Dans le cadre des relations transnationales, lorsque survient un litige civil ou commercial impliquant un État membre de l'Union européenne et un des vingt-cinq pays et territoires d'outre-mer qui entretiennent des liens constitutionnels avec la France, le Danemark, les Pays-Bas ou le Royaume-Uni, la détermination du juge compétent est cruciale. Derrière la procédure juridique en apparence froide et technique qui touche aux règles d'attribution de compétence se jouent en effet des situations humaines dont les conséquences sont parfois ravageuses pour les femmes et les hommes concernés.
Si dans un premier temps, les systèmes juridiques ont édicté de façon unilatérale des règles de compétence internationale pour leurs juridictions, très vite, des difficultés sont apparues, notamment des concurrences et des lacunes de compétences.
Dès lors, les États ont décidé de coordonner leurs activités d'édiction des règles de compétence afin d'adopter des règles communes. C'est ainsi que, dans le cadre de l'Union européenne, un effort particulier a été mené pour unifier les règles de conflits de lois et les règles de juridiction avec, in fine, l'objectif d'aboutir à un véritable espace judiciaire européen rendant impossible les abus et dénis de justice. La convention du 27 septembre 1968 sur la compétence internationale des États membres et sur les effets des jugements des États membres au sein de l'Union européenne, dite convention de Bruxelles, en est une première illustration en matière civile et commerciale.
Convertie en 2000 en un règlement européen dit Bruxelles I, cette convention ne s'applique pas aux pays et territoires d'outre-mer, restés sous le coup de la convention de Bruxelles de 1968, qui comporte certains défauts.
Parallèlement à cette dernière, la convention de Lugano a été signée le 16 septembre 1988 par les États membres de la Communauté européenne et ceux de l'Association européenne de libre-échange. En 2007, elle a été remplacée par la convention de Lugano II, qui ne concerne pas non plus les pays et territoires d'outre-mer.
Cependant, cette convention prévoit que peuvent y adhérer dès son entrée en vigueur les États membres de l'Union européenne « agissant pour le compte de certains territoires non européens faisant partie de leur territoire ou dont les relations extérieures relèvent de leur responsabilité ».
Dans ces conditions, le groupe Libertés et territoires se satisfait que la France ait décidé d'adhérer à la convention de Lugano II pour le compte des pays et collectivités d'outre-mer que sont la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Pierre et Miquelon, les Terres australes et antarctiques françaises et les îles Wallis et Futuna. Cela permettra de favoriser la circulation transfrontière des décisions de justice en matière civile et commerciale qui émanent de leurs juridictions ou dont l'exécution est recherchée sur leur sol. Ce faisant, nous permettrons à ces territoires de bénéficier du principe de confiance mutuelle à l'égard des juridictions et des ordres juridiques des uns et des autres. Les justiciables des collectivités d'outre-mer ayant le statut de PTOM bénéficieront ainsi d'une meilleure sécurité juridique et d'une meilleure prévisibilité dans les dossiers juridiques ayant des implications transnationales. À l'avenir, l'ensemble de leurs relations avec les États membres de l'Union européenne, l'Islande, la Norvège et la Suisse – et, éventuellement, les États tiers qui choisiraient d'y adhérer – sera régi par un seul et même texte.
Il était temps : rappelons que c'est à la suite d'une réunion interministérielle tenue en novembre 2010 que la France a décidé de devenir partie à la convention de Lugano II pour le compte de ses collectivités d'outre-mer ayant le statut de PTOM en vue de rapprocher les règles applicables sur l'ensemble du territoire national. Encore une fois, il était temps, et je vous en remercie !