Intervention de Paul Christophe

Réunion du mardi 30 avril 2019 à 21h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Christophe :

Monsieur le président, Monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je vous remercie de m'accueillir au sein de votre commission pour l'examen de ce texte. C'est, du reste, parmi vous, lors d'une audition de M. Stéphane Travert, alors ministre de l'agriculture et de l'alimentation, en septembre 2017, que j'ai évoqué, pour la première fois, le sujet de la pêche électrique. En ma qualité de député de Dunkerque, je peux en effet témoigner des ravages qu'a produits cette technique de pêche dans les eaux de la mer du Nord.

Pourtant interdite en Europe en 1998, en même temps que la pêche aux explosifs, la pêche électrique a été réintroduite, en 2007, par le biais d'un statut dérogatoire. Sous la présidence des Pays-Bas, l'Union européenne a en effet autorisé, à titre expérimental, ses États membres à équiper d'électrodes jusqu'à 5 % de leur flotte de chaluts à perche. La pêche électrique est, je le rappelle, une méthode alliant pêche à impulsion électrique et chaluts à perche, dont les chaînes sont remplacées par des électrodes. Les décharges envoyées tuent les poissons, qui sont ensuite pêchés par les filets.

Qui pouvait sérieusement croire que l'usage d'un filet à impulsion électrique serait sans conséquence sur la ressource ? Cette méthode de pêche ne permet aucune sélection : l'ensemble de la ressource est dévasté par le passage des filets : les petits et les gros poissons, les oeufs, larves et juvéniles également. Et si les poissons appartenant à certaines espèces sont rejetés en mer, leurs chances de survie sont faibles, voire nulles, tant la décharge électrique endommage leur colonne vertébrale. Un véritable carnage sur lequel les instances européennes ont longtemps fermé les yeux !

Attentiste sur ce sujet, la France a véritablement pris position l'année dernière, en se prononçant strictement contre cette technique et en demandant son interdiction. Le calendrier s'est accéléré, puisque les négociations du trilogue ont abouti, le 13 février dernier, à un accord repris dans un projet de règlement du Parlement européen et du Conseil de l'Union européenne. Cet accord prévoit l'interdiction totale de la pêche électrique à partir du 1er juillet 2021. Cette décision, saluée par tous et pour laquelle notre pays s'est battu, permettra de mettre fin prochainement à l'utilisation de cette technique. Toutefois, la date retenue, 2021, peut apparaître comme un horizon trop lointain, au regard notamment des dégâts que les navires néerlandais continuent de provoquer en mer du Nord, plus particulièrement sur le site dit des « bancs de Flandre ». Nous ne pouvons pas attendre deux années de plus pour que cesse ce pillage des fonds marins.

La proposition de loi présentée par notre collègue Erwan Balanant, que je remercie pour son investissement constant dans ce domaine, permet à notre pays d'anticiper sur la réglementation européenne et d'interdire la pratique de la pêche électrique dans les eaux territoriales dès l'entrée en vigueur du règlement européen. Elle permettra à la France, d'une part, d'être proactive et d'encourager ses voisins européens à suivre son exemple et, d'autre part, de protéger la ressource dans nos eaux territoriales et l'activité de notre petite pêcherie locale.

Le groupe UDI, Agir et Indépendants soutiendra sans réserve l'adoption de cette proposition de loi que nous espérons voir examiner la semaine prochaine, malgré le nombre très important de textes inscrits à l'ordre du jour par le groupe MODEM. Je regrette toutefois qu'il nous ait fallu autant d'années pour aboutir à une réelle prise de conscience, car si la pêche électrique sera bientôt interdite, les dégâts qu'elle a provoqués sur la ressource sont, quant à eux, durables. Son impact sur l'écosystème marin semble irréversible. Les chiffres que m'a transmis récemment la coopérative maritime de Dunkerque attestent, hélas ! de ce désastre. À titre d'exemple, au cours des quatre dernières années, les pêcheurs ont subi une baisse de 75 % de leur débarquement de soles. À Dunkerque, en 2018, la coopérative maritime a déclaré une production de 217 tonnes ; en 2019, celle-ci n'était que de 22 tonnes... Cette baisse des captures a entraîné de sérieuses difficultés financières pour les petits bateaux locaux. Or, nous ne pouvons pas rétablir la ressource dans l'immédiat.

Asphyxie de la petite pêche, disparition de la ressource : telles sont les raisons qui ont poussé la Chine à abandonner cette technique de pêche. Aussi souhaiterais-je qu'une aide financière soit versée par l'Union européenne aux pêcheurs touchés pour pallier cette baisse de revenus consécutive à la diminution des captures. Telle est la position que j'ai défendue auprès du ministre de l'agriculture et de l'alimentation, et je vous invite, mes chers collègues, à faire de même.

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