En annonçant, le 10 septembre dernier, son intention de se séparer de son usine Chapelle Darblay de Grand-Couronne, le groupe finlandais UPM a lancé l'acte final de son désengagement de la production de papier graphique sur notre territoire national.
Après avoir fermé en 2014 l'usine de Docelles afin d'éviter qu'elle ne soit rachetée par un concurrent, UPM avait déjà mis à l'arrêt en 2015 la machine 3 de Grand-Couronne. Si UPM affirme vouloir chercher un repreneur, il est fort à craindre qu'aucun véritable projet industriel n'aboutisse, au regard du précédent de Docelles et de la pratique des grands groupes en la matière.
Chapelle Darblay, c'est aujourd'hui 218 salariés et près de 1 000 emplois induits. Disposant d'un outil de travail très moderne, installée en bord de Seine, Chapelle Darblay est aussi un acteur majeur de la filière du recyclage. Le site traite actuellement près de 350 000 tonnes de papier usagé par an, collectées auprès de 200 collectivités locales, qui lui permettent de produire 240 000 tonnes de papier recyclé.
Le marché national, évalué à 300 000 tonnes, est approvisionné majoritairement par des producteurs étrangers – situation qui pose d'ailleurs la question de la sécurité de l'approvisionnement de notre presse nationale. En cas de fermeture de l'usine, qui fournit 20 % du marché français, la presse française serait totalement à la merci des fournisseurs étrangers.
Grand-Couronne, c'est aussi un modèle d'économie circulaire, pouvant encore être perfectionné. L'usine est en effet alimentée par une chaudière biomasse équipée d'une turbine de 20 mégawatts, dont la production de vapeur et d'électricité est revendue.
La décision d'UPM relève avant tout d'une stratégie financière visant à réduire artificiellement la production afin de faire monter les prix et d'assurer un niveau de rentabilité à ses actionnaires.
UPM a indiqué vouloir engager le processus de fermeture si aucune offre de reprise acceptable à ses yeux n'était enregistrée avant janvier prochain. Tout doit donc être fait pour permettre la poursuite des activités de l'usine : à défaut de ce débouché pour écouler les papiers usagés collectés, les collectivités n'auraient vraisemblablement d'autre choix que de les incinérer, du fait de la raréfaction des débouchés à l'exportation. La presse écrite nationale, quant à elle, se trouverait à la merci de producteurs étrangers.
Les salariés de Chapelle Darblay, leurs représentants et leurs élus, soutiennent un projet préférentiel qui prendrait la forme d'une société coopérative d'intérêt collectif, dans le but de poursuivre la production de papier graphique. À cette fin, ils ont missionné un cabinet d'études dont les premières conclusions doivent être rendues à la mi-décembre.
Le démantèlement de notre appareil productif ne peut vraiment plus être de mise dans une zone urbaine, celle de Rouen, qui a déjà connu la fermeture de Petroplus et se trouve confrontée, à l'heure actuelle, à la situation de l'usine Lubrizol. Aussi je vous demande, monsieur le secrétaire d'État, de bien vouloir préciser les mesures que vous envisagez de prendre vis-à-vis des acteurs de terrain, et me dire si vous comptez répondre à leur demande d'organiser en urgence une table ronde réunissant tous les interlocuteurs et ministères intéressés.