Cet amendement porte sur un sujet qui me tient à coeur comme à beaucoup de nos collègues, je souhaiterais que nous l'abordions de façon rigoureuse.
La loi de finances pour 2012 a créé une contribution sur les boissons rafraîchissantes sans alcool, créant ainsi deux niveaux de taxation. Le premier est un droit d'accise touchant toutes les boissons non alcoolisées, y compris celles ne comportant pas de sucre, qui rapporte environ 80 millions d'euros aux organismes de sécurité sociale. Le second est une contribution portant spécifiquementsur les boissons sucrées, quel que soit leur taux de sucre.
Une étude récente de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a montré que l'obésité des enfants a été multipliée par 10 en quarante ans. Or, nous savons que, parmi les facteurs d'obésité et de diabète de type 2, figure la consommation de boissons rafraîchissantes sans alcool, c'est-à-dire des sodas, des boissons sucrées, voire extrêmement sucrées, contenant des ajouts directs de sucre, et dont l'apport calorique est considérable sans pour autant conduire à la satiété. Ces sucres et calories viennent ainsi s'ajouter à l'alimentation habituelle des enfants.
L'OMS enjoint les États membres à agir afin de réduire ces apports sucrés provenant de sodas et autres boissons rafraîchissantes sans alcool. Un certain nombre de pays l'ont déjà fait, en prenant des mesures – que l'on me passe cette expression – plus intelligentes, pragmatiques et efficaces que la fiscalité existant aujourd'hui dans le droit français. L'Angleterre par exemple a adopté une disposition applicable dès le mois d'avril prochain ; je vous propose de moduler la fiscalité existante afin de la faire évoluer vers un système à peu près similaire.
Il ne s'agit donc pas de créer une nouvelle taxe comportementale, mais de rebattre les cartes de la taxe existante, et de la moduler de façon à ce qu'elle soit de nature à inciter les industriels à réduire le taux de sucre de leurs boissons. S'ils réduisent ce taux, ils doivent être récompensés par une baisse de la fiscalité, s'ils ne le baissent pas ou l'augmentent, ils prennent acte des conséquences de leurs pratiques sur la population de notre pays, et subissent une pression fiscale plus importante.
Nous proposons en premier lieu de supprimer le droit d'accise sur les boissons ne contenant pas de sucre, ou dont le taux de sucre est inférieur à 5 grammes par 100 millilitres ; car cette taxation n'a aucun sens au regard des impératifs de santé publique que je viens d'évoquer.
En ce qui concerne les boissons contenant entre 5 grammes et 8 grammes de sucre par 100 millilitres, il est proposé de ne pas modifier le niveau de taxe existant soit environ 2 centimes pour une canette de soda de 33 centilitres, ce que suggère d'ailleurs notre collègue, Mme Nathalie Elimas, pour le groupe Mouvement Démocrate et apparentés, ce dont je la remercie.
Il est ensuite proposé de doubler le droit d'accise pour les boissons comportant entre 8 grammes et 10 grammes par 100 millilitres. Au-delà de 10 grammes – ce qui concerne quelques sodas et boissons extrêmement sucrées –, c'est le triplement du montant de la taxe qui est proposé.
Encore une fois, si l'industriel réduit le taux de sucre, il sera fiscalement encouragé en retour. Une étude réalisée au Mexique a montré que l'augmentation de la fiscalité a été entièrement répercutée par les producteurs sur le prix de vente des boissons concernées, ce qui a entraîné un effet dissuasif sur le consommateur. L'étude montre la courbe de l'évolution de consommation de sodas, avec 70 % de jeunes atteints d'obésité, puis l'évolution à la baisse très sensible de cette consommation, accompagnée d'une très forte augmentation de la consommation de boissons sans sucre. L'effet sanitaire sur la population est donc majeur.
Une autre étude réalisée en Amérique du Nord montre que l'augmentation significative de la fiscalité pesant sur les sodas très sucrés s'est traduite un an après par une perte de poids de 720 grammes chez les enfants.
Il s'agit donc de la modulation d'une taxe existante, n'impliquant pas nécessairement un rendement supplémentaire pour l'État ; l'enjeu est de rendre le dispositif plus compréhensible et plus intelligent.
Je remercie encore nos collègues du groupe Mouvement Démocrate et apparentés pour le dépôt d'un dispositif similaire, mais qui propose des seuils de sucre si bas qu'ils ne laissent que très peu aux industriels la possibilité de se conformer aux normes préconisées en matière de santé par les organismes internationaux.
Toutefois, madame Elimas, si vous en étiez d'accord, nous pourrions reprendre ensemble la rédaction de cet amendement afin de le présenter de concert au moment du débat en séance publique.