Si vous le permettez, monsieur le président, j'évoquerai enfin l'argument selon lequel notre proposition se heurterait à l'échelon européen. Nous le connaissons par coeur : il est le meilleur prétexte pour refuser de mener des réformes en France ! Nous pouvons y répondre par un récit alternatif, fondé sur l'expérience : au moment d'adopter le devoir de vigilance, voilà quelques années, les mêmes réserves nous avaient été opposées – parfois par le même exécutif. Or l'expérience française a persuadé l'Europe de se doter d'une directive en la matière.
Bruno Le Maire a demandé à Patrick de Cambourg de défendre son rapport sur l'information extra-financière des entreprises – que j'ai contribué à inspirer, puisque j'ai été auditionné avec votre collègue Bénédicte Peyrol et que les propositions que nous avions formulées de concert ont été reprises pour l'essentiel – à l'échelle européenne. Nous proposons de faire de la France le laboratoire d'une nouvelle comptabilité intégrant la RSE, ce qui permettrait d'appuyer Patrick de Cambourg dans son plaidoyer européen, dont rien ne garantit, dans le contexte géopolitique actuel, qu'il aboutira avant plusieurs années.
Nous raterons, si vous persévérez dans votre rejet, une occasion extraordinaire de coopération, d'ouverture et d'innovation. En voulant garder le monopole du sujet de la réforme de l'entreprise, vous l'appauvrissez et le tuez. L'entreprise n'est pas tant définie par sa raison d'être que par sa façon de faire, laquelle doit être définie par la puissance publique et la démocratie, pour donner aux citoyens la capacité à la transformer.