Intervention de Alain Perea

Séance en hémicycle du jeudi 7 mars 2019 à 21h30
Intégrité des mandats électifs et de la représentation nationale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Perea :

En premier lieu, je remercie notre rapporteur d'avoir proposé ce texte, qui nous permet de réfléchir sur une question importante : la relation que l'élu doit entretenir avec la vertu, la probité, l'égalité, notions dont nous parlons depuis plus de deux heures. En préparant mon intervention et en vous écoutant, chers collègues, je me suis interrogé.

Tout au long de la journée, les députés de l'opposition ont reproché à la majorité d'empêcher le débat. Pourtant, sur chacun des textes, la discussion générale a duré deux à trois heures. Celle-ci ne nous offre-t-elle pas une occasion d'exprimer et d'entendre certains avis ?

Si elle n'a aucune valeur, nous pouvons tout aussi bien la supprimer. Mais on nous reprochera alors d'interdire toute discussion. Mieux vaut considérer que cette étape du débat offre l'occasion d'un réel échange. Peut-être y reviendrai-je si j'en ai le temps.

J'insisterai sur deux points : l'obligation faite – ou non – aux élus d'avoir un casier judiciaire vierge et le regard que le peuple porte actuellement sur leur probité.

Sur le premier point, je suis d'accord avec vous, monsieur le rapporteur. Comme vous l'avez rappelé, Emmanuel Macron a inscrit, à la page 27 de son programme, que les candidats aux élections présentés par En marche auraient un casier judiciaire vierge. Pour pouvoir figurer sur sa liste, nous avons dû prouver que nous n'avions jamais été condamnés. Nous ne sommes sans doute par les seuls. D'autres partis ont procédé de la même manière.

Mais, si nous souscrivons évidemment à une mesure que nous nous sommes appliquée à nous-mêmes, on peut se demander si elle appartient au domaine législatif. Pourquoi les partis ne l'adopteraient-ils pas simplement comme une règle de bon fonctionnement ? Pourquoi ne pas laisser au peuple – que certains prétendent incarner mieux que d'autres – le soin de privilégier les mouvements dont les candidats ont un casier judiciaire vierge ?

Le législateur que je suis considère qu'il faut parfois laisser les mouvements s'organiser, montrer leur bonne volonté et demander ensuite au peuple de se positionner en toute légitimité.

Cela nous renvoie à d'autres questionnements. Nous savons tous que certains élus multicondamnés – je ne citerai aucun nom – ont aussi été multiréélus. Serons-nous plus royalistes que le roi, ou plutôt plus rigoureux que le peuple, en lui interdisant d'élire les candidats qui lui plaisent ?

Demandons-nous plutôt si chaque mouvement ne doit pas édicter ses propres règles en fonction de ses convictions, et laisser le peuple s'exprimer.

La seconde question – le rapport du peuple à l'élu – a été abordée plusieurs fois. Je travaille avec des élus depuis 1992 et, depuis cette époque, j'entends répéter le slogan « Tous pourris ! » Lorsque j'ai suivi ma formation initiale de technicien, puis d'ingénieur, tout le monde réclamait davantage de transparence dans la vie publique. Or sur tous ces bancs, vous n'avez cessé, comme nous-mêmes lorsque nous avons voté la loi pour la confiance dans la vie politique, de rechercher plus de transparence.

Ce faisant, les élus n'ont fait qu'alimenter un ogre qui se nourrit de tous ces textes. Chaque fois qu'on lui présente une nouvelle loi, celui-ci affirme, au lieu de nous remercier : « Vous voyez bien que j'avais raison ! », et il interprète notre vote comme un aveu. Loin de rassasier cet ogre, nous ne parviendrons qu'à aiguiser son appétit.

Nous devons continuer à travailler tous ensemble, quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons. Cherchons comment combattre le mythe du « Tous pourris ». Peut-être en viendrons-nous à bout non par des textes mais par des pratiques, en adoptant des logiques fondées sur le travail en commun et le respect mutuel. En effet, si nous ne nous respectons pas les uns les autres, comment le peuple nous respecterait-il ?

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