Au nom du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, je ne peux que me féliciter de la présentation du rapporteur et de l'arrivée de cette proposition de loi dans nos débats.
J'observerai tout d'abord que, traiter de la question du logement, surtout de la façon dont cette proposition de loi le propose, c'est traiter d'un problème immense pour le pays parce que ce sujet du logement touche à de multiples questions, qui sont au coeur de la crise que connaît la société française.
Je n'en citerai que deux, à commencer par la question du pouvoir d'achat.
Nous avons bien vu, avec les gilets jaunes et depuis quelques mois, combien cette question travaille notre pays en profondeur, notamment ses milieux populaires. Or le logement est le facteur premier de la dégradation du pouvoir d'achat des familles populaires : moins de 10 % de la part du budget des ménages étaient consacrés au logement au début des années soixante ; nous en sommes à 30 % en moyenne, et à 40 à 45 % pour les milieux populaires. Il s'agit donc bien d'un sujet immense, au coeur de la crise que connaît notre pays.
L'autre question est celle de la fragmentation sociale, du séparatisme social, de la sécession. Quels que soient les mots pour le dire, comment, dans un pays fondé sur les principes républicains qui sont les nôtres, accepter la fragmentation, le séparatisme social, la ségrégation territoriale que nous connaissons ? Un ministre de l'intérieur avait tiré la sonnette d'alarme à la fin des années quatre-vingt-dix à propos de la région parisienne, disant que si nous continuions de la sorte, nous irions vers un apartheid urbain en Île-de-France. Depuis ce signal d'alarme tiré par M. Jean-Pierre Chevènement en 1999, tout s'est dégradé et le séparatisme n'a cessé de s'accentuer. Une étude récente de l'Institut d'aménagement et d'urbanisme de la région d'Île-de-France (IAURIF) et l'Insee montrent que le séparatisme social s'est accru.
Donc, le pouvoir d'achat et l'unité de la Nation – cette capacité à faire République et Nation ensemble – sont au moins deux des sujets qui sont au coeur de notre crise. Ils ne se traiteront pas, bien évidemment, seulement par le logement, mais en partie à travers une politique du logement. Le groupe GDR présentera des amendements pour l'examen du texte en séance. Nous ne l'avons pas fait en commission, mais nous aurons plusieurs corrections à apporter. Je pense, entre autres, que le sujet des APL mérite d'être mieux traité. Mais, grosso modo, la philosophie de cette proposition de loi nous convient parce que, depuis qu'il est aux affaires, ce Gouvernement malmène la question du logement.
Tout d'abord, de tous les budgets ministériels, depuis deux ans et demi, le budget du logement est celui qui a le plus baissé. Ensuite, cette loi ELAN est un contresens historique total : au moment où les pays qui s'étaient tournés vers le marché pour répondre aux problématiques du logement, comme l'Allemagne, l'Angleterre ou encore l'Espagne, renoncent à cette solution qui les a enfoncés dans la crise, nous faisons l'inverse. Alors que ces pays s'efforcent de remettre sur pied un système reposant sur de l'intervention et de l'investissement publics pour le logement des familles populaires, nous, nous empruntons le chemin inverse. Nous sommes dans un contresens historique et politique. Il est temps de se ressaisir !
Je conclurai en soulignant que les chiffres viennent corroborer cette position. Le hasard veut que, ce matin, ont été publiés les chiffres de la région parisienne. La production de logements sociaux en région parisienne enregistre une baisse de 20 %, qui fait suite à celle de même ampleur de 2018. Nous sommes sous le seuil qui nous permettrait de commencer à résorber la pénurie pour les quinze prochaines années. Le chiffre de production de logements sociaux accroît donc la pénurie en Île-de-France. Les mesures qui ont été prises, notamment celle d'assèchement des ressources des bailleurs sociaux qui les empêchent d'investir pour rénover et pour construire, sont absolument dramatiques.