicaine en Seine-Saint-Denis.
Monsieur le secrétaire d'État, j'avais initialement prévu de vous poser une question sur le redéploiement de la police de sécurité du quotidien et les quartiers de reconquête républicaine – QRR – en Seine-Saint-Denis.
Ce département était en effet le grand oublié de la première version du projet : on n'y trouvait, pour la Seine-Saint-Denis, qu'un petit quartier de 20 000 habitants, alors que le dispositif portait sur trente quartiers, où vivent en tout 860 000 Français. J'y voyais le signe qu'une fois de plus, notre département était discriminé : on n'y trouvait que 2,5 % de la population couverte par ce dispositif.
Depuis, vous avez annoncé, avec M. le ministre de l'intérieur, que le nouveau déploiement de cette police concernerait deux nouveaux quartiers, plus importants et parmi les plus criminogènes du département. Je vous remercie d'avoir écouté et entendu les inquiétudes de nombre de ses élus.
Je souhaite toutefois vous alerter sur une situation qui reste extrêmement préoccupante.
J'ai déjà interrogé M. le ministre de l'intérieur sur les intentions de la préfecture de police concernant les fusions partielles de commissariat pour la nuit et le week-end, qui inquiètent beaucoup d'élus, car elles ont donné lieu à très peu de concertation. Ce dispositif sera-t-il mis à l'arrêt, ou va-t-il se poursuivre ?
D'autre part, les problèmes d'effectif subsistent. Au cours des quinze dernières années, l'effectif du commissariat de Stains-Pierrefitte a diminué de 25 %, alors que la population de ces deux villes augmentait paradoxalement de 25 %. De ce fait, y assurer la sécurité de nos concitoyens devient nécessairement très difficile.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur.
Monsieur le député, je vous remercie d'avoir rappelé que M. Castaner et moi-même avons décidé d'implanter deux nouveaux QRR dans le département de la Seine-Saint-Denis, en plus de celui qui couvre deux quartiers à Aulnay-sous-Bois et à Sevran. C'est le signe de l'attention que le Gouvernement porte à ce département, que je connais bien pour y avoir exercé. Nous avons eu l'occasion de le rappeler lors du débat qui s'est tenu dans cet hémicycle sur la situation de la Seine-Saint-Denis dans tous les domaines, y compris celui de la sécurité : notre attention pour ce département est bien marquée.
Vous avez indiqué que, dans le cadre du lancement des quartiers de reconquête républicaine qui seront créés à Saint-Denis et Aubervilliers, nous avons d'ores et déjà prévu des renforts d'effectif. Ceux-ci seront annoncés quand M. Castaner et moi-même viendront, ensemble ou séparément, installer officiellement ces QRR.
Il s'agit effectivement de mettre l'accent sur des territoires à la situation particulièrement dégradée en termes de délinquance. C'est le cas à Saint-Denis, comme nous l'évoquons souvent ensemble. Nous aurons l'occasion d'accroître les effectifs et surtout de renforcer le dispositif de coordination avec les parquets. Nous pourrons ainsi lutter, notamment, contre les trafics de stupéfiants et les ventes à la sauvette, qui constituent une vraie difficulté à Saint-Denis. Nous porterons bien évidemment une attention très soutenue à ces dispositifs de collaboration.
Vous me posez deux questions plus précises sur les effectifs. Au moment où je vous parle, je ne connais pas la situation des effectifs au sein du commissariat de Stains-Pierrefitte, mais je puis vous répéter ce que j'ai dit lors du grand débat, à savoir que la Seine Saint-Denis constitue pour nous une priorité dans le recrutement et l'affectation des fonctionnaires de police.
Nous travaillons à des dispositifs de fidélisation afin que, une fois affectés en Seine Saint-Denis, ces fonctionnaires y demeurent. C'est une difficulté, puisque vous savez que beaucoup quittent rapidement le département pour retourner en province. Nous promouvons également cette fidélisation pour les officiers de police judiciaire, dont la proportion sur l'ensemble du service, dans le département de la Seine Saint-Denis, est une des plus faibles de France. Nous allons veiller à créer les conditions de cette fidélisation. L'ensemble des effectifs de la Seine Saint-Denis fera donc l'objet d'une attention soutenue, même s'ils ont déjà augmenté de façon significative. Je n'ai pas de chiffre précis, et j'en suis navré, mais le niveau actuel est supérieur à l'effectif de référence en Seine Saint-Denis et nous veillerons, avec Christophe Castaner, à ce que cela demeure le cas.
Quant à votre seconde question sur les fusions de commissariats, l'objectif, comme souvent dans ce genre de réforme, est que les officiers de police judiciaire soient plus disponibles au moment où les plaintes sont déposées, donc pas la nuit ou le week-end. Le préfet de police a, selon moi, intégré cette réflexion. C'est, en tout cas, ce que nous demandons. De plus, ces fusions, ces mutualisations, sont souvent une manière d'accroître la présence de nos fonctionnaires sur la voie publique.
Mais vous avez attiré mon attention sur ces fusions, et croyez bien que nous y serons attentifs dans le cadre du déploiement des QRR.
Merci pour ces réponses. De toute façon, nous allons continuer de travailler étroitement sur ce sujet. J'entends votre argument sur les fusions, mais cela doit s'opérer en toute concertation. Or les élus locaux du département, de tous bords, sont extrêmement inquiets, parce qu'ils considèrent ne pas y avoir été associés. C'est un sujet sensible, au premier rang des préoccupations des habitants. On ne peut pas réformer comme cela, sans concertation.
La parole est à Mme Marine Le Pen, pour exposer sa question, no 589, relative au retour des djihadistes détenant la nationalité française.
« S'il y a des djihadistes qui périssent dans ces combats, je dirais que c'est tant mieux. Nous ne pouvons rien faire pour empêcher leur retour. Nous pouvons poursuivre le combat pour neutraliser le maximum de djihadistes. » Vous aurez reconnu les propos de Mme la ministre des armées, le 15 octobre 2017. Depuis, les arbitrages n'ont malheureusement pas penché en faveur de Florence Parly. En effet, suite au départ prévu des troupes américaines, le Gouvernement a annoncé la mise en place d'un dispositif afin de faire revenir une centaine de djihadistes sur notre sol – 130 selon la presse.
Ces djihadistes détenant la nationalité française sont aujourd'hui prisonniers en Syrie et le Gouvernement travaillerait donc à les faire revenir sans qu'ils aient été jugés là où ils ont commis leurs crimes. Drôle de conception du droit international ! Le 29 janvier dernier, Gouvernement, par la voix de Christophe Castaner, expliquait : « on sait où ils sont et de qui il s'agit ». Je souhaite donc, monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur, que vous indiquiez avec précision à la représentation nationale le nombre de personnes concernées, qui parmi elles ont une autre nationalité, et le cas échéant la ou lesquelles.
Pour les binationaux, voire les multinationaux, pouvez-vous nous indiquer si des discussions ont été entamées avec les pays dont ces djihadistes ont également la nationalité, et suivant quel critère le choix d'un retour en France, plutôt que dans l'autre pays, a été fait ?
Enfin, comme je ne comprends toujours pas pourquoi le Gouvernement n'a pas entamé des procédures de déchéance de nationalité dès qu'il a eu connaissance de l'identité de ces soldats de l'État islamique, qui sont de facto des ennemis de la France. Pouvez-vous nous éclairer sur l'intérêt pour la France de les garder parmi ses citoyens ?
Les islamistes, comme M. Finkelkraut en a fait l'expérience ce week-end, sont déjà largement présents sur notre sol. Pourquoi voulez-vous donc à tout prix grossir leurs troupes en faisant revenir les plus dangereux d'entre eux ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur.
Madame Le Pen, vous évoquez la situation des djihadistes français qui sont partis sur zone en Syrie et en Irak. Je rappelle d'abord que depuis le début de la période, c'est-à-dire environ depuis 2013, 1 300 personnes ont quitté le territoire national pour aller combattre au djihad. Parmi elles, nous estimons qu'environ à 300 personnes sont décédées sur zone et 270 personnes sont d'ores-et-déjà revenues en France. Il demeurerait quelques centaines d'adultes toujours vivants en Syrie et en Irak.
Concernant la question très précise du nombre de prisonniers en Syrie et en Irak, vous savez que la plupart d'entre eux sont détenus en Syrie par les forces démocratiques syriennes, majoritairement composées de Kurdes. Ils le sont dans des conditions que nous connaissons et qu'il ne m'appartient pas de révéler puisqu'elles sont couvertes par le secret de la défense nationale. Je vous répète que nous considérons comme tout à fait normal que ces personnes soient jugées là où elles ont commis des exactions. Nous avons d'ailleurs toute confiance dans nos alliés pour en assurer la garde et les maintenir en sécurité.
Vous avez raison d'évoquer le contexte international et la décision de retrait prise par les Américains, laquelle est susceptible d'avoir un impact sur cette situation. Dans ces conditions, il est tout à fait normal que le gouvernement français travaille à différentes options. Le « rapatriement », que vous évoquez, n'est qu'une de ces options, et constitue d'ailleurs une expulsion plutôt qu'un rapatriement. Bref, nous travaillons à toutes les options, et je tiens à vous dire que l'option de l'expulsion n'est à ce jour pas d'actualité. Ces personnes sont pour l'instant détenues en Syrie et cette situation demeure en l'état. Mais il est normal – et je regrette les fuites qu'on a trouvées dans la presse – que le Gouvernement travaille aux conditions dans lesquelles pourraient être accueillies des personnes expulsées.
Je vous rassure : les 270 personnes qui sont déjà revenues de Syrie et d'Irak ont dans leur quasi-totalité fait l'objet d'une procédure judiciaire et bon nombre d'entre elles se trouvent actuellement incarcérées. Celles qui ont purgé leur peine sont très attentivement suivies par les services de renseignement. Les individus qui ont fait le choix d'aller combattre en Syrie et en Irak pour le djihad doivent assumer la responsabilité de leurs actes. De même, une centaine d'enfants sont déjà revenus sur le territoire national avec leurs parents. Ils sont placés dans le cadre de l'aide sociale à l'enfance, généralement en familles d'accueil.
Je répète que l'expulsion n'est à ce jour pas d'actualité, même si nous y travaillons. Par ailleurs, nous sommes capables de traiter la situation de ces individus. Au cas où ils remettraient le pied sur le territoire national, ils feraient l'objet d'une procédure judiciaire et seraient donc incarcérés.
J'en conclus que vous n'entendez absolument pas les déchoir de leur nationalité et les expulser définitivement du territoire national. Or la durée moyenne de condamnation des « revenants » condamnés est de huit ans, ce qui signifie, et c'est l'avocate qui vous parle, que dans cinq ans ils seront de nouveau dans les rues de nos villes, après avoir commis des exactions épouvantables, véritablement barbares, là où ils sont partis ! Il me semble que le Gouvernement ferait mieux de s'intéresser aux moyens d'envoyer définitivement hors de notre territoire les gens qui ont commis ces exactions, plutôt que de chercher à les y faire revenir.
La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour exposer sa question, no 596, relative à la sécurité des Français.
Il y a trois semaines, dans cet hémicycle, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères Jean-Yves Le Drian nous garantissait que la sécurité était la priorité absolue du Gouvernement. Mais la sécurité est la première des libertés, monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur. Comment pouvez-vous garantir la sécurité des Français lorsque nos forces de l'ordre sont constamment mobilisées contre des gilets jaunes que votre politique a poussés dans la rue, alors qu'elles seraient bien utiles ailleurs ? Comment pouvez-vous garantir la sécurité des Français, lorsque les policiers municipaux, les premiers sur le terrain et dont l'action est décisive, disposent à peine des prérogatives nécessaires à l'exercice efficace de leur mission ?
Le malaise est grandissant au sein des forces de police municipale. Le sentiment d'être mis de côté, et de n'agir que dans un carcan de servilité contribue à l'entretenir. Ce même malaise conduit les Français à risquer, chaque samedi, de perdre un oeil. Comment pouvez-vous garantir la sécurité des Français lorsque vous ramenez du Proche-Orient 130 djihadistes accompagnés de leurs familles, qui sont autant de bombes à retardement ? Vous affirmez que ces djihadistes seront placés en détention, mais vous n'êtes pas magistrat et ne pouvez offrir aucune garantie de ce placement en détention.
En janvier 2016, le ministre de l'intérieur, alors député de la majorité socialiste, affirmait qu'il faudrait pouvoir déchoir tout auteur d'un crime terroriste de la nationalité française, qu'il soit binational ou non. Lors de la révision constitutionnelle voulue par François Hollande pour permettre cette déchéance, il l'a soutenu, saluant son courage et sa cohérence et soulignant l'importance de dépasser les clivages lorsqu'il y va de l'intérêt général.
Aujourd'hui, il affirme que ces gens sont des Français avant d'être des djihadistes. Mais les Français sont 80 % à considérer, selon un sondage IFOP de février 2018, que ces djihadistes doivent être jugés et condamnés sur place. Mme la garde des sceaux nous a annoncé par ailleurs qu'une trentaine de djihadistes serait relâchée dans nos rues en 2019.
Il ne semble pas que votre politique emprunte le chemin de la sécurité. Il faut se donner les moyens de ses ambitions. Si la vôtre est réellement la sécurité des Français, agissez en conséquence !
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur.
Votre question, madame la députée, revêt plusieurs aspects. Le mouvement des gilets jaunes a effectivement mobilisé énormément d'effectifs, notamment le samedi, pour des tâches de gestion de l'ordre public. Cela a en effet détourné les effectifs des missions de sécurité publique ces jours-là – mais seulement ces jours-là.
Ce mouvement revêt un caractère extrêmement violent qu'il faut condamner. Permettez-moi de relever que quand on manifeste pacifiquement, on ne risque pas de perdre un oeil : on risque de perdre un oeil quand on s'en prend violemment aux forces de l'ordre, quand on veut investir des institutions. Les forces de l'ordre répondent toujours de façon proportionnée. Les tirs de lanceur de balle de défense qui ont eu lieu sont toujours proportionnés à des agressions extrêmement violentes.
Pour autant, cette crise des gilets jaunes et ces opérations de gestion de l'ordre public, qui se déroulent souvent le samedi, ne nous empêchant pas, tout au long de la semaine, de déployer la police de sécurité du quotidien et d'être présents sur l'ensemble du territoire national. C'est d'ailleurs dans le cadre de la police du quotidien que nous travaillons avec les polices municipales, qui, loin d'être écartées des missions de sécurité, y concourent pleinement, mais dans le cadre des attributions qui sont les siennes.
Or la police municipale ne participe pas à la gestion des mouvements d'ordre public. Elle exerce ses compétences dans le cadre qui est le sien et en coordination très étroite avec les forces de l'ordre – policiers nationaux, gendarmes – , dans le cadre de conventions de coopération qui, selon moi, fonctionnent très bien, comme l'a montré le rapport de vos collègues Alice Thourot et Jean-Michel Fauvergue. Nous examinons les moyens de mieux associer les polices municipales à l'action menée.
Pour ce qui est des djihadistes, je répète que l'ensemble d'entre eux font l'objet de procédures judiciaires, le plus souvent pour association de malfaiteurs en vue d'un crime terroriste. Des procédures sont en cours. J'ai eu la fierté et l'honneur de diriger la Direction générale de la sécurité intérieure – DGSI – , l'un de ces services de renseignements chargés, notamment, des procédures judiciaires concernant ces djihadistes. Je vous confirme qu'ils font tous l'objet de procédures judiciaires.
Pour vous, nous considérons qu'ils sont Français avant d'être djihadistes. Ce n'est pas exactement la réalité : ce sont des djihadistes français, et assurer la sécurité des Français nous tient à coeur. Or la dispersion de ces individus pourrait avoir des conséquences dramatiques pour la sécurité des Français. Ce n'est qu'une hypothèse pour l'instant, mais nous y travaillons évidemment.
En tout état de cause, je vous confirme que si ces individus venaient à remettre le pied sur le territoire national, ils seraient immédiatement interpellés et incarcérés. Certains le sont déjà pour des peines de prison bien plus longues que celles citées par Mme Marine Le Pen.
Quant à ceux qui ont purgé leur peine, je vous confirme qu'en 2019, 33 personnes condamnées pour des faits de terrorisme sortiront de détention. Ces individus sont suivis par les services de renseignement, et notamment par celui que j'ai eu l'honneur de diriger, qui travaille sur le haut du spectre. Vous imaginez bien que personne n'est lâché dans la nature.
Je vous remercie de votre réponse. J'espère que les personnes qui seront relâchées seront suivies de près. Il y va de la sécurité de notre pays.
La parole est à Mme Graziella Melchior, pour exposer sa question, no 574, relative à la prise en charge des retours à domicile d'enfants handicapés hospitalisés.
Plus de 9 millions de personnes en France sont touchées par un handicap. Selon la Convention relative aux droits des personnes handicapées, les États doivent faciliter la mobilité personnelle de ces personnes, à un coût abordable.
J'ai été alertée sur les conséquences négatives de l'application, depuis le 1er octobre 2018, du décret du 15 mai 2018, qui a pour objet de définir les modalités de prise en charge des transports au sein d'un établissement de santé ou entre deux établissements. Il y est précisé que l'établissement de santé doit prendre en charge les dépenses de transport des patients hospitalisés lorsqu'ils sont réalisés au cours d'une permission de sortie. Exception est faite pour les transports « correspondant à une prestation pour exigences particulières du patient ». Or, certains établissements de convalescence ou de rééducation considèrent que les retours à domicile, le week-end, d'enfants atteints de handicap ne relèvent pas de motifs thérapeutiques mais d'exigences particulières. Ces établissements refusent donc de payer ces transports, laissés alors à la charge des familles.
Un exemple m'a été rapporté par l'association PC IMC 29, qui défend et accompagne, dans tout le Finistère, les personnes atteintes d'une paralysie cérébrale ou d'une infirmité motrice cérébrale. C'est le cas d'Elio, petit garçon de 11 ans, qui vit avec un polyhandicap depuis sa naissance. Il n'est pas le seul : on dénombre 880 nouveaux cas d'enfants touchés chaque année, qui peuvent être concernés par cette question.
Beaucoup de familles n'ont ni les moyens financiers ni les équipements nécessaires pour permettre à leur enfant de rentrer chez eux le week-end. Or, le retour à domicile est indispensable à l'efficience de la prise en charge médicale de l'enfant en situation de polyhandicap et à la préservation de son équilibre de vie. Aussi, monsieur le secrétaire d'État, j'aimerais connaître votre interprétation des dispositions de ce décret, ainsi que les mesures que vous envisagez de prendre afin que l'ensemble des adultes et des enfants se trouvant dans le cas d'Elio puissent vivre et exister pleinement avec leur polyhandicap, dans une société qui se veut inclusive.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Madame Melchior, vous savez quel fut mon investissement en faveur des personnes en situation de handicap lorsque je siégeais à vos côtés, il y a encore quelques semaines. J'avais été saisi, comme vous, de cette question, par un certain nombre de personnes et d'associations. Je vous remercie donc vivement pour votre question, qui me permettra, je l'espère, de rassurer de nombreux parents.
La réforme dite de « l'article 80 » est effectivement entrée en vigueur le 1er octobre 2018. À cette date, les dépenses de transport prises en charge directement par l'assurance maladie ont été transférées, comme vous l'avez dit, aux établissements de santé, au titre des trajets effectués pour des patients hospitalisés au cours de leur séjour entre deux établissements de santé, mais également pour des permissions de sortie. Cette réforme a été l'occasion d'un retour à l'application stricte des règles prévues dans le guide de prise en charge des frais de transport des patients, publié par une circulaire ministérielle du 27 juin 2013. Ainsi, il est prévu, comme vous l'avez rappelé, que les frais de transport des permissions de sortie soient pris en charge par les établissements de santé, sous réserve du caractère thérapeutique de la sortie ou de la nécessité liée à l'organisation du service hospitalier. A contrario, les transports relevant d'exigences particulières des patients demeurent à leur charge.
Or, ce transfert de prise en charge a mis au jour les limites de cette règle, particulièrement sensibles pour certaines catégories de patients – je pense au jeune garçon dont vous avez évoqué l'histoire. Vous avez raison, pour des enfants hospitalisés sur une longue période, le retour hebdomadaire au domicile familial, sous réserve d'un avis médical bien sûr, doit être un droit. Les services du ministère des solidarités et de la santé oeuvrent actuellement pour que la réglementation relative à la prise en charge des transports sanitaires soit rapidement modifiée : il s'agit d'ouvrir le droit à la prise en charge hebdomadaire d'un aller-retour aux patients de moins de 20 ans hospitalisés pour des durées de plus de deux semaines. Tel est l'objectif que nous nous assignons.
Le choix que nous faisons signifie que le financement de ces transports ne relèvera plus des établissements de santé, mais directement des caisses d'assurance maladie. Le ministère, et l'ensemble du Gouvernement avec lui, compte sur la mobilisation de l'ensemble du réseau de l'assurance maladie pour permettre l'accès à ce droit pour la patientèle qui bénéficiera dans les plus brefs délais de cette modification.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, d'avoir pris en considération cette demande, que vous connaissiez déjà. Je veillerai à l'application de cette mesure.
La parole est à M. Olivier Gaillard, pour exposer sa question, no 578, relative à la révision du zonage des médecins libéraux dans le Gard.
Monsieur le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, je veux vous faire part de la vive inquiétude partagée par les professionnels, les élus et les patients face à la persistance du zonage actuel visant à un meilleur accès aux médecins généralistes, et dont la méthode d'élaboration est source de préoccupation.
Ce zonage est, dans bien des cas, incompréhensible, car il ne correspond pas aux réalités observées à l'échelle du large territoire des Cévennes gardoises, où la médecine rurale est littéralement en voie de disparition, à l'instar, malheureusement, des services publics. On peut s'étonner, dans ces conditions, que l'on invoque l'obligation d'installation, tant tout semble être fait pour que ces territoires en souffrance soient mis en concurrence et voient disparaître toute activité.
Quand on se penche sur la méthode de zonage, on ne peut que s'interroger sur la pertinence de l'utilisation par l'administration de données de 2015 pour effectuer la sélection nationale, de même que pour estimer la part régionale. Dans le Piémont cévenol et les Cévennes gardoises, une majorité de communes sont exclues des classements prioritaires – et donc des mesures les plus incitatives à l'installation. Pour quel motif, par exemple, le bassin alésien est-il classé de la même manière que Montpellier, alors que la nature de l'offre médicale et les besoins n'y sont en aucune mesure comparables ? Dans le même ordre d'idées, le pays viganais ne figure qu'en zone complémentaire, alors que ce territoire connaît une grande fragilité à court terme. Sa population est vieillissante, les temps de trajets sont conséquents, l'offre de soins est en tension face à une demande qui croît du fait du vieillissement. Le même constat peut être dressé pour des secteurs tels que Saint-Jean-du-Gard ou Sauve.
Dans le même temps, d'autres territoires ruraux et des quartiers de la politique de la ville bénéficient du classement en zone d'intervention prioritaire alors que les inégalités sociales et de santé n'y sont pas supérieures. À cela s'ajoute l'avenir incertain des zones de revitalisation rurale. Les professionnels et les élus locaux, pourtant les premiers concernés, ont été placés devant le fait accompli par l'ARS – agence régionale de santé. Ils se sont vu appliquer un zonage conçu selon des critères préétablis par l'agence, sans avoir été associés au choix de la méthode. En sera-t-il autrement pour le prochain zonage ? Le ministère compte-t-il véritablement faire participer les acteurs de terrain ? Enfin, comptez-vous engager une profonde révision de cette méthodologie ? Soyez assuré que les parties prenantes l'appellent unanimement de leurs voeux et qu'elles vous soutiendront dans cette démarche.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur Gaillard, permettez-moi de rappeler le contexte général de cette question avant d'évoquer plus précisément le territoire dont vous êtes élu. Un important travail de refonte de la méthodologie a été engagé pour permettre aux agences régionales de santé de mieux identifier les zones sous-denses en offre de soins, où sont mobilisées les aides à l'installation et au maintien des médecins. Entre 2017 et 2018, chaque ARS a révisé son « zonage médecin régional » en application de cette méthodologie nationale. Cette révision était nécessaire pour être au plus près de la réalité des territoires. Avec cette nouvelle méthodologie, les zones éligibles aux aides conventionnelles représentent désormais 18 % de la population nationale, contre 7 % auparavant.
Les difficultés que vous mentionnez traduisent néanmoins une réalité et se sont posées de la même manière dans un certain nombre de régions. La nouvelle méthodologie doit ainsi concilier l'expression de priorités nationales, grâce à un indicateur socle, l'« accessibilité potentielle localisée », et des priorités régionales, pour réduire les inégalités d'accès aux soins dont vous savez qu'elles sont au coeur des réflexions de ce gouvernement. Les zones non retenues au sein du zonage peuvent bénéficier d'autres mesures d'accompagnement au plan local, non liées cette fois au critère de fragilité de la zone. Par ailleurs, afin d'ajuster au mieux les aides en fonction du besoin, les ARS peuvent, sous certaines conditions, modifier leur arrêté régional.
Par ce dispositif, il s'agit à la fois d'agir sur les territoires en difficulté et de prévenir les situations de désertification médicale que vous signaliez.
Avec cette méthodologie, 6,2 % de la population régionale en Occitanie se trouve située en zone d'intervention prioritaire, et 36,9 % en zone d'action complémentaire. Enfin, au-delà du dispositif de zonage, le Gouvernement agit résolument pour un meilleur accès aux soins en développant un panel de solutions, adaptables à chaque contexte local, car la réponse aux difficultés démographiques n'est évidemment pas unique sur l'ensemble du territoire. La stratégie de transformation de notre système Ma santé 2022, présentée en septembre dernier, dont le projet de loi à venir est une des traductions, a pour objet de renforcer l'accès au médecin par des mesures complémentaires telles que la création de postes d'assistants médicaux, qui permettront de dégager du temps médical utile, ou la création de 400 postes supplémentaires de médecins généralistes dans les territoires identifiés comme prioritaires.
In fine, l'ensemble de ces dispositifs permettront d'augmenter la ressource en médecine générale, notamment dans les zones « sous-denses ».
Mme la ministre des solidarités et de la santé avait clairement indiqué qu'elle allait mettre fin au numerus clausus, tout en reconnaissant très sincèrement qu'on n'en percevrait les résultats que d'ici une dizaine d'années. La fracture sanitaire, sociale, numérique, territoriale est une réalité. Nous payons des décennies d'absence d'aménagement du territoire. Le sentiment de vivre dans un territoire de seconde zone tend, peu à peu, à traduire une réalité. C'est pourquoi il me paraissait important de souligner ce problème, qu'il est urgent de prendre en considération.
La parole est à M. Fabien Lainé, pour exposer sa question, no 586, relative à la tarification à l'activité.
Monsieur le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, je souhaite vous interroger sur la tarification à l'activité – T2A – pour le financement des établissements de santé.
La T2A permet à chaque établissement de rendre compte de son activité et, par voie de conséquence, d'obtenir un financement. Le Premier ministre a annoncé une réforme globale du système de santé et promis que de nouveaux modèles de financement seraient introduits d'ici la fin 2019. C'est heureux, car les directions des centres hospitaliers font remonter une difficulté bien réelle, qui concerne le financement des services de réanimation.
Le directeur du centre hospitalier de Mont-de-Marsan, que j'ai rencontré à plusieurs reprises, m'a interpellé sur le mode de financement des missions d'intérêt général et des services de réanimation. À l'heure actuelle, l'État accorde des financements forfaitaires ainsi qu'une dotation de fonctionnement pour les missions d'intérêt général, tandis que les services hospitaliers, notamment ceux de médecine et de chirurgie – y compris les services de réanimation – voient leur budget alimenté par une tarification à l'acte. Si la T2A est adaptée au fonctionnement des activités techniques et standardisées, les services de réanimation sont souvent déficitaires alors même qu'ils sont gérés de manière efficiente. L'analyse détaillée des dépenses de ces services fait apparaître un déficit de 10 à 15 %, qui justifie une réévaluation du supplément journalier de réanimation. Est-il envisageable que les services de réanimation soient financés au forfait, afin que leur budget, comme ceux des missions d'intérêt général, soit sanctuarisé ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur Lainé, le ministère des solidarités et de la santé ne peut que partager votre analyse quant à l'inadéquation du « tout T2A » qui a pu prévaloir aux spécificités des unités de soins critiques, au premier rang desquelles figurent les unités de réanimation.
L'activité de la filière des soins critiques se caractérise en effet par l'importance des coûts fixes supportés par ces unités spécialisées, notamment du fait des normes de moyens, notamment humains, auxquelles elles sont aujourd'hui soumises, y compris lorsque l'activité varie. Le modèle actuel de financement des activités de soins critiques conduit à ce qu'une partie des charges soit couverte par les tarifs des séjours T2A tandis qu'une autre partie est financée à travers la facturation de suppléments forfaitaires spécifiques. Ces suppléments sont facturés pour chaque journée où le patient est pris en charge dans une unité spécialisée de réanimation, de soins intensifs ou de surveillance continue.
Ce modèle de financement, intégralement fondé sur l'activité de l'année en cours, ne permet pas de répondre de manière pleinement satisfaisante aux spécificités de l'activité de soins critiques. C'est pourquoi la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 avait prévu, en son article 79, de faire évoluer ce modèle de financement vers un modèle mixte, combinant financement à l'activité et financement forfaitaire, comme vous l'appeliez de vos voeux, de manière à stabiliser le financement de ces unités.
Une telle évolution est d'ailleurs cohérente avec les orientations du plan Ma santé 2022 et les travaux confiés à la mission de Jean-Marc Aubert sur la réforme des modèles de financement des acteurs de l'offre de soins, dont le rapport a été remis il y a quelques jours à Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, et fait actuellement l'objet d'une concertation au sein du ministère.
S'agissant des soins critiques, cette évolution de modèle devra être menée en cohérence avec celle du régime d'autorisations de ces unités, dont la réforme est en cours de construction avec les acteurs des spécialités concernées. L'objectif est de revoir les décrets d'autorisation au second semestre 2019.
C'est au terme de l'ensemble de ces travaux que nous disposerons de tous les éléments permettant d'asseoir une évolution du modèle de financement des unités de soins critiques, afin d'améliorer la prise en compte des coûts et des spécificités de ces activités.
Votre réponse me satisfait, monsieur le secrétaire d'État. Nous serons vigilants sur la suite et les résultats des travaux.
La parole est à Mme Sophie Mette, pour exposer sa question, no 588, relative à la généralisation de la télémédecine et à l'engagement de l'État.
Monsieur le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, après dix ans d'expérimentation, le Gouvernement s'est engagé à généraliser la télémédecine en France. Son déploiement constitue un enjeu clé pour l'amélioration de l'organisation du système de santé et l'accès aux soins pour tous sur tout le territoire.
J'ai envoyé des courriers à Mme la ministre des solidarités et de la santé en août et en octobre 2018 au sujet de la création d'une fondation de la télémédecine, véritable chance pour les territoires. Elle est hébergée par la Fondation Bordeaux Université, dont l'objet est de faire progresser les recherches médico-économiques sur cette thématique. Force est de constater que ces recherches universitaires seraient un atout incontestable pour évaluer l'impact de la télémédecine en France et rationaliser son déploiement.
Un soutien est-il prévu pour permettre un partage des bases de données aux chercheurs universitaires ? D'autres mesures fortes seront-elles prises pour accompagner et soutenir cette initiative d'excellence, y compris financièrement ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la députée, je vous remercie pour votre question, qui me donne l'occasion de souligner avec vous l'opportunité majeure que constitue la télémédecine pour l'organisation de notre système de santé. En effet, toute initiative visant à promouvoir la formation des professionnels de santé et la recherche doit être favorisée afin de permettre à ces organisations innovantes, dont celle de Bordeaux que vous avez mentionnée, de se mettre en place et à la France de devenir un leader dans ce domaine.
Le Gouvernement a permis une accélération sans précédent du déploiement de la télémédecine, avec l'entrée en 2018 dans le droit commun de la tarification des actes de téléconsultation et de télé-expertise. Nous souhaitons désormais favoriser dans les établissements hospitaliers l'appropriation des nouveaux outils de télémédecine. Celle-ci a été intégrée aux orientations nationales du développement professionnel continu des acteurs de santé pour 2019.
En matière de recherche, puisque c'est le coeur de votre question, le ministère assure depuis de nombreuses années le pilotage de programmes de financement des équipes de recherche via des appels à projets nationaux. Je pense notamment au programme de recherche médico-économique – PRME – , qui a pour objet d'évaluer l'efficience des technologies de santé, et à celui sur la performance du système de soins – PREPS – , qui évalue les organisations professionnelles améliorant la qualité des soins et des pratiques.
Ces programmes financent déjà la recherche en télémédecine dans de nombreux champs de la santé : plus d'une dizaine de projets dans le champ de la télésanté ont ainsi été financés dans ce cadre depuis leur création. En 2018, à titre d'exemple, un projet portant sur la téléréadaptation après un syndrome coronarien aigu a été retenu pour bénéficier d'un financement dans le cadre du PREPS, tandis qu'en 2017, un projet d'évaluation médico-économique des télé-expertises bucco-dentaires dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes – EHPAD – a été retenu pour obtenir un financement dans le cadre du PRME.
Comme vous le voyez, de nombreuses mesures sont déjà mises en oeuvre. Nous continuerons nos actions visant à déployer des organisations de télémédecine et favoriser l'accès des patients à cette innovation importante pour l'organisation de notre système de santé.
Je vous remercie pour cette réponse, monsieur le secrétaire d'État. Toutefois, j'aimerais préciser que cette fondation travaille sur deux grands chantiers avec des partenaires directs du ministère, tel que le Health Data Hub. Sollicitée par eux, cette fondation n'a cependant pas les moyens de répondre à l'ensemble de leurs demandes, pour les raisons exprimées et parce qu'elle souffre d'un manque de légitimité dans le territoire. Or cette fondation est largement reconnue dans le monde, et il n'y a en réalité qu'en France que tout bloque. Monsieur le secrétaire d'État, le Gouvernement pourrait-il apporter son concours pour aider et légitimer cette fondation dans notre pays ?
La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour exposer sa question, no 595, relative à la limite d'âge et à la prolongation d'activité des praticiens hospitaliers.
Monsieur le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, je souhaite attirer votre attention sur l'application de l'article 138 de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique. Dans sa version actuelle, cet article établit à 72 ans la limite d'âge d'exercice dans les établissements publics de santé pour les médecins et les infirmiers.
Pourtant, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, l'adoption d'un amendement avait permis d'assouplir cette règle, en prévoyant différentes modalités pour y déroger. En effet, il était possible pour les praticiens de plus de 72 ans de continuer à travailler deux demi-journées par semaine dans le cadre d'un contrat annuel renouvelable, sous réserve de leur aptitude physique et mentale et de l'avis favorable du président de la commission médicale de l'établissement, du chef de pôle et du chef de service concernés.
Dans des territoires marqués par la désertification médicale, cette mesure était particulièrement adaptée. Elle permettait, entre autres, à nos hôpitaux de continuer à bénéficier des compétences et de l'expertise développées par des praticiens, notamment hospitalo-universitaires, devenus référents dans leurs domaines.
Cependant, le Conseil constitutionnel a censuré cette disposition, insérée à l'article 85 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, considérant dans sa décision no 2016-742 du 22 décembre 2016 qu'elle avait un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à son financement.
Élue d'une circonscription rurale concernée par la désertification médicale et sensible à la sauvegarde de la qualité des soins dispensés à nos concitoyens, je souhaiterais connaître les actions que vous comptez mener, notamment dans le cadre du projet de loi relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé, pour réintroduire cette mesure de bon sens dans le code de la santé publique et permettre ainsi de soulager de nombreux établissements de santé dans le territoire.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la députée, je vous remercie pour votre question qui me permet de faire le point sur les conditions dans lesquelles les praticiens exerçant en établissement de santé peuvent être autorisés à prolonger leur activité après la limite d'âge qui leur est applicable.
Celle-ci résulte de l'application de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé. Elle est de droit commun à 67 ans, portée transitoirement à 70 ans pour les praticiens hospitaliers et à 72 ans pour les praticiens en cumul emploi-retraite, jusqu'au 31 décembre 2022. Les praticiens cumulant un emploi et leur retraite ont donc déjà, sous certaines conditions, la possibilité d'exercer cinq ans au-delà de l'âge légal de départ à la retraite.
Le Gouvernement connaît évidemment les difficultés d'attractivité de l'exercice médical dans certains de nos territoires, en particulier ruraux, comme le vôtre. Permettez-moi néanmoins de préciser que la disposition du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 à laquelle vous faisiez référence et qui a effectivement fait l'objet d'une censure de la part du Conseil constitutionnel n'a de fait jamais été mise en oeuvre.
Nous ne pensons pas souhaitable d'aller au-delà de ce qui est déjà autorisé pour repousser le départ à la retraite. Nous faisons d'autres choix : dans le cadre du plan Ma santé 2022, la diversification des fonctions et des cadres d'exercice des praticiens hospitaliers sera encouragée – c'est l'une de nos réponses aux enjeux de désertification territoriale. Il est ainsi prévu, par la création d'un statut unique de praticien hospitalier, de renforcer l'attractivité des carrières hospitalières et de faciliter les exercices partagés. Les parcours professionnels seront mieux accompagnés, grâce à l'accès à une diversité de fonctions, notamment d'enseignement et de recherche, et à des cadres d'exercice mixtes entre activités hospitalières publiques et exercice libéral, dans l'optique de remédier notamment à la difficulté d'accès aux soins que vous pointiez dans votre question.
Je vous remercie pour votre réponse et serai particulièrement attentive à cette question lors de l'examen du futur projet de loi relatif à la santé.
La parole est à Mme Michèle Victory, pour exposer sa question, no 590, relative à la situation de l'hôpital de Moze en Ardèche.
Monsieur le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, notre département de l'Ardèche n'a pas une position géographique facile. Les déplacements dans la deuxième circonscription, située dans le nord du département et s'étendant de la vallée du Rhône aux limites de la Drôme, de la Loire et de l'Isère, y sont particulièrement contraignants. L'accès aux soins et à la santé y est un enjeu majeur, déterminant la stabilité socio-économique de ce territoire ainsi que son attractivité.
Vous connaissez la situation délicate de l'hôpital de Moze : nous sommes tous très attachés à la vie de cet établissement, qui reste absolument essentiel pour les habitants du bassin. Il a développé des partenariats avec les centres hospitaliers d'Annonay, de Saint-Étienne, du Puy-en-Velay ou de Firminy, tous situés à plus de 45 minutes en voiture. Les différentes rénovations, en 1973, 1979, puis 2000, ont amélioré le quotidien mais n'ont pas permis de suivre l'évolution des besoins et de l'activité médicale, ni de moderniser suffisamment la structure.
Aujourd'hui, les conditions de travail des salariés, ainsi que celles de séjour des patients et des résidents sont inadaptées et rendent très difficile le travail de tous au quotidien. À la suite de la fermeture du service de chirurgie en 2004, puis de la maternité en 2008, l'hôpital de Moze a dû faire face à d'importantes difficultés financières qui menacent son avenir. Afin d'éviter la fermeture de cet établissement et de préserver l'accès aux soins de tous, les gestionnaires de l'hôpital ont proposé aux autorités sanitaires de créer un groupement de coopération sanitaire – GCS.
Cette décision a permis aux deux établissements de santé de Moze et des Genêts de mutualiser leur direction et une partie de leur personnel, allégeant ainsi les coûts de fonctionnement. Dans le cadre de ce GCS, l'hôpital de Moze disposait d'un service de médecine de huit lits, d'un service de soins de suite et de réadaptation – SSR – de huit lits, d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes – EHPAD – de quatre-vingts lits, d'un centre périnatal de proximité et d'un service de consultation avancée. Parallèlement, l'établissement des Genêts disposait d'un SSR de vingt-quatre lits et d'un EHPAD de quarante-quatre lits.
Aujourd'hui, après l'engagement de l'équipe dirigeante sur un retour à l'équilibre pour la fin de l'année 2019, l'établissement souhaite s'engager dans un projet de rénovation nécessaire pour sa pérennité d'environ 15 millions d'euros, pour lequel le conseil d'administration et la direction recherchent activement des financements. Il est déterminant dans une politique de soutien à nos territoires ruraux, comme le Gouvernement l'a indiqué dans son plan santé. En outre, les équipes sont engagées dans un vaste projet concerté, qui prend en compte de nouvelles stratégies au service de la qualité des soins et d'un nouveau parcours de santé transversal au service du patient.
Aussi, je souhaite savoir ce que le Gouvernement entend donner comme réponse à ce projet.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la députée, je vous remercie pour votre question sur l'hôpital privé non lucratif de Moze à Saint-Agrève, que nous connaissons bien et qui est en effet un établissement de santé à dominante médico-sociale répondant aux besoins de santé de proximité – médecine, SSR, EHPAD. Il est aussi un centre périnatal de proximité et un centre de soins non programmés pour un bassin de population d'environ 20 000 habitants dans un secteur rural, de faible densité de population et aux confins du département de l'Ardèche et de la Haute-Loire.
Conscient des enjeux d'accessibilité aux soins et aux structures médico-sociales, le directeur général de l'agence régionale de santé – ARS – Auvergne-Rhône-Alpes a reçu la gouvernance de l'établissement à la fin de l'année 2018 pour faire un point de situation sur le projet de rénovation de l'établissement. À cette occasion, l'ARS a arrêté le principe d'une aide de 1,5 million d'euros pour la rénovation de la partie sanitaire de l'établissement – celle de la partie médico-sociale est déconnectée et dépend de la position du conseil départemental de l'Ardèche.
À l'heure actuelle, la direction de l'établissement doit finaliser son projet d'investissement en calibrant précisément son périmètre. Je note par ailleurs que la trésorerie de l'hôpital de Moze a pu compter sur un accompagnement fort de l'ARS ces trois dernières années, à hauteur de 830 000 euros. Dans le même temps, la direction de l'établissement a pris des mesures d'efficience, que vous avez évoquées.
Consciente des enjeux de proximité, l'ARS souhaite appuyer financièrement l'établissement pour le fonctionnement du centre de soins non programmés cette année. Cela permettra de conforter la réponse locale aux besoins de santé de l'établissement, dont les services proposés entrent en grande partie dans la définition à venir des hôpitaux de proximité, portée dans le projet de loi relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé. Cet ensemble cohérent d'actions de soutien et d'accompagnement doit permettre à l'établissement de pérenniser les recrutements médicaux, dans une zone où, vous l'avez rappelé, la problématique d'installation des médecins reste très sensible.
Merci pour votre réponse, monsieur le secrétaire d'État. J'insiste sur le fait que l'aide de 1,5 million d'euros que l'ARS s'est engagée à verser n'est pas évidemment pas suffisante. Dans un territoire où il neige encore en mai, et même s'agissant d'un hôpital privé, comme vous l'avez rappelé, il est nécessaire que l'État s'engage autant qu'il le peut.
La parole est à M. Joaquim Pueyo, pour exposer sa question, no 591, relative aux revendications des aides à domicile.
J'appelle l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la situation préoccupante des aides à domicile, et notamment sur les moyens alloués à leur rémunération. Il est essentiel de donner aux aînés l'aide qui leur est nécessaire tant qu'ils peuvent demeurer dans leur logement, afin d'assurer leur autonomie.
En raison du vieillissement de la population française, la question de l'offre et de la demande d'aides à domicile sera de plus en plus pressante. En 2050, 22 millions de personnes seront âgées de plus de 60 ans. Elles représenteront 32 % de la population française, contre 12,6 millions en 2005, soit une hausse de 80 % en quarante-cinq ans.
La France devra faire face à une très forte augmentation de la demande. Pour y répondre, il faudra favoriser une hausse du nombre d'aides à domicile. Or ces personnes sont confrontées à des situations complexes, nécessitant des réponses concrètes.
Comme l'ont rappelé à plusieurs reprises des associations telles que l'ADMR – Aide à domicile en milieu rural – ou l'UNA – Union nationale de l'aide, des soins et des services aux domiciles – , les agents à domicile perçoivent un salaire mensuel moyen légèrement inférieur à 1 000 euros – 972 euros exactement. Leur rémunération est très basse en raison d'un nombre d'heures de travail limité et d'un emploi du temps morcelé, nonobstant l'accroissement du nombre d'interventions.
En outre, ils souffrent d'un problème de mobilité, notamment dans les territoires ruraux – tel est le cas dans le département de l'Orne, où je suis élu. En effet, plusieurs trajets effectués au cours d'une journée ne sont ni indemnisés ni décomptés de leur temps de travail.
En raison de la demande observée de nos jours et des évolutions prévisibles au cours des décennies à venir, la question du recrutement et donc de l'attractivité de ces métiers me semble cruciale. Il est urgent de faire un geste afin que ces personnels bénéficient de ressources suffisantes, mais également de résorber les lacunes techniques, comme celle de ces trajets non indemnisés.
D'après les associations, plusieurs centaines de millions d'euros doivent être investis afin de résorber la situation. C'est au département de jouer ce rôle, me dira-t-on. Toutefois, ceux-ci ne peuvent fournir les fonds nécessaires. Dès lors, j'estime qu'ils doivent être soutenus par les services de l'État. Les agences régionales de santé pourraient jouer un tel rôle de soutien et de coordination.
Quelles sont les pistes de réflexion envisagées – je sais qu'il s'agit d'un sujet complexe, qui ne relève pas directement de la compétence de l'État – afin d'apaiser les inquiétudes très concrètes de ces personnels, dont l'engagement en faveur de nos aînés doit être reconnu à sa juste valeur ?
Il s'agit, me semble-t-il, d'un sujet d'actualité, qui pèsera lourdement sur l'avenir de l'accompagnement de nos aînés, qui souhaitent à juste titre demeurer autant que possible dans leur lieu de résidence.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur Pueyo, vous avez bien voulu appeler l'attention du Gouvernement sur les inquiétudes légitimes des professionnels accompagnant les personnes âgées en perte d'autonomie à leur domicile. Je vous répondrai en trois temps.
Tout d'abord, mais vous l'avez rappelé, les pouvoirs publics n'ont pas compétence pour intervenir dans les négociations collectives entre les organisations représentatives des employeurs et celles des salariés. Pour autant, ils accompagnent la dynamique de ces négociations en fixant chaque année un taux de progression de la masse salariale du secteur social et médico-social privé non-lucratif compatible avec l'équilibre de nos finances publiques.
Dans ce cadre, s'agissant de la rémunérations de ces personnels, Mme la ministre des solidarités et de la santé a procédé au mois de juin dernier à l'agrément de l'avenant n° 36 à la convention collective de branche de l'aide à domicile, afin de mieux prendre en compte le temps et les frais de déplacement des personnels dont les interventions imposent des horaires discontinus ainsi que des déplacements au cours de la journée. Nous avons bien conscience du problème que vous soulevez, monsieur Pueyo.
Par ailleurs, consciente que l'un des freins à l'attractivité de ces métiers réside en partie dans les difficultés de son exercice, Mme la ministre a également confié à la direction générale de la cohésion sociale la mission de définir et de mettre en oeuvre des actions concrètes visant à améliorer la qualité de vie au travail des professionnels de l'aide à domicile. Cette mission s'inscrit dans le cadre des travaux – en cours de finalisation – d'une commission sur la qualité de vie au travail dans les services à domicile lancée au mois de septembre 2018.
Enfin, dans le cadre de la concertation grand âge et autonomie inaugurée le 1er octobre dernier, une réflexion plus globale sur les métiers du grand âge, notamment celui d'aide à domicile, est en cours. Ces travaux visent à construire une réponse globale et adaptée aux problèmes des professionnels fournissant un soutien quotidien aux personnes en perte d'autonomie en raison de leur âge ou de leur handicap.
Cette réflexion aboutira à des propositions concrètes, en principe à la fin du premier semestre 2019, afin de définir les contours d'une réforme ambitieuse qui sera l'objet d'un projet de loi relatif à la dépendance.
Je serai attentif à l'élaboration de ce projet de loi. Je me suis inscrit, ce qui devrait vous faire plaisir, monsieur le secrétaire d'État, au grand débat national. Je participe à de nombreuses réunions, hier soir encore dans ma circonscription, et j'en organise deux, avec de nombreux parlementaires. Or ce sujet de l'accompagnement des personnes âgées et des personnes handicapées, dans le cadre des établissements spécialisés ou à domicile, y est régulièrement évoqué. Ce sujet est essentiel pour les décennies à venir. Le projet de loi annoncé tombe à point nommé. Nous y serons tout à fait attentifs. J'espère que je pourrai y contribuer positivement.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour exposer sa question, no 592, relative à la certification des dispositifs médicaux et aux pénuries de médicaments.
Je poserai deux questions. La première porte sur la certification des dispositifs médicaux. Avant leur mise sur le marché, ceux-ci sont soumis au marquage « CE », et c'est bien normal, afin de garantir leur conformité avec les exigences européennes en matière de sécurité sanitaire et de santé. La certification est établie pour cinq ans par un organisme notifié par la Commission européenne.
Comme les organismes français n'ont plus assez de créneaux horaires pour certifier les produits des entreprises françaises, de nombreuses PME – celles qui ont de petits marchés – sont contraintes de recourir à des organismes certificateurs installés hors de France, dans un autre pays de l'Union européenne. Or ceux-ci ont accumulé un retard important en matière de certification et certains ont prévenu des PME françaises qu'ils ne certifieraient plus leurs produits.
Dès lors, celles-ci ne pourront plus mettre leurs produits sur le marché – des vis utilisées en orthopédie par exemple. Certaines seront contraintes à mettre la clé sous la porte, faute de pouvoir vendre leurs produits déjà certifiés mais dont la certification n'aura pas été renouvelée.
Monsieur le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, j'aimerais que vous me disiez combien de PME françaises sont obligées de solliciter leur certification auprès d'organismes basés hors de France, et combien sont en butte à une fin de non-recevoir en raison de laquelle elles ne peuvent plus vendre leurs produits. L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé – ANSM – peut-elle agir, par exemple en prenant le relais de ces organismes, au moins pour une période transitoire, afin d'assurer une continuité entre la certification initiale et la suivante qui se fait attendre ?
Ma seconde question porte sur les pénuries de médicaments, qui me paraissent un problème crucial. J'ai été élue pour la première fois en 2012 et au cours du précédent quinquennat, je n'ai jamais entendu parler de pénurie de médicaments. Au cours des derniers mois, j'ai reçu de très nombreuses lettres à ce sujet.
J'aimerais donc connaître le nombre de médicaments en rupture de stock, savoir si celle-ci est circonscrite à quelques territoires ou concerne toute la France, et surtout connaître les actions entreprises par le Gouvernement afin d'y remédier.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
À deux questions, deux réponses : la première au sujet des organismes notifiés et de leur compétence, la seconde au sujet des pénuries de médicaments, lesquelles font l'objet de nombreux courriers mais peut-être aussi de nombreuses évocations dans des débats auxquels peut-être vous participez comme votre collègue Pueyo, madame Rabault.
Sourires.
La compétence des organismes notifiés susceptibles d'évaluer la conformité des dispositifs médicaux aux exigences de santé essentielles est une préoccupation de toutes les autorités sanitaires de l'Union européenne.
Il existe un seul organisme notifié en France, le GMED. L'ANSM s'est déjà mobilisée afin d'assurer efficacement son évaluation au regard des nouvelles exigences européennes, en vue de sa notification. Toutefois, il demeure essentiel que les demandes des industriels, français notamment, puissent être satisfaites. Or tel n'est pas le cas.
Dans le cadre du dernier conseil stratégique des industries de santé, présidé par le Premier ministre à la fin de l'année 2018, un appel à manifestation d'intérêts a été lancé, afin de résorber cette situation et d'inciter un nouvel organisme français à se porter candidat à la procédure de notification.
S'il semble difficile, pour un organisme de certification, de se porter candidat dans des délais contraints et de satisfaire aux exigences européennes renforcées, compte tenu des compétences et du temps nécessaires, rien n'exclut que d'autres organismes d'évaluation de la conformité des dispositifs médicaux soient notifiés à moyen terme, et nous oeuvrons en ce sens.
S'agissant des pénuries de médicaments, je tâcherai d'être précis. Depuis plusieurs années, le circuit de distribution des médicaments est régulièrement victime de dysfonctionnements entraînant des ruptures d'approvisionnement en médicaments. Ces difficultés récurrentes ne sont pas propres au système de santé français et concernent un nombre croissant de pays de l'Union européenne.
Les causes des ruptures de stocks sont multifactorielles. En tout état de cause, il faut reconnaître que le nombre des ruptures ou des risques de rupture de stock s'est accru de façon significative. Les chiffres sont éloquents : selon l'ANSM, le nombre a été multiplié par dix en cinq ans ! On dénombrait 44 signalements de rupture de stock en 2008, et 453 en 2013. En 2018, l'ANSM a recensé 868 signalements de rupture de stock.
Nous avons analysé avec beaucoup d'attention les propositions formulées dans le rapport de la mission d'information sénatoriale sur la pénurie de médicaments et de vaccins – lesquels sont également concernés – publié au mois d'octobre dernier. Je vous invite à le consulter si vous ne l'avez pas déjà fait.
Sur cette base, nous avons engagé des travaux. Un plan d'action visant à renforcer les moyens de lutter contre les ruptures de stocks devrait être annoncé prochainement. Il suivra trois axes majeurs : rétablir la confiance entre les acteurs de la chaîne pharmaceutique et les usagers ; développer une expertise interministérielle en vue de prévenir les ruptures ; renforcer la coordination nationale et la coopération européenne.
S'agissant de la certification des dispositifs médicaux, monsieur le secrétaire d'État, vous n'avez parlé que d'une solution à long terme. Mais que faire aujourd'hui pour les PME bloquées, qui devront licencier si elles ne peuvent pas vendre leurs produits ?
La parole est à M. Rémy Rebeyrotte, pour exposer sa question, no 576, relative à la mobilité dans les territoires du nord du département de Saône-et-Loire.
Je poserai deux questions relatives à un seul et même sujet, celui de la mobilité dans les territoires du nord de la Saône et Loire. La voie ferrée Centre Europe Atlantique, notamment sa section joignant Chagny à Nevers, est l'une des priorités du Gouvernement, conformément aux conclusions des travaux du conseil d'orientation des infrastructures. Ce projet essentiel concerne le fret comme le trafic voyageurs, et 240 millions d'euros y sont consacrés dans le contrat de plan État-région. Les travaux devraient permettre le sauvetage et la réhabilitation de la ligne, qui en a bien besoin, ainsi que son électrification si nécessaire.
J'aimerais obtenir des précisions à ce sujet et notamment obtenir la confirmation des moyens financiers ayant été fléchés ainsi que de l'échéancier de réalisation de cet important investissement, le développement du fret sur cette ligne devant permettre de décongestionner le trafic en région parisienne.
Par ailleurs, la nouvelle limitation de vitesse applicable sur les routes départementales dépourvues de séparateur central place le centre hospitalier du Creusot à plus de quarante minutes de celui d'Autun, lequel est d'ores et déjà la structure hospitalière d'accueil de la moitié du massif du Morvan pour les urgences et la maternité, et joue par ailleurs le jeu des coopérations entre public et privé.
Il en résulte que le centre hospitalier d'Autun satisfait désormais aux critères définissant le statut d'hôpital isolé, en raison desquels il devrait bénéficier de moyens supplémentaires. Ce relatif isolement induit en effet des charges et des contraintes lourdes en matière de mobilité pour l'accès aux soins et aux services sanitaires.
Ainsi, j'aimerais savoir si la demande de reconnaissance du statut d'hôpital isolé du centre hospitalier d'Autun a bien été examinée, ou réexaminée en tenant compte de ces nouvelles données, et si elle peut aboutir compte tenu de sa situation si particulière.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur le député, je me concentrerai sur votre deuxième question. L'éligibilité d'un établissement hospitalier au forfait accordé en cas d'activité isolée dans le domaine de l'obstétrique est déterminée en fonction de quatre critères, dont deux reposent sur la présence d'une activité similaire dans un rayon de quarante-cinq minutes : une activité de moins de 10 000 séjours dans un rayon de quarante-cinq minutes, déduction faite de l'activité de l'établissement ; une distance avec un autre établissement exerçant la même activité obstétrique à plus de quarante-cinq minutes.
La nouvelle limitation de vitesse à 80 kilomètres par heure sur les routes départementales a un impact minime sur un trajet d'une trentaine de kilomètres. Ainsi, le centre hospitalier d'Autun reste situé à moins de quarante-cinq minutes de l'Hôtel-Dieu du Creusot et ne remplit pas deux des quatre critères de l'activité isolée.
Je profite de votre question pour rappeler que l'hôpital d'Autun bénéficie d'aides importantes : un soutien annuel de l'agence régionale de santé de près de 1 million d'euros, dont 400 000 euros en exploitation et près de 600 000 en investissement, et des aides nationales régulières qui se sont élevées à 2 millions d'euros l'an dernier.
Je connais votre investissement pour l'accès aux soins dans votre territoire, je vous en remercie, et je ne peux que vous confirmer la vigilance et l'accompagnement de l'État en ces matières.
La parole est à Mme Catherine Fabre, pour exposer sa question, no 569, relative à la place des femmes dans le numérique.
La RoboCup est désormais un rendez-vous rassemblant chaque année 450 équipes venues de 45 pays, 3 500 participants et 40 000 visiteurs. Ses retombées sont estimées, selon les années, à 7 à 15 millions d'euros en six jours de compétition. Il s'agit de la plus grande compétition de robotique et d'intelligence artificielle au monde. La France a été retenue pour l'organisation de la prochaine compétition, à Bordeaux en 2020. Il s'agit de stimuler la robotique française et ses disciplines voisines par la recherche et l'innovation, et de susciter des vocations.
Les femmes sont trop peu nombreuses dans les métiers du numérique et de la robotique, filières pourtant essentielles de l'économie actuelle et future. En moyenne, les écoles et établissements de formation dans le domaine du numérique comptent environ 15 % de filles.
Pourquoi se priver de la moitié de nos talents ? Les enjeux économiques et de compétitivité liés à la démarche d'égalité professionnelle ne sont plus à démontrer, et la mixité est indispensable à un développement réussi de l'usage des technologies. Le plan sectoriel mixité numérique a été conclu par le Gouvernement avec les acteurs du secteur pour une période de cinq ans.
La mixité doit maintenant advenir de façon urgente, il faut en prendre conscience. Le rapport de Catherine Smadja-Froguel, remis le 20 février 2018, pose la question de savoir si les femmes vont passer à côté de l'opportunité que représente la transition numérique. Pour l'instant, c'est déjà le cas, et la France est en retard. Pire encore, l'écart se creuse : alors que la place des femmes dans les formations scientifiques et techniques de niveau licence et master a progressé de 4 % dans le monde depuis dix ans, passant de 30 % à 34 %, elle a diminué de 3 % en France, passant de 30 % à 27 %.
Monsieur le ministre, compte tenu des enjeux que représente la RoboCup pour la France et dans un contexte de transition numérique rapide, quels moyens sont employés à cette occasion pour attirer les femmes vers les domaines du numérique, de la robotique et de l'intelligence artificielle ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la députée, le Gouvernement se félicite que Bordeaux ait été retenu pour organiser la compétition internationale RoboCup en 2020, après Montréal en 2018 et Sydney cette année. Ce choix constitue une reconnaissance du territoire dont vous êtes l'élue, et plus largement de la qualité de l'écosystème « tech » français en matière de robotique et d'intelligence artificielle.
Vous avez raison de souligner que les femmes sont encore trop peu nombreuses dans les métiers du numérique. La Robocup et la Conférence internationale sur la robotique et l'automatisation qui se tiendra à Paris également en 2020 seront autant d'occasions de sensibiliser le grand public et les acteurs de l'écosystème, notamment les chercheurs et les chefs d'entreprise, aux enjeux de l'égalité entre les femmes et les hommes et à la nécessité de la féminisation des secteurs d'activité liés au numérique.
Comme cela a pu être constaté à l'étranger, la promotion de l'intérêt, de la pratique et de la connaissance des sciences connexes à la robotique auprès des plus jeunes, par exemple grâce à la RoboCup Junior, permet d'attirer des jeunes filles vers les professions concernées.
Le Gouvernement partage votre conviction que la diversité est autant un gage de justice sociale que de performance économique. C'est pourquoi la French Tech s'engage elle aussi en faveur de la diversité et donc de la féminisation des métiers du numérique. Après avoir expérimenté une action visant à accompagner trente-cinq entrepreneurs issus de la diversité en Île-de-France, dont 60 % de femmes, la French Tech déploie aujourd'hui un programme plus large pour donner les moyens à chacun, quel que soit son âge, son origine ou son parcours, de rejoindre l'écosystème de la Tech. Si la féminisation des métiers du numérique n'est pas son objectif exclusif, ce programme, intitulé French Tech Tremplin, y contribuera assurément.
Les actions prévues dans ce cadre seront financées à hauteur de 15 millions d'euros par le programme d'investissements d'avenir. Trois types d'actions seront conduites. Tout d'abord, une série d'actions de sensibilisation pour faire découvrir l'entrepreneuriat tech et ses métiers partout en France sera lancée à partir du printemps 2019. Deuxièmement, il est prévu d'accompagner 500 personnes à la création de start-up, avec un mentorat de six mois ; les candidatures pour participer à la première promotion seront ouvertes avant l'été. Enfin, la French Tech lancera une consultation sur les besoins de recrutement des start-up, et à terme une plateforme facilitera la mise en relation entre les start-up recruteuses, les talents issus de la diversité et les formations disponibles.
Depuis 2011, la Semaine de l'industrie contribue à renforcer l'attractivité du secteur, en particulier auprès des jeunes. Elle promeut également la mixité des métiers et la place des femmes dans l'industrie. En 2018, plus de 550 actions parmi les 2 900 événements labellisés portaient sur la diversité et la mixité des métiers.
Placé sous le haut patronage du ministère de l'économie et des finances, le « Challenge InnovaTech », organisé par l'association « Elles bougent » en partenariat avec la direction générale des entreprises, vise ce même objectif : favoriser la mixité dans les entreprises industrielles et technologiques en informant dès le plus jeune âge les jeunes filles sur leurs métiers. Organisé dans plusieurs régions de France, ce concours intergénérationnel rassemble des équipes composées de jeunes filles lycéennes ou étudiantes et de marraines ingénieures ou techniciennes en poste dans l'industrie et la technologie pour imaginer ensemble les innovations de demain.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix heures cinquante, est reprise à dix heures cinquante-cinq.
La parole est à Mme Élodie Jacquier-Laforge, pour exposer sa question, no 587, relative à la situation de la maison d'arrêt de Grenoble-Varces.
Madame la garde des sceaux, en juillet 2018, la France atteignait un taux de détention inégalé depuis le XIXe siècle, avec 70 710 personnes détenues dans ses prisons. Nos prisons sont surpeuplées et vétustes, les détenus n'y sont pas accueillis dignement et les agents y travaillent dans des conditions difficiles. Si ce constat résulte de l'absence totale de volonté politique des précédents gouvernements, je sais, madame la ministre, quelle attention vous avez portée à ce sujet dès votre entrée en fonction.
Je souhaite aujourd'hui vous alerter sur la situation de la maison d'arrêt de Grenoble-Varces, en Isère, mon département.
L'Observatoire international des prisons a en effet récemment publié un communiqué au sujet des conditions de détention dans cette prison. Je me suis rendue sur place en janvier 2018, à la suite de l'agression de deux surveillants du centre, et j'ai effectivement pu constater l'existence de dysfonctionnements importants. Cet établissement connaît des difficultés récurrentes de sous-effectif du personnel, liées notamment au nombre trop important de détenus par rapport à ses capacités réelles d'accueil. Le quartier disciplinaire et la cour de promenade ne sont pas non plus conformes aux normes en vigueur.
Il est urgent de trouver des solutions pour améliorer les conditions de détention comme les conditions de travail des personnels. La vétusté de l'établissement est dénoncée depuis de nombreuses années, bien que d'importants travaux soient actuellement engagés.
Dans le cadre du plan prison, une structure d'accompagnement vers la sortie – SAS – de 120 places est prévue. Ce serait une solution efficace pour faire baisser la surpopulation du site et pour adapter le régime de détention aux différents profils. Cependant, aucun terrain ne serait à ce jour disponible à Grenoble pour accueillir ce projet.
Comment un lieu adéquat pourrait-il être trouvé ? Comment les conditions de détention ainsi que les conditions de travail des personnels – tant en termes de formation que de spécialisation – peuvent-elles être concrètement améliorées ? J'appelle en particulier votre attention sur les personnels des greffes, dont le statut d'agent administratif rend impossible la récupération ou le paiement des heures supplémentaires.
Madame la députée, vous citez les chiffres de la surpopulation du centre pénitentiaire de Grenoble-Varces : ils ne sont pas bons, c'est vrai. Au 8 février 2019, le nombre de personnes détenues hébergées s'élève à 368, ce qui représente un taux de surpopulation de 156 %.
Afin d'éviter une suroccupation chronique, il est convenu que lorsque le taux d'occupation du quartier maison d'arrêt atteint 150 %, l'établissement transmet une liste de personnes susceptibles d'être réaffectées dans d'autres établissements. En 2018, l'administration pénitentiaire a ainsi procédé à 86 transferts vers d'autres établissements de la direction interrégionale.
Vous avez rappelé avec raison, madame la députée, que la suroccupation a accéléré la dégradation de l'établissement, mais la conception même du bâti ne correspond plus aux standards actuels. Des efforts ont cependant été engagés pour améliorer la situation et renforcer les capacités d'entretien. Les renforts octroyés rendent l'effectif en personnel technique suffisant pour procéder à la maintenance courante et aux réparations à la suite des dégradations.
La population carcérale est elle-même impliquée dans l'entretien de l'établissement pénitentiaire. Nous avons ainsi formé des peintres pour repeindre la zone des parloirs ; une intervention similaire est prévue cette année pour les cellules. Actuellement, des auxiliaires s'occupent de repeindre le quartier des mineurs ainsi que le quatrième étage de la détention. D'autres exemples pourraient encore être cités.
En outre, des travaux sont régulièrement programmés. La rénovation du réseau d'eau courante est ainsi prévue en 2019. Quant au système électrique, il a été mis en conformité à la suite de la visite de la commission sécurité incendie.
Les cellules du quartier disciplinaire, entièrement repeintes en 2016, ont été rénovées lors d'une opération globale visant les douches. La rénovation des cours, dont vous avez parlé, particulièrement au sein du quartier disciplinaire, est à l'étude, afin d'offrir des possibilités de promenades à l'air libre, dans un contexte architectural atypique et complexe du fait d'une construction en hauteur.
Par ailleurs, vous l'avez souligné, nous poursuivons le projet de créer dans l'agglomération grenobloise une structure d'accompagnement vers la sortie d'une capacité de 120 places. Cette SAS offrira des possibilités nouvelles pour l'exécution de courtes peines ou de reliquats de peines inférieurs à deux ans, au sein d'un environnement qui, comme nous le souhaitons, permettra d'engager activement des démarches de réinsertion. Toutefois, les terrains qui ont été identifiés jusqu'à présent n'ont pas permis d'aboutir, en raison de la topographie contraignante du secteur et de disponibilités foncières réduites.
Dans ces conditions, je souhaite qu'une concertation étroite soit rapidement engagée avec les élus, pour examiner les propositions qui pourront être faites par les services de l'État en vue d'accueillir cette structure qui, vous le savez, est un rouage clé de la politique des peines que je compte mettre en place. Je sais, madame la députée, pouvoir compter sur votre soutien.
Madame la ministre, j'ai aussi parlé des agents administratifs travaillant dans les greffes, qui ne peuvent récupérer ni être payés des heures supplémentaires qu'ils effectuent. Ce sujet est d'une importance cruciale à Grenoble.
La parole est à M. Sébastien Cazenove, pour exposer sa question, no 568, relative aux projets agrivoltaïques.
Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, mais je suis persuadé que Mme la ministre chargée des transports saura parfaitement y répondre !
Depuis vingt mois, le Gouvernement agit avec détermination en matière environnementale, après avoir doté le ministère d'un budget de 34 milliards d'euros pour 2019, en augmentation de 1 milliard, ce qui lui permettra de continuer à soutenir l'innovation verte.
Le 8 novembre 2018, un des premiers dispositifs agrivoltaïques mondiaux a été inauguré dans ma circonscription. Ce projet de plantation de vigne sous panneaux photovoltaïques mobiles, pilotés à distance, se situe à Tresserre, dans les Pyrénées-Orientales, sur une parcelle de 5 hectares. Il prend la forme d'une ombrière de 7 850 panneaux photovoltaïques, situés à plus de 4 mètres de hauteur et pouvant pivoter à la demande.
En collaboration technique avec la chambre d'agriculture des Pyrénées-Orientales, d'autres projets de démonstrateurs agrivoltaïques ont été présentés en réponse au dernier appel d'offres de la Commission de régulation de l'énergie, mais ils n'ont pas été retenus, malgré leurs excellents résultats en matière d'innovation.
Ce concept présente pourtant de nombreux avantages. En effet, les pilotes couvrant les produits maraîchers arboricoles permettent de comparer, dans des délais très courts, les technologies agrivoltaïque dynamique et photovoltaïque fixe. Par ailleurs, ce dispositif, au-delà de la production d'électricité solaire, a pour objectif d'améliorer les rendements agricoles en économisant notamment l'arrosage, afin de maîtriser la consommation d'eau. L'agriculteur pourra réguler les besoins en ensoleillement et en ombre de la plante grâce aux panneaux produisant de l'énergie, en donnant priorité à la végétation qui se trouve protégée des aléas climatiques en cas de chaleur excessive ou de grêle. Une station météo est par ailleurs présente sur le site.
Ces projets innovants de couverture modulables présentent donc un réel intérêt pour notre territoire. Le Gouvernement entend-il prendre des mesures afin de favoriser l'émergence de nouveaux projets de ce type ?
Monsieur le député, François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, ne peut être présent. Il m'a chargée de vous répondre.
Le Gouvernement s'est effectivement engagé dans un développement sans précédent des énergies renouvelables électriques, tout en prenant en compte de manière renforcée les enjeux environnementaux et d'intégration des énergies renouvelables dans leur environnement, afin d'éviter d'éventuels conflits d'usages.
L'innovation sera une des clefs pour atteindre les objectifs ambitieux du projet de programmation pluriannuelle de l'énergie concernant l'énergie solaire.
Afin de développer cette innovation, et à la suite des échanges avec les parties prenantes dans le cadre du groupe de travail sur l'énergie solaire présidé début 2018 par Sébastien Lecornu, le Gouvernement s'est engagé à doubler le volume de l'appel d'offre pour le développement de projets solaires innovants.
Un nouveau cahier des charges sera ainsi publié prochainement, qui permettra de développer 140 mégawatts de projets solaires innovants par période. Cet appel d'offres, qui concerne notamment les projets d'agrivoltaïsme, constituera une opportunité pour le développement de projets permettant de concilier production agricole et production d'électricité.
Parallèlement à cet appel d'offres, le Gouvernement soutient l'innovation sur ce type de projets à l'aide des investissements d'avenir. En particulier, des projets d'agrivoltaïsme développés par l'entreprise Sun'R ont déjà été soutenus, le projet Sun'Agri 3 s'étant en particulier vu octroyer une aide de 6,8 millions d'euros, pour un montant total d'investissement de 15,1 millions.
Afin de trouver le bon équilibre entre le développement du photovoltaïque et le maintien d'une activité agricole, un groupe de travail associant les services du ministère de la transition écologique et solidaire et ceux du ministère de l'agriculture et de l'alimentation, la Confédération paysanne, la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles et les chambres d'agriculture a été constitué, afin d'établir un retour d'expérience des différents projets d'agrivoltaïsme développés et d'identifier les projets solaires permettant une réelle poursuite de l'activité agricole.
Toutes ces mesures permettront, j'en suis sûre, de faire émerger des projets semblables à ceux proposés par Sun'R, qui allient transition énergétiques, innovation et développement de l'activité agricole.
La parole est à M. Bertrand Sorre, pour exposer sa question, no 575, relative à l'éradication des frelons asiatiques.
Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Depuis leur première apparition en 2004, les frelons asiatiques ont proliféré sur l'ensemble du territoire français et dans d'autres pays européens. Pour l'année 2018, dans mon seul département de la Manche, la fédération départementale des groupements de défense contre les organismes nuisibles – FDGDON – a localisé 5 898 nids, soit 1 nid par kilomètre carré en moyenne, soit près de 2 000 nids de plus qu'en 2017. Les agglomérations et les zones littorales urbanisées restent les plus touchées, allant jusqu'à une densité de 17 nids par kilomètre carré, la plus forte connue sur la même commune.
Aujourd'hui, avec le soutien du conseil départemental de la Manche, 91 % des communes du département ont signé la convention de lutte collective avec la FDGDON. Ainsi, 4 347 nids ont pu être détruits par la lutte collective et selon le protocole départemental.
L'investissement des conseils départementaux sur ce sujet n'est cependant pas le même partout en France, tant s'en faut.
Cette prolifération est chaque année plus inquiétante, et ce, à plusieurs titres. Il s'agit d'une part d'un enjeu de santé publique, car la piqûre du frelon asiatique peut être dangereuse voire mortelle pour l'homme. Ces derniers mois, dans le département de la Manche, 310 victimes d'attaques par piqûres et deux par projection de venin dans les yeux, ainsi qu'un décès et quatre chocs anaphylactiques ont été enregistrés.
D'autre part, les abeilles étant une source d'alimentation privilégiée pour les frelons, les impacts apicoles ont été considérables en 2018. On a constaté une situation de stress pour les abeilles, une baisse de production de miel et des pertes de ruches. Les frelons sont également nuisibles sur le plan de la biodiversité, car ils se nourrissent de nombreux insectes pollinisateurs. De plus, des impacts sur le poisson sont parfois signalés sur les étals de marché. En 2018, des frelons asiatiques ont également été signalés pour la première fois sur un atelier conchylicole.
Afin de lutter contre cette menace, des dispositions législatives et réglementaires ont d'ores et déjà été adoptées au niveau national et extracommunautaire. Le frelon asiatique a notamment été classé parmi les nuisibles de deuxième catégorie, pour lesquels, selon le code rural, « il peut être nécessaire, dans un but d'intérêt collectif, de mettre en oeuvre des mesures de prévention, de surveillance ou de lutte ».
En 2017, dans un rapport sur la stratégie nationale relative aux espèces exotiques envahissantes, le ministère de l'environnement prônait des mécanismes nationaux pour répondre à l'invasion des frelons asiatiques. Mais dans les faits, les moyens alloués à la lutte contre ces insectes sont très contrastés selon les régions et les départements.
À mon sens, il est temps de requalifier les frelons asiatiques en nuisibles de première catégorie, pour qu'un véritable réseau d'acteurs compétents, dotés de moyens appropriés, se mette en place et détruise automatiquement les départs de nids. Ce fléau touche tout la France, et même si la FDGDON 50 effectue un travail remarquable, l'État doit s'emparer du problème pour que l'action soit la même partout sur le territoire national. Un frelon asiatique, vous vous en doutez, ne s'arrête pas aux limites d'un département !
Le Gouvernement compte-t-il adopter une véritable stratégie de lutte nationale contre les frelons asiatiques, permettant d'harmoniser la lutte sur le territoire, de développer les moyens de lutte les moins nocifs pour l'environnement et la biodiversité et enfin d'assurer un financement pérenne, afin de faciliter une lutte collective efficace ?
Monsieur le député, François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, ne peut être présent. Il m'a chargée de vous répondre.
Comme vous le rappelez, le frelon asiatique est une espèce exotique envahissante, qui est à l'origine de diverses difficultés. Si l'on déplore malheureusement des décès liés à sa piqûre et si l'on peut suspecter une incidence sur la biodiversité locale, qui reste toutefois à documenter, l'impact de cette espèce porte principalement sur les populations d'abeilles domestiques, qui constituent des proies faciles pour ce prédateur.
Ainsi, cette espèce a été classée par le ministère de l'agriculture en danger sanitaire de deuxième catégorie, en raison de son impact pour l'apiculture. Avec Didier Guillaume, ministre en charge de cette politique, François de Rugy a annoncé au début de ce mois la mise en place d'un groupe de travail en vue de renforcer les mesures de protection des abeilles et autres insectes pollinisateurs, notamment envers les produits phytopharmaceutiques utilisés.
Le frelon asiatique a été également classé par ces deux ministères comme espèce exotique envahissante préoccupante.
Depuis son arrivée, il y a quinze ans, cette espèce a colonisé la quasi-totalité du territoire métropolitain. Au vu de son aire de répartition, de sa vitesse de propagation et de l'absence de moyens de lutte efficace, force est de constater que l'objectif d'éradication sur notre territoire n'est plus atteignable.
Les crédits publics affectés à la gestion des espèces exotiques envahissantes doivent être ciblés sur des opérations efficientes. Les stratégies régionales en matière d'espèces exotiques envahissantes ont ainsi pour objet de définir des axes d'intervention sélectifs selon les espèces et les espaces considérés.
Ces stratégies doivent être définies conjointement par les services et opérateurs de l'État avec les régions, chef de file des collectivités en matière de biodiversité, afin de cibler au mieux l'ensemble des moyens publics.
Merci de ces précisions, madame la ministre. Un pilotage national est nécessaire, car le degré d'appropriation de cette problématique est très variable selon les territoires.
La parole est à M. Damien Abad, pour exposer sa question, no 579, relative à la saturation des centres de stockage des déchets.
Je m'adresse à vous, madame la ministre chargée des transports, ainsi qu'à M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, à Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, et à tous les autres membres du Gouvernement : stop au plastic bashing ! Stop à ces images d'Épinal de bouts de plastique flottant dans l'océan ! Cette situation n'est pas de la responsabilité des pays européens, qui ne représentent que 2 % des déchets mondiaux.
Stop aussi à ceux qui n'ont pas compris que le plastique peut être innovant, recyclé et, naturellement, recyclable. Qu'il s'agisse de la loi Égalim ou de la loi sur la transition énergétique, c'est à chaque fois la même chose : on s'en prend au plastique, sans regarder les emplois que représente ce secteur, ni les bienfaits du plastique en tant que tel.
Je pense à la sécurité alimentaire, aux secteurs médical, aéronautique, automobile, cosmétique, et d'autres encore qui ont besoin des industries de la plasturgie. Dans l'Ain, au coeur de ma circonscription, nous fabriquons dans la « Plastics Vallée » des plastiques innovants et non polluants et nous transformons la contrainte environnementale en atout. On peut citer l'exemple, parmi bien d'autres, des entreprises Triveo ou Ain Fibres.
Encore faut-il que des politiques publiques soutiennent la filière et permettent une gestion intelligente des déchets. En matière de collecte, notamment, des progrès sont attendus de l'extension des consignes de tri progressivement mise en oeuvre pour valoriser encore mieux les déchets et donner une nouvelle vie aux emballages recyclés. Car le recyclage, au coeur de l'économie circulaire, est pourvoyeur d'emplois directs et indirects.
Plutôt que relayer des clichés sur le plastique, attaquons-nous donc aux vrais enjeux, et d'abord à celui du recyclage des déchets. Seuls 22,2 % des plastiques produits et consommés en France sont réellement réutilisés. En outre, dans la perspective de l'application des objectifs de réduction de l'enfouissement de 30 % d'ici à 2020 et de moitié d'ici à 2025, contenus dans la loi de transition énergétique, on entreprend de réduire dès maintenant les quotas administratifs d'accueil en centre de stockage. Qu'est-ce que cela veut dire ? Qu'aucune solution alternative de valorisation des déchets n'a été proposée, en particulier pour ce que l'on appelle les déchets ultimes – ceux qui ne peuvent plus être stockés – , alors même que l'on observe une augmentation de la quantité de déchets. Cette hausse globale est liée à la reprise économique, mais également à la fermeture des frontières chinoises à certains déchets – sachant que, sur les quelque 900 000 tonnes de déchets plastiques français, 170 000 sont envoyées chaque année en Chine – , à la prime de conversion automobile et à l'importation de déchets valorisables.
Madame la ministre, le Gouvernement va-t-il augmenter les quotas de déchets stockés et mettre en oeuvre une véritable stratégie pour toute la filière avant que la situation ne s'aggrave en 2019 ? Si tel n'est pas le cas, il y aura en France des endroits, comme dans la « Plastics Vallée », où l'on ne pourra plus stocker les déchets.
Monsieur le député, le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, ne pouvant être présent, m'a chargée de vous répondre en son nom.
Si, sur la majorité du territoire français, les capacités de stockage ont couvert sans difficulté les besoins en 2018, environ la moitié des régions métropolitaines ont cependant fait face à une légère saturation de leurs décharges en fin d'année. Cette situation s'explique par de nombreux facteurs.
Tout d'abord, les objectifs prévus par la loi de baisse de la quantité de déchets à mettre en décharge ne se concrétisent pas encore suffisamment dans les faits au sein de chacune de nos régions. Ensuite, la fermeture des frontières chinoises à certains déchets triés peut avoir entraîné quelques reports vers les exutoires disponibles en France. Enfin, la conjoncture économique, plus favorable en 2018, a conduit à une augmentation de la production de déchets ménagers.
Cependant, les régions les plus concernées par la saturation sont en sous-capacité structurelle du fait de l'insuffisance de projets d'installations de gestion des déchets.
Face à cette situation, le Gouvernement a mis en oeuvre dès avril 2018 une stratégie définie par la feuille de route pour l'économie circulaire et reposant sur des mesures de prévention – information du consommateur, lutte contre le gaspillage alimentaire – visant à réduire le volume de déchets produits, sur l'accélération du déploiement du tri à la source et de la valorisation des déchets – extension des consignes de tri à tous les emballages, nouvelles filières à responsabilité élargie du producteur – , enfin sur une réforme globale de la fiscalité des déchets afin de rendre leur recyclage économiquement plus attractif que leur élimination.
Au-delà de ces actions, les contrôles des décharges seront renforcés. Il est en effet inadmissible que des objets pouvant faire l'objet d'un réemploi ou d'un recyclage soient mis en décharge. L'État n'hésitera pas à sanctionner ces comportements. Mais il convient que l'ensemble des acteurs, qu'il s'agisse des collectivités, des acteurs économiques ou des opérateurs de traitement des déchets, s'investissent pour relever le défi d'une économie circulaire.
Merci de ces précisions, madame la ministre. Mais je veux vous alerter sur l'urgence du problème : sur le territoire national, plusieurs entreprises ne peuvent tout simplement plus traiter les déchets ultimes ; nous le vivons dans la « Plastics Vallée ». Il s'agit d'un enjeu environnemental crucial. Par ailleurs, n'oublions pas de tenir compte, dans tous les projets de loi que nous discuterons, des bienfaits de la plasturgie et de l'importance de la défense de cette filière économique qui, je le répète, sait faire d'une contrainte environnementale un atout.
La parole est à Mme Muriel Ressiguier, pour exposer sa question, no 563, relative au réchauffement climatique et au littoral.
Le changement climatique a des conséquences irréversibles. On l'observe déjà en France, sur le littoral. Victimes d'un développement sauvage de l'urbanisme, les littoraux français subissent de plus en plus les phénomènes d'érosion et sont davantage exposés qu'auparavant aux risques de submersion marine. Rappelons que, d'ici à 2100, l'élévation du niveau de la mer devrait être comprise entre 18 et 59 centimètres. Les populations concernées seront de plus en plus nombreuses : selon l'Observatoire national de la mer et du littoral, il devrait y avoir en 2040 en France, départements d'outre-mer inclus, 9 millions d'habitants sur les côtes, contre 7,6 millions en 2007.
Dès à présent, 850 000 personnes vivent dans les zones basses, dont l'altitude est inférieure aux niveaux atteints par la mer lors de conditions météorologiques extrêmes. Or le phénomène connaît aujourd'hui une accélération. Il a des effets négatifs considérables pour les populations : risque d'inondation ; fissures des bâtiments, notamment en front de mer ; ensablement des rues et des bâtiments ; glissements de terrain. En outre, sur la façade littorale languedocienne, la côte majoritairement sableuse et la faible altitude rendent le bord de mer plus vulnérable à la sédimentation et aux phénomènes d'érosion.
Les collectivités tentent de s'adapter. À Sète, pour protéger la plage du Lido, on a déplacé la route pour l'éloigner de la mer ; la plage a gagné 70 mètres et un cordon dunaire a été recréé. Au large, des boudins de sable ont été posés au fond de l'eau pour atténuer la houle et les vagues. À Gruissan, des chalets sur pilotis ont été installés.
À la suite de la tempête Xynthia qui a frappé la côte atlantique en février 2010, l'État a quant à lui multiplié les textes réglementaires, sans réelle efficacité. Le recul du trait de côte exige que l'État s'investisse davantage. Il doit encourager les efforts d'adaptation à la montée des eaux qui passent par des méthodes alternatives aux ouvrages en dur, telles que la promotion des zones tampon ou la restitution des terres inondables à l'élevage. Il doit enfin veiller à l'accompagnement des personnes sinistrées qui sont forcées de partir, véritables déplacés climatiques.
Que compte faire le ministre de la transition écologique et solidaire pour éviter d'abandonner les citoyens du littoral à leur sort ? Quels moyens concrets va-t-il mettre en oeuvre pour adapter les côtes à la montée des eaux ?
Madame la députée, je vous réponds au nom du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, qui, ne pouvant être présent, m'a chargée de le faire.
Si le littoral est effectivement un territoire très attractif, un quart environ de son étendue recule sous l'effet de l'érosion et 1,4 million d'habitants y sont exposés à un risque de submersion marine. La hausse du niveau marin aura, à court et à plus long terme, des conséquences sur ces phénomènes, qu'elle contribuera à aggraver. Voilà pourquoi le Gouvernement entend faire de l'adaptation des territoires littoraux une priorité : il est essentiel d'anticiper les effets du changement climatique pour imaginer le littoral de demain.
L'État a adopté en 2012 une stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte qui contribue à cet objectif en identifiant plusieurs actions à mener. Par ailleurs, l'adoption en 2014 de la stratégie nationale de gestion des risques d'inondation a permis de fixer un cadre commun à la politique de prévention des risques d'inondation, y compris en ce qui concerne la submersion marine.
De nombreuses collectivités littorales ont également fait le choix de recourir à des programmes d'action de prévention des inondations – PAPI : ces outils de contractualisation entre l'État et les collectivités permettent de promouvoir une gestion intégrée des risques d'inondation.
En outre, une démarche participative intitulée « Dynamique(s) littoral » a eu lieu au premier semestre 2018. Reposant sur la forte participation des territoires, elle a permis de faire émerger des idées innovantes, mais a également confirmé qu'un cadre juridique adapté à la mise en oeuvre d'une gestion intégrée et durable du trait de côte était nécessaire, comme l'est la transformation des territoires littoraux pour anticiper les effets du changement climatique.
Des réflexions parlementaires sont d'ailleurs en cours sur ce sujet ; en écho aux objectifs du plan national d'adaptation au changement climatique que le ministre d'État a lancé en décembre dernier, elles fournissent l'occasion de définir une dynamique et des outils adaptés aux enjeux des territoires littoraux.
La question du financement des éventuels projets de relocalisation des biens et des activités en raison de l'érosion est cruciale. Le Gouvernement a lancé une mission d'inspection sur le sujet, qui devrait rendre ses conclusions avant la fin du premier trimestre 2019.
Madame la ministre, nous en sommes au point où nous ne pouvons plus revenir en arrière : nous en sommes réduits à gérer les conséquences du changement climatique. On le voit sur le littoral, mais cela va se produire aussi à d'autres endroits. Cela vient sans doute également du fait que l'on a longtemps regardé ailleurs en espérant que les choses allaient s'arranger toutes seules. Je suis donc ravie de voir que vous prenez conscience du problème ; j'attends avec impatience nos prochains débats sur le sujet, ici ou en d'autres lieux, et j'espère des mesures significatives au lieu des mesurettes prises jusqu'à présent, par lesquelles on se contente de faire face à l'inexorable. Mais je vous remercie de votre réponse.
La parole est à M. Yannick Favennec Becot, pour exposer sa question, no 585, relative aux nuisances sonores liées à la ligne à grande vitesse – LGV – Bretagne-Pays-de-la-Loire.
Madame la ministre chargée des transports, il y a un an presque jour pour jour – le 20 février 2018 – , lors de la séance des questions orales sans débat, j'invitais votre collègue Brune Poirson à venir passer un moment chez les riverains de la ligne à grande vitesse reliant Paris à Rennes afin de mesurer concrètement les graves préjudices sonores que subissent ces hommes, ces femmes et ces enfants, plus particulièrement ceux résidant dans les départements de la Sarthe, de la Mayenne et de l'Ille-et-Vilaine, et les conséquences qui en découlent, qu'il s'agisse de la dégradation de leur qualité de vie ou de la forte dépréciation de leur bien immobilier.
Il y a un an, j'appelais en particulier l'attention du Gouvernement sur les pics de bruit très élevés qu'ils subissent lors du passage du TGV, jusqu'à quatre-vingt-dix fois par jour sur certains tronçons. Vous ne pourriez assurément supporter d'être à leur place, madame la ministre.
J'alertais également le Gouvernement sur la nécessité de modifier la réglementation en vigueur concernant la mesure du bruit. Le 11 juillet dernier, vous nous informiez, Guillaume Garot et moi-même, avoir saisi de ce dossier très sensible le Conseil général de l'environnement et du développement durable – CGEDD – dont le rapport serait rédigé et publié avant la fin du mois de novembre 2018. J'ai effectivement rencontré les membres du CGEDD lorsqu'ils sont venus sur le terrain en Mayenne ; je puis témoigner de leur qualité d'écoute, et je sais que les riverains concernés ont également pu leur faire part de leurs légitimes revendications et de leurs propositions.
Madame la ministre, nous sommes aujourd'hui le 19 février 2019. Près de trois mois se sont écoulés depuis la fin novembre, date butoir annoncée pour la publication du rapport du CGEDD. Les riverains de la LGV s'impatientent ; leur exaspération bien compréhensible les a même conduits à saisir la justice. Où en est ce rapport ? Pourquoi ce retard ? Quelles actions seront proposées pour répondre enfin aux attentes des personnes concernées touchant la préservation de leur qualité de vie, la protection de leur santé, la sauvegarde de leurs intérêts économiques et patrimoniaux ?
Dans le contexte de la crise qui traverse notre pays, de la volonté affichée par le Président de la République et le Gouvernement d'être à l'écoute de nos compatriotes, notamment par le grand débat national, et d'apporter des remèdes concrets à leurs difficultés quotidiennes, il est grand temps d'apporter des solutions rapides et efficaces en réponse aux doléances des riverains de la LGV Bretagne-Pays-de-la-Loire. En leur nom, je vous remercie d'avance de le faire, madame la ministre.
Monsieur le député, au-delà de l'amélioration très nette de la desserte ferroviaire du grand Ouest permise par la nouvelle infrastructure Bretagne-Pays-de-la-Loire dès sa mise en service en juillet 2017, je puis vous assurer que j'ai pleinement conscience des difficultés rencontrées par certains de nos concitoyens qui résident à proximité et que je comprends leurs inquiétudes.
Afin de vérifier le respect de la réglementation sonore par cette LGV ainsi que par la LGV Sud Europe Atlantique, c'est-à-dire la ligne Tours-Bordeaux, une vaste campagne de mesures acoustiques sur site a été réalisée de l'automne 2017 à l'été 2018. Sur les 440 sites où des mesures acoustiques ont été effectuées, trois seulement doivent faire l'objet de mesures correctrices prioritaires, qui seront mises en oeuvre prochainement.
Naturellement, il nous faut aller au-delà de cette approche réglementaire : l'objectif du Gouvernement est de réagir au ressenti des populations et des élus locaux.
C'est le sens de la mission que j'ai confiée au Conseil général de l'environnement et du développement durable. Elle porte sur les deux lignes à grande vitesse, Sud-Europe-Atlantique et Bretagne-Pays de la Loire, et vise à apporter des réponses aux situations difficiles rencontrées. Elle s'articule en trois volets : d'abord, établir les critères objectifs permettant d'identifier les habitations les plus exposées aux nuisances sonores ; ensuite, proposer un calendrier de réalisation des investissements identifiés comme nécessaires et examiner les modalités de leur financement ; enfin, émettre des recommandations sur l'évolution de la réglementation en matière de nuisances sonores applicable aux nouvelles infrastructures ferroviaires – ce n'est pas un mince sujet, la réglementation s'étant déjà appliquée à des infrastructures existantes.
Le rapport ne m'a pas encore été remis, mais devrait l'être dans les prochaines semaines. Le sujet, vous en conviendrez, n'est pas simple. Une fois le rapport remis, la mission prévoit de se déplacer afin de partager ses conclusions et ses propositions avec les associations de riverains et d'élus des territoires concernés.
Je tiens à vous assurer, monsieur le député, de l'engagement de l'État pour apporter des solutions concrètes aux difficultés rencontrées par les riverains de ces deux lignes à grande vitesse, notamment la ligne Bretagne-Pays de la Loire. Au-delà de ces réponses urgentes, le Gouvernement est ouvert à une évolution de la réglementation en matière de bruit ferroviaire, afin de mieux prendre en compte le caractère intermittent de ce bruit, notamment les pics sonores.
Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse. J'aurais aimé que vous nous indiquiez une date plus précise pour la remise du rapport, tant celui-ci est attendu par les riverains. L'exaspération gagne, je l'ai dit, au point qu'ils ont saisi la justice. Il convient de leur donner rapidement des éléments de réponse concrets, clairs et précis. Cela contribuerait à calmer la situation sur le terrain.
La parole est à M. Philippe Gomès, pour exposer sa question, no 594, relative à la conférence internationale de la biodiversité.
Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur la tenue d'une manifestation internationale relative à la protection de la biodiversité. Comme vous le savez, la France occupe une place particulière en la matière : elle dispose du deuxième espace maritime à l'échelle de la planète et se distingue par l'importance de sa biodiversité. Or elle le doit principalement aux outre-mer, qui représentent à eux seuls 97 % de cet espace maritime. Il en est de même en matière de biodiversité : 80 % de la biodiversité française est située dans les collectivités ultramarines.
Lors de sa campagne pour l'élection à la Présidence de la République, le candidat Emmanuel Macron avait proposé que, pendant son mandat – si les Français lui accordaient leur confiance – , une conférence internationale relative à la protection de la biodiversité soit organisée dans l'une des collectivités ultramarines.
À ce titre, j'appelle votre attention sur l'importance du Pacifique insulaire, qui abrite les écosystèmes les plus riches de la planète tout en étant la première victime des dérèglements climatiques, lesquels constituent, on le sait, la principale menace sur la biodiversité à l'échelle de la planète. Trois territoires du Pacifique insulaire sont des collectivités ultramarines françaises : la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie, Wallis-et-Futuna.
La Nouvelle-Calédonie occupe une place particulière dans cet espace : elle est le second hotspot – zone critique – de la planète en matière de biodiversité, derrière Madagascar, ce qui n'est pas rien ; elle est le troisième hotspot du point de vue de l'endémisme végétal, derrière Hawaï et la Nouvelle-Zélande. Enfin, si la France est la quatrième puissance à l'échelle de la planète en matière de récifs coralliens, c'est grâce à la Nouvelle-Calédonie : celle-ci comprend 75 % des récifs français et un tiers des récifs dits « pristines », à savoir les 3 % de récifs quasi vierges qui demeurent dans le monde.
Par sa place en matière de biodiversité, la Nouvelle-Calédonie a une vocation naturelle à accueillir cette conférence internationale relative à la protection de la biodiversité. Madame la ministre, l'engagement du Président de la République sera-t-il tenu ? La Nouvelle-Calédonie est-elle susceptible d'être retenue pour accueillir cette manifestation internationale ?
Ne pouvant être présent, M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, m'a chargée de répondre à la question que vous lui avez posée.
Vous soulignez à juste titre, monsieur le député, l'importance que revêt pour la France la protection de la biodiversité et la valeur de son patrimoine naturel, tout particulièrement dans les territoires et départements d'outre-mer. La France a fait de cette question un axe majeur de son action internationale en matière d'environnement, dans l'objectif de parvenir à un accord ambitieux lors de la quinzième conférence des parties – COP15 – à la convention sur la diversité biologique, qui se tiendra en Chine en octobre 2020. Pour ce faire, elle souhaite contribuer à la mobilisation de l'ensemble des acteurs, notamment les États, les collectivités locales, les ONG, les entreprises, les organismes de recherche et le système éducatif, à travers un grand événement international centré sur la biodiversité.
L'événement d'ampleur internationale retenu à cet effet est le congrès mondial de la nature de l'Union internationale pour la conservation de la nature – UICN – , qui se tiendra à Marseille du 11 au 19 juin 2020. Bien entendu, les territoires d'outre-mer, en particulier la Nouvelle-Calédonie, seront largement associés à la conception de ce congrès, pour laquelle une équipe dédiée a été constituée. Ce congrès permettra en outre de faire un point d'étape sur la réalisation, à l'échelle nationale, des actions du plan biodiversité, adopté par le Gouvernement le 4 juillet 2018.
Par ailleurs, je me réjouis que le gouvernement de Nouvelle-Calédonie manifeste lui aussi son engagement pour la protection de la nature en organisant, la même année, un événement international important en matière de biodiversité, à savoir la dixième conférence des îles du Pacifique sur la conservation de la nature et des aires protégées, en liaison étroite avec le Programme régional océanien pour l'environnement – PROE.
La France souhaite résolument, par son action aux niveaux national et international, mettre un terme à l'érosion de la biodiversité sur son territoire et dans le monde. La Nouvelle-Calédonie, deuxième hotspot mondial du point de vue de la richesse de la biodiversité, vous l'avez rappelé, a certainement un grand rôle à jouer pour contribuer à la réussite de cette ambition.
Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse. L'ensemble des manifestations organisées, tant celle qui le sera en Nouvelle-Calédonie dans le cadre du PROE que le congrès mondial de la nature de l'UICN à Marseille, constituent, bien évidemment, des éléments d'une politique majeure en faveur de la protection de la biodiversité et de la conscientisation de l'ensemble des populations à l'échelle de la planète.
Néanmoins, j'aurais souhaité un acte plus symbolique et plus fort, je crois que nous en avons besoin. La France jouit tout de même d'une chance exceptionnelle : la Nouvelle-Calédonie est le deuxième site de la planète en matière de biodiversité, ce qui n'est pas rien. La tenue d'une conférence internationale en Nouvelle-Calédonie, conformément à l'engagement du Président de la République d'organiser un tel événement outre-mer, aurait puissamment illustré la nécessité de protéger cette biodiversité, qui est de plus en plus fragilisée.
La parole est à Mme Albane Gaillot, pour exposer sa question, no 567, relative aux dysfonctionnements de la ligne 7 du métro.
Madame la ministre chargée des transports, je me fais l'écho du mécontentement de mes concitoyennes et concitoyens quant aux dysfonctionnements de la ligne 7 du métro, qui dessert la ville de Villejuif.
La vitalité économique et la qualité de vie à Villejuif et dans les villes alentour se traduisent par une importante densité démographique. Près de 5 200 nouveaux habitants ont emménagé à Villejuif en 2018. Le territoire attire de grandes entreprises : le Crédit Lyonnais y est implanté depuis des années, Orange va bientôt s'y installer. Des déplacements pendulaires denses en découlent. Or un train toutes les 3 minutes 30 en période de pointe et toutes les 10 minutes en cas de perturbation ne suffisent pas à satisfaire les besoins des habitants en matière de transports en commun.
À ce problème de temps d'attente trop important s'ajoutent des incidents techniques à répétition – il y avait encore, ce matin, dix minutes d'attente entre deux rames – sans qu'aucune information de qualité ne soit donnée aux voyageurs, ni aucun bus de substitution mis à leur disposition.
La détérioration des conditions de transport a d'importantes conséquences sur la vie professionnelle et familiale des usagers : retards au travail, refus d'élèves en cours de français en raison d'un retard trop important, arrivées après la fermeture de l'accueil du centre de loisirs, et j'en passe.
Si la rénovation des rames est déjà engagée pour réduire les incidents matériels, il est nécessaire, j'en suis convaincue, d'aller plus loin, afin de mettre un terme à la dégradation des conditions de transport de nos concitoyens. Plusieurs solutions pourraient certainement être envisagées. Je pense notamment à l'automatisation de la ligne, qui semble constituer une solution technique concrète et efficace, entre autres pour réduire l'intervalle entre les trains. J'appelle l'attention du Gouvernement sur ce point.
Quelles mesures seront prises afin que la RATP et l'autorité organisatrice de transports, Île-de-France Mobilités, garantissent un service public de qualité, orienté vers les usagers – qui sont obligés de prendre le métro chaque jour – et facteur de mobilité, pour que se déplacer ne soit plus une contrainte, mais représente une réelle opportunité et une chance pour toutes et tous ?
Madame la députée, je suis bien consciente de l'importance que revêt la qualité des transports du quotidien dans la qualité de vie de nos concitoyens. C'est précisément pour cette raison que le Gouvernement en a fait sa grande priorité en matière de transports.
Néanmoins, je rappelle que l'autorité organisatrice des transports franciliens est Île-de-France Mobilités. C'est donc elle qui définit le niveau et la qualité de service demandés à la RATP, dans le cadre du contrat qui la lie à l'entreprise.
En 2017, sur les quatorze lignes de métro de la RATP, douze ont respecté l'objectif de régularité aux heures de pointe, qui a été fixé à 96,5 % de ponctualité pour les voyageurs. Seules les lignes 6 et 7 n'y sont pas parvenues. Le problème que vous soulevez est donc bien réel.
Les actions engagées par la RATP ont permis de réduire les irrégularités d'origine interne et de limiter certains incidents externes, notamment les interruptions de trafic dues à la présence d'un bagage oublié, grâce à l'intervention d'équipes de cyno-détection. Ces mesures ont permis d'augmenter le nombre de passages aux heures de pointe. L'indice de régularité aux heures de pointe est ainsi remonté de 96,3 % à 98,5 % en 2018.
C'est bien Île-de-France Mobilités qui est chargée de la qualité de service sur les lignes de métro. Néanmoins, l'État est conscient de la nécessité d'améliorer les conditions de déplacement et est engagé en faveur des transports du quotidien en Île-de-France dans le cadre de deux programmes.
Le premier est l'amélioration et le développement du réseau existant au travers du contrat de plan État-région Île-de-France, qui est le seul à disposer d'un volet relatif aux transports urbains. Celui-ci prévoit un investissement de 7,6 milliards d'euros, dont 1,4 milliard financé par l'État et 1,6 milliard par la Société du Grand Paris.
Le second est, bien sûr, le Grand Paris Express, qui vise à doter l'Île-de-France d'un métro automatique en rocade. Celui-ci aura une correspondance avec la ligne 7 à la station Villejuif-Louis Aragon, ce qui améliorera considérablement les capacités de déplacement des usagers de la ligne 7.
Je vous remercie, madame la ministre, pour la clarté et la précision de votre réponse.
La parole est à Mme Aurore Bergé, pour exposer sa question, no 571, relative à la mobilité des Franciliens et au stationnement.
Madame la ministre chargée des transports, nous avons placé, au coeur de notre projet, la lutte contre l'assignation à résidence. Celle-ci commence quand on ne peut pas poursuivre ses études ou accepter un emploi, faute de transports adaptés et à des tarifs accessibles.
Pas un jour ne passe sans que je sois interpellée par des habitants de ma circonscription à propos des difficultés qu'ils rencontrent dans leurs déplacements quotidiens. On les considère comme des privilégiés parce qu'ils résident en Île-de-France, près des grandes entreprises et des centres de décision, mais la réalité est tout autre : l'absence de mobilité crée une fracture territoriale et sociale au coeur même de l'Île-de-France.
C'est également un enjeu pour la transition écologique. Nous devons accompagner les Français vers des déplacements plus verts. Or les infrastructures en place n'incitent pas les Franciliens à opter pour des modes de transport plus écologiques, voire les en découragent.
Les habitants du Sud-Yvelines sont contraints de se déplacer en voiture pour leur travail et leur vie quotidienne. Le maillage des transports collectifs s'est certes amélioré, mais demeure insuffisant. C'est d'autant plus vrai pour les habitants des territoires ruraux.
J'ai tenu des réunions publiques pour faire remonter les attentes et les difficultés des habitants du Sud-Yvelines en matière de mobilités, notamment vers Île-de-France Mobilités, que vous avez mentionnée précédemment. Ils se heurtent à des obstacles majeurs lorsqu'ils utilisent les transports en commun : absence de stationnement en toute sécurité et à tarif abordable aux abords des gares ; mauvaise qualité des infrastructures. La question des parcs relais ne doit pas être déconnectée de celle des investissements dans les lignes ferroviaires.
Le territoire est en effet desservi par des lignes SNCF à l'efficacité discutable : retards, vétusté des lignes et des rames, insécurité, amplitudes horaires réduites aux guichets. Des investissements importants ont été annoncés pour améliorer leur performance. L'État va ainsi investir 10 millions d'euros par jour pendant dix ans. Néanmoins, pouvez-vous nous confirmer que les trains du quotidien seront bien les premiers visés ? Quels seront exactement les investissements et les lignes concernées en Île-de-France ? Les attentes des habitants en la matière sont fortes et précises.
Je crains que ces investissements ne soient vains si l'ambition n'est pas élargie : l'objectif est de désengorger nos routes franciliennes des trajets quotidiens et de faire du train le mode de transport privilégié. Les quelques parkings existants témoignent du succès de cette solution mais, victimes de leur succès, ils sont saturés et les gestionnaires locaux envisagent des solutions de tarification.
Si des parkings-relais sont en cours d'ouverture aux portes de Paris, pour les gares les plus éloignées d'Île-de-France le nombre de projets est largement insuffisant. La gratuité de ces parcs pour les détenteurs d'un Pass Navigo annuel, annoncée par la présidente de région, est une décision importante, mais il convient d'accélérer leur construction si nous voulons progresser.
Madame la ministre, quelles mesures seront prises pour encourager l'utilisation du train, comme la création de parcs de stationnement gratuits ? Le projet de loi d'orientation des mobilités, bientôt examiné au Sénat, pourrait-il intégrer une disposition afin d'accélérer le mouvement ?
Madame la députée, vous soulevez la question de la qualité des transports du quotidien en Île-de-France. Je vous confirme qu'elle fait partie des priorités Gouvernement, dans l'ensemble du territoire. Le sujet plus particulier des parkings relais et de rabattement relève de la compétence d'Île-de-France Mobilités.
Île-de-France Mobilités, qui est l'autorité organisatrice des transports pour l'ensemble de la région, a annoncé une politique d'accompagnement du développement des parkings relais pour les Franciliens, formalisée par un schéma directeur dont l'objectif est de créer 10 000 places d'ici à 2021.
L'amélioration et le développement du réseau existant des transports du quotidien constituent bien la priorité du Gouvernement. En Île-de-France, ce soutien se matérialise au travers de différents projets, notamment celui du Grand Paris Express – 35 milliards d'euros d'investissement – mais aussi du contrat de plan État-région, le seul en France à disposer d'un volet consacré aux transports collectifs, lequel en l'espèce prévoit 7,6 milliards d'investissements pour la période 2015-2020, dont 1,4 milliard financé par l'État et 1,6 milliard par la Société du Grand Paris. Ce volet permet de financer à la fois le prolongement de certaines lignes de métro – quatre sont en cours – , la mise en service de nouveaux tramways ou tram-trains, et l'amélioration du fonctionnement des trains du réseau Transilien ainsi que des RER existants. Les schémas directeurs et de secteur des RER et du réseau Transilien sont ainsi bien financés par le contrat de plan. La ligne N a ainsi bénéficié d'investissements importants, cofinancés par l'État, pour améliorer son fonctionnement et préparer l'arrivée de nouveaux matériels roulants.
Par ailleurs, il est important de proposer aux usagers des solutions de rabattement efficaces vers les modes lourds comme le RER, le train ou le métro, en développant de nouvelles mobilités, comme le covoiturage, ou en favorisant l'intermodalité grâce, notamment, aux parkings relais. À ce titre, le projet de loi d'orientation des mobilités, qui sera prochainement discuté au Parlement, vise à accompagner ce type de démarche : faciliter le covoiturage et renforcer l'obligation faite aux gestionnaires de gare de créer des parkings, avec notamment des places sécurisées pour les vélos.
Nous saluons tous l'engagement sans précédent de l'État pour les trains du quotidien, qui était le parent pauvre ces dernières années. Nos concitoyens ont besoin de précisions concrètes sur le fléchage de ces investissements. L'examen du projet de loi d'orientation des mobilités permettra de verser ces éléments au débat public. Le projet du Grand Paris Express ne profitera pas à tous les Franciliens même s'il permettra de désengorger les transports. Nous avons besoin, s'agissant du réseau Transilien, de connaître le détail des investissements prévus pour sa modernisation.
La parole est à Mme Typhanie Degois, pour exposer sa question, no 573, relative à la suppression de TER sur la ligne Lyon-Chambéry.
Comme vous le savez, les habitants de l'Avant-Pays savoyard, bassin de vie de 30 000 habitants, connaissent de grandes difficultés de mobilité au quotidien depuis le 9 décembre dernier. En raison des travaux réalisés en gare de Lyon-Part-Dieu, huit trains express régionaux sur dix ont été supprimés sur la ligne Chambéry-Lyon par la région Auvergne-Rhône-Alpes, sans concertation préalable. Or, cette ligne régionale dessert de nombreuses petites gares, ce qui permet aux habitants de se déplacer facilement et aux communes d'être attractives.
Aujourd'hui, 3 000 salariés, chefs d'entreprise, étudiants, bénévoles entreprennent un parcours du combattant pour partir travailler le matin et regagner leur domicile le soir, du fait d'un cadencement des trains drastiquement réduit et ne correspondant pas aux horaires de la population active.
Certes, depuis la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, entrée en application en 2002, les régions sont devenues autorités organisatrices des transports mais l'État reste le garant d'un système ferroviaire cohérent.
Depuis plusieurs semaines, la situation est bloquée, les habitants de l'Avant-Pays savoyard n'ont plus de solution correcte de transport en commun alors qu'ils habitent à plusieurs dizaines de kilomètres de là où ils travaillent. Le Gouvernement doit réagir.
Cette situation est ubuesque alors que nos vallées en Savoie sont chaque année de plus en plus polluées, que SNCF Réseau a investi 55 millions d'euros sur cette ligne pas plus tard que l'année dernière, qu'un droit à la mobilité sera bientôt reconnu dans le projet de loi d'orientation des mobilités, que vous défendrez prochainement.
Alors que le Gouvernement mène une politique visant à désenclaver les territoires périurbains et ruraux tout en luttant contre la pollution, comment mettre un terme à ce blocage qui réduit à néant la mobilité des habitants de l'Avant-Pays savoyard ?
Madame la députée, vous m'avez alertée sur les difficultés des habitants de l'Avant-Pays savoyard lors de mon récent déplacement en Savoie. Des travaux très importants ont actuellement lieu sur le pôle d'échanges multimodal de Lyon-Part-Dieu, destinés à désaturer cette gare majeure aussi bien pour les services TGV que TER. En particulier, pour faciliter l'exploitation ferroviaire et améliorer la régularité des trains, la signalisation sera modifiée et une nouvelle voie créée. Ce projet d'ampleur impose, durant la période des travaux, de neutraliser deux voies sur onze, limitant donc la capacité d'accueil des trains.
Le schéma de dessertes et les horaires des TER du service annuel 2019, qui a débuté le 9 décembre 2018, ont ainsi dû être largement adaptés. Cela s'est fait en étroite concertation entre les services de SNCF Réseau, de SNCF Mobilités et de la région Auvergne-Rhône-Alpes. En effet, en tant qu'autorité organisatrice des services ferroviaires régionaux, cette dernière est la seule compétente pour définir l'offre de services TER, en fonction à la fois de son analyse des besoins de mobilité dans son ressort territorial et des contraintes d'exploitation. En application du principe de libre administration des collectivités territoriales, l'État n'intervient pas dans ces choix.
En ce qui concerne plus particulièrement les services TER entre Chambéry et Lyon, deux itinéraires sont proposés aux voyageurs, l'un via Aix-les-Bains, l'autre via Lépin-le-Lac et Pont-de-Beauvoisin. Sur ce dernier itinéraire, pour répondre aux principaux besoins de mobilité des habitants de l'Avant-Pays savoyard, deux trains directs sont conservés en heure de pointe le matin pour se rendre à Lyon et deux le soir en sens inverse. En raison des travaux, les autres liaisons proposées comportent dans la majorité des cas une correspondance entre un service routier assurant la desserte fine du territoire de l'Avant-Pays savoyard et un service ferroviaire jusqu'à Lyon.
Je comprends parfaitement le ressenti des voyageurs face au rallongement des temps de parcours que ces adaptations du plan de transport TER impliquent. J'appelle de mes voeux à davantage de concertation de la part de la région, en liaison avec la SNCF.
Les habitants comprennent que des travaux soient nécessaires mais sur la plupart des lignes du secteur, 80 % des trains ont été supprimés alors que la capacité ferroviaire de la gare de Lyon-Part-Dieu n'est réduite que de 20 %. Les habitants des territoires ruraux vivent comme une injustice le fait que l'on favorise toujours les agglomérations. La concertation avec la région a posé problème, c'est évident mais peut-être est-ce justement là l'occasion de profiter du prochain projet de loi d'orientation des mobilités pour donner plus de pouvoir à l'autorité chargée de contrôler la qualité du service dans les transports et rendre obligatoires les comités de ligne afin de développer la concertation.
La parole est à M. Yannick Haury, pour exposer sa question, no 577, relative au désenclavement du Sud-Loire.
Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur les difficultés de mobilité dans le sud de la Loire-Atlantique. Le Pays de Retz est un territoire très attractif, où la croissance démographique est forte – quatre fois la moyenne nationale. L'adaptation des infrastructures routières et ferroviaires aux besoins des entreprises et des habitants devient donc impérative. Au moment où le Premier ministre a signé un contrat d'avenir avec la région Pays de la Loire et où le projet de loi d'orientation des mobilités sera bientôt débattu, je me fais le porte-parole des parlementaires et élus concernés pour demander que nous soyons associés aux décisions qui seront prises.
C'est à partir de la base, au plus près des besoins véritables, que nous trouverons des solutions à la fois moins coûteuses et plus efficaces, et non à travers le regard lointain des élus de la métropole, lesquels semblent malheureusement peser sur certaines décisions. Par exemple, l'aménagement de l'aéroport de Nantes-Atlantique doit englober l'adaptation des lignes de train et de tramway.
L'objectif du projet de loi d'orientation des mobilités est de désenclaver les territoires ruraux et semi-urbains. Aussi convient-il de trouver rapidement une solution au franchissement de la Loire en aval du pont de Cheviré. Dans le même esprit, la déviation de Vue et le doublement de la RD 751 entre Nantes et Pornic, sont des travaux à réaliser en urgence. Le trafic est tellement dense sur cette voie qu'elle est devenue extrêmement dangereuse, théâtre de nombreux accidents mortels qui endeuillent toute la région. Je sais bien que cette route est départementale, mais l'enjeu vital est tel que l'intervention de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France se justifierait. C'est le souhait que j'exprime avec force.
Nous travaillons avec le sous-préfet pour trouver des solutions adaptées aux problèmes de mobilité sur notre territoire. Toutefois, je me permets de vous le répéter, madame la ministre : nous avons absolument besoin de l'aide de l'État pour rattraper le retard accumulé durant ces années d'abandon et réaliser en urgence les améliorations indispensables.
Monsieur le député, comme vous l'avez rappelé, le Premier ministre a signé le 8 février avec la région Pays de la Loire, un contrat d'avenir qui formalise les engagements partagés de l'État et des collectivités en faveur des mobilités dans la région. Le contrat prévoit notamment la régénération de la ligne ferroviaire Nantes-Bordeaux via La Roche-sur-Yon et la Vendée, qui complètera les gains permis par le remplacement de la totalité des trains circulant sur cette ligne et financés par l'État.
Il prévoit aussi le lancement d'études pour un nouveau franchissement de la Loire en aval de Nantes. L'État a pleinement conscience des attentes des élus pour ce sujet dont le principe a été intégré au contrat d'avenir. Même si cet aménagement a vocation à être concerté, décidé et mis en oeuvre par les collectivités, l'État s'attache à ce que celles-ci puissent bénéficier d'un soutien technique et d'un accompagnement dans leurs réflexions en cours.
À ce titre, conformément à l'engagement pris dans l'avenant au CPER, le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement, le CEREMA, apportera un soutien méthodologique et technique au conseil régional dans le cadre de la réalisation d'une étude d'opportunité pour un nouveau franchissement de la Loire en aval du pont de Cheviré. Cet appui contribue notamment à identifier les enjeux d'un nouveau franchissement et son impact sur l'équilibre territorial local et régional.
Conformément au contrat, l'État s'est engagé, une fois les études achevées, début 2020, à examiner le principe et les modalités de son soutien pour la réalisation de la solution de franchissement qui sera retenue.
Pour ce qui est des routes départementales, l'État n'a pas vocation à intervenir dans leur financement, leur transfert aux départements ayant donné lieu à des compensations financières. Le département de la Loire-Atlantique a les moyens d'assumer les aménagements nécessaires.
Vous pouvez constater, monsieur le député, la force de l'engagement de l'État à accompagner les mobilités dans le grand Ouest. Il marque sa volonté de poursuivre une politique dynamique de désenclavement des territoires, s'appuyant sur la modernisation des infrastructures mais aussi sur tous les outils prévus dans le projet de loi d'orientation des mobilités, en faveur d'une mobilité durable dans tous les territoires.
Merci, madame la ministre, de tenir compte de ces réalités d'aménagement qui conditionnent le bon équilibre entre les territoires ruraux, la métropole et les liaisons avec les territoires voisins.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour exposer sa question, no 580, relative à la suppression d'un trajet Lyria passant par Frasne, Dole et Dijon.
Lors des débats parlementaires autour du nouveau pacte ferroviaire puis au cours du grand débat national, le Gouvernement a affiché sa volonté de préserver la desserte ferroviaire des territoires. Or, la société Lyria a décidé unilatéralement de supprimer un aller-retour par jour entre Paris et Lausanne passant par Frasne, Dole et Dijon. À compter du service annuel 2020, il n'y aurait plus que trois allers-retours quotidiens, au lieu de quatre actuellement, soit une baisse de 25 % des fréquences.
Je rappelle que le capital de Lyria est codétenu à 74 % par la SNCF et à 26 % par les Chemins de fer suisses. L'entreprise affiche d'ailleurs de bons résultats financiers : elle a réalisé 289 millions d'euros de chiffre d'affaires l'an passé.
Si elle était confirmée, cette décision aurait des conséquences néfastes pour l'aménagement du territoire. Lyria relie en effet à la Suisse l'ensemble de la région Bourgogne Franche-Comté, y compris, par le jeu des correspondances, le Haut-Jura et le Haut-Doubs. Lyria facilite en outre les coopérations économiques. Elle fait partie, par exemple, des liaisons qui motivent le projet de ville nouvelle et d'aménagement dans le secteur de la gare de Dole. Enfin, Lyria est important pour notre capitale régionale, Dijon, qui s'est lancée dans de grands investissements touristiques.
Lyria nous répond que les trains seront mieux équipés, avec de nouvelles rames à deux étages, du wifi et un confort nouveau. Cet argument n'est pas recevable : l'accroissement de la capacité des trains ne compense pas la réduction de leur fréquence.
Je voudrais souligner l'union et la mobilisation des élus de Bourgogne Franche-Comté de tous les départements et de toutes sensibilités politiques, contre la décision de Lyria. Je note aussi le soutien engagé des élus suisses des villes de Lausanne, de Vallorbe, ou encore de Neuchâtel. Ils sont formels : les travaux prévus en gare de Lausanne ne peuvent servir de prétexte. On parle de supprimer un train par jour, alors que cette gare en voit partir ou arriver vingt-cinq par heure.
C'est pourquoi, madame la ministre, je vous demande, et je demande au Gouvernement de soutenir clairement les élus de Bourgogne Franche-Comté dans le bras de fer qui les oppose à la société Lyria.
Vous m'interrogez, monsieur le député, sur la desserte de la liaison TGV Lyria Paris-Lausanne passant par le Jura à compter du service annuel de 2020. Vous l'avez rappelé, à compter de 2020, et au moins jusqu'en 2026, la gare de Lausanne connaîtra des travaux importants.
Ce projet d'ampleur se traduira par la fermeture temporaire, durant la période des travaux, de deux voix sur huit, limitant d'autant la capacité d'accueil de cette gare. Cette contrainte technique amène l'opérateur Lyria à reporter ou à supprimer certains TGV assurant la liaison Paris-Lausanne par le Jura, qui comptera trois allers-retours quotidiens en 2020, contre quatre actuellement. Les gares de Dijon, Dole et Frasne perdront en conséquence un aller-retour quotidien. Les gares de Mouchard et de Pontarlier, en revanche, conserveront respectivement un et trois allers-retours quotidiens, soit leur desserte actuelle.
Compte-tenu de l'ampleur des évolutions envisagées, Lyria a rencontré des élus locaux pour leur présenter les modifications de desserte. Comme vous l'avez également rappelé, pour compenser la baisse de la fréquence sur la liaison Paris-Lausanne via le Jura, Lyria remplace l'ensemble des rames actuellement en service sur cette liaison par de nouvelles rames à deux niveaux, plus confortables et plus fiables, mais surtout en mesure d'accueillir plus de voyageurs. Cela veut dire que la suppression d'un aller-retour sur quatre n'empêchera pas une légère augmentation du nombre de places offertes.
J'ai bien conscience que la capacité n'est pas tout, et que la fréquence est également importante. Je réaffirme, par conséquent, la nécessité que les évolutions en matière de desserte TGV s'opèrent en concertation avec les territoires, afin de définir les mesures permettant de maintenir une desserte ferroviaire de qualité dans les gares du Jura, tout en tenant compte des contraintes liées aux travaux en gare de Lausanne.
Merci, madame la ministre, pour ces éléments, mais la fréquence est en effet essentielle. Conserver quatre allers-retours quotidiens entre Paris et Lausanne qui passent par le Jura nous semble essentiel pour ce département. Une fréquence moindre finira par tuer cette ligne à petit feu, et fera que notre département, mais aussi l'ensemble de la Bourgogne Franche-Comté seront bien moins desservis qu'auparavant par le trafic ferroviaire, ce qui serait catastrophique pour notre région.
La parole est à M. Jean-Louis Thiériot, pour exposer sa question, no 581, relative à la gratuité des péages et des services de secours.
Ma question, madame la ministre, concerne la gratuité des péages d'autoroute, votée dans la précédente loi de finances au profit des services de secours, et qui devait faire l'objet d'un décret d'application. À ce jour, ce décret n'a pas été pris.
De surcroît, j'avais saisi votre ministère par une question écrite. J'en ai obtenu une réponse le 18 décembre, et c'est sur cette réponse que je souhaite vous interroger. J'ai été assez surpris par les termes employés par vos services : ils ont indiqué que la décision prise dans la loi de finances étant trop compliquée, et contraire à la fois au principe d'égalité et au droit des contrats, il serait impossible, ou quasiment impossible, de la mettre en oeuvre. En d'autres termes, votre administration a répondu à la représentation nationale qu'un texte voté dans le cadre de la loi de finances ne serait pas appliqué.
Je souhaiterais donc savoir si c'est bien la position de votre ministère. J'en profite pour appeler votre attention sur le fait que l'argumentation présentée par vos services dans leur réponse à ma question écrite est exactement celle que développeraient les sociétés concessionnaires d'autoroutes, si elles devaient ouvrir un contentieux avec l'État, à partir du moment où nous appliquerions cette gratuité pour les services de secours.
Dans ces conditions, madame la ministre, je vous demande quelle est la position de votre ministère sur ce sujet. Ce décret d'application sera-t-il pris ?
Dans tous les cas, il conviendrait probablement de modifier la réponse de vos services, parce que – je coiffe maintenant mon ancienne casquette d'avocat – si je plaidais pour les sociétés d'autoroutes, j'aurais l'avantage sur l'État, dès lors que le ministère lui-même dirait que l'État est en faute : il serait évidemment très compliqué pour l'État de se défendre dans le cadre d'un contentieux.
Cette réponse laisse entendre, de surcroît, que c'est l'administration qui gouverne, non le Gouvernement, et peu importe le vote de la représentation nationale.
J'ai bien en tête que la loi de finances pour 2018 prévoit de rendre les péages d'autoroutes gratuits pour les véhicules des services de secours, y compris lorsque ceux-ci ne sont pas en intervention sur l'autoroute. Je voudrais rappeler que cette disposition vise à réduire les dépenses de l'État et des départements.
Mais je ne souscris pas à la réponse que vous avez citée, et à laquelle vous venez de faire une publicité tout à fait significative : si l'on voulait éviter d'indiquer des pistes aux sociétés concessionnaires, eh bien c'est le contraire qui est fait.
On peut cependant noter que les conditions d'application de la mesure votée sont complexes. Les sociétés concessionnaires d'autoroutes et l'État sont liés par des contrats dont l'équilibre ne peut pas être remis en cause, même par la loi. L'amendement voté dans le cadre de la loi de finances pour 2018 provoque un manque à gagner pour ces sociétés concessionnaires. En tant que parties à ce contrat, elles seraient fondées, sur la base du droit des contrats que vous connaissez certainement, en tant qu'avocat, à demander une indemnisation à l'État. La puissance publique serait alors contrainte de compenser, pour les sociétés concessionnaires, la gratuité accordée par cet amendement.
Si le Gouvernement souhaite évidemment appliquer la loi, il souhaite aussi préserver l'intérêt de la puissance publique dans l'application de la loi. Il travaille donc à trouver des modalités conformes à l'intérêt général, qui ne pèsent pas sur les finances publiques. Il ne me semble pas douteux que c'était bien le sens de l'amendement qui avait été voté. Il n'est donc pas question de faire financer par la puissance publique une mesure de gratuité qui incombe aux sociétés concessionnaires. C'est ce à quoi nous nous employons.
Quant à la publicité donnée à la réponse de vos services, celle-ci a été publiée au Journal officiel. Je ne doute donc pas que, en tout état de cause, les sociétés d'autoroutes y auraient eu accès assez aisément.
Sur le fond, je regrette qu'aucune date n'ait été fixée pour la mise en oeuvre de cette décision : nous n'avons visiblement pas reçu de réponse sur ce point.
J'appelle enfin votre attention sur un point particulier. En tant qu'ancien président de conseil départemental, j'ai eu à gérer toutes les problématiques, notamment budgétaires, d'un service départemental d'incendie et de secours. Cet amendement, au-delà même de l'aspect financier, revêt un aspect symbolique très fort. Pour me rendre régulièrement dans les casernes de pompiers de mon territoire, je peux vous dire que la question de son application est suivie à la loupe. Et, à un moment où nous avons tant besoin de nos services d'incendie et de secours, et où leur engagement est absolument irréprochable, je crois qu'en tout état de cause, il faut vraiment que vos services avancent vite, pour que cet engagement soit respecté. Que l'on ne vienne pas nous dire qu'à cause de difficultés de négociation, on ne peut pas appliquer un texte qui a été voté par l'ensemble de cet hémicycle. Ce sujet n'est vraiment pas politique, il est d'intérêt général.
La parole est à Mme Marine Brenier, pour exposer sa question, no 582, relative aux concessions d'autoroutes.
Depuis de nombreuses années, les péages d'autoroutes augmentent et pénalisent les automobilistes. Nice est la seule métropole à avoir un péage périurbain, qui oblige la population souhaitant contourner la ville à payer. De plus, l'annonce de l'utilisation du fichier national des plaques d'immatriculation par les concessionnaires a choqué bon nombre de nos concitoyens.
J'ai été effarée de constater que les négociations, notamment celles de 2015 auxquelles vous avez participé en tant que directrice de cabinet de la ministre compétente, ont été menées en dépit de tout ce que l'État pouvait obtenir de ces concessionnaires.
C'est la raison pour laquelle j'ai déposé le 8 janvier une proposition de résolution demandant la création d'une commission d'enquête relative à ces concessions autoroutières. Elle est soutenue par plusieurs députés, dont certains appartiennent à votre majorité. Une omerta existe encore aujourd'hui sur ces négociations, ces contrats et ces bénéfices, et cela est inacceptable.
Le coût devient trop élevé pour les automobilistes, et ce n'est pas la nouvelle hausse du 1er février de 1,8 % qui va atténuer leur colère. Les concessionnaires ont trop longtemps été favorisés au détriment de l'intérêt général et des automobilistes. Ces derniers sont dans l'obligation d'emprunter les autoroutes pour diverses raisons, et sont pénalisés par leurs tarifs prohibitifs.
Je sais que vous craignez une nouvelle grogne. C'est d'ailleurs pour cela que vous avez obtenu des concessionnaires une réduction de 30 % pour les automobilistes réalisant plus de dix allers-retours par mois. Mais les Français ne sont pas dupes, madame la ministre. Cet effort, que vous présentez comme inédit, tant ils ont été rares ces dernières années, n'empêchera pas le thème de la renationalisation des autoroutes de surgir dans le grand débat national dont vous revendiquez les vertus. Espérons que ce forfait ne soit pas annonciateur des fameux péages urbains évoqués par votre majorité en début de mandat !
D'autant que, nous le savons, ce type d'effort doit donner lieu à une compensation, afin de respecter les conditions financières des contrats de concession. C'est le signe de l'impuissance évidente de l'État face à ces concessionnaires.
Il est donc grand temps d'éclaircir les zones d'ombre qui persistent autour de ce sujet. Pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, la position du Gouvernement sur ses relations avec les concessionnaires d'autoroutes, et le plan d'action envisagé en vue des prochaines négociations ?
Je voudrais vous rappeler que la privatisation des sociétés d'autoroutes remonte à 2006, et je pense que vous appartenez à la majorité qui l'a voté. Personnellement, je ne faisais pas partie du Gouvernement en 2006.
Néanmoins, cette privatisation pose effectivement la question de la transparence et de l'équilibre des relations entre l'État et les sociétés concessionnaires d'autoroutes. Pour ce qui est de la transparence de ces relations contractuelles, il convient de rappeler que la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a imposé la « mise à la disposition du public par voie électronique » des contrats autoroutiers. Par ailleurs, depuis 2016, l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières – ARAFER – rend des avis publics sur les projets de nouveaux contrats de concession, mais aussi sur tous les projets d'avenants ayant une incidence sur les tarifs de péage.
La Commission européenne contrôle, quant à elle, les renégociations des contrats ayant pour objet l'allongement de la concession.
Le Parlement, enfin, a vu ses moyens de contrôle et d'évaluation considérablement renforcés, puisque depuis la loi du 6 août 2015 précitée, c'est à lui qu'il revient d'autoriser l'allongement de la durée des contrats de concession.
D'autre part, il convient de souligner qu'à la suite de la crise de 2015, qui avait d'ailleurs donné lieu à la création d'une commission d'enquête parlementaire, s'est opéré un rééquilibrage des relations entre l'État et les sociétés concessionnaires.
Ainsi, un dispositif limitant les sur-profits a été introduit dans les contrats historiques : en cas de sur-performance économique sur la période d'allongement du contrat, les tarifs de péage sont revus à la baisse, ou la durée de la concession est réduite. Tout cela, sous le contrôle du régulateur indépendant qu'est l'ARAFER. L'État peut également récupérer l'avantage financier procuré par des décalages dans l'échéancier réel des investissements liés aux nouvelles opérations sur le réseau.
Par ailleurs, la loi du 6 août 2015 a créé l'ARAFER, qui dispose d'un pouvoir de contrôle et de sanction lui permettant de préserver l'intérêt des usagers dans les négociations entre l'État et les concessionnaires d'autoroute.
Je voudrais enfin rappeler que les remises consenties aux usagers réguliers ayant souscrit un abonnement constituent des mesures commerciales sans contrepartie. Près d'un million d'automobilistes vont ainsi voir les péages baisser de 30 %. Cela représente potentiellement, pour les sociétés d'autoroutes, un effort de plusieurs dizaines de millions d'euros. S'agissant de mesures commerciales décidées par les sociétés d'autoroutes, cet effort ne fera l'objet d'aucune contrepartie, ni des usagers, ni de l'État, ni aujourd'hui, ni demain.
Madame la ministre, en 2006, compte tenu de mon âge, je n'étais pas députée, malheureusement, et n'ai donc pu participer au débat.
En revanche, en 2015, vous étiez directrice de cabinet au moment des renégociations, qui ont abouti à des décisions encore entourées de flou. Vous êtes aujourd'hui ministre. Vous avez l'occasion d'agir. Nous payons aujourd'hui le prix des renégociations de 2015, …
… puisqu'il avait été décidé à l'époque de geler pour un an les tarifs des péages. La décision prise alors se répercute aujourd'hui sur les automobilistes. Je vous demande, madame la ministre chargée des transports, de faire preuve de vigilance sur ce dossier.
La parole est à Mme Frédérique Dumas, pour exposer sa question, no 593, relative au CDG Express.
Madame la ministre chargée des transports, dans une interview au Parisien du 5 février dernier, vous avez annoncé la signature du contrat de concession pour la réalisation du CDG Express, en assurant que « cela ne se fera pas au détriment des transports franciliens ». Nous avons alors été cinq députés à diffuser un communiqué de presse pointant les nombreuses incohérences du dossier. Nous demandions, comme de nombreux élus et citoyens, le report, et non l'étalement, de ce chantier comme cela semble être envisagé.
Le préfet Cadot a confirmé dans son pré-rapport que « si l'impact des travaux serait acceptable en 2019 et 2020 », ce ne serait pas le cas entre 2020 et 2024 « sans un plan inédit et ambitieux ». Il a par ailleurs relevé les incertitudes pesant sur l'impact des travaux, en précisant que « les solutions en cours d'étude ne seront connues et leur efficacité démontrée qu'à l'issue de la mission de coordination fin mars 2019 ». Ce n'est qu'à cette échéance qu'il sera possible « de confirmer l'impact des travaux sur les trains du quotidien ».
Je souhaite vous poser deux questions, madame la ministre. Première question : alors que tout se décide un peu dans la précipitation, pouvez-vous nous garantir que le principe que vous avez vous même fixé, de la neutralité du projet CDG Express sur le RER B, aussi bien durant la phase de travaux qu'ultérieurement en exploitation, sera respecté ?
Seconde question : il n'a été possible, ni à Nicolas Sarkozy, ni à Manuel Valls, qui tenaient à ce projet, de trouver une solution de financement émanant du privé, du fait des interrogations sévères sur l'équilibre d'exploitation de la ligne à terme. Le Gouvernement a donc pris la décision, afin de respecter la parole donnée que le CDG Express serait prêt pour les Jeux olympiques, de devenir le créancier de ce projet pour un montant qui s'élève à ce jour à 1,8 milliard d'euros.
Il s'agit certes non pas d'une subvention publique mais d'un prêt remboursable. Mais la loi de finances pour 2018 précise bien que les dépenses et la dette seront consolidées au sein des finances publiques et que la société dédiée appartient à la catégorie des organismes divers d'administration centrale. Si la concession a bien été ainsi accordée à un consortium de droit privé, les principaux actionnaires sont des entreprises publiques : SNCF Réseau d'une part, Aéroports de Paris d'autre part, dont la privatisation annoncée est fortement contestée.
Madame la ministre, pouvez-vous nous assurer que le contrat de concession ne comporte aucune garantie de l'État ? Pouvez-vous également nous assurer que, sous une forme ou sous une autre, les finances publiques ne seront pas engagées en cas de déficit d'exploitation ?
Si le lien de confiance est rompu entre les Français et leurs dirigeants, c'est que, bien trop souvent, les engagements ne sont pas tenus. Car les paroles s'envolent, les ministres passent – je le dis non pas pour vous mais de manière générale – , alors que les conséquences des décisions prises, elles, sont inéluctables.
Ces deux questions, madame la ministre, je vous les pose solennellement : vos réponses engageront la parole de l'État et votre propre parole, devant les citoyens. Elles vous engageront pour l'avenir.
Madame la députée, j'entends vos inquiétudes concernant le CDG Express, notamment son impact sur les lignes du quotidien que sont le RER B, le RER D ou encore les lignes P et K du Transilien. Cependant, personne ne peut se satisfaire de la desserte actuelle de l'aéroport. L'objectif est donc de reporter le trafic de la route vers le rail, tout en évitant une cohabitation délicate des usagers du RER B avec des passagers transportant des bagages.
Je l'ai déjà affirmé très clairement : il n'est pas question que le CGD Express se fasse au détriment des transports du quotidien. Je le répète : il n'y pas 1 euro de subvention publique à destination de ce projet, qui sera financé à hauteur respective de 60 % par ses utilisateurs et de 40 % par une taxe sur les billets d'avion.
Vous m'avez interrogée sur la fragilité financière du projet : nous sommes encore loin d'avoir atteint le plafond, prévu par la loi, de la taxe sur les billets aériens. Le contrat prévoit, de plus, de nombreux dispositifs de rééquilibrage si la trajectoire du projet ne devait pas être nominale.
Je tiens aussi à rappeler que, sur les 1,8 milliards d'euros investis – sans aucune subvention publique – , 530 millions serviront à des améliorations sur le RER B, notamment sur la partie sud de la ligne, en garantissant une plus grande robustesse et une meilleure ponctualité grâce à trois retournements qui permettront de limiter les conséquences des incidents.
Ma priorité n'a jamais changé : elle va aux transports du quotidien. La totalité des investissements de l'État en Île-de-France y est consacrée, avec un niveau d'investissements inédit : 7,6 milliards d'euros dans le cadre du contrat de plan, plus de 200 kilomètres de lignes nouvelles de métro et un effort de modernisation du réseau ferroviaire multiplié par trois.
Jamais le projet CDG Express ne passera avant la priorité donnée aux transports du quotidien : telle est ma ligne rouge, je vous le confirme. Je suis donc prête, et je l'ai déjà dit, à ce qu'il soit ajusté autant que nécessaire pour respecter cette priorité, y compris en matière de calendrier. Le préfet, chargé de coordonner l'ensemble des travaux prévus sur le secteur, nous rendra ses recommandations à la fin du mois de mars ou au début du mois d'avril. Nous veillerons de près à ce que les usagers et les collectivités soient associés aux travaux en toute transparence.
En réponse aux inquiétudes que vous aviez déjà exprimées, une réunion est prévue, ce jeudi, avec les parlementaires des Hauts-de-Seine et le préfet de région : elle permettra, je l'espère, de répondre à vos interrogations sur le CDG Express et de recueillir toutes vos propositions.
S'agissant de l'impact des travaux, quelle valeur ont les garanties que vous apportez puisque, comme l'a indiqué le préfet Cadot, les conclusions sur le sujet ne sont pas encore rendues – elles ne le seront que fin mars ?
J'ai dit que nous en tiendrions compte.
Votre engagement ne s'appuie donc pas sur des garanties certaines, lesquelles sont très ambitieuses, comme l'a souligné le préfet lui-même.
De plus, si le financement n'est pas assuré par une subvention publique, toutefois, les actionnaires de la société privée appartiennent au public : les finances de l'État pourront dont être sollicitées.
La parole est à M. Alain Bruneel, pour exposer sa question, no 565, relative à la desserte TGV reliant le Douaisis à Paris-Nord.
Madame la ministre chargée des transports, un hôpital malade, des tribunaux en danger, un centre postal qui ferme ses portes : le territoire du Douaisis semble être devenu la cible des mauvais coups. En matière de transports, le bilan n'est pas plus réjouissant. La gare de triage de Somain est laissée à l'abandon, malgré tout l'intérêt écologique du fret ferroviaire. Les élus, les cheminots et les citoyens sont d'ailleurs toujours dans l'attente d'une visite gouvernementale sur le site.
Dernière attaque en date : la disparition programmée des dessertes TGV pour les trains reliant la capitale. Au-delà de Douai, c'est tout un territoire qui est visé. Lens, Valenciennes, Dunkerque : jusqu'à deux tiers des dessertes TGV de la région seraient menacées. Cette décision irresponsable, prise sans consultation, fait l'unanimité contre elle. C'est toujours la même chanson : il faut supprimer, supprimer et encore supprimer, sans aucune place pour le débat. On nous informe une fois que la décision est prise.
Sans vouloir dramatiser, c'est l'avenir et la survie d'un territoire qui sont en jeu. Comment parler de mobilité, d'attractivité et de dynamisme économique si les TGV à destination et en provenance de Paris-Nord sont supprimés ? La SNCF m'a déjà répondu qu'il est « trop tôt pour réagir », sans pour autant exclure une forte réduction de l'offre à grande vitesse pour préparer l'ouverture à la concurrence.
Vous, madame la ministre, vous restez silencieuse. Il m'est impossible d'obtenir une réponse depuis que je vous ai interpellée en décembre dernier, en dépit de plusieurs relances de mon cabinet. Ma question est sans détour : pouvez-vous informer aujourd'hui les habitants de la région de ce que vous comptez faire pour empêcher la SNCF d'être le moteur d'une République à deux vitesses ?
Quelle est votre action politique concrète sur ce dossier, afin de refuser toute réduction de desserte ? J'attends ici un engagement ferme et durable, une réponse précise.
Monsieur le député, en m'interrogeant, vous me donnez l'occasion de répondre sur les dessertes TGV dans les Hauts-de-France en général et sur la liaison entre Douai et Paris en particulier.
Je tiens tout d'abord à réaffirmer que je suis très attachée à ce que le transport ferroviaire ait toute sa place dans notre politique de mobilité pour, à la fois, répondre aux besoins de nos concitoyens en matière de transports du quotidien et lutter contre toutes les fractures territoriales.
Je comprends les inquiétudes à la suite des différents articles, parus dans la presse, concernant les restructurations des dessertes TGV dans les Hauts-de-France. Je puis vous assurer de ma plus grande vigilance sur le sujet. Le dialogue entre la SNCF et les territoires concernés est indispensable avant toute décision. Une concertation a été engagée avec le conseil régional, à sa demande. Dans les réflexions en cours, il s'agit non pas de supprimer des dessertes TGV mais de les réorganiser vers Lille plutôt que vers Paris, dans le cadre de TGV conventionnés.
J'ai reçu récemment M. Guillaume Pepy pour évoquer cette question et j'ai demandé à la SNCF de prolonger le travail mené avec le conseil régional tout en consultant l'ensemble des collectivités concernées. J'ai également demandé que soient reçus les parlementaires concernés. Le Gouvernement est très attaché à la qualité du dialogue entre la SNCF et les territoires. La réforme ferroviaire a ainsi prévu de mettre en place à partir de 2021 des procédures de consultation et d'information obligatoires des territoires avant toute évolution de desserte.
Je l'ai souligné lors des débats sur la réforme ferroviaire, il n'est pas question de revenir sur le modèle d'un TGV qui dessert largement nos territoires. Mon message est clair, monsieur le député.
Je vous ai bien entendue, madame la ministre. Force est toutefois de constater que les décisions sont prises sans que les élus et les citoyens concernés n'aient été consultés. Toutes les forces politiques sont unanimes à refuser la disparition des TGV dans le Douaisis. Le Douaisis n'est pas une seconde zone, pas plus que ses habitants ne sont des citoyens de seconde zone. Ce territoire a droit à ses services publics, comme tout autre territoire.
Madame la ministre, vous avez évoqué des consultations : j'ai été moi-même invité en tant que député le 29 mars prochain à une telle consultation. Il n'est toutefois pas question que ce soit pour apprendre que la réorganisation des dessertes fait que les habitants du Douaisis seront désormais obligés, pour aller prendre le TGV, de prendre d'abord un TER jusqu'à Lille ou Arras. Nous souhaitons conserver les départs de TGV à partir des gares de Douai, Valenciennes et Lens.
Si vous confirmez que vous êtes d'accord avec moi, l'affaire est réglée : des TGV continueront de partir de Douai.
J'ai évoqué des consultations.
La parole est à Mme Nathalie Sarles, pour exposer sa question, no 570, relative au dédoublement des classes de CP.
Monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, à l'heure où nous avons pris connaissance des cartes scolaires – j'ai reçu un courrier du directeur académique des services de l'éducation nationale en date du 15 février – , ma question porte sur les prévisions pour la rentrée scolaire 2019.
Le dédoublement des classes de cours préparatoire et de cours élémentaire première année dans les territoires les plus défavorisés était un engagement fort du Président de la République, en faveur de l'égalité réelle et de l'émancipation, afin de lutter contre l'échec scolaire et le décrochage.
Les évaluations de la mise en place de cette mesure tout d'abord en CP, puis en CE1, ont montré son efficacité. Or, dans ma circonscription, sur les cinq classes de CP qui ont été dédoublées en REP – réseau d'éducation prioritaire – , les effectifs de deux classes, situées dans l'école d'une commune de la périphérie de la ville centre, atteignent quinze élèves. La présence d'un CADA – centre d'accueil de demandeurs d'asile – entraîne aussi des variations d'effectifs à la baisse et à la hausse – elle est actuellement à la hausse dans une école de ma circonscription. Quels sont, monsieur le secrétaire d'État, l'effectif par classe maximal que vous considérez comme compatible avec l'objectif de qualité que nous recherchons tous ? Quelles directives avez-vous donné aux services dans le département ?
jihPar ailleurs, je souhaite vous poser une autre question qui concerne plutôt les zones rurales. Dans ma circonscription, pour prendre des exemples concrets, les effectifs de certaines classes de primaire, hors REP ou REP+, atteignent trente élèves sur plusieurs niveaux. Que pensez-vous de ces classes à plusieurs niveaux aux effectifs importants ? Que pouvons-nous offrir aux enfants pour favoriser l'égalité des chances et faciliter leur futur parcours au collège ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Madame la députée, vous m'avez interrogé sur la lutte contre les difficultés scolaires et les inégalités à la racine. Je sais que ce sujet vous mobilise particulièrement, dans votre circonscription comme au niveau national.
Oui, il faut agir à la racine : c'est le sens des efforts entrepris en éducation prioritaire avec le dédoublement des classes de CP et de CE1 échelonné sur les rentrées scolaires de 2017 à 2019. Vous avez rappelé qu'il s'agissait d'un engagement du Président de la République.
À la rentrée 2018, le dispositif est pleinement opérationnel dans les classes de CP en REP et en REP+. Les classes de CE1 en REP+ ont été dédoublées partout où cela était possible. Le nombre moyen d'élèves par classe de CP s'élève à 12,6 en REP+ et à 12,7 en REP.
Concernant plus particulièrement les dédoublements de classes dans le département de la Loire, à la rentrée 2018, en REP+, les vingt-huit classes de CP ont été dédoublées, avec un taux d'encadrement de 12,9 élèves par classe. De même, les vingt-six classes de CE1 ont été dédoublées, avec un taux d'encadrement de 12,8 élèves par classe. En REP, soixante et onze des soixante-treize classes de CP sont dédoublées, soit un taux d'encadrement de 12,6 élèves par classe. Pour répondre à votre question, c'est ce niveau d'encadrement que nous cherchons à atteindre.
Comme le montrent ces taux d'encadrement moyens, des situations comme celles que vous décrivez peuvent encore exister, mais elles sont transitoires. Cette réforme attendue a été mise en place très rapidement. Notre objectif est qu'elle se déploie de manière à ce que l'ensemble des classes dans l'ensemble des territoires puissent en bénéficier et avoir le taux d'encadrement annoncé par le Président de la République pendant la campagne. Il a pu arriver que le manque de locaux disponibles dans certaines écoles ait conduit à privilégier la co-intervention de deux professeurs des écoles dans la même salle ou à organiser des regroupements en double niveau. Là encore, il s'agit de situations pratiques qu'il a fallu gérer en cas d'arrivée de nouveaux élèves en cours d'année scolaire. C'est au cas par cas que les services académiques, en lien étroit avec les communes, décident s'il est souhaitable et possible d'ouvrir une nouvelle classe.
Vous m'avez ensuite interrogé sur le sujet extrêmement sensible de la présence scolaire en zone rurale. Le Gouvernement met un point d'honneur à renforcer cette présence scolaire en milieu rural et à faire en sorte que le taux d'encadrement n'y diminue pas malgré la situation démographique. Si l'on prend les vingt-cinq départements les plus ruraux, on observe une diminution de 60 000 élèves sur deux ans : normalement, cette situation aurait dû conduire mécaniquement à des suppressions de classes et de postes. Au contraire, nous créons des classes et des postes en milieu rural.
Vous avez posé plus particulièrement la question des classes à plusieurs niveaux. C'est un sujet sensible, car ce type de classes permet parfois de maintenir un établissement dans certains territoires. En même temps, il faut garantir que la qualité de l'enseignement soit toujours au rendez-vous pour les élèves. Ces situations sont évidemment étudiées au cas par cas par les services académiques. Nous allons poursuivre la réflexion sur ce sujet. Un rapport sur la territorialisation des politiques éducatives, tant dans les REP et REP+ que dans les zones rurales, a été commandé à M. Mathiot et Mme Azéma et nous sera remis dans les prochaines semaines. Il sera intéressant de voir quelles évolutions pourront être apportées dans les situations que vous décrivez.
Monsieur le secrétaire d'État, j'appelle votre attention sur cette question des classes dédoublées à plusieurs niveaux, dont on parle assez peu…
La parole est à M. Fabien Di Filippo, pour exposer sa question, no 583, relative à la réforme des écoles et des lycées.
Monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, comme Mme Sarles vient de l'expliquer fort justement, le dédoublement des classes de CP et de CE1 en REP et REP+, avec un seuil de douze élèves par classe, a entraîné l'explosion des effectifs de certaines autres classes, qui ont dépassé la barre des trente élèves. C'est une réalité dans nos territoires périphériques et ruraux. Lorsque nous vous interrogeons sur ce sujet, nous avons souvent droit à une réponse, ou plutôt à une non-réponse, qui consiste à citer des chiffres démographiques ou des seuils très globaux, exprimés au niveau départemental, mélangeant les REP et les zones périphériques et ne permettant pas une lecture réelle de la situation.
Aujourd'hui, je souhaite concentrer ma question sur quelques points afin de souligner les iniquités scolaires et sociales qu'engendre une telle réforme.
Tout d'abord, à cause des fermetures de certaines écoles rurales, certains enfants se retrouvent très éloignés de leur école. Dans ma circonscription, du fait des horaires des tournées de bus, ils passent parfois plus de deux heures par jour dans les transports. C'est autant de temps en moins pour les activités familiales, périscolaires, culturelles et sportives. Ce temps de transport génère énormément de fatigue et nuit à la capacité de concentration et d'apprentissage des élèves. Ces derniers passent plus de temps hors de leur foyer que des ouvriers ou des employés.
Deuxième chose tout aussi révélatrice, alors que vous parlez des difficultés dans certains quartiers : un rapport de France Stratégie, un organisme lié au Gouvernement, a montré que les enfants des zones rurales ont aujourd'hui 15 % de chances de moins que les enfants des quartiers de connaître une ascension sociale par rapport à la situation de leurs parents. Ma question est très simple, monsieur le secrétaire d'État : comment appréhendez-vous ces inégalités graves qui condamnent certains enfants et contribuent à condamner nos territoires ?
J'en viens à la réforme des lycées, qui paraît aujourd'hui illisible. Elle complexifie le système, dévalorise certaines disciplines et suscite des inquiétudes légitimes chez les enseignants, les parents et surtout les élèves. Elle entraîne aussi des iniquités géographiques pour les lycées ruraux et des difficultés pour les enfants des milieux populaires.
En premier lieu, il y a moins d'options disponibles dans les lycées de la périphérie et de la ruralité que dans les grandes villes. Certains lycées de ma circonscription du Sud-Mosellan n'offrent même pas les sept options sur douze promises par le ministre pour chaque lycée. Finalement, l'offre globale est moindre.
S'agissant ensuite de l'apprentissage des langues, alors que la Moselle est un département frontalier, proche de l'Allemagne, à peine six lycées offrent l'option et la spécialité « allemand ». Chez moi, dans le Sud-Mosellan, il n'y en a même aucun ! Pas un enfant de ma circonscription ne peut accéder à cette spécialité.
Quant à l'enseignement du numérique, il est disponible dans très peu de lycées – en tout cas, il n'est proposé dans aucun établissement du Sud-Mosellan. On parle de fracture numérique et on regrette que les enfants habitant dans les zones rurales aient moins accès que les autres à la connectivité, mais cette situation sera aggravée par l'impossibilité d'accéder à la spécialité « numérique et sciences informatiques », qui sera pourtant, dans les prochaines années, un important facteur d'insertion professionnelle.
Enfin, en conséquence de tout cela, certains enfants issus de familles du Sud-Mosellan voulant suivre des spécialités très précises auront des temps de trajet d'une heure ou une heure et demie par jour pour se rendre dans les lycées des grandes villes. Souhaite-t-on vraiment que nos jeunes de 15 ou 16 ans partent chaque semaine en internat ou passent autant de temps dans les transports chaque jour ?
Monsieur le secrétaire d'État, au sein de l'école de la République, tous les enfants n'ont-ils pas le droit aux mêmes chances ? Nous considère-t-on comme une variable d'ajustement pour les écoles des villes et des quartiers ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le député, j'entends bien ce discours politique qui consiste à opposer les quartiers, les REP et les REP+ à la ruralité, en expliquant que les dédoublements de classes en REP et en REP+ ont été opérés au détriment des zones rurales et que l'on a pris aux uns pour donner aux autres. Jean-Michel Blanquer et moi-même répétons régulièrement que c'est faux. À la rentrée 2018, il y avait 32 000 élèves de moins : si nous avions suivi une logique comptable, nous aurions donc dû supprimer mécaniquement des postes et des classes, alors qu'en réalité nous en avons créé ! J'ai bien compris que vous nous suggériez, dans votre question, de jouer sur le dédoublement des classes. Or, si vous faites abstraction de tous les dédoublements de classes effectués à la rentrée 2018, vous obtiendrez un solde positif de 1 000 classes créées sur l'ensemble du territoire alors que le nombre d'élèves a baissé de 32 000 dans le premier degré. Ces classes ont été créées dans des territoires ruraux : c'est pour cela que nous arrivons à maintenir un taux d'encadrement élevé.
S'agissant de la carte scolaire du premier degré à la rentrée 2019, douze emplois supplémentaires ont été attribués au département de la Moselle, malgré une baisse prévisionnelle de près de 1 000 élèves. Cela signifie que le taux d'encadrement dans votre département – le nombre d'enseignants pour cent élèves – va augmenter à la rentrée prochaine : il atteindra 5,57, contre 5,39 à la rentrée 2013, 5,45 à la rentrée 2017 et 5,50 à la rentrée 2018. Vous pouvez donc constater que cette progression est continue.
Quant à la répartition des spécialités dans le cadre de la réforme du lycée, le recteur de chaque académie arrête la carte académique des enseignements de spécialité en veillant à l'équilibre et à la bonne répartition des enseignements de spécialité dans un cadre géographique adapté au territoire. Le projet de répartition des enseignements de spécialité dans l'académie de Nancy-Metz prévoyait initialement que l'enseignement de langue allemande soit proposé dans trois établissements publics et un établissement privé de Moselle. La rectrice vient de s'engager à étoffer cette offre, dès la rentrée 2019, dans quatre nouveaux établissements en Moselle : le lycée Jean-Moulin de Forbach, le lycée Jean-Victor-Poncelet de Saint-Avold, le lycée Louis-Vincent de Metz et le lycée Félix-Mayer de Creutzwald.
S'agissant de l'enseignement numérique, j'entends ce que vous dites, monsieur Di Filippo, mais c'est une spécialité…
Merci, monsieur le secrétaire d'État. Je vous rappelle que la durée globale de la question, de la réponse et de l'éventuelle réplique ne peut excéder six minutes.
Ce temps de parole est écoulé, mais je donne la parole à M. Di Filippo pour une très brève intervention.
Monsieur le secrétaire d'État, vous êtes prévisible jusqu'à la caricature. Comme je le disais, vous donnez des taux d'encadrement globaux, …
Non !
… calculés au niveau départemental, qui ne rendent pas compte de la réalité vécue dans nos territoires.
S'agissant de l'enseignement de l'allemand, les lycées que vous avez cités sont tous situés à plus d'une heure de chez moi. Comment pouvons-nous faire, monsieur le secrétaire d'État ? Il faut prendre en compte tous les territoires, s'il vous plaît.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour exposer sa question, no 584, relative aux dotations horaires des collèges.
Je souhaitais poser une question à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et exprimer devant lui un sujet de préoccupation.
Monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, permettez-moi d'abord de vous interroger sur la diminution annoncée des dotations horaires des établissements à faible effectif, qui affectera, à la rentrée, quatre collèges ruraux du département du Cantal. Aussi, j'associe bien évidemment mon collègue Jean-Yves Bony à ma question. Cette diminution de moyens contraste avec ce que nous connaissions jusqu'à ce jour et avec les efforts déployés par le conseil départemental du Cantal, tant en investissement qu'en fonctionnement, ayant pour objectif affiché de maintenir un maillage de collèges de proximité, d'éviter aux élèves de trop longs déplacements, en particulier en zone de montagne, et de renforcer in fine l'attractivité de nos établissements, dont la présence est indispensable pour mener à bien la politique d'accueil et de reconquête démographique que nous avons engagée.
Cette diminution de moyens ne sera pas sans incidence sur l'organisation et la qualité des enseignements, ni sur les conditions d'exercice des enseignants en service partagé, de fait, sur plusieurs établissements. Aussi, monsieur le secrétaire d'État, je vous demande de m'assurer que ces établissements disposeront bien, à la rentrée prochaine, des moyens nécessaires à leur bon fonctionnement.
Je souhaite enfin relayer les inquiétudes que suscitent auprès des enseignants et des parents d'élèves la réforme du lycée et plus particulièrement la mise en place des spécialités – un sujet qui vient d'être évoqué par M. Di Filippo. La mise en place de ces spécialités pose la question essentielle de l'offre de formation que pourront proposer les lycées des préfectures et sous-préfectures des territoires ruraux. Nous nous interrogeons sur le nombre de spécialités qui seront effectivement proposées aux élèves, ainsi que sur l'impact de la réforme sur la dotation horaire des établissements et, par voie de conséquence, sur les effectifs des classes de seconde et de tronc commun, qui vont mécaniquement augmenter. Comment le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse compte-t-il répondre aux inquiétudes des enseignants, des parents et des élus ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le député, votre question me permet de poursuivre l'échange que nous venons d'avoir avec M. Di Filippo puisqu'elle porte également sur le sujet très important de la présence scolaire dans la ruralité. Comme vous l'indiquez, certains collèges ruraux du département du Cantal enregistrent une baisse très importante de leurs effectifs. Quatre collèges de ce département accueilleront entre quarante-neuf et soixante-dix élèves à la rentrée scolaire 2019. Face à cette situation, nous ne pouvons faire qu'une chose : innover pour garantir une présence scolaire et un accès à une scolarité de qualité pour tous les élèves. Les organisations arrêtées au niveau national doivent évidemment connaître une adaptation spécifique pour des territoires comme le vôtre. Bien que la baisse démographique y soit très importante, nous voulons maintenir un même niveau de qualité, raison pour laquelle nous construisons une offre pédagogique selon des modalités adaptées et innovantes. La réflexion porte sur plusieurs sujets et notamment sur une organisation scolaire permettant dans certaines disciplines, comme l'éducation physique et sportive ou les arts plastiques, des regroupements pédagogiques ne faisant pas obstacle aux préconisations des programmes.
Par ailleurs, ces projets locaux sont adossés à des partenaires culturels, sportifs et associatifs afin de mettre en place une pédagogie active et dynamique, ce qui est très positif pour le contenu des enseignements à destination des jeunes. Les échanges sont très nourris avec les principaux de collèges, les équipes pédagogiques et les élus. Les résultats sont là : les collèges de Pierrefort et de Pleaux ont repensé très rapidement leur organisation pédagogique et conçu de nouveaux emplois du temps ; le collège de Condat commence à élaborer des hypothèses d'emploi du temps nouvelles ; le maire d'Allanche a formé un groupe de travail réunissant l'ensemble des acteurs pour élaborer un projet pédagogique afin d'augmenter les effectifs du collège.
Concernant les spécialités au lycée – je n'ai pas pu répondre à la question de M. Di Filippo – , la réforme du bac jouera un rôle considérable pour lutter contre les inégalités entre les jeunes au lycée. Nous voulons que la spécialisation soit progressive afin de sortir des couloirs, des silos qui poussaient des jeunes à entrer dans une filière sans pouvoir en sortir, et de leur permettre de découvrir de nouvelles matières. Des spécialités ont été créées et, avec Jean-Michel Blanquer, nous souhaitons que les académies les proposent le plus largement possible. Par définition, toutes les spécialités ne sont pas disponibles dans tous les lycées mais nous faisons en sorte qu'elles soient présentes sur l'ensemble des territoires et que les jeunes puissent y accéder. Parfois, il faudra des solutions innovantes ; parfois il faudra passer de manière transitoire par le Centre national d'enseignement à distance. En tout cas, nous essayons de développer et de renforcer cela au fur et à mesure.
Concernant le Cantal, tous les établissements offriront l'ensemble des enseignements communs. Trois d'entre eux offriront les enseignements de spécialité « Humanités, littérature et philosophie » et « Langues, littératures et cultures étrangères ». Deux d'entre eux proposeront les enseignements de spécialité « Arts », « Littérature, langues et cultures de l'Antiquité » et « Numérique et sciences informatiques », qui est très demandé. Enfin, l'enseignement de spécialité « Sciences de l'ingénieur » sera présent dans l'un des quatre établissements – le choix n'est pas encore arrêté.
Vos échanges récents et à venir avec le recteur permettront de vous rassurer sur l'attention toute particulière portée par les services de l'éducation nationale au département du Cantal, qui connaît une situation spécifique de baisse démographique. Nous voulons maintenir un niveau de qualité équivalent pour les jeunes ; c'est à cela que nous travaillons.
La problématique est celle des collèges en zone de montagne. Le temps de transport des enfants peut parfois excéder une heure trente par jour : cela justifie que nous conservions des collèges à petits effectifs. Ces collèges innovent déjà, avec des sections de jeunes sapeurs-pompiers volontaires et des sections sportives, mais ont besoin de moyens.
Je veux ici saluer les efforts déployés par la directrice des services académiques pour tenter d'apporter des moyens supplémentaires afin que les collèges arrivent à remplir leurs missions. Le fait d'ailleurs qu'elle ait ouvert ce dialogue prouve, si besoin était, que les dotations initiales étaient insuffisantes.
Quant aux enseignements de spécialité au lycée, il sera utile, à la rentrée prochaine, d'en dresser un bilan très précis parce qu'il faut impérativement que les établissements des territoires ruraux proposent une offre suffisante et jugée satisfaisante pour les élèves.
Prochaine séance cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Explications de vote et vote par scrutin public sur le projet de loi pour une école de la confiance ;
Discussion de la proposition de loi visant à créer le statut du citoyen sauveteur, lutter contre les arrêts cardiaques et sensibiliser aux gestes qui sauvent.
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures cinquante.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra