Intervention de Sébastien Lecornu

Séance en hémicycle du mardi 19 mai 2020 à 9h00
Questions orales sans débat — Conséquences de la crise sanitaire pour les collectivités territoriales

Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales :

Vous avez raison de rappeler que les collectivités territoriales jouent un rôle important dans cette crise et que les conséquences financières seront nombreuses pour elles, mais de façon très inégale, selon la strate et surtout selon le moment.

Certains instruments de fiscalité sont contemporains, c'est le cas, bien sûr, de la taxe de séjour ou encore de la part de la fiscalité qui s'adosse aux courses hippiques et aux casinos. Les communes touristiques sont donc bien celles qui sont le plus fortement touchées. J'y ajouterais volontiers les communes d'outre-mer – certes fort éloignées de la Seine-et-Marne – , confrontées à la chute des recettes de l'octroi de mer.

Pour d'autres instruments de fiscalité, il y a un décalage dans le temps. Cela concerne particulièrement la fiscalité économique des intercommunalités, notamment avec les deux composantes de la contribution économique territoriale – CET – que sont la cotisation foncière des entreprises – CFE – et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises – CVAE. Ce décalage dépend du niveau de déclaration des entreprises, mais il est au minimum d'un an.

Pour être complet, il faut mentionner un troisième aspect que nous avons évoqué avec les élus de votre département, madame la députée. Je pense aux droits de mutation à titre onéreux, les DMTO, qui intéressent le bloc communal autant que le bloc départemental. Ils sont à ranger parmi les outils fiscaux « contemporains » : ces frais de notaire, pour parler de façon intelligible, s'ils ne sont pas perçus pendant une certaine période, font immédiatement défaut aux collectivités concernées ainsi qu'au système de péréquation entre les départements.

Voilà le constat ; il faut le documenter. Comme je l'ai dit la semaine dernière à Melun, je ne propose aucun chiffre. En effet, chacun y va de son estimation, mais les choses sont très compliquées à établir, en particulier pour la CVAE qui n'existait pas lors de la crise de 2008 – alors que pour les DMTO, nous disposons d'un élément de référence.

À ce stade, nous pouvons néanmoins affirmer qu'évidemment nous n'abandonnerons aucune collectivité territoriale. Il faut le dire, c'est important. De nombreux outils d'urgence sont disponibles. Je constate qu'à l'heure actuelle, heureusement, ils sont peu sollicités, ce qui signifie que la tension n'est pas insurmontable. Je pense aux avances de douzièmes de dotation globale de fonctionnement mais aussi de fiscalité, consenties afin que le niveau de trésorerie des collectivités territoriales soit toujours satisfaisant et qu'aucune d'entre elles ne soit en panne.

Je n'ai pas le temps de traiter la question des dépenses liées à la lutte contre le covid-19. Avec Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics, nous avons trouvé un certain nombre de solutions afin que ces dépenses ne déstabilisent pas trop durablement le budget de fonctionnement des collectivités.

Une fois que nous aurons documenté l'ensemble des pertes, il faudra se poser la question du plan de soutien et de la façon dont nous traiterons le problème. Il y aura des rendez-vous législatifs – j'ai cru comprendre qu'un projet de loi de finances rectificative vous serait bientôt soumis ; toutefois, étant donné ce que je vous ai dit des décalages dans le temps, nous voyons bien qu'il faudra traiter cela dans le projet de loi de finances pour 2021, à la fin de l'année.

Nous devrons alors voir comment nous pourrons intervenir. Pour ce qui concerne les recettes, madame la députée, vous avez dit que la compensation ne se ferait pas à l'euro près. Or la fiscalité locale est malheureusement beaucoup trop complexe pour adopter cette approche : il faudra examiner les situations au cas par cas, en fonction des instruments fiscaux qui n'ont pas tous la même nature et le même fonctionnement. Des questions se poseront aussi en matière de péréquation entre les territoires, les intercommunalités, les communes et les départements les plus riches et les plus pauvres.

Le chantier est de taille. M. Jean-René Cazeneuve qui préside la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de votre assemblée est missionné par le Gouvernement pour l'épauler et documenter cet important sujet.

Enfin, il faut évoquer le rôle des collectivités dans la relance économique, en particulier grâce à l'investissement public. C'est pour qu'elles puissent agir en la matière que nous voulons leur donner de la visibilité le plus rapidement possible.

Madame la députée, je vous remercie pour l'attention que vous portez à ces sujets, y compris en ce qui concerne votre intercommunalité.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.