Intervention de Anne Genetet

Séance en hémicycle du mercredi 18 septembre 2019 à 15h00
Compétence judiciaire et exécution des décisions dans les communautés d'outre-mer — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnne Genetet :

Les termes de l'accord ne sont pas simples à comprendre, rien que le titre ne faisant pas très envie. Pourtant, il est essentiel de se pencher sur cette convention. Beaucoup a été dit, si bien que je vais me contenter de donner deux exemples concrets pour illustrer, à destination de ceux qui nous regardent, la signification d'un tel accord, qui concerne des territoires bien lointains, mais qui est essentiel pour eux.

Le premier cas intéresse une entreprise. Prenons l'exemple d'une société néocalédonienne qui a vendu d'importantes quantités de nickel à une entreprise allemande. Celle-ci ne veut pas payer le prix convenu et prétend que le contrat est nul. Que faire ? Aujourd'hui, la société néocalédonienne assigne l'entreprise allemande devant le tribunal de Nouméa, lieu de réception de la marchandise par l'entreprise allemande, qui s'est elle-même chargée du transport. Le tribunal de Nouméa confirme la validité du contrat et condamne l'entreprise allemande à payer le prix convenu. Comment faire exécuter cette décision ? Après l'entrée en vigueur de la convention de Lugano II, la société néocalédonienne pourra faire déclarer exécutoire en Allemagne le jugement rendu par le tribunal de Nouméa, aux fins d'exécution forcée dans ce pays, c'est-à-dire afin de faire procéder à des actes d'exécution matérielle sur les biens ou les actifs que l'entreprise allemande y possède. Voilà tout ce que cette convention peut apporter ! La procédure prévue par la convention Lugano II est beaucoup plus simple que celle de la convention de Bruxelles actuellement applicable, selon laquelle la société néocalédonienne devrait effectuer plusieurs démarches supplémentaires pour éventuellement obtenir gain de cause. Rendre exécutoire de manière plus facile et rapide les jugements prononcés dans les PTOM sera très précieux pour ces derniers.

Le second cas est celui de la séparation de deux personnes originaires de pays différents, situation que je connais bien pour vivre à l'étranger. Un juge a prononcé un divorce entre une ressortissante polynésienne et un Hongrois et a octroyé une pension alimentaire, versée par ce dernier à son ancienne épouse et à leurs deux enfants. Chose qui arrive fréquemment – je rencontre quotidiennement de tels cas dans ma circonscription – , l'ancien mari est retourné en Hongrie et a évidemment – j'emploie cet adverbe, pardonnez-moi, mais il traduit l'émotion de mes concitoyens qui me contactent sur le sujet – cessé de verser la pension alimentaire : comment faire exécuter le jugement en Polynésie ? Il n'a plus ni compte ni bien en Polynésie ni en métropole. Grâce à la procédure simplifiée et allégée de la convention Lugano II, l'ancienne épouse pourra faire déclarer exécutoire en Hongrie la décision du juge sur la pension alimentaire : les biens et les actifs de son ancien mari pourront être saisis pour qu'elle puisse avoir une vie normale.

Voilà comment je voulais illustrer la façon dont cette convention pourra grandement faciliter la vie quotidienne des entreprises et des particuliers dans les pays et territoires d'outre-mer. Je vous invite donc à voter le projet de loi.

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