La proposition de loi remet à l'ordre du jour du débat parlementaire une question cruciale : l'intégrité et l'exemplarité des élus et des membres du Gouvernement.
L'article 1er vise à durcir la peine complémentaire d'inéligibilité pouvant être prononcée par un juge à l'encontre d'une personne exerçant au moment des faits une fonction de membre du Gouvernement ou un mandat électif public, pour la porter jusqu'à trente ans, voire à l'étendre à toute la vie, lorsqu'un crime suit ou accompagne la commission d'un autre crime ou d'un autre délit.
Une sécurité juridique est évidemment ajoutée à cette mesure : toute personne qui s'est vue condamner à une peine d'inéligibilité à vie ou supérieure à dix ans peut formuler une demande auprès du juge de l'application des peines tous les dix ans, pour que celle-ci soit réduite ou qu'il y soit mis fin.
L'article 2 tend à soumettre les élus à un régime pénal plus sévère.
L'article 3 vise à rendre le texte applicable sur l'ensemble des territoires français.
En lisant la proposition de loi, nous n'avons pas pu ne pas penser à ce que nous avons entendu sur les ronds-points. Selon ceux que nous y avons rencontrés, les élus ne sont pas toujours des plus honnêtes. C'est un cliché tenace que, quel que soit notre groupe politique, nous avons bien du mal à combattre, tant certaines affaires restent dans les esprits.
Or l'intégrité des élus est une question cruciale pour deux raisons.
Une défiance grandissante tend à se répandre parmi nos concitoyennes et nos concitoyens. Beaucoup n'ont plus confiance dans les élus, qu'ils regardent avec suspicion. Ils pensent que, si tel dossier n'avance pas, c'est parce qu'un élu a personnellement intérêt à le freiner.
D'autre part, nous rencontrons une question d'éthique. Que nos concitoyennes et nos concitoyens nous fassent confiance ou non, nous ne pouvons nous dispenser d'une exigence forte d'intégrité et de probité, car être élu, c'est être investi d'un mandat, c'est porter quelque chose qui est plus grand que soi.
Lors des débats sur la loi de moralisation de la vie publique, nous avons déposé de nombreux amendements allant dans le sens de la proposition de loi. Ils ont évidemment été rejetés. Ils visaient à rendre inéligibles à vie les élus condamnés pour corruption, à interdire le pantouflage ou à soumettre les membres des cabinets ministériels à des contrôles de transparence plus poussés. S'y ajoutaient des amendements que nous avions déjà déposés dans le passé.
En plus de la proposition de loi en discussion, d'autres textes nous viennent à l'esprit. Les questions des gilets jaunes que j'ai entendues dans ma permanence m'ont fait comprendre plusieurs choses.
Beaucoup de gens pensent qu'à l'Assemblée nationale, nous recevons des lobbyistes qui décident des amendements que nous déposons ou de notre vote. Or je sais que, pour beaucoup d'entre nous, de telles pratiques sont exclues. Nous ne nous soumettons pas au poids des lobbys, mais quelle réponse apporter à ceux qui pensent que ce sont les lobbyistes qui écrivent vos amendements, décident de votre vote et, en fait, adoptent les lois ?
Comment faire comprendre aux gens que nous, députés de la République, ne subissons pas cela, n'acceptons pas cela ? La proposition de loi nous offre l'occasion de réfléchir à ce sujet et d'apporter des réponses à toutes les personnes convaincues qu'il ne peut exister un élu honnête.
Le sujet de l'intégrité ne sera jamais épuisé, parce que ceux qui corrompent ne reculent devant rien, et que, lorsque les lois changent, les méthodes évoluent de la même façon. C'est à nous tous, sur tous les bancs, quelle que soit notre étiquette, qu'il revient de les repousser.