Mardi 17 octobre 2017
La séance est ouverte à vingt-et-une heures trente.
(Présidence de Mme Brigitte Bourguignon, présidente)
La commission des affaires sociales poursuit l'examen des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 (n°269) (M. Olivier Véran, rapporteur général).
Article 10 : Allégement des démarches des petits déclarants en poursuivant la modernisation des titres simplifiés
La commission adopte l'article 10 sans modification.
Article 11 : Suppression du régime social des indépendants et modification des règles d'affiliation à la CNAVPL
La commission examine l'amendement AS340 de M. Joël Aviragnet.
La loi de financement de la sécurité sociale vise à assurer la maîtrise des dépenses de santé, or cet article est d'une tout autre nature puisqu'il vise à supprimer un régime social, celui des indépendants (RSI). Aussi pensons-nous qu'il s'agit d'un cavalier législatif. Cela d'autant que l'essentiel des dispositions qui y figurent ne portent pas sur les règles relatives au financement du RSI mais sur l'organisation, la gouvernance, la représentation des assurés, les règles d'affiliation, de prestation et de cotisation d'un nouveau système de portée générale. En outre, en intégrant salariés et indépendants dans le régime général sans systèmes différenciés, on peut s'attendre à de sérieux problèmes de gestion. C'est pourquoi la suppression du RSI devrait faire l'objet d'un projet de loi ordinaire à part entière et, de ce fait, bénéficier d'un examen plus approfondi.
Je n'ai pas compris si vous étiez favorable sur le fond à la suppression du RSI et si c'est contre la forme que vous vous inscriviez en faux, ou bien si vous étiez défavorable et à la suppression et à la forme.
Nous ne sommes pas opposés à la suppression du RSI mais à la méthode par laquelle vous entendez y procéder.
Je vous rassure : nous pouvons supprimer le RSI dans le cadre du présent PLFSS puisqu'il s'agit de règles d'affiliation à un régime de sécurité sociale et des modalités de recouvrement des cotisations et contributions sociales.
Cela étant, je persiste à penser que la suppression du RSI mérite un examen plus approfondi, et que cette question doit faire l'objet d'un projet de loi ordinaire.
La création du RSI a tout de même été marquée par de réels problèmes de mise en oeuvre. Ce régime et les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) doivent assurer conjointement le calcul, l'encaissement et le recouvrement des cotisations mais avec des systèmes informatiques qui ont créé des dysfonctionnements. Au-delà de l'adossement du RSI au régime général, nous voulons retravailler la méthode en maintenant certaines spécificités inhérentes à l'activité indépendante. L'action sociale dédiée des régimes de retraite complémentaire d'invalidité me paraît ainsi très importante. De même, les règles de cotisation doivent tenir compte de la situation économique des intéressés. Enfin, il faut prendre en considération la gestion spécifique des missions relatives à l'accompagnement des travailleurs indépendants, notamment ceux qui éprouvent des difficultés à acquitter leurs cotisations, mais aussi la surveillance générale de la mise en oeuvre de la protection sociale des indépendants par les différents organismes. Or, je tiens à rassurer nos collègues car ces différents éléments figurent bien dans le texte. En outre, à compter du 1er janvier 2018, un conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants garantira les droits des indépendants et le niveau de leurs cotisations.
L'article 11 vise à simplifier les démarches et les conditions de prise en charge des assurés au sein du régime de droit commun des travailleurs indépendants, qui pourront également bénéficier d'une continuité de leur couverture au fil de leur activité. Nous savons en effet que celle-ci peut parfois s'interrompre, reprendre et que ces interruptions sont complexes à gérer. Il nous revient donc, par l'adossement au régime général, de faciliter cette gestion, j'y insiste. Enfin, un comité sera créé afin de piloter la réforme et de veiller à son bon déroulement.
Nous pensons également que le dispositif en question devrait faire l'objet d'un projet de loi à part entière dès lors que l'article 11 compte à lui seul plus de trente pages. Je n'ai pas encore obtenu de réponse de la part du ministre de l'action et des comptes publics mais il y a un risque constitutionnel sur le fait que l'on rattache brutalement le RSI au régime général. Attention, monsieur le rapporteur général, vous savez que le Conseil constitutionnel a ses règles et, dès l'instant où il sera saisi du texte, il pourrait même faire valoir que l'article relève d'une loi organique car vous changez totalement de régime et vous imposez, dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale, la suppression d'un régime au profit d'un autre.
Pour aller dans le sens de notre collègue Grandjean, je crois que pas un seul d'entre nous, sur les marchés, pendant la campagne pour les élections législatives, n'a pas été interpellé sur le RSI. Les 6,5 millions de travailleurs indépendants attendent vraiment que les choses changent. Il y a eu des cafouillages, peu importe pour quelles raisons – on dit qu'il y a jusqu'à 20 % d'erreurs dans les systèmes d'information. Évidemment, l'efficacité ne reviendra pas comme par magie, il faudra un peu de temps. Reste que le régime général est totalement adapté pour intégrer et développer les systèmes d'information nécessaires pour améliorer la situation. Le RSI avait néanmoins fait des efforts, ces dernières années, en matière de structuration et d'organisation.
Nous avons auditionné ici même les représentants de la direction du RSI, ceux des syndicats de salariés et ceux des indépendants. Nous avons pu constater une attente très forte. Il s'agit en outre d'un engagement du Président de la République. Des garanties sont prévues pour sauvegarder les emplois.
Pour ce qui est de la forme, j'y insiste, j'ai une confiance absolue. Le travail réalisé avec les administrateurs de l'Assemblée me conduit à avoir une lecture différente de la vôtre monsieur Door, monsieur Aviragnet, et du risque constitutionnel encouru. En outre, le Gouvernement s'en est également assuré.
Je remarque que les députés du groupe Nouvelle Gauche souhaitent que cette proposition fasse l'objet d'une loi organique puisqu'il s'agit d'un sujet très important. Dont acte mais, à l'exception d'une demande de rapport, le présent amendement est le seul déposé par votre groupe sur ce sujet, monsieur Aviragnet.
Avis défavorable.
Les députés du groupe Les Constructifs ne voteront pas cet amendement, même si l'article présente un vrai risque d'inconstitutionnalité. Reste qu'il s'agit de rapprocher des régimes spéciaux du régime général de la sécurité sociale.
Lors de l'audition de M. Darmanin, j'ai évoqué les retraites complémentaires des indépendants. Il a alors répondu n'avoir pas avancé sur le sujet. Or, il nous importe que les droits des indépendants soient garantis et que ceux qui ont cotisé pendant un certain nombre d'années puissent bénéficier de leurs droits.
Les députés du groupe La France insoumise ne voteront pas cet amendement. Toutefois, si nous sommes d'accord avec la majorité – notre programme prévoyait également la fin du RSI et donc nous vous suivrons parce qu'il faut être intelligent -, nous défendrons un amendement relatif aux salariés des caisses du RSI.
Je vous confirme, Monsieur Vercamer, que les retraites complémentaires des travailleurs indépendants seront préservées. Et je remercie Mme Fiat pour sa position constructive.
La commission rejette l'amendement AS340.
Puis elle examine l'amendement AS61 de M. Jean-Pierre Door.
Pour avoir assisté aux mêmes auditions des responsables du RSI et des syndicats que vous, monsieur le rapporteur général, je n'ai pas eu le même sentiment d'un soulagement à l'idée de la suppression du RSI telle qu'elle est envisagée par cet article. J'ai même eu plutôt l'impression d'une très grande inquiétude de la part de responsables que j'ai trouvé très déçus.
Le RSI, je suis le premier à le reconnaître, a connu de très importantes difficultés de fonctionnement au cours des premières années, liées à une mauvaise fusion des fichiers au moment de sa création, difficultés qui se sont répercutées jusqu'à ces dernières années et ont eu un effet des plus préjudiciables pour les commerçants, les artisans et autres professions libérales.
J'ai néanmoins remarqué, à l'occasion des nombreuses permanences que je tiens dans ma circonscription, que si j'ai été saisi d'un très grand nombre de réclamations de la part des commerçants et des artisans pendant plusieurs années pendant le précédent quinquennat, ces réclamations ont beaucoup diminué l'année dernière à la suite de l'application des préconisations du rapport remis par Sylviane Bulteau et Fabrice Verdier, nos anciens collègues. Or, j'y insiste, à écouter les commerçants et les artisans, même s'ils gardent une certaine rancoeur vis-à-vis du RSI, j'ai l'impression que ces améliorations commencent à produire leurs effets.
Il ne faudrait donc pas que ce soit à ce moment qu'on décide brutalement de supprimer le système en vigueur pour en créer un autre qui présentera à ses débuts les mêmes inconvénients que le précédent.
Aussi le présent amendement propose-t-il une solution qui figurait dans une proposition de loi soutenue par la plupart des connaisseurs du dossier, déposée par MM. Aubert et Le Maire sous la précédente législature et qui a été rejetée par la majorité d'alors.
Lors des auditions, l'inquiétude portait sur l'emploi : qu'allait-il advenir des salariés du RSI ? Les deux ministres se sont engagés pour le maintien de l'emploi et l'absence de mobilité contrainte, les salariés du RSI étant dès lors intégralement réintégrés dans le régime général – une attention particulière sera même accordée à leurs appétences professionnelles. Cette inquiétude, nous la partageons donc et vous aurez remarqué qu'à chaque audition les premières questions portaient sur ce point.
Au-delà, il y avait aussi la volonté des salariés d'en finir avec le système du RSI, pesant pour eux. Aussi, l'idée de leur permettre demain d'intégrer le régime général et de partir sur de nouvelles bases me semblait-elle correspondre à des attentes sinon unanimes, du moins d'un certain nombre de représentants syndicaux.
Vous proposez de passer à un calcul en fonction des revenus mensuels ou trimestriels des indépendants et non plus en fonction de leurs revenus annuels. J'ai sur ce point une bonne nouvelle : l'article 11 comporte une disposition similaire. Nous sommes donc d'accord sur le principe de votre amendement. Reste qu'en supprimant l'article 11, il supprime la possibilité de mettre en place ce dispositif. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable.
J'ai rencontré, il y a quelque temps, des salariés du RSI – ceux notamment de l'Apria RSA (Réunion des sociétés d'assurances) – qui s'inquiétaient de la différence de traitement susceptible d'advenir entre eux à l'occasion de la suppression du RSI. Est-il possible d'obtenir des précisions sur ce point ? Il conviendrait en tout cas qu'ils aient connaissance du calendrier, des postes qui ne leur seront pas proposés, des déplacements géographiques qu'ils seront éventuellement amenés à faire. J'ajouterai une inquiétude supplémentaire : la différence de logiciel entre ceux qui gèrent le RSI et ceux qui travaillent à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM).
Je partage totalement l'inquiétude qui vient d'être exprimée par notre collègue Dharréville. J'ai bien entendu M. Darmanin, lors des questions au Gouvernement, assurer qu'il disposait de toute une équipe qui travaillait au cas par cas pour que les salariés du RSI soient replacés sans qu'ils aient à subir de problèmes liés à la mobilité géographique. Mais quand un siège du RSI se trouve dans une ville où il n'y a pas de CPAM, que deviendront ses salariés ?
J'ai par ailleurs très bien compris l'engagement du Gouvernement selon lequel le montant des cotisations des travailleurs indépendants ne varierait pas la première année ; mais qu'en sera-t-il les années suivantes ?
Pour ce qui est des organismes conventionnels – un de nos collègues a évoqué l'Apria –, le texte précise que l'ensemble des droits et obligations des organismes délégataires, y compris les contrats de travail afférents à la gestion leur ayant été confiée, sont transférés de plein droit aux organismes de leur circonscription au plus tard le 31 décembre 2020 ; le texte ajoute que ces transferts ne donnent pas lieu à la perception de droits, impôts ou taxes de quelque nature que ce soit. Les équipes du RSI seront, j'y insiste, pleinement intégrées au régime général.
La commission rejette l'amendement
Puis elle en vient à l'amendement AS395 du rapporteur général.
Le présent amendement vise à rappeler de manière symbolique, dans le premier article du livre II du code de la sécurité sociale, que les assurés salariés et les travailleurs indépendants couverts par le régime général sont obligatoirement affiliés au régime général.
En effet, l'affiliation obligatoire des salariés aux assurances sociales du régime général figure au livre III du code. Or, à la suite de nombreuses modifications, il n'y a plus de disposition équivalente pour les travailleurs indépendants.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS396 du rapporteur général.
Je propose que les organismes du régime général transmettent au conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants, nouvellement créé – par l'article 11 –, toutes les informations nécessaires à l'exercice de ses missions.
En effet, une réelle communication entre les organismes du régime général d'une part et ce nouveau conseil d'autre part, est essentielle pour permettre au conseil de veiller effectivement à la qualité du service rendu aux travailleurs indépendants par les organismes du régime général.
La commission adopte l'amendement.
Elle en vient à l'amendement AS399 du rapporteur général.
Il s'agit d'ajouter explicitement, au sein du futur conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants, une représentation des assurés retraités parmi les représentants des travailleurs indépendants. En effet, le RSI couvre encore 2 millions de retraités. En outre, sur 18,3 milliards d'euros de prestations qu'il verse, 9,2 milliards correspondent à des pensions de retraites.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS321 de Mme Nathalie Elimas.
À la suite de la crise de 2015, les agriculteurs avaient obtenu une baisse de 7 points de leurs cotisations. C'était une mesure nécessaire pour réduire les charges des exploitants et mettre à niveau notre agriculture avec celle de nos voisins européens, alors même que les charges de nos principaux compétiteurs demeurent moindres que les nôtres. Or, le PLFSS propose une harmonisation du régime des cotisations maladie pour l'ensemble des travailleurs indépendants, agricoles et non agricoles. En conséquence, dès 2018, pour les exploitants, le nouveau barème de cotisations sera progressif avec un taux qui variera de 1,5 % à 6,5 %. Ce nouveau système va faire quelques gagnants mais de nombreux perdants et va alourdir le coût du travail pour certaines exploitations agricoles.
Si nous avons entendu votre réponse à l'amendement présenté par notre collègue Door, le présent amendement propose toutefois de maintenir le gain pour les agriculteurs concernés et ne touche que ceux qui seraient les perdants de la réforme, en maintenant pour ces derniers l'avantage de la baisse des charges, acquis en 2016 par un plafonnement du taux de cotisation des agriculteurs à 3,04 %.
L'exposé sommaire de votre amendement, madame Elimas, justifie la mesure que vous proposez par une harmonisation de la protection sociale des agriculteurs sur le régime général. Or, l'article 7 que nous avons adopté procède déjà à un alignement du taux de la cotisation maladie des exploitants agricoles sur celui des travailleurs indépendants affiliés au régime général, soit 6,5 % au lieu de 10,04 %.
Cette réduction se substitue à celle de 7 points de la cotisation maladie dont les agriculteurs ont bénéficié en 2016. Cette exonération n'était soumise à aucune condition de ressources, si bien que 50 % de son montant bénéficiaient aux exploitants agricoles dont les revenus étaient les plus élevés. Le Gouvernement privilégie cette fois un abaissement de cotisations qui va favoriser les 60 % des agriculteurs aux revenus les moins élevés.
Avis défavorable.
Je suis assez d'accord avec notre collègue du Groupe du Mouvement Démocrate et apparentés. Mais qu'entend-on par revenus les moins élevés ?
Je soutiens l'amendement de notre collègue. Je trouve très regrettable que nous revenions en arrière sur ce qui a été décidé lors des précédentes législatures et qui était à l'avantage du monde agricole qui reste en souffrance, il faut le rappeler. Plutôt que de chercher à manipuler des chiffres et des pourcentages, il aurait fallu laisser en l'état, j'y insiste, ce qui existait.
Je sais bien, monsieur le rapporteur général, que mon amendement n'est pas placé au bon endroit et que j'aurais dû le défendre lors de l'examen de l'article 7, mais c'est une réponse sur le fond que je souhaite entendre. Pour les députés de mon groupe, il est injuste d'augmenter les cotisations de certains agriculteurs alors que c'est toute notre agriculture qui est en crise.
Le coût du travail agricole en France est déjà très élevé : 12 euros avec les charges et après exonérations contre 6 euros en Allemagne et environ 5 euros en Espagne. Aussi, si nous adoptons les mesures proposées par la majorité, c'est la compétitivité agricole de la France qui en pâtira.
Les députés du groupe Les Constructifs voteront cet amendement. Notre agriculture est en grande souffrance et il n'est pas utile d'aggraver la situation.
Le dégrèvement sera maximal jusqu'à 27 000 euros de revenus annuels et dégressif, ensuite, jusqu'à 43 000 euros de revenus annuels.
Vous regrettez que nous parlions chiffres et pourcentages, monsieur Door, mais malheureusement, et vous qui avez une plus longue expérience que la mienne en la matière, le budget de la sécurité sociale comprend de nombreux chiffres et pourcentages… et il faut bien trancher à un moment donné. Je le répète, l'arbitrage du Gouvernement avantage les 60 % d'agriculteurs dont les revenus sont les plus faibles.
J'appelle en outre votre attention sur le fait que le dispositif proposé par Mme Elimas pourrait entraîner une perte de recettes qui serait compensée par une taxe sur le tabac et l'alcool mais sans notion de valeur, sans qu'on sache les conséquences de cette disposition sur l'équilibre général du budget de la sécurité sociale. On navigue donc un peu à l'aveugle, si j'ose dire. C'est pourquoi je réitère mon invitation à ne pas voter l'amendement.
Il serait en effet important de pouvoir évaluer les conséquences financières du dispositif proposé par Mme Elimas. Faute de connaître plus précisément les montants qui pourraient être engagés en valeur absolue, il me semble difficile de se prononcer en faveur de l'amendement.
Le sujet est très important. Le ministre de l'économie est un ancien ministre de l'agriculture. Je vous propose d'examiner la question en séance la semaine prochaine, après que vous en aurez débattu avec lui, monsieur le rapporteur général, afin que nous ayons des explications. Je vous suggère donc de donner une sorte d'avis de report en séance…
Le règlement, monsieur Door, vous le savez bien, prévoit qu'on adopte ou qu'on rejette un amendement dès lors que son auteur le maintient. Rien ne nous empêchera de revenir sur le sujet en séance.
Le coût de la main-d'oeuvre, dans le secteur agricole, est très important et avec l'adoption des dispositions proposées par la majorité, nous allons favoriser les travailleurs détachés. Pour toutes les activités saisonnières, les agriculteurs embaucheront des travailleurs détachés venant de Pologne ou des pays de l'Est.
L'intention est sans doute louable, mais personne ici n'est capable de dire quelle est la somme en jeu.
Juste avant la pause dans nos travaux, nous avons adopté l'article 7, qui prévoit des dispositions spécifiques pour les agriculteurs. Je les ai rappelées, en vous donnant les valeurs : le dégrèvement des cotisations sociales sera maximal pour un revenu de 27 000 euros annuels, cette somme est issue d'un arbitrage gouvernemental. Lors du débat en séance, vous aurez tout loisir d'en discuter avec les ministres présents au banc, qui seront peut-être plus convaincants que moi sur ce sujet.
Je réitère mon avis défavorable à cet amendement.
Je défends, comme beaucoup, l'agriculture et les agriculteurs, mais pourquoi, à de tels niveaux de salaire, serait-elle traitée comme une industrie à part et privilégiée en termes de cotisations sociales ?
De nombreux agriculteurs souffrent et il faut les aider. Mais au niveau de rémunération qui est évoqué, le régime commun est tout à fait approprié et ces mesures ne se justifient pas.
La commission rejette l'amendement AS321.
Elle est saisie de l'amendement AS408 du rapporteur général.
Cet amendement propose de maintenir la possibilité de créer de nouvelles prestations supplémentaires pour tous les travailleurs indépendants.
Pour les indépendants hors professions libérales, les prestations supplémentaires consistaient en indemnités journalières de maladie. Le rattachement des travailleurs indépendants au régime général a conduit à intégrer ces prestations supplémentaires d'indemnités journalières parmi les prestations servies par le régime général, dont bénéficient les travailleurs indépendants. En conséquence, la possibilité pour les indépendants, hors professions libérales, de bénéficier de prestations supplémentaires a été supprimée par l'article 11.
Je vous propose donc de rétablir cette possibilité, notamment pour leur permettre, s'ils le souhaitent, de bénéficier de prestations supplémentaires au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite les amendements AS401, AS402, AS403 et AS404 du rapporteur général.
Ces différents amendements ont pour objet, conformément au résultat des concertations conduites avec les organisations interprofessionnelles représentatives des professions libérales, d'ajouter plusieurs professions libérales à la liste de celles qui restent affiliées à la CIPAV.
L'amendement AS401 vise les diététiciens ; l'AS402, les experts automobiles qui travaillent auprès des assurances ; l'AS403, les architectes d'intérieur et les économistes de la construction et l'AS404, les guides conférenciers.
L'an dernier, le transfert des professions indépendantes de la CIPAV vers le RSI a été censuré par le Conseil constitutionnel. Le transfert d'une caisse interprofessionnelle de prévoyance vers le régime social des indépendants ne se fait pas d'un coup de baguette magique, il soulève des problèmes de constitutionnalité. Sinon, tout le monde serait placé dans le même panier et il n'y aurait plus besoin de mutuelles, de compagnie d'assurances ou de compagnies interprofessionnelles. Il y aurait une assurance universelle, mais ce n'est pas le cas aujourd'hui.
Monsieur le rapporteur général, ne risquez-vous pas de subir une nouvelle censure du Conseil constitutionnel ?
C'est une excellente remarque, et c'est justement la raison pour laquelle ces dispositions sont dans la loi. Le Conseil constitutionnel a censuré le recours au décret pour définir la liste des professions considérées : il nous demande d'inscrire dans la loi la liste exhaustive des professions concernées.
La commission adopte successivement les amendements.
Elle en vient à l'amendement AS360 de M. Xavier Roseren.
Cet amendement a pour unique but de compléter cet article, en ajoutant le cas des guides de haute montagne après l'alinéa 182 qui concerne les moniteurs de ski. Leur situation étant similaire, le traitement qui leur est réservé doit l'être aussi.
Je suis d'accord avec vous, il y a beaucoup de similitudes entre les moniteurs de ski et les guides de haute montagne, je suis donc favorable à votre amendement.
La commission adopte l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement AS18 de Mme Marine Brenier.
Cet amendement vise à supprimer une contribution à la seule charge des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés.
À l'origine, le régime spécial des praticiens et auxiliaires médicaux se voulait un avantage social. Cependant, cette contribution peut devenir un désavantage selon les circonstances, et favoriser ainsi les praticiens déconventionnés. Cette différenciation ne nous semble pas justifiée par la gestion du risque maladie des praticiens.
Il convient donc de redonner toute son attractivité à la contractualisation conventionnelle en supprimant cette contribution inéquitable imposée aux praticiens conventionnés.
C'est toute la différence entre le secteur 1 et le secteur 2 vis-à-vis des charges qui pèsent sur les libéraux. Lorsqu'ils exercent sans dépassement d'honoraires, ou sans secteur privé, une partie des cotisations est prise en charge. Lorsqu'il y a des dépassements d'honoraires dans cette activité, il n'y a pas de prise en charge et les cotisations sont plus importantes.
Supprimer les cotisations sur la partie de dépassements d'honoraires que pourraient pratiquer des médecins en secteur 1 dont une partie de l'activité est dans le secteur privé revient à supprimer la différence entre l'exercice à tarif opposable et les dépassements d'honoraires. Cela contrevient aux équilibres négociés par la convention médicale, et pour les autres professions de santé.
Par ailleurs, financer la défiscalisation des dépassements par les recettes du tabac me semble justifier un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement AS400 du rapporteur général.
Jusqu'au 31 décembre 2019, les anciennes caisses du RSI apportent leur concours aux caisses du régime général, en matière de recouvrement des cotisations dues par les travailleurs indépendants et de versement des prestations dont ils bénéficient.
Cet amendement a pour objet de permettre au personnel des caisses héritières du RSI de signer les actes nécessaires à l'exercice de leurs missions, exercées pour le compte du régime général, pendant la période transitoire de deux ans.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine l'amendement AS238 de M. Jean-Hugues Ratenon.
Monsieur le rapporteur général, la suppression du RSI nous semble relever du bon sens et nous y étions favorables dans notre programme. Mais si certains parlent de mettre un terme à un naufrage, il ne faudrait pas laisser périr l'équipage…
Il est nécessaire de veiller à ce que les salariés des caisses et des organismes associés, qui ont fait de leur mieux dans un contexte souvent difficile, ne pâtissent pas de la fusion avec le régime général. Ces salariés ont tenté de pallier au mieux les difficultés rencontrées, ont tenu à traiter sérieusement les demandes des cotisants, et ils n'ont pas à souffrir de la disparition d'un dispositif mal ficelé.
Nous souhaitons protéger les salariés du RSI de toute mobilité géographique forcée, et nous demandons une application circonstanciée en fonction des régions et de la durée des temps de transports. Si la création du RSI a été difficile, tâchons qu'il n'en aille pas de même de sa suppression.
Votre amendement pose plusieurs problèmes.
Des problèmes de rédaction tout d'abord, parce que vous parlez de bassins d'emplois sans préciser desquels il s'agit. Il faudrait préciser qu'il s'agit du bassin d'emplois où se situe le lieu de travail des salariés du RSI.
Vous écrivez ensuite que les salariés doivent être transférés : « prioritairement dans le bassin d'emploi » ; il s'agit donc d'une simple priorité et pas d'une garantie. Ainsi, les salariés pourraient en principe être reclassés n'importe où. Votre amendement est donc moins favorable que le texte proposé, ce qui, je n'en doute pas, n'est pas votre intention première.
Enfin, quand bien même votre amendement serait correctement rédigé, le Gouvernement s'est engagé fortement pour que, dans le processus d'affectation des personnels du RSI, les contraintes pouvant peser sur eux en termes de temps de déplacement soient bien prises en compte. La lettre cosignée par la ministre des solidarités et de la santé et le ministre de l'action et des comptes publics l'a rappelé.
À trop restreindre le périmètre, on risque de restreindre les solutions de reprise possibles. Avis défavorable.
Sur ce sujet de la mobilité, une attention toute particulière doit être portée au personnel du RSI dans les outre-mer. Les mobilités depuis La Réunion vers une ville de la métropole seraient extrêmement compliquées pour les salariés.
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement AS261 de M. Thomas Mesnier.
Par cet amendement, nous souhaitons faciliter le paiement des cotisations pour les indépendants en favorisant la faculté d'estimation de ces cotisations.
L'article L. 131-6-2 du code de la sécurité sociale précise le principe du calcul des cotisations dues par les travailleurs indépendants non agricoles ne relevant pas du statut du micro-entrepreneur : elles sont calculées à titre provisionnel sur les revenus de l'avant-dernière année, puis régularisées sur la base du revenu d'activité définitif de la dernière année.
Le même article prévoit la possibilité pour un travailleur indépendant qui anticipe une baisse ou une hausse de son activité de demander la prise en compte d'une estimation pour le calcul de ses cotisations provisionnelles. Néanmoins, en cas d'écart trop important entre le montant de revenu estimé et celui finalement constaté, le travailleur indépendant est redevable d'une majoration de retard.
Nous souhaitons revenir sur ce principe, et favoriser cette faculté d'estimation des revenus annuels en supprimant cette sanction pour les deux années à venir.
Avis favorable. Suspendre tout système de sanction pendant deux ans devrait permettre d'améliorer le taux de personnes ayant recours à ce dispositif, qui est seulement de 10 % aujourd'hui alors qu'il devrait être bien supérieur.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine l'amendement AS398 du rapporteur général.
Il s'agit simplement de prolonger de six mois la durée d'expérimentation relative à la modulation des acomptes de cotisations et contributions sociales dues par les travailleurs indépendants, de façon à améliorer la qualité du service et mettre fin au décalage temporel existant entre leur activité et les prélèvements de cotisations sur le revenu que génère cette activité.
Un an semblait un peu court, un délai d'un an et demi semble plus adapté.
Cet amendement confirme que nous ne sommes pas certains de pouvoir réaliser ce transfert total du RSI vers le régime général. Si les prestations ne posent pas de problèmes, ce n'est pas le cas du recouvrement. Si vous prolongez la durée d'expérimentation, c'est parce que vous avez peu confiance dans le résultat de l'année à venir.
Non, monsieur Door. Ce qui est prévu à titre expérimental, c'est de permettre aux travailleurs indépendants d'acquitter leurs cotisations et contributions sociales sur une base mensuelle ou trimestrielle, établie en fonction de leur activité ou de leurs revenus mensuels ou trimestriels.
Cela rejoint l'amendement déposé par votre groupe et discuté précédemment. Mais tandis que vous proposiez de faire cela dans le cadre du RSI, nous proposons de le faire dans le cadre du régime général. La durée de l'expérimentation, un an, ne semble pas suffisante pour avoir un retour exhaustif sur les données.
Cela n'a aucun rapport avec la capacité à transférer au régime général, je tiens à vous rassurer.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine l'amendement AS339 de M. Joël Aviragnet.
J'ai bien entendu que plusieurs mesures sont prévues pour accompagner cette réforme du RSI. Il n'en demeure pas moins qu'au regard des problèmes de gestion que cette suppression risque d'entraîner, une évaluation permettrait d'avoir une analyse précise des effets de cette mesure, alors que lors de sa création, le RSI avait connu des difficultés opérationnelles importantes.
Cette évaluation permettrait aussi d'avoir une vision précise du sort réservé aux 6 000 salariés du RSI qui assurent sa gestion au quotidien.
Le Président de la République a expliqué, notamment dans le discours qu'il a prononcé devant le Congrès, qu'il souhaitait que les parlementaires soient davantage investis dans leur mission d'évaluation et de contrôle.
Évaluer le transfert du RSI vers le régime général fait partie de nos prérogatives dans le cadre de cette mission de contrôle. Plutôt que de demander au Gouvernement de produire un rapport, je pense que les parlementaires sont capables de le faire eux-mêmes. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 11, modifié.
Après l'article 11
La commission est saisie de l'amendement AS22 de Mme Marine Brenier.
Cet amendement vise à supprimer une mesure discriminatoire pour les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME), dont les associés sont majoritairement affiliés au RSI, et le seront au futur régime, et à imposer les dividendes versés au régime de droit commun.
Il s'agirait d'un geste fort au bénéfice des TPE, donc des artisans et commerçants. Beaucoup de TPE et PME ont choisi de se transformer en société par actions simplifiées unipersonnelle (SASU) ou société par actions simplifiée (SAS) afin d'éviter cette taxation, ce qui rend le droit existant inefficace, mais également inique pour certaines sociétés à responsabilité limitée (SARL) majoritaires qui se voient surtaxées.
Nous proposons donc de mettre fin à cette mesure discriminatoire et de revenir au droit commun.
Madame Brenier, ne prenez pas mal ma boutade, mais si vous avez compris cet amendement, ne prenez pas le volant…
Nous avons essayé d'analyser le texte avec les administrations centrales pour en comprendre tous les tenants et aboutissants. Je n'ose vous exposer les motifs pour lesquels je demande le rejet de cet amendement, mais je suis disposé à les détailler si vous le souhaitez. Je vous assure que ce mécanisme est extrêmement compliqué et alambiqué. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement AS24 de Mme Marine Brenier.
Il s'agit d'un autre amendement pour défendre les TPE et les PME. Celui-ci sera certainement plus facile à comprendre, puisqu'il vous est proposé de rétablir la déductibilité de 10 % pour frais professionnels pour les gérants majoritaires de ces entreprises.
La suppression de l'abattement des 10 % pour les indépendants affiliés au RSI est fondée sur l'hypothèse fausse que les gérants majoritaires imputent déjà les frais leur incombant personnellement du domicile à leur lieu de travail au travers de la société. Mais c'est faux, car l'administration fiscale n'admet pas la déductibilité de ces frais, qui sont personnels et n'ont pas à figurer dans les frais généraux des sociétés.
C'est pourquoi cet amendement vise à rétablir un traitement juste et asseoir les cotisations sur la base d'un revenu disponible, et non rehausser l'assiette des cotisations sociales sur les frais supportés par les dirigeants de TPE et PME.
Cet amendement est le même que le précédent, amputé de sa seconde partie.
Pour répondre sur le fond à cet amendement et au précédent, il s'agirait en substance de ressortir de l'assiette des cotisations sociales des indépendants certains éléments qui y ont été réintroduits afin de lutter contre des stratégies d'optimisation. Par exemple, la déduction des frais professionnels de 10 %, qui s'appliquait pour les assiettes sociales comme en matière fiscale, aboutissait à une double déduction de frais, pour un coût estimé à 500 millions d'euros. Autre exemple, les cotisations sociales de prévoyance facultative, dites « Madelin », d'un coût d'un milliard d'euros. Ou encore les dividendes perçus au-delà de 10 % du capital social lorsque l'activité indépendante s'exerce en société. En substance toujours, il arrivait que des rémunérations soient déguisées en dividendes, et ainsi assujetties à l'impôt sur le revenu mais pas aux cotisations sociales. En plafonnant les dividendes déductibles, ces stratégies sont limitées. Le coût de cette pratique était d'au moins 100 millions d'euros.
J'appelle donc au rejet de cet amendement.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS131 de Mme Marine Brenier.
Nous allons en terminer avec cette série d'amendements. Celui-ci tend à protéger le régime des autoentrepreneurs en empêchant les Urssaf de taxer les sommes versées par les clients au régime général de la sécurité sociale. En effet, les Urssaf essaient de plus en plus de remettre en cause le régime des autoentrepreneurs, ce qui créée une insécurité juridique très forte.
C'est pourquoi cet amendement va encore une fois dans le sens d'une plus grande protection du statut des autoentrepreneurs. On ne peut pas vouloir relancer l'économie du pays en favorisant l'esprit d'entreprise et d'innovation, et d'un autre côté entraver l'utilisation, par les citoyens, des possibilités qu'offrent ces statuts. Cette situation impose une clarification de notre part.
Cet amendement aborde un sujet intéressant : la frontière entre micro-entrepreneur et salariat. Toutefois, il interdit tout simplement aux Urssaf de procéder à des contrôles liés au travail illégal dès lors que la personne aurait payé ses cotisations de micro-entrepreneur.
Cela ne revient plus à présumer que le travailleur indépendant est de bonne foi, comme le prévoit le droit en vigueur, mais à affirmer que toute fraude est impossible. Tout contrôle deviendrait impossible. De plus, ce serait renoncer à une protection pour ces faux indépendants, qui se voient parfois imposer leur forme de travail.
Cet amendement paraît excessif, et je vous propose de le retirer. À défaut, avis défavorable.
Cet amendement propose d'inscrire dans le code de la sécurité sociale l'impossibilité de remettre en cause l'appartenance de travailleurs indépendants au régime micro social, notamment s'il s'agit d'une requalification en contrat de travail.
Si l'on ne peut plus remettre en cause, on ne peut plus effectuer de contrôles.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement AS170 de Mme Agnès Firmin Le Bodo.
Les praticiens conventionnés bénéficient d'un régime d'assurance maladie spécifique, institué par les articles L. 722-1 et suivants du code de la sécurité sociale. Ce régime spécial, lié au conventionnement des praticiens et auxiliaires médicaux libéraux, est adossé au régime général.
Cependant, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a modifié l'article L. 612-3 du code de la sécurité sociale, en augmentant le taux de cotisations de 0,1 % à 3,25 %, et en modifiant l'assiette de calcul, basée sur les revenus liés à l'activité non-conventionnée et aux dépassements d'honoraires.
En médecine bucco-dentaire, il n'y a pas de dépassements, mais un complément d'honoraires, appelé entente directe, justifié par la stagnation des tarifs des soins dits « opposables » au cours des dernières décennies, mais surtout par le blocage des bases de remboursement des prothèses et des traitements d'orthopédie dentofaciale depuis 1988.
Cette situation conduit à un désengagement de l'Assurance-maladie pour les soins bucco-dentaires, les bases de remboursement de ces actes n'ayant plus aucune réalité économique. Désormais, les cotisations au RSI et au régime des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés sont identiques, il n'y a donc plus aucune raison de conserver une contribution additionnelle, insérée pour les seuls bénéficiaires du régime des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés, qui renchérit leurs cotisations sans cause réelle.
Qui plus est, depuis le 1er avril 2017, un règlement arbitral s'applique pour les chirurgiens-dentistes, fixant des plafonds à la quasi-totalité des actes à entente directe. Une nouvelle négociation est certes ouverte depuis le 15 septembre, avec pour objectif de s'accorder sur une nouvelle convention qui remplacera le règlement arbitral. Mais les orientations du ministère sont claires dans le maintien du principe de plafonnement.
L'amendement propose donc de supprimer cette taxe récente, qui introduit une rupture d'égalité dans les cotisations payées par les professionnels de santé exerçant le même métier et bénéficiant de prestations d'assurance-maladie similaires.
Votre amendement est similaire à l'amendement AS18 de Mme Brenier, qui n'a pas été adopté. J'y serai également défavorable.
La cotisation de 3,45 % est assise uniquement sur les dépassements d'honoraires et permet de limiter ces dépassements, donc de favoriser l'accès aux soins.
La question des dentistes sera abordée plus tard. Le règlement arbitral qui s'était appliqué, faute de négociations, sous le Gouvernement précédent, ne s'appliquera pas. Nous proposerons que son application soit reportée pour permettre au dialogue conventionnel entre les syndicats de dentistes, l'Assurance-maladie et les complémentaires d'aboutir à une conclusion prenant en compte le fait que les pratiques dentaires ont évolué, que les tarifs n'ont pas été augmentés depuis des années, et que des actes plus anciens qui ne sont quasiment plus pratiqués sont mieux valorisés que des actes plus innovants. Tout cela relève du dialogue conventionnel, avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
La commission est saisie de l'amendement AS30 de M. Martial Saddier.
Cet amendement soulève le débat de la pluriactivité, indispensable notamment aux territoires de montagne. Beaucoup de villages en montagne n'existeraient tout simplement plus sans le statut particulier existant pour les pluriactifs, en particulier dans les métiers spécifiques de la montagne. Vous avez accepté tout à l'heure un amendement sur les guides de haute montagne ; il faudra voir d'ici à la séance si les accompagnateurs et les moniteurs n'ont pas été oubliés. En ce qui concerne le régime d'assurance vieillesse, les pluriactifs, notamment les moniteurs, sont rattachés aux professionnels libéraux, soumis à une cotisation minimale forfaitaire. L'activité des moniteurs de ski est sujette à des aléas : pics de saisonnalité – les vacances scolaires –, conditions climatiques… Ces pluriactifs n'ont pas de difficulté à faire valider les trimestres nécessaires tout au long de l'année. C'est pourquoi les différentes majorités les avaient exonérés de cette cotisation minimale forfaitaire pour en rester à un régime de cotisation au premier euro. Toutefois, en 2016, celle-ci a fait place à un régime forfaitaire. Le présent amendement est très général, portant sur les professionnels libéraux, et le suivant concernera spécifiquement les moniteurs de ski.
Il s'agit à nouveau d'un amendement d'une très grande complexité, mais ce n'est pas de votre faute, c'est parce que le dispositif a évolué par strates et est devenu un magma peu lisible. Bien que vous visiez principalement les moniteurs de ski, cet amendement couvre en fait la totalité des professions libérales affectées à la Caisse, et il n'est pas certain que toutes les professions souhaitent bénéficier de la mesure que vous proposez. Depuis 2014, avec entre autres l'article 26 de la loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, dite « ACTPE », l'article 9 de la LFSS pour 2015 et le décret du 16 juillet 2015, et l'article 21 de la LFSS pour 2016, les choses ont énormément bougé. Je vous invite à redéposer votre amendement en séance pour interpeller le Gouvernement.
L'amendement est retiré .
La commission examine ensuite l'amendement AS29 de M. Martial Saddier.
Merci, monsieur le rapporteur général, de n'avoir pas complètement fermé la porte. Je sais bien que, depuis le mois de juin, plus rien ne doit être fait comme avant, mais je rappelle que, pendant cinquante ans, sur quelques sujets, notamment ceux relatifs aux spécificités de la montagne, l'ensemble de la représentation nationale a été unanime, c'est le cas pour les moniteurs de ski. Si vous présentiez un amendement précisant le mien, je n'y verrais que des avantages.
Avis défavorable. La dispense n'est pas nécessaire car les moniteurs de ski peuvent relever du dispositif microsocial et ne pas acquitter de cotisations minimales. Ouvrir une dispense de cotisations minimales conduirait au contraire à créer un avantage dans le champ du régime au profit des seuls moniteurs de ski pluriactifs – salariés ou exploitants agricoles –, tandis que ceux qui exerceraient à titre indépendant pour toutes leurs activités professionnelles resteraient soumis à ces cotisations.
La commission rejette cet amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS236 de M. Jean-Hugues Ratenon.
La croissance exponentielle du nombre de travailleurs indépendants cache mal l'émergence d'un salariat déguisé, véritable casse-tête pour les juristes du travail. Les travailleurs de plateforme ont vu leur nombre exploser, à l'image des coursiers pressés que nous croisons partout dans les grandes villes. Ce qu'il est convenu d'appeler « uberisation » et que nous considérons comme une augmentation du nombre de travailleurs en situation de dépendance économique, donc de faux indépendants, doit nous interroger sur l'avenir de notre système de protection sociale. Soit nous laissons ce type d'emploi se développer, réduisant les retraites de la sécurité sociale tout en contribuant au développement d'un sous-salariat sans droits, soit nous prenons la mesure du phénomène et les décisions adéquates. La requalification en salariat des travailleurs en situation de dépendance pourrait en être une. Le coût pour les finances sociales d'une évolution aussi rapide et incontrôlée mériterait un rapport.
Ma réponse sera la même que pour les autres demandes de rapport. Pour les seules années 2016 et 2017, il y a eu à ce sujet un rapport de l'IGAS de mai 2016 relatif au salariat à l'épreuve des plateformes collaboratives, dont l'article 10 du présent projet reprend certaines propositions, un rapport du Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFPS) sur la protection sociale des non-salariés, en janvier 2017, et une étude de la DARES d'août 2017 sur l'économie des plateformes. Les sources d'information sont donc déjà nombreuses. Je vous invite à retirer l'amendement.
Je le maintiens car je ne suis pas certaine qu'un rapport existe sur les cotisations sociales.
La commission rejette cet amendement.
Elle en vient ensuite à l'amendement AS237 de M. Jean-Hugues Ratenon.
Les contours de la mise en oeuvre opérationnelle de la suppression du RSI appellent à la vigilance quant aux impacts juridiques de ce changement sur les contrats de travail des salariés. C'est pourquoi nous demandons la remise d'un rapport afin de savoir ce qu'il adviendra de la protection sociale des indépendants.
Avis défavorable, d'autant plus que le délai prévu est de six mois alors que la période transitoire doit s'achever dans deux ans : il faudrait donc évaluer le dispositif après un quart à peine de la période transitoire…
La commission rejette cet amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS363 de M. Julien Aubert.
Nous demandons un rapport du Haut conseil du financement de la protection sociale (HCFPS) sur les cotisations sociales des personnes non salariées. J'étais membre du Haut Conseil sous la précédente législature : il dispose d'informations et d'analyses très précises et détaillées.
Avis défavorable. L'article 7 du projet de loi permet des gains de pouvoir d'achat pour 75 % des travailleurs indépendants : 270 euros par an pour un indépendant au SMIC, 550 euros par an pour un indépendant gagnant 2 400 euros, soit deux SMIC, en un mot pour tous les indépendants dont les revenus annuels nets sont inférieurs à 43 000 euros. Nous n'avons pas besoin de rapport : les bonnes nouvelles sont dans la loi !
La commission rejette cet amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement AS365 de M. Julien Aubert.
J'aimerais partager l'optimisme du rapporteur général quant aux gains des indépendants. Un certain nombre de personnes ont beaucoup souffert ces dernières années des dysfonctionnements du RSI et, même si j'ai le sentiment que les choses sont en train de s'améliorer, elles en subissent encore les conséquences aujourd'hui car tous les dossiers ne sont pas complètement réglés. Nous demandons donc que le Gouvernement remette au Parlement un rapport qui étudie les conditions de la création d'un fonds d'indemnisation des cotisants au régime social des indépendants ayant subi un préjudice en raison de dysfonctionnements du RSI.
En 2012, la Cour des comptes évoquait une « catastrophe industrielle » au sujet de l'interlocuteur social unique (ISU) créé en 2008 sous un autre gouvernement. Ce sont en effet 1,5 milliard d'euros de cotisations auxquelles le régime a dû renoncer parce que tout dysfonctionnait. L'objet de la suppression du RSI est aussi de tourner cette page. Aujourd'hui, les dysfonctionnements, qui ne sont pas acceptables, sont en général réparés, même avec retard, et l'adossement au régime général s'accompagnera d'une réflexion sur ce qui s'est passé afin d'éviter de répéter les mêmes erreurs. Avis défavorable.
Je vous remercie d'indiquer que les dysfonctionnements sont réparés « en partie » : car ils ne le sont pas tous, même si je perçois une évolution positive depuis quelques mois. Et c'est au moment où les choses vont beaucoup mieux que l'on interrompt le processus.
La commission rejette cet amendement.
Chapitre III DISPOSITIONS RELATIVES À LA FISCALITÉ COMPORTEMENTALE
Article 12 : Augmentation des droits de consommation applicables au tabac et engagement du rattrapage de la fiscalité applicable en Corse
La commission est saisie des deux amendements identiques AS62 de M. Jean-Pierre Door et AS132 de Mme Isabelle Valentin.
Le tabac n'est pas un produit comme les autres : sa consommation constitue aujourd'hui, et de loin, la première cause de mortalité évitable en France, avec environ 73 000 décès chaque année, soit 200 morts par jour. Il est actuellement responsable de plus d'un décès sur cinq chez les hommes. La baisse du tabagisme, en particulier chez les jeunes, est un enjeu de santé public majeur, il y a consensus sur cela.
Pour autant, nous arrivons à un tournant. Alors que notre pays pratique des prix très sensiblement supérieurs à ceux des pays voisins, un marché parallèle très important s'est installé, pour environ 27 % des ventes, et il rend de moins en moins opérantes les mesures que nous prenons pour lutter contre le tabagisme. La nouvelle hausse proposée, comme le paquet neutre en son temps, n'aura vraisemblablement pas d'impact, ou très peu, sur la consommation de tabac.
La priorité absolue, si l'on veut retrouver de l'efficacité, c'est de lutter réellement contre le trafic parallèle. Pour cela, comme le rappelle Éric Woerth, président de la commission des finances : « La seule façon de lutter contre le marché parallèle du tabac, c'est la traçabilité. Il suffit de mettre en application la convention de l'OMS. » C'est pour ces raisons que nous proposons de supprimer cet article.
Le tabac est un fléau. Avec 66 000 décès chaque année en France, l'enjeu est de taille. Le tabac coûte environ dix milliards d'euros aux finances publiques.
Ces derniers temps, la profession de buraliste a trop souvent été attaquée par des mesures défavorables à son activité – paquet neutre, augmentation des prix, etc. –, qui coûtent cher, qui n'ont jamais démontré leur efficacité et qui ont eu au contraire des effets pervers, avec le développement du marché parallèle, qui représente aujourd'hui 30 % des ventes.
La réalité est que ces dispositions ont contraint de nombreux buralistes de nos communes, souvent rurales, à fermer leurs établissements. Or, ils forment notre tissu économique de proximité, ils sont, dans nos communes, les figures du lien social, ils incarnent des valeurs qui peuvent nous rassembler : le travail, le mérite, l'esprit d'entreprise. Il faut donc les accompagner et non les stigmatiser.
Je vous propose des mesures concrètes pour lutter contre le tabagisme sans mettre en péril l'activité des buralistes : un grand plan de prévention, une harmonisation européenne des prix, une intensification des contrôles de la vente parallèle. Elles permettront à l'État de récupérer le manque à gagner important pour nos buralistes, qui souhaitent vivre de leur métier, et à nos concitoyens de prendre conscience des méfaits du tabac. Cet amendement vise donc à supprimer l'article 12.
L'augmentation du prix de paquet de cigarettes à dix euros en trois ans est un engagement présidentiel. Un engagement courageux car ce sera la plus forte augmentation depuis que la cigarette existe dans notre pays. C'est un engagement de santé publique majeure. On ne sauve pas des vies en luttant contre la contrebande mais en luttant contre le tabagisme, en augmentant le prix du tabac. Avec le passage du prix de 3,60 euros à 5 euros entre 2002 et 2004, 1,5 million de fumeurs ont arrêté de fumer. Aujourd'hui, 200 personnes meurent encore chaque jour du tabac dans notre pays : ce sont donc 73 000 morts directement causées par le tabac chaque année, sans compter les innombrables maladies cardiovasculaires, les AVC, les infarctus, les cancers…
Vous avez raison de souligner qu'il faut travailler à une harmonisation des prix au niveau européen et lutter efficacement contre la contrebande. Le Gouvernement prend des dispositions : création de 200 postes supplémentaires dans l'administration des douanes, nouveau cadre de traçabilité, opérationnel dès 2019, coordination des parquets, fonds de prévention du tabagisme doté de plus de 100 millions d'euros en 2017, le « mois sans tabac » qui va démarrer le 1er novembre, les mesures du plan cancer… Il faut aussi des dispositifs d'accompagnement des jeunes : dire à un adolescent de seize ans que fumer va le tuer ne le dissuadera pas, on doit expliquer aux plus jeunes comment le tabac bouche les artères, provoque des mutations cellulaires et des cancers. Les pays qui ont réussi à lutter efficacement contre le tabagisme des jeunes, comme l'Allemagne et surtout l'Australie – 2,5 % des jeunes fument en Australie contre près de 25 % en France –, ont mené des campagnes de prévention proactives. Il n'empêche qu'une augmentation importante du prix du paquet de cigarettes sauve des vies, on le sait.
Je demande donc le retrait de ces amendements. Nous devons débattre de la façon dont assortir l'augmentation du prix de mesures opérationnelles, y compris pour les buralistes, que j'ai reçus ici pour discuter des reconversions professionnelles car on ne peut poursuivre l'objectif de mettre un terme au tabagisme et vouloir en même temps aider les buralistes à se maintenir cette activité. L'objectif doit être d'accompagner les buralistes vers d'autres commerces de proximité.
Il faut certes de la prévention. Le paquet à dix euros ne dissuadera pas les gens car ils commanderont des cigarettes sur internet, et cela développera le marché parallèle.
Le groupe majoritaire votera contre ces amendements de suppression. Outre que c'était un engagement fort de la campagne présidentielle, c'est la première mesure de prévention dans l'examen de ce PLFSS. Depuis dix ans, les augmentations faibles et successives n'ont eu aucun effet majeur sur la diminution du nombre de consommateurs, alors que le tabac, qui représente un coût de 14 milliards pour la société et qui tue 200 personnes chaque jour, est la première cause de décès évitable. Certes, la hausse est majeure mais le calendrier permet à chacun de se mettre dans la perspective d'arrêter. C'est une mesure essentielle de santé publique et, parallèlement, nous soutenons bien sûr les actions de lutte contre la contrebande et de reconversion des buralistes.
Les taxes sur le tabac ont été le moyen pour les gouvernements successifs d'accroître les recettes de la sécurité sociale. Si cet argent ne sert pas à renforcer les actions de prévention, cela créera un hiatus.
La mesure va frapper inégalement la population selon ses revenus. Les plus défavorisés en seront les principales victimes, frappés au porte-monnaie. Cela n'enlève rien à l'enjeu de santé publique mais je me demande si une mesure aussi aveugle n'est pas inéquitable, donc problématique.
En tant qu'élus, nous devons prendre toutes nos responsabilités en utilisant les leviers les plus efficaces contre ce fléau, et il a été démontré et redémontré que le prix est l'élément essentiel permettant la baisse de la consommation. Affirmer le contraire est d'ailleurs assez dangereux.
Quand le Président Jacques Chirac a souhaité prendre des décisions fortes pour réduire le nombre de morts sur la route, on entendait objecter que les verbalisations, les radars étaient des impôts déguisés. Eh bien, ça a été un succès. Je crois d'ailleurs que ceux qui, aujourd'hui, nient que le prix du tabac soit un élément essentiel dans la baisse de la consommation étaient fort optimistes avec le plan du Président Chirac.
Selon les études, l'augmentation progressive du prix du paquet de cigarettes ne montre pas un arrêt spectaculaire de la pratique, car la hausse est à un moment donné budgétisée. Nous sommes tous d'accord pour dire que le tabac est un fléau et qu'il faut trouver des solutions. La prévention, cela commence par aider les personnes qui n'ont pas autant de moyens pour arrêter de fumer, c'est-à-dire par rembourser les substituts nicotiniques. Une fois que cela aura été fait, augmentons le prix du paquet de cigarettes, d'un seul coup.
Selon un rapport de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies de septembre 2015, le coût social du tabac est de 122 milliards d'euros. Il faut sortir du discours sur les recettes fiscales du tabac. J'appelle votre attention sur le nombre d'amendements de réduction des recettes fiscales, déposés par tous les groupes, qui sont gagés par une augmentation des taxes sur le tabac : attention à l'ambivalence vis-à-vis de cet outil fiscal. Ensuite, si demain il n'y avait plus de fumeurs dans ce pays, ne considérez pas une seule seconde que l'État perdrait de l'argent, car le coût social du tabac est énorme.
Son coût humain, le plus important bien sûr, l'est tout autant. On estime que l'augmentation du paquet à dix euros réduira de 15 % la consommation de tabac. Chaque jour, ce sont plusieurs personnes qui ne mourront plus à cause du tabac.
Les consultations de tabacologues sont remboursées. Certains substituts nicotiniques de sevrage le sont aussi, la présentation de leur emballage a d'ailleurs été améliorée.
Un débat est en cours au sujet de la façon de consommer autrement de la nicotine, notamment au moyen de la cigarette électronique, j'ai ici même interpellé Mme la ministre à ce propos. Des études montrent que la cigarette électronique permet à beaucoup de personnes en France et en Europe d'arrêter le tabac ; nous devons poursuivre notre réflexion, mais cela ne doit pas nous empêcher d'adopter cette mesure courageuse d'augmentation massive du prix du paquet de cigarettes.
La commission rejette les amendements identiques.
Elle étudie ensuite l'amendement AS392 du rapporteur général.
Je rétablis le ministère de la santé dans ses droits en le faisant cosignataire de l'arrêté de revalorisation des parts spécifiques et des minima de perception, ce qui lui avait été retiré au profit du seul ministère du budget.
La signature conjointe des deux ministres me paraît constituer un signal assez fort.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 12 modifié.
Article 13 : Verdissement de la taxe sur les véhicules de société
La commission examine l'amendement AS266 de M. Francis Vercamer.
Les flottes de véhicules de sociétés en France sont équipées à 90 % de moteurs diesel. Afin de lutter plus efficacement contre le changement climatique, il faut remplacer ces véhicules carburant aux énergies fossiles par des voitures carburant aux énergies renouvelables.
Le superéthanol contient entre 65 % et 85 % de bioéthanol, et réduit d'au moins 50 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport aux carburants fossiles. Promouvoir le recours au bioéthanol contribue à la réduction des émissions de gaz à effet de serre ainsi qu'à l'amélioration de la qualité de l'air.
Cet amendement propose donc l'octroi de l'exonération de la taxe sur les véhicules de société (TVS) pendant une période de douze trimestres pour les véhicules fonctionnant au superéthanol, comme cela existe déjà pour les véhicules fonctionnant au gaz naturel et au gaz de pétrole liquéfié (GPL).
Cette mesure permettrait également de répondre aux objectifs de réduction de CO2 et de particules fines émises par les flottes de véhicules de société.
Vous proposez d'inclure dans le champ de l'exonération de la taxe sur les véhicules de société les véhicules carburant au bioéthanol, sur le principe, je dirais : pourquoi pas ?
Hélas votre dispositif pose problème, car il renvoie à l'article 1011 bis du code général des impôts qui correspond à la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d'immatriculation. Par ailleurs, cette rédaction n'est pas complètement opérationnelle puisqu'il existe des kits permettant de transformer une voiture essence en une voiture « flex-fuel » compatible avec l'usage de superéthanol, ne donnant aucune garantie à l'administration sur l'utilisation de tel ou tel carburant.
Je vous suggère de retirer cet amendement, et de le reprendre en vue de la séance publique afin que nous puissions en débattre avec le Gouvernement.
S'agissant des émissions polluantes des véhicules automobiles, l'attention est toujours focalisée sur le CO2, il ne faut toutefois pas négliger les diverses microparticules émises par le bioéthanol.
Cet amendement est retiré.
La commission en vient à l'examen de l'amendement AS274 de Mme Caroline Fiat.
La TVS a pour objet de limiter les émissions de CO2 afin de lutter contre la pollution atmosphérique et le réchauffement climatique. Ce combat doit être mené de façon urgente à une grande échelle.
Pour autant, la transition souhaitée par le Gouvernement ne va pas dans le bon sens. Vous souhaitez encourager l'achat de véhicules électriques ou hybrides qui nécessitent le recours aux terres rares, et dont l'empreinte écologique est considérable dès lors que l'on prend en compte les coûts de fabrication, d'utilisation, de recyclage et de démantèlement.
Votre orientation demeurera avantageuse pour les constructeurs automobiles ainsi que pour le secteur du bâtiment et travaux publics. Par ailleurs, cet article favorise les grandes entreprises qui disposent des moyens de s'équiper de véhicules hybrides ou électriques, et défavorise les plus petites.
Notre objectif est de mettre fin au culte de la voiture, nocive pour l'environnement et la santé. Nous voulons engager une stratégie nationale déterminée en faveur des transports collectifs et des modes de transport doux, et diminuer les inégalités.
Notre amendement vise ainsi à flécher les recettes issues de la TVS vers le soutien aux entreprises désireuses de faire bénéficier leurs employés des transports collectifs et des modes doux. Il s'agit de mettre un terme à la casse des transports publics collectifs en favorisant l'accès au transport en autocar, trains express régionaux (TER), trains Intercités, TGV, bus, tramway, métro pour les employés. Nous voulons rendre les transports accessibles aux personnes à mobilité réduite, développer les itinéraires cyclables et favoriser les vélos à assistance électrique.
Catastrophe, madame Fiat ! Car vous proposez d'affecter les recettes de TVS à un fonds de soutien à la transition des transports collectifs. Dès lors, ses recettes sortiraient complètement du champ de la sécurité sociale, et creuseraient d'autant l'équilibre de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), aujourd'hui affectataire de la TVS, en la privant 900 millions d'euros par an.
Au regard de ces conséquences financières, et non pas de votre demande de rapport, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 13 sans modification.
Après l'article 13
La commission se saisit de l'amendement AS99 de M. Jean-Pierre Door.
Cet amendement vise à faire évoluer le parc automobile français dans l'esprit des engagements pris lors de la COP21.
Il convient de développer l'usage des véhicules à faibles émissions de substances polluantes ; or, 50 % des véhicules achetés chaque année sont des véhicules de société. Les salariés utilisant ces véhicules bénéficient d'un avantage en nature assujetti à cotisations, alors que le coût d'un véhicule de ce type est supérieur à celui d'un véhicule conventionnel. Le salarié se voit donc ainsi pénalisé.
Afin de favoriser l'évolution de notre parc automobile, il est prévu un abattement spécifique sur le montant de rémunération à prendre en compte au titre de l'avantage en nature constitué par l'utilisation privée de véhicules de sociétés dont le taux d'émission de dioxyde de carbone est inférieur à 60 grammes par kilomètre.
L'intention est louable, mais je ne suis pas convaincu par le dispositif proposé.
Sur le principe : vous proposez la création d'une niche sociale allant à l'encontre de la préservation de l'assiette de prélèvements sociaux, sur laquelle il serait difficile de revenir par la suite. Je rappelle que l'intégration des avantages en nature dans l'assiette des cotisations se justifie par l'économie de frais de transport effectuée par le salarié pour se rendre sur son lieu de travail.
Votre amendement conduirait le salarié à prendre une voiture électrique en location de longue durée ou en leasing, ce qui lui conférerait directement des avantages, alors que le fait de bénéficier de la location de longue durée d'un véhicule constitue déjà un avantage.
Par ailleurs, nous venons d'adopter le principe du verdissement du parc automobile des sociétés avec l'article 13.
Pour ces raisons, mon avis est défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement AS412 du rapporteur général.
Cet amendement porte sur un sujet qui me tient à coeur comme à beaucoup de nos collègues, je souhaiterais que nous l'abordions de façon rigoureuse.
La loi de finances pour 2012 a créé une contribution sur les boissons rafraîchissantes sans alcool, créant ainsi deux niveaux de taxation. Le premier est un droit d'accise touchant toutes les boissons non alcoolisées, y compris celles ne comportant pas de sucre, qui rapporte environ 80 millions d'euros aux organismes de sécurité sociale. Le second est une contribution portant spécifiquementsur les boissons sucrées, quel que soit leur taux de sucre.
Une étude récente de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a montré que l'obésité des enfants a été multipliée par 10 en quarante ans. Or, nous savons que, parmi les facteurs d'obésité et de diabète de type 2, figure la consommation de boissons rafraîchissantes sans alcool, c'est-à-dire des sodas, des boissons sucrées, voire extrêmement sucrées, contenant des ajouts directs de sucre, et dont l'apport calorique est considérable sans pour autant conduire à la satiété. Ces sucres et calories viennent ainsi s'ajouter à l'alimentation habituelle des enfants.
L'OMS enjoint les États membres à agir afin de réduire ces apports sucrés provenant de sodas et autres boissons rafraîchissantes sans alcool. Un certain nombre de pays l'ont déjà fait, en prenant des mesures – que l'on me passe cette expression – plus intelligentes, pragmatiques et efficaces que la fiscalité existant aujourd'hui dans le droit français. L'Angleterre par exemple a adopté une disposition applicable dès le mois d'avril prochain ; je vous propose de moduler la fiscalité existante afin de la faire évoluer vers un système à peu près similaire.
Il ne s'agit donc pas de créer une nouvelle taxe comportementale, mais de rebattre les cartes de la taxe existante, et de la moduler de façon à ce qu'elle soit de nature à inciter les industriels à réduire le taux de sucre de leurs boissons. S'ils réduisent ce taux, ils doivent être récompensés par une baisse de la fiscalité, s'ils ne le baissent pas ou l'augmentent, ils prennent acte des conséquences de leurs pratiques sur la population de notre pays, et subissent une pression fiscale plus importante.
Nous proposons en premier lieu de supprimer le droit d'accise sur les boissons ne contenant pas de sucre, ou dont le taux de sucre est inférieur à 5 grammes par 100 millilitres ; car cette taxation n'a aucun sens au regard des impératifs de santé publique que je viens d'évoquer.
En ce qui concerne les boissons contenant entre 5 grammes et 8 grammes de sucre par 100 millilitres, il est proposé de ne pas modifier le niveau de taxe existant soit environ 2 centimes pour une canette de soda de 33 centilitres, ce que suggère d'ailleurs notre collègue, Mme Nathalie Elimas, pour le groupe Mouvement Démocrate et apparentés, ce dont je la remercie.
Il est ensuite proposé de doubler le droit d'accise pour les boissons comportant entre 8 grammes et 10 grammes par 100 millilitres. Au-delà de 10 grammes – ce qui concerne quelques sodas et boissons extrêmement sucrées –, c'est le triplement du montant de la taxe qui est proposé.
Encore une fois, si l'industriel réduit le taux de sucre, il sera fiscalement encouragé en retour. Une étude réalisée au Mexique a montré que l'augmentation de la fiscalité a été entièrement répercutée par les producteurs sur le prix de vente des boissons concernées, ce qui a entraîné un effet dissuasif sur le consommateur. L'étude montre la courbe de l'évolution de consommation de sodas, avec 70 % de jeunes atteints d'obésité, puis l'évolution à la baisse très sensible de cette consommation, accompagnée d'une très forte augmentation de la consommation de boissons sans sucre. L'effet sanitaire sur la population est donc majeur.
Une autre étude réalisée en Amérique du Nord montre que l'augmentation significative de la fiscalité pesant sur les sodas très sucrés s'est traduite un an après par une perte de poids de 720 grammes chez les enfants.
Il s'agit donc de la modulation d'une taxe existante, n'impliquant pas nécessairement un rendement supplémentaire pour l'État ; l'enjeu est de rendre le dispositif plus compréhensible et plus intelligent.
Je remercie encore nos collègues du groupe Mouvement Démocrate et apparentés pour le dépôt d'un dispositif similaire, mais qui propose des seuils de sucre si bas qu'ils ne laissent que très peu aux industriels la possibilité de se conformer aux normes préconisées en matière de santé par les organismes internationaux.
Toutefois, madame Elimas, si vous en étiez d'accord, nous pourrions reprendre ensemble la rédaction de cet amendement afin de le présenter de concert au moment du débat en séance publique.
La préoccupation qui marque cet amendement est louable puisque nous savons que ce phénomène touche principalement les enfants, premiers consommateurs de ces boissons, ce qui conduit certains d'entre eux à souffrir d'obésité ; la responsabilité de leurs parents est d'ailleurs en cause.
Je ne suis pas sûr que, lorsque nous avons entendu la ministre de la santé, elle se soit montrée favorable ou non à cette mesure ; j'ai cru comprendre qu'elle demeurait interrogative.
Je rappelle que certaines de ces boissons sont produites par des entreprises françaises, or votre proposition est susceptible de les mettre en difficulté. Par ailleurs, je m'interroge sur la pertinence du niveau d'augmentation de la fiscalité que vous préconisez : ne serait-il pas plus judicieux d'envisager une progression moindre, passant, par exemple, d'une part de 6 grammes à 7 grammes de sucre par 100 millilitres, d'autre part de 8 grammes à 9 grammes ?
Il convient en effet de prendre le temps de la réflexion et de ne pas se précipiter dans cette démarche ; d'autant moins que les travaux des États généraux de l'alimentation (EGA) sont en cours et que les industriels du secteur des boissons, alcoolisées ou non, y participent.
Je me souviens, monsieur le rapporteur général, que les boissons sucrées ont été interdites dans les distributeurs installés dans les établissements scolaires ; nous avions déjà fait le premier pas.
Ne risque-t-on pas de vous accuser de créer une nouvelle taxe ?
L'amendement suivant de Mme Elimas propose des taux très différents de ceux avancés par le rapporteur général. Or, depuis des années, des entreprises se sont engagées de façon très volontaire dans une diminution importante du taux de sucre dans leurs boissons, atteignant des proportions correspondant à peu près à celles proposées par M. le rapporteur général.
Il me semble que nous devons rester très prudents, et récompenser nos entreprises ayant d'ores et déjà pris les mesures nécessaires.
En réponse à M. Lurton, j'indiquerai que l'amendement de notre collègue Elimas est beaucoup plus radical.
Je n'exclus pas de présenter au cours du débat en séance publique une version légèrement différente de mon amendement, proposant un dispositif de lissage plus progressif que celui actuellement en vigueur afin de rendre l'incitation quasiment gramme par gramme très visible. Le but est d'encourager très concrètement les industriels à réduire ces taux de sucre.
Les taux aujourd'hui retenus reconnaissent précisément les efforts réalisés par certaines entreprises, notamment françaises, qui ne seront pas désavantagées par ma proposition.
Je rappelle par ailleurs que j'ai entendu en audition des industriels produisant des boissons rafraîchissantes sans alcool ; ils se sont montrés favorables à une fiscalité reconnaissant les efforts fournis au lieu de frapper aveuglément comme le fait le droit en vigueur depuis 2012.
S'agissant de savoir si la ministre sera favorable ou non à cette mesure, le mieux sera d'avoir avec elle ce débat en séance publique. J'insiste sur l'intérêt que nous aurions à travailler ensemble sur cette question. À cet égard le rapport d'information de Véronique Louwagie et Razzy Hammadi, déposé au mois de juin 2016 sur la taxation des produits agroalimentaires, considérait qu'en l'état, la taxe n'avait pas de sens, et formulait des propositions à certains égards plus radicales que les miennes. Il me semble enfin que François Baroin lui-même avait jugé que cette taxe ne constituait qu'une mesure de rendement, et qu'il conviendrait un jour de la changer.
J'indique au rapporteur général que, s'il propose une modification progressive des seuils à l'occasion du débat dans l'hémicycle, nous le soutiendrons dans cette démarche.
La commission adopte l'amendement AS412.
Elle se saisit de l'amendement AS191 de Mme Nathalie Elimas.
L'amendement est retiré .
La commission étudie l'amendement AS198 de M. Cyrille Isaac-Sibille.
Cet amendement propose d'augmenter la contribution assise sur les boissons contenant des édulcorants de synthèse, et de la réaffecter au financement d'une politique de prévention de la santé au bénéfice d'expérimentations nouvelles en faveur de la lutte contre le surpoids et l'obésité touchant les enfants.
Cet amendement présente une incohérence puisqu'il propose d'affecter la taxe existante à la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) et non à la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA), mais, l'opération se faisant à somme nulle, un transfert de la CNAM vers la CCMSA demeurerait nécessaire.
Mon amendement précédemment adopté répond à l'objectif sous-tendu par votre proposition, je demande le retrait.
L'amendement est retiré .
La commission en vient à l'amendement AS243 de M. Jean-Hugues Ratenon.
Les boissons sucrées sont à l'origine de problèmes de santé très préoccupants. Commercialisées par des entreprises qui excellent dans l'art de rendre leurs produits attractifs, elles multiplient la consommation de sucre, notamment des plus jeunes, ce qui entraîne de lourdes conséquences sur la santé publique. Une canette de soda de 33 centilitres contient en effet entre 30 grammes et 45 grammes de sucre. Sachant que, d'après les recommandations de l'Agence de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), pour rester en bonne santé, il ne faut pas dépasser 100 grammes de sucre par jour, on comprend aisément le bouleversement qu'elles provoquent, le diabète et l'obésité étant les effets les plus flagrants.
Cet amendement propose la création d'une nouvelle taxe sur les sodas, qui a pour objet d'encourager la baisse de la consommation de boissons sucrées ; ses recettes seront versées à l'assurance maladie. Je rappelle qu'il y a quelques instants nous étions tous d'accord au sujet du tabac et de l'importance de l'augmentation du prix du paquet de cigarettes afin d'en réduire la consommation. Il me semble donc que la même préoccupation de préserver nos enfants de la consommation excessive de sucre doit nous animer.
Je suis heureux de constater que nous partageons les mêmes objectifs pour ce sujet de santé publique.
Toutefois, en proposant le doublement de la taxe assise sur les boissons comprenant des édulcorants, vous courrez le risque de brouiller le message sur le taux de sucre, dont l'impact est plus important.
Une fiscalité particulière s'applique déjà aux boissons comprenant des édulcorants : dans l'amendement que nous venons d'adopter figure une disposition favorisant les boissons moins sucrées et sans édulcorants par rapport aux boissons moins sucrées, mais comportant des édulcorants.
En effet, une suspicion plane sur certains édulcorants au regard des risques sanitaires qu'ils pourraient présenter, même si aucune étude recensée par l'ANSES n'est pas parvenue à le démontrer. En revanche, les édulcorants peuvent habituer le consommateur à un goût sucré, notamment pour les boissons.
Faut-il pour autant imposer une fiscalité aussi lourde aux édulcorants qu'aux boissons sucrées ? Je pense que la réponse est négative. Je vous propose donc de retirer votre amendement et de vous joindre à celui que nous déposerons en vue du débat en séance publique.
Nous reconnaissons que votre proposition constitue une avancée, mais nous persistons à considérer que, tout comme le tabagisme, l'excès de sucre est néfaste à la santé. Nous maintenons donc notre amendement.
La commission rejette cet amendement.
Chapitre IV Dispositions relatives aux recettes de la branche maladie
Article 14 : Fixation des taux « Lv » et « Lh » pour 2018 et précisions sur les conditions d'application de la clause de sauvegarde
La commission examine l'amendement AS137 de M. Jean-Pierre Door.
Il s'agit de redéfinir la nature du chiffre d'affaires taxé dans le cadre du mécanisme de la clause de sauvegarde.
L'article 30 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 a redéfini les modalités de calcul de ce mécanisme au moyen d'une assiette reposant sur le chiffre d'affaires brut. Le précédent mécanisme prenait en compte un chiffre d'affaires net des remises négociées avec le Comité économique des produits de santé (CEPS) ou versées à l'occasion de la fixation du prix d'un produit faisant précédemment l'objet d'une autorisation temporaire d'utilisation (ATU) ou selon le mécanisme « W » spécifique aux médicaments destinés au traitement de l'hépatite C.
Les remises versées au titre des produits pharmaceutiques pris en charge par la collectivité sont croissantes. Elles ont dépassé un milliard d'euros en 2015, dernière année où les chiffres sont connus, contre seulement 308 millions d'euros en 2012 : l'écart est considérable.
Les entreprises commercialisant les médicaments les plus récents, qui sont les plus soumises au versement de remises, sont taxées sur la base d'un chiffre d'affaires qu'elles ne réalisent pas, alors que ces médicaments sont la plupart du temps ceux qui apportent le plus d'innovation thérapeutique.
L'amendement vise à revenir à une règle de calcul cohérente, avec une assiette de taxation basée sur un chiffre d'affaires net.
Votre proposition vise à défalquer les remises dans le calcul de l'assiette des taux « Lv » et « Lh ». Vous souhaitez harmoniser les assiettes de l'année n (en l'occurrence 2018) et de l'année n-1 (2017), qui font référence pour calculer la progression du chiffre d'affaires hors taxes : l'assiette de l'année n-1 (2017) tient compte des remises conventionnelles accordées au CEPS, mais pas l'assiette de l'année n (2018).
Je rappelle que le CEPS fixe un objectif de baisse des prix, par exemple 100 millions d'euros. Soit les entreprises réalisent cet objectif et il y a une répercussion sur le chiffre d'affaires, soit elles n'y parviennent pas, le chiffre d'affaires prospère et la clause de sauvegarde joue : les industriels pharmaceutiques reversent alors à l'assurance maladie un pourcentage de l'objectif d'économies qu'ils ne sont pas parvenus à atteindre.
Si l'on acceptait la modification de l'assiette de calcul du chiffre d'affaires que vous proposez, la base de calcul serait faussée pour 2018. En effet, les remises accordées au titre d'une année ne se répercutent pas l'année suivante, à la différence des baisses de prix. Si vous défalquez les remises en 2018, vous aboutissez à un mécanisme inefficace, marqué par une absence de baisses de prix et une absence de clause de sauvegarde.
Pour cette raison technique, avis défavorable.
Le sujet est très complexe. La grille devient de plus en plus sévère alors que des molécules de plus en plus innovantes et performantes sont développées. Le mécanisme actuel a été mis en place quand sont arrivés les nouveaux médicaments pour l'hépatite C et qu'il fallait bien assurer une régulation. Ce cap est maintenant passé, les prix sont différents et le CEPS fixe les remises. N'en restons pas à la situation actuelle qui constitue un frein au développement des molécules. Nous proposons d'en revenir à une règle de calcul cohérente en nous basant sur le chiffre d'affaires net plutôt que brut : l'entreprise reverse à la sécurité sociale au-delà d'un seuil et il ne faut pas mettre la barre trop haut.
La commission rejette l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement AS288 de M. Adrien Quatennens.
Nous saluons la volonté du Gouvernement de vouloir faire des économies sur le médicament : la France paie encore trop et nous devons multiplier les modalités de contrôle d'une industrie pharmaceutique qui se concentre et dont les réseaux d'influence se multiplient. Le déclenchement de la clause de sauvegarde en cas de dépassement de l'objectif de dépenses va dans le bon sens, mais le relèvement du taux hospitalier ressemble fort à un desserrage de vis alors que vous prétendez demander des efforts au secteur du médicament. Nous ne comprenons pas un tel laxisme : lorsqu'il s'agit de l'hôpital, tout semble permis pour les industries pharmaceutiques, qui ont trop de marge de manoeuvre. Nous demandons donc la réduction du taux à zéro, afin de contraindre le secteur du médicament à réguler ses prix. Les Français attendent une telle rigueur, qui serait on ne peut plus favorable aux finances sociales.
Si l'on inclut le rebasage de l'ONDAM, le taux est en réalité inférieur à 3 %. Si on le ramenait à zéro, on supprimerait la différence entre le taux « Lv » et le taux « Lh » et l'on reviendrait au taux antérieur, le taux « L » unique.
Quel est l'intérêt d'avoir deux taux ? Il y a deux enjeux. En termes d'innovation, il s'agit de ne pas brider l'arrivée de traitements améliorant la santé des patients. Ne pas le reconnaître serait fermer les yeux sur la perte de chances. C'est un enjeu de santé publique. À cela s'ajoute un enjeu de coûts, qui doit aussi être réglé par d'autres moyens. Je pense notamment à la maîtrise de la liste en sus, dispositif que nous étudierons tout à l'heure, ou à la diffusion des bonnes pratiques de prescription. Ce n'est pas qu'une « affaire de laboratoires ».
Il faut reconnaître ce qui est fait en termes de maîtrise médicalisée. Chaque année, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale, l'industrie pharmaceutique participe de façon importante à la politique de maîtrise médicalisée : un gros effort lui est demandé en matière de maîtrise des coûts et de l'expansion du volume de médicaments distribués. Cette année, cela représente 1,5 milliard d'euros sur la pertinence et l'efficience des produits de santé, notamment le médicament, à travers les baisses de prix, les remises et le développement des génériques. 33 % des économies sont demandés à l'industrie des produits de santé, alors qu'elle ne représente que 17 % des dépenses de santé.
Il faut conserver une place pour l'accès à l'innovation. Si je peux remettre brièvement ma casquette de neurologue, on voit arriver des traitements certes onéreux, mais porteurs d'espoir pour des malades que l'on ne pensait pas pouvoir soigner hier encore. Si on bride trop l'accès à l'innovation, si on l'empêche de se développer davantage, on aura demain des difficultés pour proposer des traitements aux malades. Par conséquent, avis défavorable à l'amendement.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements AS63 de M. Jean-Pierre Door et AS310 de Mme Jeanine Dubié.
Mon amendement est contraire à celui qui vient d'être rejeté. Il faut absolument éviter de brider l'innovation. Lors de son déplacement à Nevers, le Président de la République a souligné qu'il faut être responsable : on peut faire des économies, mais il y a des risques quand on fait du mal aux entreprises pharmaceutiques, quand on gêne leur développement.
On distingue aujourd'hui le taux « Lv », pour la ville, et le taux « Lh », pour l'hôpital. Or, depuis un certain temps, le taux affiché pour l'hôpital n'est plus compatible avec l'arrivée d'innovations : elles n'arrivent plus à se développer et des entreprises risquent de se détourner de la recherche. Nous proposons donc de porter le taux « Lh » de 3 à 6 %, au bénéfice de l'innovation dans le monde hospitalier.
L'amendement AS310 propose de ramener le taux « Lh », qui concerne les médicaments dispensés par les hôpitaux, de 3 à 2 %. Il faut bien sûr soutenir l'innovation, notamment en cancérologie, mais on doit aussi renforcer la maîtrise des coûts des médicaments, comme l'a préconisé la Cour des comptes. Il s'agit de protéger l'assurance maladie contre une progression trop rapide des dépenses de médicaments remboursés.
Un des deux amendements repose sur l'idée que le taux est trop faible, l'autre sur celle qu'il est trop élevé. Je vous propose la voie de la sagesse, c'est-à-dire le taux fixé par le projet de loi. Un taux de 3 % permet d'accueillir l'innovation sans trop la contraindre, tout en évitant que les dépenses flambent au-delà du raisonnable. L'amendement de M. Door, qui propose d'augmenter l'enveloppe à travers le taux « Lh » et de compenser avec la fiscalité sur le tabac, illustre par ailleurs ce que je disais tout à l'heure. Avis défavorable aux deux amendements.
L'amendement AS310 est retiré .
La commission rejette l'amendement AS63.
Puis elle adopte l'article 14 sans modification.
Après l'article 14
La commission examine les amendements identiques AS58 de Mme Josiane Corneloup, AS81 de M. Jean-Pierre Door, AS173 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS337 de M. Francis Vercamer.
Les entreprises de répartition pharmaceutique disposent d'un large référencement de médicaments génériques destinés à l'approvisionnement des officines. Acteurs responsables, les grossistes répartiteurs vont au-delà de leurs obligations légales, qui leur imposent seulement de disposer du princeps et d'un générique. Ils contribuent pleinement au développement de ce marché, en proposant l'ensemble des références génériques aux patients qui peuvent ainsi conserver leurs habitudes de traitement. Ces acteurs participent ainsi à la maîtrise des dépenses de santé.
La Cour des comptes a confirmé la situation économique préoccupante des entreprises de la répartition : leur modèle de rémunération, assis sur le prix des médicaments, n'est plus adapté, notamment en raison de l'essor des médicaments génériques. La situation est telle que les conditions dans lesquelles les répartiteurs distribuent ces médicaments ne sont pas économiquement supportables.
L'objet de notre amendement est de retirer le segment des génériques de l'assiette de la taxe sur le chiffre d'affaires des distributeurs en gros et de pérenniser ainsi leur activité. Cette mesure serait salutaire au regard de l'urgence qui s'impose à nous et constituerait par ailleurs une mise en cohérence avec le cadre fiscal existant, les génériques étant déjà exclus d'une des trois composantes de la taxe.
Nous avons été alertés par un rapport de la Cour des comptes qui confirme la situation économique très préoccupante des entreprises de la répartition, dont nous avons un réel besoin pour assurer la distribution des médicaments, de l'industrie jusqu'à la pharmacie. Le modèle de rémunération, reposant sur le prix des médicaments, n'est plus adapté. Il y a urgence à exclure les médicaments génériques de l'assiette de la taxe sur le chiffre d'affaires des distributeurs en gros afin de les aider à sortir la tête de l'eau.
Les grossistes répartiteurs se trouvent vraiment dans une situation économique très difficile. Retirer les médicaments génériques de l'assiette constituerait pour eux une petite bouffée d'air. Il faut bien être conscient que ces acteurs participent à la bonne distribution des médicaments et nous permettent ainsi de suivre des traitements dans de bonnes conditions.
Beaucoup a déjà été dit sur ces amendements identiques. Les grossistes répartiteurs sont en grande difficulté, comme la Cour des comptes l'a souligné. La baisse des prix fait que leur marge nette diminue au fil du temps, même si le pourcentage reste identique. La disparition de ces acteurs, qui sont indispensables pour la répartition du médicament dans le réseau des officines en France, donc pour l'aménagement du territoire, ajouterait aux déserts médicaux des déserts pharmaceutiques. Il est important de leur donner une bouffée d'oxygène, en attendant peut-être une remise à plat complète du financement.
Afin d'éviter de pénaliser les entreprises de la répartition lors de la vente de médicaments génériques, généralement peu chers, une marge d'au moins trente centimes d'euros par boîte a été attribuée à partir de 2012. Je suis conscient qu'il existe une difficulté pour les grossistes répartiteurs en raison d'une baisse de leur chiffre d'affaires et que nous devons être capables de faire des propositions. À titre personnel, je m'engage à rencontrer les acteurs concernés et à me rendre sur le terrain à l'issue de l'examen du projet de loi, afin de voir quelles solutions nous pourrions proposer pour l'évolution de cette profession.
Dans l'immédiat, j'appelle votre attention sur le fait que si l'on exclut les médicaments génériques de l'assiette de la taxe sur la vente en gros, cela profiterait aussi bien à la vente directe qu'à la répartition. On risquerait même de favoriser la première au détriment de la seconde, en augmentant l'incitation financière pour les laboratoires à assurer eux-mêmes la distribution de leurs produits dans les officines. L'effet pourrait donc être contre-productif.
Enfin, et pardon de le rappeler, il y a un équilibre budgétaire à prendre en compte : l'exclusion des médicaments génériques représenterait quand même une perte de recettes de 60 millions d'euros pour l'assurance maladie.
Avis défavorable, mais avec une sensibilité et une attention particulières à ces enjeux auxquels nous pourrons travailler ensemble, si vous le souhaitez, dans les mois et les années à venir.
La commission rejette ces amendements.
Elle en vient ensuite à l'amendement AS167 de Mme Agnès Firmin Le Bodo.
Il s'agit de mettre fin à une incohérence dans l'approche des différentes administrations en ce qui concerne le prix net du médicament. Les laboratoires versent à l'assurance maladie des « remises conventionnelles » lorsque les produits des ventes excèdent un seuil préalablement négocié avec le CEPS, tandis que les administrations fiscales et de sécurité sociale imposent les laboratoires sur le chiffre d'affaires. Il y a donc une « double peine » : les laboratoires sont taxés sur un chiffre d'affaires non perçu, puisqu'il y a un reversement à l'État dans le cadre des « remises conventionnelles ». L'amendement vise à clarifier la nature de « remises accordées » de ces remises négociées entre le CEPS et chaque laboratoire dans le cadre des conventions de prix ou des avenants de baisse de prix.
Cet amendement revient sur la fusion de la taxe sur le chiffre d'affaires des laboratoires et de la taxe sur les premières ventes de médicaments, qui avait été instaurée en loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. Le dispositif proposé n'aboutirait pas à une rédaction limpide. Il y aurait deux types de contributions, basés sur deux assiettes différentes, sans que l'on arrive à distinguer qui s'acquitterait de quoi, ce qui compliquerait singulièrement la vie des entreprises concernées.
Par ailleurs, le droit actuel prévoit déjà que l'assiette de la contribution est défalquée du chiffre d'affaires : l'argument de la « double peine » ne tient donc pas.
Enfin, l'amendement complique inutilement le dispositif. Il vise à défalquer de l'assiette de la contribution des laboratoires les montants versés dans le cadre de la clause de sauvegarde. Celle-ci ne joue que si la maîtrise de l'ONDAM et l'objectif de baisse des prix ne sont pas tenus. La clause de sauvegarde n'affecte pas de manière pérenne le chiffre d'affaires. Inclure dans une assiette un montant hypothétique n'est un bon signal de prévisibilité ni pour les entreprises, ni pour l'administration.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Article 15 : Prorogation et augmentation de la participation des organismes complémentaires au financement des rémunérations alternatives au paiement à l'acte
La commission examine l'amendement de suppression AS295 de M. Adrien Quatennens.
Nous progressons assez rapidement dans l'examen du texte, mais je ne suis pas certain que nous devions nous en réjouir car ce PLFSS, qui réforme profondément la sécurité sociale, ne nous semble pas aller dans le bon sens.
La participation des complémentaires au financement de l'assurance maladie équivaut à une privatisation de notre système de santé et à une charge supplémentaire pour les Français. Elle s'inscrit dans la logique de la hausse du forfait hospitalier qui, si elle ne figure pas dans le PLFSS, aura un impact sur la vie des patients. Puisque leurs cotisations aux complémentaires vont augmenter, c'est en effet à ces derniers que le Gouvernement demande de mettre la main à la poche pour aider le secteur hospitalier à survivre à la rigueur qui lui est imposée. Et que dire des 4 millions de Français qui, eux, n'ont pas de complémentaire santé ?
Il s'agit donc d'une atteinte fondamentale à un système d'assurance sociale que le monde entier nous enviait. Au-delà des principes, je le répète, cet article fait peser une partie de la charge de l'assurance maladie sur les usagers, puisque les complémentaires répercuteront cette contribution sur les tarifs des cotisations. C'est la raison pour laquelle nous nous y opposons.
Avis défavorable. Je me garderai bien, à cette heure tardive, de me lancer dans un débat sur la place de chacun des acteurs dans le financement de la protection sociale. Ce sujet nous est cher, à vous et à moi. Du reste, nous partageons peut-être un certain nombre de constats, notamment celui que l'assurance maladie doit garantir la solidarité entre tous les assurés, sans sélection des risques. Toutefois, les complémentaires ont un rôle à jouer dans le financement de la protection sociale. Sous le quinquennat précédent, l'objectif était d'en généraliser l'accès. Cet objectif n'a pas été atteint, puisque – c'est l'externalité négative des accords nationaux interprofessionnels – s'en retrouvent aujourd'hui paradoxalement exclus certains étudiants, certains retraités et certains chômeurs. Nous pourrons travailler, au cours des prochaines années, à l'amélioration de la protection sociale. De même, nous pourrons nous interroger sur les raisons pour lesquelles les coûts de gestion et de fonctionnement des complémentaires santé sont croissants – et le mot est faible. Mais ce serait un long débat.
Je m'en tiendrai à votre amendement. Cet article entérine un accord conventionnel. Or, aller à l'encontre de ce qui a été négocié serait faire une mauvaise manière aux partenaires sociaux. Les choses évolueront probablement dans les mois et les années à venir.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 15 sans modification.
Chapitre V Dispositions relatives à la modernisation de la branche recouvrement
Article 16 : Modernisation du recouvrement des cotisations sociales des artistes auteurs
La commission adopte l'article 16 sans modification.
Article 17 : Centralisation de la passation des marchés de services bancaires du régime général
La commission adopte l'article 17 sans modification.
TITRE II Conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale
Article 18 : Transferts entre branches et régimes de la sécurité sociale
La commission adopte l'article 18 sans modification.
Article 19 : Approbation du montant de la compensation des exonérations mentionnées à l'annexe 5
La commission adopte l'article 19 sans modification.
Article 20 : Approbation du tableau d'équilibre de l'ensemble des régimes obligatoires pour 2018
La commission adopte l'article 20 et l'annexe C sans modification.
Article 21 : Tableau d'équilibre du régime général
La commission adopte l'article 21 sans modification.
Article 22 : Approbation des recettes (état C) et du tableau d'équilibre du FSV, de l'objectif d'amortissement de la dette sociale et prévisions sur les recettes du FRR et la section 2 du FSV
La commission adopte l'article 22 sans modification.
Article 23 : Habilitation des régimes de base et des organismes concourant à leur financement à recourir à l'emprunt
La commission adopte l'article 23 sans modification.
Article 24 : Approbation du rapport sur l'évolution pluriannuelle du financement de la sécurité sociale (annexe B)
La commission examine l'amendement AS64 de M. Jean-Pierre Door.
Nous ne partageons pas le satisfecit contenu dans l'annexe B, que nous considérons comme très éloigné de la réalité.
S'il est vrai que le déficit de la sécurité sociale se réduit d'année en année, celle-ci n'est pas encore sauvée, comme on nous l'avait pourtant annoncé l'année dernière. En effet, comme le dénonce la Cour des comptes, faute de véritables réformes structurelles, la réduction du déficit est obtenue grâce, d'une part, à des artifices comptables – ce qui rend de plus en plus insincère la présentation du budget – d'autre part, à une augmentation des recettes dans le cadre d'un véritable matraquage fiscal. Le PLFSS pour 2018 ne déroge pas à la règle. Qu'on en juge.
S'agissant de la branche vieillesse, le report de trois mois de la revalorisation des pensions, du 1er octobre 2018 au 1er janvier 2019, permet de réaliser, sur le dos des retraités, qui vont déjà être affectés par la hausse de la CSG, une économie de 500 millions d'euros. Évidemment, cette mesure n'est pas renouvelable, à moins que le Gouvernement ne repousse, chaque année, de quelques mois les revalorisations.
En ce qui concerne la branche maladie, sur laquelle se concentrent désormais les déficits, le Gouvernement prévoit, tout d'abord, une hausse de deux euros du forfait hospitalier, ce qui revient à transférer 200 millions d'euros de charges vers les complémentaires santé, qui annoncent d'ores et déjà des hausses de prix. Qui paiera, au bout du compte ? Toujours l'assuré social !
Le Gouvernement maintient ensuite les habituelles mesures d'économie sur le médicament, qui représente 15 % des dépenses mais contribue depuis des années à plus de la moitié des économies – 45 % cette année. À cet égard, la politique actuelle ne présente aucune différence avec celle de Mme Touraine.
Par ailleurs, il annonce d'importantes mesures d'économie pour l'hôpital, sans pour autant mettre en oeuvre les réformes structurelles dont celui-ci a besoin pour se réformer. Seul point positif : le PLF rétablit le jour de carence dans la fonction publique. Avant d'être supprimé par les socialistes, celui-ci avait en effet permis aux hôpitaux d'économiser 70 millions d'euros en une année.
Enfin, pour la branche famille, des mesures compliquées d'alignement du montant et des barèmes de l'allocation de base de la Prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) sur ceux du complément familial permettront au Gouvernement d'économiser, en 2018, 70 à 90 millions d'euros sur le dos des familles. Qui plus est, ces prestations étant servies sous conditions de ressources, il ne s'agit pas des familles les plus riches. Après cinq années de massacre organisé de la politique familiale de notre pays, les familles de la classe moyenne n'avaient certainement pas besoin de cela.
Pour ces différentes raisons, nous vous proposons de supprimer l'article 24.
Avis défavorable, vous vous en doutez. Vous n'y allez pas de main morte ! Votre amendement m'offre cependant l'occasion de rappeler la trajectoire des finances publiques pour les années à venir. Nous prévoyons un excédent du régime général pour l'année prochaine, un retour à l'équilibre du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) dès 2019, un retour à l'équilibre de l'ensemble des régimes obligatoires de sécurité sociale en 2020 et l'extinction de la dette sociale en 2024. Pour 2018, le Haut conseil des finances publiques et le Comité d'alerte de l'ONDAM ont validé ces prévisions qui s'appuient sur des hypothèses prudentes.
Nous apercevons donc le bout du tunnel. Mais, je l'ai dit, nous ne partons pas de nulle part : depuis 2010, le déficit annuel est passé, grâce à l'action des gouvernements successifs, de 25 à 4 milliards, et il sera bientôt nul. À cet égard, il faut reconnaître les efforts consentis par l'ensemble des acteurs de la filière santé : hôpital, médecine de ville, industrie du médicament. C'est grâce à leurs efforts conjugués que nous avons pu juguler les déficits pour retrouver, enfin, des comptes annuels à l'équilibre. Je salue également l'action de l'ensemble des ministres de la santé et du budget qui se sont succédé depuis 2010, en particulier celle de Marisol Touraine, qui a pris sa part dans la réduction des déficits et dont les prévisions pour l'année 2017 n'étaient pas éloignées de la réalité.
On peut considérer que les efforts demandés sont importants, mais on peut aussi espérer ne plus avoir à en demander dans les années à venir. Ne broyons donc pas du noir : la dette sociale qui pesait sur nos têtes comme l'épée de Damoclès aura disparu, quoi qu'il arrive, d'ici à 2024 – le président de la CADES, que nous avons auditionné, a été très clair sur ce point. Nous allons donc pouvoir commencer à imaginer, au cours de cette législature, ce que nous pourrons faire une fois que le déficit et la dette sociale auront disparu. Faudra-t-il, par exemple, consacrer les contributions sociales qui étaient affectées à son remboursement au financement de la perte d'autonomie ?
Aussi, je vous suggère, monsieur Viry, de retirer votre amendement, faute de quoi j'y serai défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 24 et l'annexe B sans modification.
Elle adopte la troisième partie du projet de loi.
La séance est levée à zéro heure quinze.
Présences en réunion
Réunion du mardi 17 octobre 2017 à 21 heures 30
Présents. – M. Joël Aviragnet, Mme Delphine Bagarry, Mme Ericka Bareigts, Mme Justine Benin, M. Julien Borowczyk, Mme Brigitte Bourguignon, Mme Marine Brenier, Mme Blandine Brocard, Mme Josiane Corneloup, M. Dominique Da Silva, M. Pierre Dharréville, M. Jean-Pierre Door, Mme Jeanine Dubié, Mme Audrey Dufeu Schubert, Mme Nathalie Elimas, Mme Catherine Fabre, Mme Caroline Fiat, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Emmanuelle Fontaine-Domeizel, Mme Albane Gaillot, Mme Carole Grandjean, Mme Florence Granjus, M. Brahim Hammouche, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Caroline Janvier, Mme Fadila Khattabi, Mme Fiona Lazaar, Mme Charlotte Lecocq, M. Gilles Lurton, M. Sylvain Maillard, M. Thomas Mesnier, M. Thierry Michels, M. Bernard Perrut, Mme Michèle Peyron, M. Laurent Pietraszewski, Mme Claire Pitollat, M. Adrien Quatennens, M. Alain Ramadier, Mme Mireille Robert, Mme Nicole Sanquer, M. Aurélien Taché, Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, M. Adrien Taquet, Mme Isabelle Valentin, M. Boris Vallaud, Mme Michèle de Vaucouleurs, M. Olivier Véran, M. Francis Vercamer, Mme Annie Vidal, Mme Corinne Vignon, M. Stéphane Viry, Mme Martine Wonner
Excusés. - Mme Claire Guion-Firmin, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Nadia Ramassamy, Mme Hélène Vainqueur-Christophe
Assistaient également à la réunion. - M. Xavier Roseren, M. Martial Saddier