Il ne me paraît pas inutile de rappeler, dans le cadre de cette nouvelle lecture, les raisons pour lesquelles nous avons proposé une réforme des commissaires aux comptes.
Je commencerai par souligner que les seuils de nomination obligatoire d'un commissaire aux comptes prévus par le projet de loi n'ont pas été fixés de manière aléatoire : ils correspondent aux seuils européens de référence en la matière. Si, comme vous le dites, deux États européens s'interrogent actuellement sur l'opportunité de revoir à la baisse les seuils mis en place, il ne faut pas oublier que pour une quinzaine d'autres États, ces seuils ne posent aucun problème – l'Allemagne retient même un seuil de 12 millions d'euros de chiffre d'affaires au lieu du seuil européen fixé à 8 millions d'euros.
Certains pays pourront estimer que les seuils européens ne sont pas adaptés à leur situation, qui nécessite des contrôles plus importants qu'ailleurs – je pense notamment à l'Italie, où l'économie souterraine représente une part non négligeable du produit intérieur brut (PIB). Cela dit, les études réalisées il y a quelques mois ont montré qu'il n'y avait pas de différence significative, en termes de qualité de la liasse fiscale, entre les entreprises faisant appel à un commissaire aux comptes et les autres. Contrairement à ce qu'implique votre raisonnement, chers collègues, la fraude fiscale n'est donc pas plus répandue au sein des entreprises où n'intervient pas un commissaire aux comptes, ce qui s'explique notamment par le fait que la très grande majorité d'entre elles font appel à des experts-comptables avec lesquels elles travaillent au quotidien, et qui permettent de garantir que leur comptabilité est régulière et sincère.
Comme nombre d'entre vous, il m'est arrivé de présider le conseil d'administration de sociétés – souvent des sociétés d'économie mixte – faisant appel à des commissaires aux comptes. Sans remettre en cause la qualité du travail effectué par ces professionnels, j'avoue que je me suis toujours interrogé sur la réalité de la valeur ajoutée de leur intervention par rapport à celle des experts-comptables : si ces sociétés faisaient appel à des commissaires aux comptes parce que la loi leur en faisait obligation, force est de reconnaître que leur intervention n'était pas franchement transcendante…
La réforme que nous avons souhaité engager a été entreprise à l'issue d'un débat de qualité avec la profession, un débat parfois passionné – ce qui est bien normal – et ayant permis de mettre en place, notamment sur la base du rapport de M. Patrick de Cambourg, toute une série d'aménagements et de propositions intelligentes de nature à permettre aux commissaires aux comptes de développer de nouvelles activités rémunérées relatives à la vie des entreprises et aux relations inter-entreprises, plus proches des attentes de celles-ci. Je pense notamment à l'établissement d'attestations sur les délais de paiement, sur la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) et sur de nombreux autres sujets relevant de la nécessité d'avoir des relations de confiance dans l'économie, évoquée tout à l'heure par M. Potier : sur ces sujets-là, l'intervention du commissaire aux comptes peut représenter une réelle valeur ajoutée.
J'insiste sur le fait que la réforme proposée n'a pas pour objet de remettre en cause l'utilité des commissaires aux comptes, nécessaires au bon fonctionnement économique du pays, mais simplement de réorienter leurs attributions et de leur fournir certaines garanties et protections – je pense notamment à la possibilité pour les commissaires aux comptes diplômés de pouvoir s'inscrire au tableau des experts-comptables.
Pour toutes ces raisons, je suis tout à fait défavorable aux amendements de suppression de l'article 9.