Sur ce sujet, il n'existe pas de réponse qui ne présente pas d'inconvénients. À partir du moment où l'on joue avec le temps pour la conservation des gamètes, il y a obligatoirement un effet boomerang lorsque surviennent des accidents, comme le décès d'un membre du couple.
On voit bien aussi que la proposition qui nous est faite aurait un effet cette fois domino. D'abord, dès lors que vous ouvrez la procréation médicalement assistée aux femmes seules, comment expliquer qu'elle serait refusée aux femmes ayant construit avec leur conjoint décédé un projet parental ?
Ensuite, vous considérez que dans la mesure où cette procédure peut se dérouler à l'étranger, il faudrait l'autoriser en France. Une telle logique de dumping éthique n'est pas souhaitable.
Il faut bien mesurer les conséquences en droit de nouvelles dispositions légales, notamment en matière de succession. Un enchaînement de délais peut apporter bien des complications : d'abord, six mois minimum à partir du décès, puis douze mois au cours desquels aura lieu l'insémination ou le transfert d'embryons, et enfin le temps de la grossesse. En tout, vingt-sept mois qui peuvent avoir des conséquences familiales ou patrimoniales si le défunt était chef d'entreprise, et si donc une entreprise fait partie de l'actif successoral. Les juristes nous ont alertés sur ces points.
Il est effectivement dommage que Mme la ministre Agnès Buzyn ne soit pas présente parmi nous pour pouvoir formuler ses interrogations, mais je veux les reprendre parce qu'elles m'ont donné matière à réflexion. Je pense, d'une part, au poids que l'on fait peser sur l'enfant de sa naissance intervenue après le décès de son père, et, d'autre part, aux pressions que son entourage familial pourrait exercer sur la femme. On aura beau prévoir d'organiser le recueil d'un consentement libre, on sait que les relations familiales sont souvent compliquées à gérer par le droit.
Pour ces raisons, je suis très réticent.