Intervention de Jean François Mbaye

Séance en hémicycle du mercredi 19 juin 2019 à 15h00
Indemnisation des victimes du valproate de sodium — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean François Mbaye :

Avant d'être investi du mandat me permettant de m'exprimer depuis cette tribune, mes compétences juridiques étaient mises au service de l'ONIAM. C'est donc avec un sentiment particulier que je prends aujourd'hui la parole devant vous pour discuter de la proposition de résolution relative à la simplification du dispositif d'indemnisation des victimes du valproate de sodium et de ses dérivés, déposée par notre collègue Véronique Louwagie.

Le valproate de sodium, antiépileptique plus connu sous le nom commercial de Dépakine, est à l'origine de l'une des plus importantes crises sanitaires de ces dernières décennies. L'ANSM estime en effet entre 18 000 et 34 000 le nombre de victimes directes d'une exposition in utero à ce produit ou à l'un de ses dérivés. Les collègues qui se sont exprimés avant moi l'ont rappelé, ces victimes souffrent de graves séquelles physiques, mentales ou comportementales. À leurs côtés, leurs proches sont eux aussi affectés et meurtris, car les pages d'un drame s'écrivent trop souvent à quatre mains.

Il y a donc des dizaines de milliers de victimes. Pourtant, à peine plus de 1 500 demandes ont été déposées auprès de l'ONIAM, qui est chargé de l'exécution d'une procédure d'indemnisation à l'amiable garantie par la solidarité nationale. Cet écart interpelle d'autant plus que l'ONIAM avait lui-même estimé en 2016 qu'environ 10 300 personnes verraient leur préjudice indemnisé. Le chiffre a donc été surévalué, mais il ne constitue pas une fin en soi.

La seule fin que doit poursuivre ici la solidarité nationale est d'indemniser avec justesse celles et ceux qu'elle s'est engagée à protéger. Pour ma part, je ne doute aucunement que Mme la ministre des solidarités et de la santé tiendra son engagement de mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour retrouver les victimes potentielles du valproate de sodium. Je me félicite de toutes les démarches qui ont été entreprises en ce sens et de celles qui le seront à l'avenir.

Autre point soulevé par la proposition de résolution de notre collègue : la lenteur des procédures conduisant à l'indemnisation effective des victimes. Si des améliorations sont toujours possibles, il ne faut pas sous-estimer la complexité de la tâche incombant, d'une part, au comité d'experts et, d'autre part, au comité d'évaluation. Ils ont l'un et l'autre mené à bien la mission qui leur a été confiée, dans le cadre des avis déjà rendus.

Au-delà de la difficulté intrinsèque à tout processus d'expertise médicale, nous parlons ici de situations extrêmement diverses, dont certaines peuvent remonter jusqu'aux années 1960. Cette complexité et les enjeux en présence nous interdisent de confondre vitesse et précipitation. Mon opinion rejoint donc celle de Mme la rapporteure spéciale s'agissant de la nécessité d'optimiser le traitement des dossiers, à condition que cela résulte d'un processus de réflexion guidé par la volonté de ne pas sacrifier la pertinence sur l'autel de la célérité.

Je reviens sur la décision du laboratoire Sanofi de ne pas contribuer à l'indemnisation amiable des victimes qui l'incriminent. Je me félicite – j'en suis même fier – de la réponse apportée par Mme la ministre et par l'ONIAM : celui-ci saisira les juridictions à chaque refus du laboratoire de donner suite aux avis d'indemnisation.

Si la solidarité nationale doit tous les égards aux victimes, elle n'a pas vocation à se substituer indéfiniment à des intérêts privés. J'ai mentionné précédemment l'importance de la justesse avec laquelle l'indemnisation doit être appréciée ; je conclurai en soulignant avec non moins d'ardeur l'importance de la justesse avec laquelle les responsabilités doivent être assumées.

Le groupe La République en marche se félicite de la proposition de résolution de notre collègue Véronique Louwagie. Bien entendu, nous la soutiendrons.

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