Intervention de Pascal Brindeau

Séance en hémicycle du mardi 15 octobre 2019 à 15h00
Bioéthique — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Brindeau :

L'exercice d'une explication de vote au sujet d'un texte complexe est d'autant plus délicat que les députés du groupe UDI, Agir et indépendants entendent exercer la liberté de vote dont ils disposent. Certains voteront pour ce texte, une majorité contre, tandis que les autres s'abstiendront.

Saluons tout d'abord la qualité de nos débats, marqués, au sein de la commission spéciale comme dans l'hémicycle, par le respect mutuel d'opinions par essence divergentes. Ces débats ont fait honneur à la représentation nationale.

Remercions Mmes les ministres et M. le secrétaire d'État pour avoir apporté les réponses les plus approfondies possibles à des questions de nature politique ou technique. Ces réponses ne nous auront peut-être pas convaincus, mais elles auront éclairé les débats.

S'agissant du coeur de ce texte moins éthique que politique, à savoir l'ouverture de la procréation médicalement assistée à toutes les femmes, nombre de nos collègues y ont vu la création d'un droit nouveau pour toutes les femmes qui ne porterait pas préjudice à d'autres catégories de la population.

D'autres considèrent en revanche que les conséquences de cette ouverture sur la filiation emportent une conception nouvelle du droit de la filiation, du lien de filiation, désormais fondé sur la seule volonté et non plus sur la réalité ou la vraisemblance biologiques, ce qui conduit à un basculement conceptuel, anthropologique, de la notion de lien de filiation, de lien de parentalité et de lien de famille. Ce faisant, il annonce forcément d'autres voies de procréation que les couples d'hommes ne manqueront pas de revendiquer légitimement : la gestation pour autrui.

Concernant la filiation, le Gouvernement propose un nouvel édifice juridique, différent de celui initialement proposé, mais qui demeure fragile en ce qu'il repose sur un non-sens : le postulat d'une stricte égalité entre la mère qui accouche et la mère dit « sociale ». Pas plus dans la construction de l'enfant que dans son intérêt juridique, cette construction théorique n'a de réalité. Elle n'a pas de sens sur le plan juridique, à moins d'éliminer toute référence à la réalité biologique du droit de la filiation, qu'il s'agisse d'un parent seul, homme ou femme, ou d'un couple hétérosexuel comme homosexuel.

Bien évidemment, faire droit à cette notion ouvrirait, là encore, la voie à l'établissement d'une filiation à l'égard de plus de deux parents.

Nous ne sommes pas certains non plus que la loi doive suivre et répondre aux demandes sociétales catégorielles.

Par ailleurs, ce texte est empreint d'une tendance libérale qui n'a pas manqué d'inquiéter en ce qu'elle pourrait conduire à transgresser certains principes éthiques fondamentaux auxquels nous sommes attachés et que nous tenons à réaffirmer : l'indisponibilité de l'état du corps humain, sa non-marchandisation, sous aucune forme que ce soit, le respect de la dignité et la gratuité du don.

Enfin, les débats ont fait émerger certains courants de pensée dont la cohérence intellectuelle est incontestable, mais qui militent déjà pour aller plus loin que les concessions déjà consenties par ce projet de loi.

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