La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures.
La parole est à M. Bertrand Sorre, pour exposer sa question, no 1026, relative au conseil de prud'hommes d'Avranches.
Madame la ministre de la justice, je souhaite vous interroger sur le devenir des conseils de prud'hommes d'Avranches, dans la Manche, et sur le projet de la chancellerie qui suscite l'inquiétude des conseillers prud'homaux. Il est en effet prévu de réduire le nombre de conseils prud'homaux dans le cadre de la réforme de la justice et de l'instauration des tribunaux judiciaires. Le conseil de prud'hommes d'Avranches figure sur la liste des vingt-deux sites menacés de fermeture ou de réduction de sections. Je salue, madame la ministre, l'esprit de votre réforme qui vise à faciliter l'accès à la justice et à renforcer sa proximité, point essentiel pour la justice prud'homale dont l'avantage, rappelons-le, est un fonctionnement peu coûteux qui s'appuie sur la mobilisation des employeurs, mobilisation qu'un éloignement viendrait freiner. La suppression d'une juridiction spécialisée en droit du travail imposerait au justiciable des déplacements plus importants qu'aujourd'hui, nécessairement plus coûteux, voire dissuasifs.
La Manche bénéficie d'une dérogation lui permettant de disposer de deux conseils de prud'hommes pour un seul tribunal judiciaire, ce qui tient compte de la géographie particulière de ce département très étendu en longueur. Il est important de souligner que les cinq sections actuelles sont très utiles et que les audiences foraines doivent prochainement reprendre sur le site du tribunal judiciaire d'Avranches. De surcroît, la pandémie du covid-19 et la période de confinement ont contraint à reporter les audiences, ce qui va vraisemblablement accentuer le retard dans l'instruction des affaires. Qui plus est, l'on peut craindre une augmentation significative du volume d'affaires à traiter avec l'apparition de contentieux entre employeurs et salariés découlant directement de la crise sanitaire. J'ajoute qu'il devrait en être de même du côté des affaires civiles au vu de la hausse malheureusement attendue des divorces et des cas de violences intrafamiliales.
Compte tenu de ces éléments, madame la ministre, confirmez-vous le maintien du conseil de prud'hommes d'Avranches et de l'ensemble de ses sections afin que je puisse apporter aux conseillers, aux élus locaux, aux salariés et aux employeurs les nouvelles rassurantes qu'ils attendent ?
Depuis plusieurs années, des demandes d'ajustement des effectifs de conseillers prud'homaux émanent, de manière récurrente, des partenaires sociaux. Pour y répondre, un groupe de travail a été institué dans le cadre du Conseil supérieur de la prud'homie, son objectif étant de réviser le nombre de conseillers au regard de l'évolution de l'activité des différentes sections, c'est-à-dire du nombre de contentieux effectivement traités, et de l'évolution des bassins économiques et des flux de population. Le bilan du renouvellement général des conseillers prud'homaux a par ailleurs fait apparaître un nombre important de sièges non pourvus en l'absence de propositions de candidatures émanant des organisations syndicales et professionnelles.
Le groupe de travail a donc examiné la situation de chacun des 210 conseils de prud'hommes. Il s'est agi, à titre principal, d'ajuster les effectifs et la répartition des sièges entre chacune des cinq sections d'un même conseil. Dans un nombre de cas très limité, il est envisagé une autre organisation, notamment pour l'activité des sections encadrement et agriculture : lorsqu'il existe, dans un département, plusieurs conseils de prud'hommes, l'un d'entre eux pourrait connaître de tout le contentieux de la section encadrement et un autre de tout le contentieux de la section agriculture ; il serait aussi envisageable qu'un conseil se charge de tout le contentieux de l'agriculture et que le contentieux relevant de la section encadrement continue, lui, à être examiné par chacun des deux conseils.
Pour le conseil de prud'hommes d'Avranches, je note que moins de cinq affaires en matière d'agriculture ont été enregistrées depuis trois ans. C'est dans cette perspective que le regroupement de ce contentieux pourrait être envisagé. Reste qu'aucun arbitrage n'a été rendu à ce stade et, dans la droite ligne des engagements que j'ai pris lors de l'examen du projet de loi sur la réforme de la justice, je confirme que je n'envisage aucun projet de réorganisation sans consultation des acteurs locaux et que je ne souhaite fermer aucun lieu de justice.
Un grand merci, madame la ministre, pour la précision – à laquelle vous nous avez habitués – de votre réponse.
Sourires.
La parole est à M. Yannick Favennec Becot, pour exposer sa question, no 1042, relative à la vie culturelle dans les territoires ruraux.
Monsieur le ministre de la culture, devant l'ampleur de la crise sanitaire que nous traversons et de ses conséquences pour l'ensemble des secteurs économiques, j'appelle plus particulièrement votre attention sur la situation des associations culturelles organisant des festivals, notamment ceux qui devaient réunir plus de 5 000 participants ce printemps et cet été : je pense au festival Au Foin de la Rue, au festival des Mouillotins ou encore à celui des Trois Éléphants, dans mon cher département de la Mayenne. Vous savez, monsieur le ministre, que ces rassemblements contribuent fortement à l'attractivité et au dynamisme de nos territoires, ainsi qu'au développement du lien social, notamment en ruralité. Vous savez aussi que ces événements reposent sur des équilibres financiers souvent précaires et donc sur l'engagement et sur le dévouement dont font preuve sans compter des milliers de bénévoles.
Beaucoup de collectivités territoriales ont constitué, comme c'est le cas dans ma région Pays de la Loire, un fonds d'urgence et ont maintenu les subventions versées à ces associations, malgré l'annulation des manifestations. Nombre d'entre elles peuvent également bénéficier de mécanismes de soutien à portée générale mis en place par l'État. Mais, monsieur le ministre, vous savez aussi que cela ne suffira pas, loin de là, à assurer leur survie et la pérennité de ces festivals pour les prochaines années.
C'est pourquoi je souhaite savoir quels outils complémentaires vous comptez mettre en place. Ne serait-il pas possible d'utiliser dans chacun des départements concernés, en l'abondant à titre exceptionnel cette année, le Fonds national de développement de la vie associative en fléchant prioritairement ses crédits vers les associations organisatrices de festivals ?
Vous avez raison, monsieur le député, de souligner que la culture est frappée de plein fouet par la crise sanitaire, tout particulièrement les festivals. Ceux-ci sont pour nos compatriotes un rendez-vous, généralement printanier ou estival, un moment où partager des émotions communes devant la représentation des arts qu'ils préfèrent – bien sûr la musique, mais ce peut être aussi le cinéma, le théâtre et bien d'autres encore. Bénévoles, salariés, artistes et techniciens qui participent à l'organisation de ces festivals sont effondrés parce que ces rendez-vous sont évidemment essentiels dans leur vie.
Le Gouvernement a immédiatement pris, vous l'avez rappelé, plusieurs dispositions de portée générale à l'attention de ceux qui organisent les festivals, comme l'accès au chômage partiel et le recours au fonds de solidarité qui permet de les accompagner, y compris les toutes petites structures. L'État a maintenu, comme la plupart des collectivités, ses subventions pour les festivals. Nous entendons en outre prendre des mesures destinées à accompagner les festivals à l'avenir : je pense bien évidemment à ce qui a été annoncé pour les techniciens et pour les artistes du spectacle vivant, les intermittents devant bénéficier d'une prolongation de leurs droits jusqu'à la fin du mois d'août 2021. C'est essentiel pour leur permettre de préparer sereinement les futurs festivals. Nous avons ensuite pris la décision de créer un fonds festivals, qui sera financé par les collectivités territoriales ou du moins, en partie, par les fonds qu'elles leur consacrent et dont vous avez rappelé l'existence. Ce fonds permettra de passer le cap de la mise en sommeil de cet été et, éventuellement, d'organiser ces festivals sous des formats différents, l'idée étant qu'ils renaissent en 2021 avec toute la force qu'on attend d'eux.
« Formats différents », disais-je, car vous savez que si les rassemblements de plus de 5 000 personnes sont interdits jusqu'à au moins la fin du mois d'août, nous allons examiner la question de savoir comment organiser, cet été, d'une façon différente de celle prévue, les festivals devant rassembler moins de 5 000 personnes. Une décision sera prise à la fin du mois de mai en fonction de l'évolution de l'épidémie. Nous verrons alors s'il sera possible d'aller plus loin dans le déconfinement et d'autoriser des rassemblements plus importants que ceux de dix personnes au plus, les seuls autorisés aujourd'hui. Si c'est le cas, le Gouvernement verra comment accompagner les festivals désireux d'organiser des événements dans ce nouveau cadre. Ces derniers seront donc d'un format forcément différent de celui de ces dernières années, mais cela permettrait tout de même de maintenir une certaine activité.
La détermination du Gouvernement, en lien avec les collectivités territoriales, est en tout cas totale, tant les festivals sont essentiels à la vie culturelle du pays. Les Français doivent en effet pouvoir se retrouver de nouveau partout en France, à l'occasion des festivals, pour partager leurs émotions.
Je vous remercie monsieur le ministre pour votre réponse. Nous comptons sur votre action pour pérenniser ces grands rendez-vous, si importants dans nos territoires.
La parole est à Mme Pascale Fontenel-Personne, pour exposer sa question, no 1028, relative aux conséquences de la crise sanitaire sur le tourisme.
Depuis le début de la crise sanitaire, l'activité économique du secteur touristique est à l'arrêt. Je rappelle qu'il représente 8 % du produit intérieur brut. La France est donc durement menacée et son rayonnement largement fragilisé.
L'État a pris des mesures très fortes, à la hauteur de l'enjeu, pour protéger cette filière indispensable à l'économie française. Les annonces faites à l'issue du comité interministériel du tourisme, le 14 mai dernier, ont répondu aux attentes des acteurs : les ordonnances relatives aux avoirs, le chômage partiel, les prêts garantis par l'État et l'assurance donnée par le Gouvernement de prolonger et d'adapter les aides le temps nécessaire, ont été très appréciés, tout comme l'annonce de l'annulation des charges car il s'agit bien en effet d'envisager, pour certains opérateurs, une année blanche et donc d'organiser leur survie en attendant la reprise.
Au-delà du front économique, le tourisme social, renommé dans mon rapport remis au Premier ministre, « tourisme pour tous », doit faire l'objet d'une mobilisation particulière car il entend jouer pleinement son rôle. Pour reprendre les mots du secrétaire d'État Jean-Baptiste Lemoyne, le tourisme sera cette année « bleu, blanc, rouge ». Eh oui, disons-le haut et fort : seule la solidarité touristique permettra de sauver la saison 2020. Mais cela ne pourra se faire que si tous les Français ont la capacité de partir en vacances en France, sachant que les étrangers ne seront malheureusement pas au rendez-vous. Or, l'an passé, encore un Français sur trois ne partait pas en vacances. Qu'en sera-t-il cette année alors que la France aborde une crise économique majeure ? Le tourisme social n'a pu être évoqué lors du conseil interministériel… Pourtant, les conclusions de mon rapport d'information, Le tourisme pour tous, sont sur la table des négociations. À cet égard, pouvez-vous nous confirmer que, d'ici à la fin mai, les mesures d'aide au départ en vacances telles que la diffusion accrue du chèque-vacances, le développement des colonies « summer camps » ou encore d'autres mesures d'aide à la mobilité seront bien annoncées et nous indiquer quelles formes ces mesures pourraient prendre ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
Merci, madame Fontenel-Personne, pour le travail que vous accomplissez et en particulier pour le rapport sur Le tourisme pour tous que vous avez rédigé. Ce rapport, très utile et inspirant, sera largement appliqué et fera l'objet de diverses annonces. Il est nécessaire d'utiliser à la fois la longue-vue, pour avoir une vision de long terme, et le microscope, pour assurer, sur le très court terme, le déroulement de la saison estivale 2020. Cette dernière, même si elle sera sûrement très différente de celles que nous avons connues les années précédentes, du fait des divers protocoles sanitaires qui devront être appliqués, sera néanmoins, je l'espère, tout aussi réussie pour les Français.
L'été bleu, blanc, rouge que j'appelle de mes voeux, nécessitera, très clairement, que nous menions des actions en matière de tourisme social. Le Président de la République a réuni vendredi dernier les ministres concernés par cette question afin de travailler à ces dispositifs, qui s'articuleront autour de plusieurs mesures. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, et Gabriel Attal, son secrétaire d'État, travaillent à l'organisation de « vacances apprenantes » et à la remise en marche de certaines colonies de vacances. Nous devons également, plus que jamais, encourager les classes découverte – nous y travaillons notamment avec l'UNAT, l'Union nationale des associations de tourisme.
S'agissant des infrastructures, diverses mesures visant à abonder les fonds d'aide à la rénovation de certains établissements ont déjà été arrêtées à l'occasion du CIT – comité interministériel du tourisme – qui s'est tenu le jeudi 14 mai. Elles constituent un premier pas.
Par ailleurs, Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement, travaille activement à la question des quartiers de la politique de la ville, en lien avec plusieurs acteurs associatifs. Vous évoquez en outre, dans votre rapport, le dispositif des chèques-vacances. Pour cette saison, nous travaillons, notamment avec les régions, à la création d'un dispositif spécifique afin de de proposer un chèque-vacances tourisme 2020. L'objectif consiste à additionner les efforts. Une réunion sur cette question se tenait hier encore à mon cabinet, et le Président de la République souhaite que nous annoncions, au début du mois de juin, l'ensemble des mesures qui permettront au maximum de Français de partir en vacances après l'épisode traumatique que nous avons vécu.
Je tiens enfin à saluer tous les travaux conduits par la Fédération nationale de l'hôtellerie de plein air, la FNHPA, qui, chacun le sait, représente la moitié des hébergements disponibles et contribue à accueillir de nombreux Français pendant leurs vacances. Les gérants de campings ont hâte d'accueillir à nouveau les Français – et peut-être également les ressortissants d'autres nationalités si les conditions sanitaires et de circulation en Europe le permettent – , parce que ce sont des professionnels de l'accueil, parce qu'ils ont envie d'offrir de belles expériences à leurs clients et parce que la France occupe le premier rang dans ce domaine. Ils seront évidemment une composante très importante d'un été 2020 réussi pour tous les Français.
Je vous remercie à nouveau pour votre contribution à la tête du groupe d'études consacré à la valorisation des activités touristiques, lequel apporte une aide très précieuse, dans ce moment de crise, afin de gérer au mieux les conséquences économiques de l'épidémie pour le secteur du tourisme.
La parole est à M. Julien Aubert, pour exposer sa question, no 1039, relative à l'activité touristique pendant l'été 2020.
Vous avez en effet participé, monsieur le secrétaire d'État, au cinquième comité interministériel du tourisme, présidé par le Premier ministre. Ce dernier a annoncé une série de dispositifs que vous venez de décrire. Ces mesures ne sont toutefois pas de nature à remplacer le chiffre d'affaires réalisé grâce à la venue de clients. Or vous savez qu'une incertitude persiste puisque l'état d'urgence sanitaire se prolongera pendant le mois de juillet. La question se posera donc de la possibilité réelle, pour les Français, de partir en vacances, étant entendu que les étrangers, au vu de la fermeture partielle de nos frontières et de l'état de nos transports, seront peu nombreux.
Je poserai trois questions. D'abord, disposez-vous de prévisions concernant l'activité dans les secteurs du tourisme et de l'hôtellerie-restauration au mois de juillet, en particulier pendant la première quinzaine de ce mois ?
Ensuite, je salue évidemment le lancement de la campagne de communication visant à favoriser les séjours en France, intitulée « Cet été, je visite la France », d'autant plus que les députés du groupe Les Républicains vous l'avaient proposée sous un autre nom.
Mais pourquoi ne pas prévoir, en complément, des mesures de défiscalisation, d'exonérations de charges, ou d'autres incitations financières, portant par exemple sur les réservations de vacances ? Nous vous avions suggéré d'agir en ce sens dans un courrier que nous vous avons adressé.
Enfin, je souhaite savoir si un remboursement des communes qui accordent une exonération des droits de voirie pour les terrasses de cafés et de restaurants est prévu, afin d'inciter à la généralisation de cette mesure et d'encourager le passage en terrasse.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
Vous le savez, le Président de la République a fait du tourisme une priorité nationale. Cette volonté s'est illustrée au cours de sa rencontre avec les professionnels du secteur le 24 avril, à l'issue de laquelle des mesures d'aide au secteur, représentant un effort de 10 milliards d'euros, avaient été annoncées. Le chef de l'État avait également appelé à ce qu'un véritable plan de sauvetage soit déployé. C'est ce qui a été annoncé jeudi dernier : 8 milliards d'euros supplémentaires y seront consacrés, portant à 18 milliards d'euros l'effort de soutien au secteur touristique – qui en a bien besoin, parce qu'il a été touché le premier, et de plein fouet, par la crise.
Il est tout d'abord important que le tourisme national reparte, ce qui supposera de relancer le moteur de la consommation domestique. Chacun le sait, les deux tiers des recettes touristiques du pays proviennent des Français eux-mêmes. En outre, du fait des difficultés à circuler, non seulement au sein de l'Union européenne mais partout dans le monde, les 90 millions de touristes étrangers qui visitent la France chaque année, dont 17 millions en saison estivale, ne seront pas ou peu présents au rendez-vous. Il est par conséquent important que nous soutenions, dans un esprit de solidarité, les professionnels du tourisme, très affectés par la crise sanitaire.
Nous avons pris des dispositions pour permettre les départs en vacances. Ces derniers seront nécessaires : les Français ont besoin de prendre un bol d'air après avoir vécu ces événements particulièrement anxiogènes. Nous avons en effet lancé la campagne « Cet été, je visite la France », dont nous avons puisé l'inspiration, pas tant chez les députés du groupe Les Républicains – vous me pardonnerez donc de ne pas vous verser de droits d'auteurs – que chez les professionnels du patrimoine, comme Stéphane Bern, particulièrement mobilisé sur cette question.
Cette campagne sera relayée par Atout France, qui travaillera naturellement avec les territoires, régions ou départements, qui constituent autant de destinations touristiques en France.
S'agissant ensuite des perspectives pour cet été, l'annonce, le 14 mai, du fait que les Français pourraient partir en vacances en juillet et août, a créé un véritable déclic psychologique : tous les témoignages des professionnels du secteur qui me parviennent depuis jeudi dernier font état d'un bond des réservations. C'est le cas, par exemple, de la chaîne de résidences de tourisme Belambra Clubs, qui me signalait que son déficit de réservations par rapport à l'année dernière était passé de 85 % à 15 % : si le solde reste négatif, on constate, globalement, une reprise notable des réservations. C'est également le cas d'un groupe aussi important que Pierre & Vacances-Center Parks, qui fait état de réservations en hausse de 20 % par rapport à la même période de l'année dernière. Tout cela me semble aller dans le bon sens.
Afin d'inciter les Français à réserver, nous avons également pris contact avec les professionnels du secteur. Je remercie l'UMIH – Union des métiers et des industries de l'hôtellerie – , le GNI – Groupement national des indépendants – , les entreprises du voyage, ou encore le SETO – Syndicat des entreprises du tour-operating – , qui ont accepté de pratiquer une politique d'annulation des réservations particulièrement flexible en cas d'événement lié au covid-19, en élargissant les possibilités de remboursement. Nul doute que cette souplesse aidera les consommateurs à se projeter et qu'ils n'hésiteront pas à réserver.
L'appui aux collectivités locales prendra la forme d'une prise en charge directe, par l'État, de 50 % de l'exonération de CFE – cotisation foncière des entreprises – qu'elles pourraient octroyer aux entreprises du tourisme, dans la limite d'un dégrèvement qui pourra atteindre deux tiers de la CFE. Nous avons en effet constaté que certaines collectivités avaient pris de telles mesures pour accompagner les acteurs du tourisme.
Le travail se poursuit. Je vais réunir aujourd'hui le comité de filière tourisme, comme je le fais chaque semaine pour faire le point, avoir un retour d'expérience et adapter les dispositifs dès que la nécessité s'en fait sentir. Nous sommes tous mobilisés autour de ce joyau national qu'est le tourisme pour préparer la saison 2020, qui sera sûrement un peu différente mais, je le souhaite, tout aussi réussie que les précédentes.
Dans le Vaucluse, les sites inscrits au patrimoine mondial de l'UNESCO, comme le Palais des papes ou le théâtre antique d'Orange restent fermés et le festival d'Avignon a été annulé. Je ne partage donc pas totalement votre optimisme, notamment pour le mois de juillet. Je renouvelle ma proposition consistant à mettre fin au zonage et à décaler les vacances estivales au mois de septembre afin d'allonger la saison touristique.
La parole est à M. Éric Coquerel, pour exposer sa question, no 1021, relative à l'enterrement à l'étranger des personnes décédées pendant la crise sanitaire.
Durant l'épidémie de covid-19, nombreux sont ceux qui ont perdu un proche. J'adresse à toutes ces personnes mes plus sincères condoléances. La perte d'un proche est toujours dramatique et, dans le contexte épidémique que nous connaissons, elle porte un coup très dur aux familles car, pour des raisons sanitaires, il leur a été interdit d'assister au dernier souffle de leur proche et, pour ces mêmes raisons, il a été interdit aux familles de se recueillir auprès de leur défunt, comme elles l'avaient imaginé.
Vous le savez, pour un nombre important de personnes résidant en France, l'enterrement d'un membre de la famille se déroule dans son pays d'origine. Il s'agit là d'une tradition culturelle forte, répondant souvent à la dernière volonté du défunt. Or, depuis le début de la crise, le rapatriement des corps des défunts dans leur pays d'origine a été interdit. Le deuil, l'enterrement des morts font partie des rites humains les plus anciens. Ce serait un échec collectif que de ne pas pouvoir respecter les dernières volontés d'un défunt – qu'il ne puisse pas reposer auprès de son conjoint ou de sa lignée familiale, dans son pays d'origine.
Monsieur le secrétaire d'État, la crise sanitaire que nous connaissons ne doit pas remettre en cause les fondements de notre humanité. Je suis sûr que vous partagez cette préoccupation. C'est pourquoi je vous demande ce que vous comptez faire pour établir une coopération internationale afin d'assurer le retour des corps à l'étranger, le plus rapidement possible, dans le respect des règles sanitaires.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
Vous faites référence à des épisodes particulièrement douloureux qui se sont déroulés ces dernières semaines : ces moments où l'Ankou, armé de sa faux – pour reprendre une légende bretonne – a emporté nombre de nos compatriotes ou de personnes résidant en France, entraînant son lot de douleurs. À ces douleurs s'est ajoutée celle liée aux conditions matérielles imposées par l'épidémie, qui ont rendu difficile l'accompagnement d'un être aimé dans ses derniers moments, voire le respect des dernières volontés du défunt. Nous en sommes tout à fait conscients.
Il est d'autant plus complexe de répondre à ces considérations que, juridiquement, le transport international des corps de personnes décédées pendant l'épidémie n'a fait l'objet d'aucune dérogation par rapport au régime de droit commun. Un laissez-passer mortuaire pour l'étranger ou une autorisation de sortie du territoire sont le plus souvent exigés. Or, chacun le sait, plusieurs situations ont été très compliquées à gérer : dans certains cas, le transport international d'un corps a été retardé, voire empêché, tout simplement parce que plusieurs pays de destination ont provisoirement refusé le rapatriement de corps ou exigeaient un certificat de non-épidémie qu'il n'était pas possible de délivrer en période d'état d'urgence sanitaire.
Ces difficultés ont conduit les familles à prendre des dispositions transitoires, en déposant le corps dans un caveau provisoire – comme il en existe dans certains cimetières – ou dans un dépositoire, pour une durée maximale de six mois, avant de pouvoir exécuter les volontés du défunt et lui donner un nouveau lieu de sépulture à l'étranger.
Je sais que le ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales mène un travail d'information particulièrement actif auprès des familles, des opérateurs funéraires et du réseau des préfectures et des services consulaires. Jean-Yves le Drian et moi-même sommes très attentifs à cette situation et n'hésitons pas à relayer auprès de nos homologues étrangers les attentes des familles. J'espère que, petit à petit, à mesure que l'épidémie recule dans différents territoires, nous pourrons obtenir que ces personnes puissent enfin accompagner leurs proches vers leur dernière demeure.
Je le répète, j'ai conscience de la complexité de la situation et je sais qu'il n'y a pas de solution définitive, mais je tiens à rappeler que le travail se poursuit sans relâche pour raccourcir les délais et rapprocher les familles de ce dernier moment d'intimité qu'elles pourront avoir avec leur proche là où il aura souhaité être enterré.
Merci, monsieur le ministre, de m'avoir répondu à propos de la gestion de ces situations en France, mais ma question portait plutôt sur ce que vous comptez faire sur le plan diplomatique, car la question se pose vis-à-vis de pays étrangers, dont plusieurs, comme vous le savez, sont situés de l'autre côté de la Méditerranée pour ce qui concerne mon département de la Seine-Saint-Denis. Il convient d'engager très vite des actions diplomatiques, car les familles ont entreposé les corps dans des chambres froides ; or cette situation ne peut pas s'éterniser, tant à cause de son coût que pour répondre à la nécessité du deuil. Je compte donc sur vous pour agir sur ce plan.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour exposer sa question, no 1024, relative au rattrapage des cours non dispensés pendant le confinement.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, depuis le 16 mars, 12 millions d'élèves ont quitté leurs classes et leurs enseignants. Où en sommes-nous dix semaines plus tard ? À l'évidence, le confinement des élèves a accentué les fractures sociale, scolaire et numérique. Il ne pouvait pas en être autrement, car on sait que l'accès au savoir n'est pas le même d'une famille à une autre, que les conditions de vie, notamment d'habitat, diffèrent considérablement d'une famille, d'un département ou d'une catégorie sociale à l'autre et que le décrochage numérique est une réalité pour bon nombre de familles. Certaines zones rurales comportent des zones blanches et certaines familles ne possèdent qu'un seul ordinateur, voire un seul téléphone portable. En outre, il n'y a pas eu, durant cette période, la dynamique pédagogique de la classe, à laquelle se sont souvent substituées des disputes dans la fratrie pour savoir qui disposerait du seul lien numérique de la famille. On ne peut donc pas considérer qu'il y ait eu continuité pédagogique pendant le confinement : il y a ceux pour qui les liens ont été totalement rompus, ceux pour qui ils ont été maintenus par les efforts des parents et des enseignants, mais pour qui l'enseignement s'est fait en pointillé – des pointillés parfois très espacés – , et aussi, fort heureusement, ceux qui ont pu continuer l'apprentissage.
Notre système éducatif ne peut pas fonctionner sans l'école, sans les classes, sans les enseignants, sans les dynamiques de groupe. Comme vous l'avez fait à plusieurs reprises, je tiens à saluer l'implication et le courage dont ont fait preuve les enseignants pour maintenir coûte que coûte le lien pédagogique pendant cette période, à force d'innovation, de mobilisation et, parfois, d'engagement personnel très fort.
Depuis le 11 mai, la reprise est engagée. Elle est, on le sait, très partielle et se fait sur la base du volontariat, dans des conditions qui peuvent être très différentes d'un endroit à un autre selon la configuration des villes et des classes et selon la sociologie des communes ou des quartiers, mais s'il ne s'agit plus du confinement, ce n'est pas non plus la reprise de l'école. De fait, ce n'est pas de la garderie, mais pas vraiment non plus de l'école. Dans ma ville, un enseignant me parlait d'« accueil pédagogique ».
La question du rattrapage des semaines de confinement est donc posée et j'imagine que vous-même et votre ministère y réfléchissez. Comment faire pour ne pas pérenniser ce trou noir de trois mois, quels que soient les moyens mis en oeuvre ? Est-il envisagé, comme le proposent certains universitaires et enseignants, d'opérer au cours des années prochaines un lissage des trois mois de programme qui n'auront pas pu être étudiés, afin que ce retard ne soit d'aucune manière entériné, ce qui creuserait un peu plus les inégalités ?
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Je partage en grande partie votre déception – mais en grande partie seulement. Je souscris aisément à l'épine dorsale de votre argumentation, qui consiste à dire que l'école est fondamentale – en d'autres termes, qu'on ne peut pas se passer de l'école. Pour ceux qui n'en auraient pas été convaincus avant le confinement, ce dernier a malheureusement démontré qu'on a besoin de l'école, et c'est bien pour cela que le déconfinement est aujourd'hui nécessaire. L'école est la clé de l'unité de la République, de l'égalité des chances et de la compensation des inégalités familiales – vous l'avez très bien dit et nous allons évidemment être d'accord sur ce point.
Il ne faut cependant pas noircir le tableau. Il y a eu, en effet, continuité pédagogique. Certains y ont, hélas, échappé : c'est le cas des fameux 4 % de décrocheurs. Ce chiffre est, au demeurant, une moyenne : il est, en certains endroits, beaucoup plus élevé, et en d'autres beaucoup moins. Il faut aussi compter avec des imperfections générales. Toutefois, ne minimisons ni les problèmes ni les forces.
Minimiser les problèmes, ce serait ne pas voir que l'Europe en son entier – le continent qui a été le plus touché dans le monde – , que les sociétés européennes sont en quelque sorte affectées dans leur lien avec l'école. C'est pourquoi il faut non seulement restituer ce lien mais encore, compte tenu des difficultés que nous avons eues, nous efforcer de le renforcer.
Ne minimisons pas non plus les forces. Vous l'avez dit, les professeurs se sont engagés. La France a probablement été l'un des pays les meilleurs en matière d'enseignement à distance, ne serait-ce que parce que nous avions préparé depuis deux ans ce système de la classe à la maison et parce que les professeurs se sont magnifiquement engagés.
Je me trouvais hier dans un collège de Pacy-sur-Eure qui reprenait le travail. Les élèves que j'y ai vus avaient connu la continuité pédagogique et ce qui leur était proposé n'était pas un « accueil pédagogique » – je suis en cela en désaccord avec vous. Il ne faut surtout pas dénigrer ce qui se passe. Si j'ai demandé que la rentrée se fasse d'abord par niveau, en même temps que par public prioritaire, c'est bien pour assurer la charpente de l'éducation nationale : il s'agit vraiment de faire classe en mai et juin, même si cela se fait d'une manière différente. L'école ne doit pas être une garderie. Elle est le lieu de la transmission des savoirs, et c'est le cas actuellement, même si, je vous l'accorde, c'est encore imparfait.
Pour répondre directement à votre question, il est certain qu'un rattrapage scolaire est nécessaire. Tout au long du mois de juin, je procéderai à des concertations afin de réfléchir à l'année 2020-2021. Ce rattrapage passera surtout par des modules de soutien scolaire gratuit. La réflexion que je mène sur ce point englobe les vacances d'été et l'année 2020-2021.
La parole est à M. Maxime Minot, pour exposer sa question, no 1035, relative à la réouverture des écoles en période de déconfinement.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, alors que notre pays traverse une crise sans précédent et est entré dans une seconde phase, celle du déconfinement progressif, la question de la réouverture des écoles est hautement sensible et, très certainement, fort épineuse. Permettez-moi d'ailleurs de remercier à travers vous tous les enseignants qui, lors du confinement, ont assuré, comme vous venez de le dire, la continuité pédagogique, laquelle a parfois été rendue très difficile par les inégalités sociales et territoriales, ainsi que par la fracture numérique dont je vous ai déjà parlé à maintes reprises.
Je voudrais comprendre les motivations qui ont présidé à votre décision, visant notamment à assurer la prise en charge des enfants les plus vulnérables. En effet, je n'ai pas été convaincu, en raison de la responsabilité que vous faites peser sur les élus et des surcoûts induits pour les collectivités – qui ne seront sans doute pas compensés. Ainsi, de nombreux maires de l'Oise ont pris des arrêtés différant la réouverture des écoles, voire la reportant à septembre. En tant qu'ancien maire, je mesure pleinement leurs réticences.
Je ne suis pas convaincu non plus par le contenu pédagogique proposé. Dans de nombreux cas, en effet, la reprise de l'école s'accompagne d'un retour à la normale, mais elle se limite parfois à de la garderie et isole les enfants les uns des autres pour limiter tout contact, ce qui entraîne pour eux de la frustration.
Enfin et surtout, je ne suis pas convaincu non plus en raison du risque sanitaire que votre décision fait courir aux enfants aux parents, aux enseignants et aux personnels municipaux. Dans le département de l'Oise, qui est toujours classé rouge, les écoles referment leurs portes quelques jours seulement après les avoir rouvertes, en raison des nombreux cas de covid-19 détectés.
Comme dans de nombreuses situations, il faut ici mettre en balance les bénéfices et les inconvénients. Ici, la balance penche indéniablement du mauvais côté, et je ne m'en réjouis pas – bien au contraire. Quel premier bilan tirez-vous de cette rentrée pour le moins particulière et comment évaluez-vous le risque d'un retour en arrière, à l'heure où, dans mon département de l'Oise, de nombreux enseignants font valoir leur droit de retrait ?
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Votre question porte, en creux, celle de savoir ce que vous feriez si c'était à vous qu'incombait la décision à prendre. J'en déduis que vous êtes favorable à un retour des élèves en classe en septembre. Il faut assumer la responsabilité de cette position.
Cela signifie que vous acceptez le décrochage de pans entiers de notre jeunesse, car c'est de cela qu'il s'agit.
Ce choix, qui n'est pas celui que font majoritairement d'autres pays européens, ne serait pas du tout responsable. Déjà – et je vous renvoie à ce propos à la réponse que je viens de faire à M. Peu – , les quelques semaines de confinement que nous avons connues produisent inévitablement du décrochage. Il ne s'agit du reste pas là d'une spécificité française, et puisqu'il nous a plu, tout au long de la crise, de nous comparer à d'autres pays, je vous invite à comparer ce qui se passe en Allemagne avec ce qui a été fait en France : vous ne rougirez pas d'être Français.
L'enseignement à distance a plutôt bien réussi, malgré bien des failles, mais n'a pas empêché un décrochage, notamment en lycée professionnel, ainsi qu'à l'école primaire, où nous avons aujourd'hui des difficultés à faire revenir les élèves de CP – cours préparatoire – et de CM1 – cours moyen première année – , de REP+ – réseau d'éducation prioritaire renforcé – , au moment même où ils doivent rentrer à l'école.
Cette école n'est pas une garderie et vous ne rendez pas service à l'école de la République en prétendant qu'elle en est une, alors précisément que nous travaillons à ce qu'elle ne le soit pas, au moyen notamment de la rentrée par niveau et de toutes les mesures que vous critiquez. Si nous faisions ce que vous voulez, l'école serait en effet une garderie, mais ce n'est pas ce que nous faisons. C'est ainsi que nous mettons en oeuvre l'entrée par niveau, avec des circulaires pédagogiques pour chaque niveau, et assurons un soutien aux équipes enseignantes. Certes, nous avons pleinement assumé la souplesse locale, visant à la fois à ce que les équipes enseignantes s'organisent et à ce que les communes fassent qu'elles souhaitent.
Je retiens de votre propos que vous êtes solidaire du petit pourcentage de communes qui ont décidé de ne pas rouvrir les écoles d'ici à septembre – 7 % à 8 % à ce stade, et ce chiffre diminuera encore. C'est une position, encore une fois, que vous devez assumer. Notez néanmoins que 92 % des maires de France ont raisonné différemment, quelle que soit leur tendance politique. On peut certes toujours souligner, sur chaque point, les inconvénients, mais c'est un sport un peu trop facile. Il faut en revanche, comme vous l'avez dit, les mesurer aux avantages, et je n'ai aucune peine à assumer devant vous le fait que, dans ce domaine, nous avons mesuré ce rapport, et que c'est la raison pour laquelle nous sommes en train de déconfiner. D'autres pays observent ce que nous faisons car la France a une manière particulièrement intéressante de lutter contre le décrochage scolaire causé par le confinement.
Monsieur le ministre, vous parlez de décrochage scolaire pour nos élèves, mais dans mon département de l'Oise, où il a été décidé de rouvrir l'ensemble des écoles primaires pour éviter le décrochage des enfants vulnérables, il y a aussi des décrocheurs scolaires dans le secondaire et dans les universités.
C'est pour cela que nous allons essayer de les rouvrir !
Pourquoi donc rouvrir les écoles, où nos jeunes peuvent être infectés par le covid-19 ? Je note une claire contradiction dans votre raisonnement depuis le début de la crise : vous disiez précédemment qu'il fallait vite fermer les classes pour lutter contre la propagation du virus, et vous devenez maintenant un ardent défenseur de la réouverture, alors que le virus circule fortement dans notre département de l'Oise et sur le territoire national.
Réouverture des écoles en période de déconfinement
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour exposer sa question, no 1048, relative à la réouverture des écoles en période de déconfinement.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, j'appelle votre attention sur les conditions de la rentrée scolaire dans l'élémentaire et le pré-élémentaire après le confinement dans mon département de la Sarthe et dans ma ville du Mans.
Les protocoles établis par le ministère ont fixé le cadre dans lequel les personnels enseignants, éducatifs, de services et techniques devraient intervenir pour assurer leur sécurité et, évidemment, celle des enfants et, ainsi, celle de leurs familles. Pour les écoles maternelles et primaires, un plan départemental devait être établi par la direction départementale des services de l'éducation nationale. Je saisis cette occasion pour remercier l'ensemble des personnels qui ont travaillé pendant le confinement et qui oeuvrent en cette période de déconfinement. Quelques jours seulement avant la date du début du déconfinement, bon nombre de responsables n'avaient pas encore reçu d'indications précises sur la collaboration des personnels communaux à l'organisation matérielle, à la désinfection des locaux, à la détermination des dispositifs barrières, aux conditions du réapprovisionnement des services de restauration.
Quelques jours après la tenue de cette rentrée progressive, qu'en est-il, tout d'abord, dans mon département, la Sarthe ? Combien d'enfants ont-ils pu rejoindre leur école ? De façon plus générale, je souhaite savoir où en est l'application du protocole, quelles sont les difficultés recensées, les moyens mis en oeuvre et les modalités de collaboration entre les services de l'éducation, les écoles et les élus. Nous avons énormément de retours des personnels et des familles qui nous disent, aujourd'hui encore, que tout n'est pas forcément en place. J'aimerais connaître les modalités de la collaboration entre les personnes publiques et le calendrier que celles-ci ont programmé.
Enfin, s'agissant des fermetures de classes pré-élémentaires et élémentaires déjà envisagées, je demande que les propositions de l'administration puissent être réexaminées en prenant en considération les mois pendant lesquels les inscriptions n'ont pu être faites, les hésitations des familles et les difficultés rencontrées par les enfants au vu d'un dernier trimestre qui n'aura pas été tout à fait comme les autres.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Je vous remercie pour votre question qui vient compléter les précédentes. Nous assumons bien sûr totalement le fait que le mois de mai est un mois de transition, le déconfinement constituant un véritable défi organisationnel. En outre, nous avons toujours su que nous ne renverrions pas tous les enfants dans les établissements de façon parfaitement simultanée mais bien de façon progressive. Nous assumons ce choix, le seul possible. Tous les pays sont d'ailleurs soumis aux mêmes contraintes, ce qui est malheureusement normal.
Votre question porte sur la Sarthe, un département assez représentatif de ce qui se passe en France : 100 % des collèges ont pu y rouvrir depuis hier pour accueillir les élèves de sixième et de cinquième, ce qui est un bon point pour les collégiens, de même que 99 % des écoles de 98 % des communes. La Sarthe est donc aux avant-postes du déconfinement.
Un vrai travail en commun a été mené, autour d'un groupe thématique, avec les associations de maires, la DDCS, la direction départementale de la cohésion sociale, la CAF, la caisse d'allocations familiales, ainsi qu'avec la région pour ce qui concerne les transports. Au départ, cela concernait surtout les établissements du premier degré. Les premières réunions se sont tenues au début du mois de mai. Les questions de restauration et de travail en dehors de la classe, notamment, ont alors fait l'objet d'une vaste concertation. On constate une hétérogénéité des situations : certaines petites écoles de campagne comptent moins de quinze élèves, ce qui permet un retour en classe presque normal – à l'opposé de l'école-garderie. Ce groupe de travail thématique a été élargi le 12 mai au conseil départemental pour faire le point, avec le ministère de l'éducation nationale, sur la rentrée des collèges depuis le 29 avril. Un comité de déconfinement, auquel ont participé les collectivités, a même été réuni par le préfet les 7 et 14 mai.
La dotation en matériel, qui comprend les masques que nous fournissons aux adultes et aux collégiens, le gel hydroalcoolique et les réserves de masques pédiatriques pour l'école élémentaire, a été réalisée dans des délais permettant d'assurer la prérentrée des professeurs et l'accueil des élèves, à l'école primaire depuis la semaine dernière et au collège depuis hier.
Dans le premier degré, 86 % des écoles ont rouvert le 12 mai, un pourcentage qui, depuis, a augmenté. La reprise a été fixée au 18 mai par 14 % des communes. D'après ce qui a été constaté les premiers jours, sur 17 500 élèves de maternelle, environ 2 000 étaient présents en classe le mardi 12 mai et 2 500 le jeudi 14 et le vendredi 15, soit 20 à 25 % du total. Au niveau élémentaire, 4 000 élèves sur 29 000 étaient présents cette semaine ; une montée en puissance est donc nécessaire. Au collège, on attendait en ce début de semaine 5 611 élèves de sixième et de cinquième.
Depuis le 12 mai, des suspicions de contamination nous ont été signalées, les premiers cas ayant donné lieu à la fermeture de l'école par le maire, avant même que les résultats soient connus. À ce propos, je tiens à dire que nous faisons preuve d'une extrême prudence, ce qui explique le choix de fermer les écoles à titre préventif. Enfin, le taux d'encadrement sera en augmentation à la rentrée prochaine, dans chaque commune du département.
La parole est à M. Daniel Labaronne, pour exposer sa question, no 1029, relative à l'aménagement des examens pour les personnes handicapées.
Je me permets, monsieur le ministre, d'appeler votre attention sur les disparités relevées, d'une académie à l'autre, dans la mise en place des PAP, les plans d'accompagnement personnalisé, et des aménagements aux examens pour les élèves en situation de handicap. S'il n'est pas lié à la crise actuelle, ce problème se posera de nouveau à moyen terme.
Ainsi, certaines académies se réfèrent, pour la mise en place du PAP, à la circulaire no 2015-016 du 22 janvier 2015, alors que d'autres ont rédigé leur propre circulaire, ce qui entraîne d'importantes différences d'une région à l'autre et des inégalités entre les élèves.
Ceci concerne d'abord le constat des troubles qui, d'après la circulaire de 2015, « est fait par le médecin de l'éducation nationale ou par le médecin qui suit l'enfant ». Or, dans certaines régions, à la suite de la publication de circulaires internes, il n'est plus fait mention du médecin traitant et les familles sont renvoyées obligatoirement vers un médecin scolaire qui, parfois, n'existe pas…
De même, la liste des pièces nécessaires à la constitution d'un dossier fait l'objet de variations importantes selon les régions. Optionnels, les bilans psychologiques et paramédicaux deviennent obligatoires dans certaines académies, alors que le coût lié à ces tests décourage certaines familles de les passer et que le temps d'attente des résultats ralentit d'autant la mise en place du PAP.
Les mêmes dysfonctionnements se retrouvent dans les formulaires de demande d'aménagement aux examens. Pour les troubles dyslexiques en particulier, la fédération ANAPEDYS, l'Association nationale des associations de parents d'élèves dyslexiques, fait état de plusieurs remontées de ses associations membres qui signalent que certaines académies interdisent l'utilisation de l'ordinateur personnel et imposent celle de l'ordinateur du centre. Or, d'une part, les logiciels qu'ils utilisent en classe sont parfois longs à installer sur un ordinateur du rectorat et, d'autre part, un logiciel installé à la hâte sans avoir été testé dans toutes ses fonctionnalités peut présenter des dysfonctionnements lors de l'examen. Pour le logiciel Dragon, par exemple, le transfert des voix peut être plus ou moins bien réalisé, ce qui pourrait créer des problèmes pour le candidat dont la voix ne serait pas reconnue. Les élèves ont aussi l'habitude d'utiliser des raccourcis clavier spécifiques, créés par leur ergothérapeute, qu'ils ne retrouveront pas sur l'ordinateur du centre.
Enfin, le stress important provoqué par l'examen pour des élèves en situation de handicap peut être augmenté par la découverte, le jour des épreuves, d'un ordinateur différent du leur, qu'ils risquent de ne pas maîtriser. Il semble que, sur ces points, il soit préférable que les rectorats appliquent strictement la circulaire no 2015-016 du 22 janvier 2015 sans chercher à la préciser ni à la modifier. Je souhaite donc savoir, monsieur le ministre, si vous partagez ce constat d'une différence d'application entre les académies et, le cas échéant, si vous envisagez des mesures pour vous assurer que la circulaire de janvier 2015 sera bien prise en considération et respectée dans les établissements.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Votre question porte sur le caractère national de notre politique en matière d'examens pour les élèves en situation de handicap. Le code de l'éducation prévoit que le service public de l'éducation « contribue à l'égalité des chances et à lutter contre les inégalités sociales et territoriales en matière de réussite scolaire et éducative » et « reconnaît que tous les enfants partagent la capacité d'apprendre et de progresser. Il veille à l'inclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinction ».
Vous le savez, nous avons permis de nombreuses avancées sur la question des élèves en situation de handicap. Hier encore, j'étais justement en visioconférence avec les recteurs ainsi qu'avec les directeurs d'ARS, les agences régionales de la santé, afin de préparer la prochaine rentrée.
Ce dossier, suivi également par la secrétaire d'État Sophie Cluzel, est au coeur de nos préoccupations. Je rappelle que le Président de la République considère qu'il s'agit d'une priorité. La rentrée 2019 s'est caractérisée par un progrès en matière d'inclusion scolaire et ce sera encore plus le cas de la rentrée 2020, y compris concernant le point précis que vous avez abordé.
L'article D 311-13 du code de l'éducation dispose que « les élèves dont les difficultés scolaires résultent d'un trouble des apprentissages peuvent bénéficier d'un plan d'accompagnement personnalisé prévu à l'article L. 311-7, après avis du médecin de l'éducation nationale ». C'est à cela que fait référence la circulaire no 2015-016 du 22 janvier 2015 que vous citez et qui prévoit en effet que « le constat des troubles est fait par le médecin de l'éducation nationale ou par le médecin qui suit l'enfant, au vu de l'examen qu'il réalise et, le cas échéant, des bilans psychologiques et paramédicaux réalisés auprès de l'élève ». Si le médecin qui suit l'enfant est habilité à faire le constat des troubles, il ne peut donc rendre lui-même l'avis quant à l'opportunité de la mise en place du plan d'accompagnement personnalisé.
Enfin, pour garantir un traitement uniforme sur l'ensemble du territoire, au coeur de votre question, je signale qu'un document type, téléchargeable, figure en annexe de la circulaire. Il doit être utilisé au sein des établissements scolaires afin de faciliter l'homogénéité des pratiques académiques – nécessaire, vous avez raison – , la continuité et le suivi des aménagements.
Si les académies ou les directions des services départementaux de l'éducation nationale élaborent leurs propres circulaires, celles-ci doivent simplement permettre une adaptation de la procédure à la situation locale tout en respectant le cadre national. La création d'un service départemental de l'école inclusive, dont j'ai souhaité qu'il soit opérationnel dès la rentrée 2019, constitue une des améliorations que j'ai évoquées. Il vise à apporter une réponse de proximité aux familles, non à changer les règles. Si un territoire est dépourvu de médecin scolaire, c'est le médecin conseiller technique de l'inspecteur d'académie qui doit assurer une réponse à la prise en compte des besoins identifiés localement.
La création d'un système d'information national, visant à prendre en considération les élèves à besoins éducatifs particuliers – un chantier auquel je tiens beaucoup – , est en cours de développement. À terme, à la rentrée 2022, cet outil numérique, qui mettra à disposition des académies un livret de parcours inclusif, offrira aux professeurs la possibilité de préciser quels sont les adaptations et aménagements pédagogiques mis en place sur le temps scolaire et d'en informer les familles. Les PAP, qui pourront ainsi être créés et remis à la famille après avis du médecin, seront donc nécessairement harmonisés à l'échelle nationale.
Concernant les aménagements d'examens, les situations que vous avez évoquées existent. Dans la grande majorité des cas, le candidat compose avec son propre matériel. Le prêt de matériel informatique par le centre d'examen reste possible. Je manque de temps pour vous donner l'ensemble des dispositions prévues mais sachez que les aménagements et adaptations obtenus dans le cadre d'un PAI, un projet d'accueil individualisé, d'un PAP ou d'un PPS, un projet personnel de scolarisation, seront mis en oeuvre pour les épreuves maintenues et pour les épreuves de septembre, sans autre avis médical ou administratif, quelles que soient les modalités de l'examen.
La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour exposer sa question, no 1051, relative aux conséquences de la crise sanitaire pour les collectivités territoriales.
Comme vous le savez, monsieur le ministre chargé des collectivités territoriales, la crise sanitaire qui frappe le pays entraîne des pertes de recettes parfois significatives pour les collectivités territoriales. Les premières estimations données par le ministre Darmanin font état de 4 milliards d'euros de pertes pour l'année 2020, et environ 11 milliards pour 2021.
Si, évidemment, les conséquences de cette épidémie ne sont pas ressenties de façon uniforme par l'ensemble des collectivités territoriales, celles qui tirent leurs recettes du tourisme sont particulièrement touchées – je pense notamment au bloc local.
Les activités liées au tourisme peuvent en effet rapporter jusqu'à 85 % des ressources fiscales de certains EPCI, les établissements publics de coopération intercommunale, représentant parfois jusqu'à 50 % de leurs recettes de fonctionnement. C'est le cas d'une agglomération, dans ma circonscription de Seine-et-Marne, dont l'activité est essentiellement liée à la présence des parcs Disneyland Paris et Villages nature. Ce cas a d'ailleurs été évoqué lors d'une conférence qui s'est tenue avec le préfet jeudi et à laquelle vous avez assisté.
À n'en pas douter, ces collectivités vont se retrouver dans une situation financière délicate dès 2020 avec des recettes de taxe de séjour en forte baisse, de 8 à 10 milliards d'euros pour le cas que je viens de citer, et qui se dégraderont considérablement en 2021 et 2022. Il leur sera alors bien difficile d'équilibrer leur section de fonctionnement.
Pouvez-vous nous préciser quels dispositifs exceptionnels pourraient être mis en place pour accompagner ces collectivités territoriales. Les élus, en tant que personnes responsables, savent très bien qu'ils ne pourront pas obtenir une compensation à l'euro près de la part de l'État.
Pourrait-on néanmoins envisager des dispositifs exceptionnels tels que des exonérations de contribution au FPIC, le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales ou au FSRIF, le Fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France, ou tels que la suppression du prélèvement fiscal résiduel de la CRFP, la contribution au redressement des finances publiques, afin de leur offrir de nouvelles marges de manoeuvre ?
Vous avez raison de rappeler que les collectivités territoriales jouent un rôle important dans cette crise et que les conséquences financières seront nombreuses pour elles, mais de façon très inégale, selon la strate et surtout selon le moment.
Certains instruments de fiscalité sont contemporains, c'est le cas, bien sûr, de la taxe de séjour ou encore de la part de la fiscalité qui s'adosse aux courses hippiques et aux casinos. Les communes touristiques sont donc bien celles qui sont le plus fortement touchées. J'y ajouterais volontiers les communes d'outre-mer – certes fort éloignées de la Seine-et-Marne – , confrontées à la chute des recettes de l'octroi de mer.
Pour d'autres instruments de fiscalité, il y a un décalage dans le temps. Cela concerne particulièrement la fiscalité économique des intercommunalités, notamment avec les deux composantes de la contribution économique territoriale – CET – que sont la cotisation foncière des entreprises – CFE – et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises – CVAE. Ce décalage dépend du niveau de déclaration des entreprises, mais il est au minimum d'un an.
Pour être complet, il faut mentionner un troisième aspect que nous avons évoqué avec les élus de votre département, madame la députée. Je pense aux droits de mutation à titre onéreux, les DMTO, qui intéressent le bloc communal autant que le bloc départemental. Ils sont à ranger parmi les outils fiscaux « contemporains » : ces frais de notaire, pour parler de façon intelligible, s'ils ne sont pas perçus pendant une certaine période, font immédiatement défaut aux collectivités concernées ainsi qu'au système de péréquation entre les départements.
Voilà le constat ; il faut le documenter. Comme je l'ai dit la semaine dernière à Melun, je ne propose aucun chiffre. En effet, chacun y va de son estimation, mais les choses sont très compliquées à établir, en particulier pour la CVAE qui n'existait pas lors de la crise de 2008 – alors que pour les DMTO, nous disposons d'un élément de référence.
À ce stade, nous pouvons néanmoins affirmer qu'évidemment nous n'abandonnerons aucune collectivité territoriale. Il faut le dire, c'est important. De nombreux outils d'urgence sont disponibles. Je constate qu'à l'heure actuelle, heureusement, ils sont peu sollicités, ce qui signifie que la tension n'est pas insurmontable. Je pense aux avances de douzièmes de dotation globale de fonctionnement mais aussi de fiscalité, consenties afin que le niveau de trésorerie des collectivités territoriales soit toujours satisfaisant et qu'aucune d'entre elles ne soit en panne.
Je n'ai pas le temps de traiter la question des dépenses liées à la lutte contre le covid-19. Avec Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics, nous avons trouvé un certain nombre de solutions afin que ces dépenses ne déstabilisent pas trop durablement le budget de fonctionnement des collectivités.
Une fois que nous aurons documenté l'ensemble des pertes, il faudra se poser la question du plan de soutien et de la façon dont nous traiterons le problème. Il y aura des rendez-vous législatifs – j'ai cru comprendre qu'un projet de loi de finances rectificative vous serait bientôt soumis ; toutefois, étant donné ce que je vous ai dit des décalages dans le temps, nous voyons bien qu'il faudra traiter cela dans le projet de loi de finances pour 2021, à la fin de l'année.
Nous devrons alors voir comment nous pourrons intervenir. Pour ce qui concerne les recettes, madame la députée, vous avez dit que la compensation ne se ferait pas à l'euro près. Or la fiscalité locale est malheureusement beaucoup trop complexe pour adopter cette approche : il faudra examiner les situations au cas par cas, en fonction des instruments fiscaux qui n'ont pas tous la même nature et le même fonctionnement. Des questions se poseront aussi en matière de péréquation entre les territoires, les intercommunalités, les communes et les départements les plus riches et les plus pauvres.
Le chantier est de taille. M. Jean-René Cazeneuve qui préside la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de votre assemblée est missionné par le Gouvernement pour l'épauler et documenter cet important sujet.
Enfin, il faut évoquer le rôle des collectivités dans la relance économique, en particulier grâce à l'investissement public. C'est pour qu'elles puissent agir en la matière que nous voulons leur donner de la visibilité le plus rapidement possible.
Madame la députée, je vous remercie pour l'attention que vous portez à ces sujets, y compris en ce qui concerne votre intercommunalité.
La parole est à M. Stéphane Testé, pour exposer sa question, no 1030, relative aux punaises de lit.
Les punaises de lit posent un problème majeur de santé publique. Alors qu'elles avaient presque disparu des foyers depuis les années 1950, les punaises de lit connaissent une forte recrudescence depuis quelques années. L'association Droit au logement a ainsi communiqué le nombre de 400 000 logements infestés en 2019 contre 200 000 en 2017, soit un doublement en deux ans.
Si les punaises de lit ne présentent pas de risque de transmission vectorielle d'agents infectieux, leurs piqûres provoquent des démangeaisons et un envahissement tels qu'ils handicapent au quotidien ceux qui en pâtissent, en grande majorité les plus mal logés. En effet, une étude québécoise a démontré qu'une infestation de punaises affectait fortement la santé mentale : les victimes présentent jusqu'à cinq fois plus de symptômes d'anxiété et de troubles du sommeil. L'infestation par les punaises de lit constitue donc un enjeu réel de santé publique.
Or ce phénomène ne semble pas ralentir et même s'accélère, notamment en Seine-Saint-Denis, ce qui a d'ailleurs rendu le confinement beaucoup plus compliqué. Bien que des mesures de sensibilisation aient été prises par le Gouvernement, la prévention n'est pas suffisante si elle ne s'accompagne pas d'une véritable politique d'éradication. Le traitement d'un logement infesté coûte entre 300 et 350 euros, alors même que les foyers concernés sont parfois ceux des plus démunis. Le traitement ne saurait par ailleurs être efficace s'il ne concerne qu'un seul foyer quand tout un bâtiment est concerné. Qui plus est, la lutte chimique contre les punaises de lit est nocive pour la santé et pour l'environnement. La lutte mécanique et thermique semble bien plus efficace mais, hélas, compliquée à mettre en oeuvre pour les habitants faute d'informations, de moyens et de mode d'emploi.
Pour lutter efficacement contre la prolifération des punaises de lit, le Gouvernement a lancé au début de l'année une campagne d'information, avec un numéro de téléphone et un site internet dédiés. Dans le même temps, le lancement d'une mission à l'Assemblée a été annoncé pour étudier d'éventuelles évolutions législatives. Par ailleurs, certaines villes mettent en place des actions telles que le prêt gratuit de kits ou encore l'organisation d'ateliers de sensibilisation et de formation.
Face à l'urgence de ce problème de santé publique, je souhaite savoir quelles solutions sont envisagées par le Gouvernement pour éradiquer durablement ce phénomène. Le Gouvernement envisage-t-il d'aider financièrement les habitants dans leurs démarches ?
Monsieur le député, je sais que vous vous êtes beaucoup investi sur ce sujet. Le ministre chargé de la ville et du logement, Julien Denormandie, qui vous prie de bien vouloir excuser son absence, m'a confié la réponse qu'il a préparée à votre attention.
Effectivement, nous notons une croissance forte du fléau que représentent les punaises de lit, notamment dans votre département, avec un doublement des logements infestés. Ce phénomène touche les différents types d'habitats, sans distinction d'usage ou de niveau de vie. Face à un problème de santé publique majeur, le Gouvernement a souhaité apporter, vous l'avez rappelé, une réponse forte et globale qu'il s'agisse du traitement ou du financement. Ainsi, Julien Denormandie a lancé, le 21 février dernier, le plan de prévention et de lutte contre les punaises de lit dans l'habitat.
Ce plan comporte un volet informatif essentiel pour apporter des réponses et permettre un traitement efficace et rapide en cas d'infestation. Les conseils de prévention et les premiers gestes à effectuer en cas de présence de punaises sont récapitulés sur le site du ministère de la cohésion des territoires. Nous avons également lancé en février une campagne de communication pour mettre fin au sentiment de honte que peuvent ressentir certains de nos concitoyens car, il faut le rappeler, chacun peut être touché par les punaises de lit. Il faut donc adopter les bons gestes, et vite, pour éviter qu'elles s'installent et qu'elles se reproduisent dans nos logements.
Ce plan comprend aussi un partenariat avec la chambre syndicale des industries de désinfection, désinsectisation et dératisation. Il permettra la certification des professionnels à partir du mois de décembre prochain. Il s'agit d'une première étape pour garantir la formation des professionnels, l'efficacité et la qualité des traitements proposés.
Cependant, comme vous l'avez souligné, il reste à faire pour éradiquer ce fléau : le partage des responsabilités entre le locataire et le propriétaire doit être clarifié, c'est une piste importante ; dans l'habitat collectif, une lutte globale doit être pensée à l'échelle de l'immeuble, car le traitement par logement n'est pas toujours suffisant et montre ses limites ; la diffusion d'informations doit être renforcée ; les gestionnaires d'immeubles doivent pouvoir intervenir pour éradiquer au plus vite ces nuisibles dès lors qu'ils sont signalés.
Enfin, la question du financement sera centrale avec la nécessaire mutualisation des risques mais aussi le soutien aux occupants les plus fragiles. C'est pour traiter toutes ces questions qu'une mission a été confiée par le Premier ministre à votre collègue, la députée Cathy Racon-Bouzon, le 5 mars dernier. Ses travaux sont toujours en cours ; elle apportera dans quelques mois, des réponses larges et très concrètes à cette préoccupation.
Je vous remercie pour ces précisions et pour les avancées dont vous venez de nous faire part – c'est bien le terme qui convient, car nous devons avancer rapidement. Je fais évidemment confiance à Cathy Racon-Bouzon ; je serai à ses côtés afin que nous progressions collectivement sur cette si importante question.
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour exposer sa question, no 1020, relative à la faim en Seine-Saint-Denis.
Les gens ont faim ! Voilà ce que disent aujourd'hui les bénévoles associatifs en Seine-Saint-Denis. Car, dans ce département, le coronavirus ne tue pas seulement plus qu'ailleurs : l'épidémie et ses conséquences plongent aussi de nombreux habitants déjà fragiles dans une précarité plus grande encore.
Dans un département où près de 28 % des habitants vivent sous le seuil de pauvreté – une proportion qui représente deux fois la moyenne nationale – , la crise sanitaire se double d'une crise sociale, une crise d'une gravité telle qu'elle est d'abord une crise alimentaire. Avoir faim, se demander comment l'on va nourrir sa famille : la question hante aujourd'hui le quotidien de milliers d'habitants de Seine-Saint-Denis. Partout les files d'attente s'allongent devant les points de distribution alimentaire. Le nombre des demandes aux centres communaux d'action sociale explose.
Les personnes concernées ne sont pas seulement les mêmes qu'avant le confinement : de nombreuses familles qui n'y avaient pas recours n'ont d'autre choix que de solliciter l'aide alimentaire, et menacent de tomber dans la pauvreté. Le préfet de la Seine-Saint-Denis estimait récemment lui-même que 15 000 à 20 000 personnes risquaient d'avoir du mal à se nourrir. Beaucoup d'autres le peuvent encore, mais seulement au prix de choix déchirants, de privations indicibles.
Une habitante d'Aubervilliers me disait encore il y a peu : « Mon mari est intérimaire et depuis la mi-mars il ne gagne plus rien. Nous ne touchons plus que les allocations pour les enfants. Je ne paierai pas mon loyer en avril. Ma priorité est de nourrir mes trois enfants. » Comment peut-on accepter cela aujourd'hui en France, dans la sixième puissance économique mondiale ?
Depuis le début du mois de mars, c'est avant tout l'élan de solidarité de la population, des associations, qui a permis de faire face à l'urgence. Pour beaucoup d'habitants, les distributions de paniers-repas, de produits de première nécessité, le soutien humain aussi, ont constitué une aide cruciale, souvent la seule. Il faut rendre hommage à tous ceux qui se sont engagés sans compter. Mais ces dons ne suffisent pas à eux seuls, d'autant que les séquelles sociales de la crise seront durables. C'est à l'État de prendre ses responsabilités et d'agir massivement pour protéger tous ceux qui en ont besoin.
Or le Gouvernement ne prend pas la mesure de l'urgence sociale qui frappe la Seine-Saint-Denis. C'était déjà le cas avant la crise : le plan pour le département, annoncé par le Premier ministre en octobre 2019, n'était pas à la hauteur. Votre surdité est plus grave encore aujourd'hui. L'aide exceptionnelle de 150 euros et de 100 euros par enfant qui a été annoncée, versée une seule fois aux foyers les plus modestes, ne suffit pas, pas plus que l'enveloppe de 39 millions d'euros destinée aux associations chargées de l'aide alimentaire et à la distribution de chèques d'urgence alimentaire. Vous pouvez faire plus – nous savons par exemple que l'État a débloqué 7 milliards d'euros de prêts pour Air France-KLM !
Les mesures qui pourraient être prises immédiatement sont pourtant simples. Je les ai déjà proposées au Premier ministre dans un courrier : encadrer les prix des produits alimentaires de première nécessité ; doubler la prime aux ménages les plus modestes et la pérenniser jusqu'à la fin de la crise ; mettre en place un soutien vraiment massif de l'État aux collectivités locales et aux associations ; suspendre les loyers des personnes en difficulté en compensant les bailleurs. Je pourrais continuer.
Ma question est donc simple. Quand prendrez-vous la mesure de la crise et de ses conséquences sociales ? Quand déploierez-vous un vrai plan d'urgence, pour que des milliers de personnes, y compris d'enfants, n'éprouvent pas la faim, aujourd'hui, en Seine-Saint-Denis, aux portes de Paris ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé.
Merci de m'interpeller sur un vaste sujet que nous avons pris à bras-le-corps dès le début de la crise et même avant – vous avez évoqué le plan annoncé par le Premier ministre en octobre dernier pour un investissement massif dans un département parmi les plus pauvres de France métropolitaine.
Je rappelle que si l'aide alimentaire est gérée par les associations, elle bénéficie d'un soutien financier fort et important de la part de l'État. Lorsque nous apportons 39 millions d'euros supplémentaires dans le cadre d'un plan d'urgence de soutien, cette somme représente bien un tiers du budget annuel de l'aide alimentaire qui s'élève à 115 millions d'euros. Il s'agit d'aider les associations et les familles à surmonter les difficultés nées de la crise et de faire face à l'augmentation des besoins.
Nous avons également accompagné les associations pour faire en sorte que les bénévoles qui ne pouvaient plus intervenir puissent être remplacés grâce à l'élan de solidarité des services de l'État, des collectivités et de l'ensemble des citoyens que je tiens également à saluer.
Nous agissons aussi lorsqu'au-delà du budget de 115 millions d'euros, nous permettons 350 millions d'euros de défiscalisation des dons des particuliers et des entreprises, et lorsque nous continuons de travailler, comme avant la crise, à l'achat de denrées pour les associations afin qu'il n'y ait pas de rupture dans l'approvisionnement. L'arrivage de sept types de denrées est prévu dans les prochains jours, la livraison annuelle de lait et de beurre aura lieu au mois de juillet et les autres produits arriveront en septembre. Il faut en effet préparer l'après-crise et s'assurer que les stocks permettent toujours de répondre aux besoins.
Permettez-moi de souligner que sur un total de 39 millions d'euros, dont 14 millions de chèques d'urgence alimentaire destinés à 100 000 foyers, la Seine-Saint-Denis a bénéficié de 2,6 millions d'euros ; 25 000 familles du département ont bénéficié de ces chèques. Le préfet, que vous avez cité, évoquait 15 000 à 20 000 foyers ; nous avons donc bien apporté une réponse au problème. Quant à l'aide exceptionnelle de solidarité, elle visait en effet à soutenir les familles ayant des frais supplémentaires liés à l'alimentation.
La parole est à Mme Valérie Beauvais, pour exposer sa question, no 1037, relative à la réhabilitation du centre hospitalier universitaire de Reims.
Je tiens en préambule à adresser mes plus vifs remerciements à l'ensemble des personnels soignants qui poursuivent, dans des conditions toujours difficiles, leur engagement auprès des malades atteints du covid-19 – sans oublier le traitement des autres pathologies.
M. Maxime Minot applaudit.
Madame la secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, il est temps de leur accorder enfin le paiement de leurs nombreuses heures supplémentaires !
Il y aura un avant et un après covid-19. J'espère que cette crise sanitaire, qui a mobilisé tous les moyens humains et matériels de nos hôpitaux publics et privés, vous fera prendre conscience de la nécessité de garantir l'offre de soins. Si nous savions que l'hôpital avait besoin de davantage de personnel, la crise sanitaire a rendu ce constat encore plus évident. Par personnel, j'entends bien évidemment le personnel soignant : il ne s'agit aucunement d'ajouter des personnels administratifs, dont l'objectif est de toujours réorganiser les services au détriment des moyens pour les soignants.
« On arrivait à une saturation de cet hôpital-entreprise avec des tableaux Excel et des alignements de chiffres pour taper sur les médecins en leur disant : Vous ne travaillez pas assez. » Vous l'aurez compris, ces propos ne sont pas les miens – encore que j'aurais pu les prononcer – , mais ceux de soignants, publiés dans Le Monde daté du 12 mai 2020. Ils révèlent non seulement ce que ceux-ci ont vécu, mais plus encore leur crainte pour l'hôpital de demain.
Je souhaite vous parler du CHU de Reims et de la regrettable annonce, faite en février 2019 par le Premier ministre, d'en réduire davantage la capacité d'accueil dans le cadre de la deuxième phase du projet de sa réhabilitation, en supprimant plus d'une quarantaine de lits, qui viendraient s'ajouter à ceux déjà supprimés au moment de la première phase de restructuration. Je rappelle que la suppression de 150 lits a été validée en 2015 par le comité interministériel de la performance et de la modernisation de l'offre de soins hospitaliers – COPERMO. L'annonce par le Premier ministre de la suppression de 43 lits supplémentaires a eu un retentissement dévastateur. J'avais saisi à ce propos, en mai 2019, le prédécesseur d'Olivier Véran, Agnès Buzyn, et j'attends encore aujourd'hui sa réponse.
Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous rassurer la direction et les personnels soignants du CHU de Reims et m'indiquer que la prise en compte de la crise sanitaire liée au covid-19 vous conduira à interrompre le processus de suppression de 43 lits dans cet hôpital ?
M. Maxime Minot applaudit.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé.
Je profite de votre question pour saluer à mon tour l'engagement de tous les soignants – particulièrement, puisque vous m'y invitez, de ceux de la région Grand Est. Sans leur dévouement pendant ces longues semaines, notre système de santé, dans cette région et, au-delà, dans l'ensemble du territoire, n'aurait pas pu répondre à la crise. Grâce à eux, loin d'avoir failli, il a bien été au rendez-vous.
Ce week-end, le ministre s'est exprimé plus généralement sur le sujet en annonçant le lancement d'un « Ségur de la santé », à partir du 25 mai, qui permettra, en lien avec les acteurs de la profession médicale et paramédicale, de tirer les enseignements de la crise et d'identifier les réponses à apporter. Celles-ci, parfois, ne demandent pas grand-chose : il suffit souvent de lever les blocages réglementaires. Il faudra aussi aller plus loin dans la revalorisation salariale. Les travaux commenceront prochainement.
Pour ce qui est du CHU de Reims, l'établissement réalise un projet immobilier important, de 410 millions d'euros, et découpé en trois phases. La première, concernant la chirurgie, prévoit la construction d'un bâtiment de 489 lits et places, et d'un plateau technique, qui devrait entrer en service en 2023. La deuxième, concernant la médecine, prévoit la construction d'un second bâtiment de 334 lits et places, et d'un centre de dialyse. La troisième, enfin, prévoit la démolition de l'actuel hôpital Robert-Debré. Le dossier global, vous l'avez dit, a été validé en COPERMO à la fin de l'année 2015 ; il en fut de même pour la première phase, portant essentiellement sur la chirurgie et les plateaux techniques associés. L'État soutient le projet à hauteur de 110 millions d'euros – un accompagnement majeur.
La deuxième phase, qui concerne majoritairement l'activité de médecine, a été discutée en 2019 afin de produire l'avant-projet définitif et de respecter le calendrier prévu. Des discussions importantes ont été menées à cette occasion autour des capacités de l'établissement. L'enjeu principal porte notamment sur la projection de l'évolution du besoin de soins, compte tenu du vieillissement marqué de la population du territoire marnais. À ce stade, vous l'avez noté, l'arbitrage n'a toujours pas eu lieu. La réflexion devrait reprendre dès la fin de la crise sanitaire et devra évidemment tirer les leçons de l'épidémie, l'objectif étant d'apporter des solutions là où c'est nécessaire, en fonction des capacités et des besoins de chacun.
Je vous remercie pour votre réponse et j'espère que les décisions qui seront annoncées par M. le ministre iront dans ce sens. La suppression de ces 43 lits est une véritable catastrophe car, au-delà de la présente crise, la population française vieillit. La médecine ambulatoire n'est pas la panacée et il est donc très important de conserver ces lits dans la deuxième phase de restructuration.
M. Maxime Minot applaudit.
La parole est à M. Joaquim Pueyo, pour exposer sa question, no 1047, relative aux aides à domicile.
Nous n'avons pas attendu la présente crise sanitaire pour découvrir les difficultés auxquelles les aides à domicile faisaient face dans l'accompagnement quotidien des plus fragiles. Il faut tout de même rappeler les conditions dans lesquelles elles ont dû opérer au début de l'épidémie. En contact avec des populations à risque – personnes âgées ou handicapées, malades chroniques… – , ces personnels n'ont pas disposé des protections – masques, gels, kits de protection – en quantité suffisante. Pourtant, ils ont accompli leur mission avec une grande conscience professionnelle car c'est dans les moments de crise que les plus fragiles sont surexposés. Parfois isolés de leurs familles, ces derniers dépendaient grandement des aides à domicile pour conserver un minimum de lien social – je tiens donc ici à les remercier pour leur engagement sans faille.
En février 2019, à l'occasion d'une précédente question orale, j'avais déjà soulevé les difficultés rencontrées par ces professions : la revalorisation de leurs activités et la prise en compte d'aspects organisationnels étaient déjà d'actualité. En ce qui concerne le temps de travail et les frais de déplacement, il m'avait été indiqué qu'une mission avait été confiée à la direction générale de la cohésion sociale – DGCS – pour définir et mettre en oeuvre des actions concrètes visant à améliorer la qualité de vie au travail des professionnels de l'aide à domicile. Qu'en est-il ?
Nous le savons, avec le vieillissement de la population, la demande d'aide va augmenter considérablement, alors même que ces métiers souffrent d'un défaut d'attractivité. Or la qualité de la prise en charge est étroitement liée à celle de la prestation humaine apportée. L'heure est venue de reconnaître l'action de ces professionnels par une revalorisation significative de leur rémunération. Une réflexion doit en outre être engagée sur les métiers de la dépendance dans le cadre d'un projet de loi qui n'a malheureusement toujours pas été présenté ni examiné.
Madame la secrétaire d'État, à quel moment les primes dédiées aux auxiliaires de vie seront-elles versées, et selon quelles modalités ? Pouvez-vous préciser le calendrier de l'examen du projet de loi sur la dépendance ? Quelles mesures seront-elles proposées afin d'utiliser l'expérience de la crise que nous traversons ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé.
Je vous remercie d'appeler l'attention sur les services d'aide et d'accompagnement à domicile – SAAD. Nous connaissons les difficultés dans lesquelles ils ont eu à travailler au début de l'épidémie. Le ministère les a soutenus tout au long de cette crise, avec des livraisons hebdomadaires de masques prélevés sur les stocks de l'État, par l'intermédiaire des ARS et des pharmacies. Les départements ont également été présents aux côtés des ARS pour en distribuer aux professionnels. Un accompagnement sanitaire a été proposé grâce à l'instauration d'une astreinte gériatrique. En matière de soutien financier, les ordonnances du 25 mars et du 15 avril 2020 prévoient une garantie de financement des SAAD, tarifés ou non, par le département. La signature du décret précisant les modalités de cette garantie, nécessaire pour traverser la crise, est imminente.
Pour ce qui est du versement d'une prime exceptionnelle pour les professionnels des SAAD, particulièrement mobilisés pendant la crise, les échanges se poursuivent avec les départements, dans le respect des compétences de chacun, pour en assurer le financement. Nous sommes encore au coeur de la crise ; comme toutes les crises, celle-ci souligne et amplifie à la fois les atouts et les difficultés. Les atouts sont évidents : les intervenants des services à domicile font partie des 800 000 professionnels du grand âge qui se sont fortement mobilisés. Quant aux difficultés structurelles du secteur, il est crucial d'y répondre : je pense aux difficultés économiques récurrentes des professionnels, qui ne leur permettent pas de faire face aux coups durs, mais aussi aux problèmes de coordination entre l'accompagnement et le soin, au manque de reconnaissance des personnels et à la pénibilité des métiers.
Des travaux techniques sont en cours pour la mise en oeuvre de mesures concrètes destinées à revaloriser ces métiers, mesures inspirées notamment des propositions du rapport de Myriam El Khomri sur le sujet. Outre la question centrale de l'évolution des rémunérations, qui fera l'objet d'échanges spécifiques avec l'ensemble des acteurs du secteur, les autres dispositions portent sur l'évolution des compétences, la diminution des risques professionnels et l'augmentation des entrées en formation. Tout ce qui touche à l'attractivité des métiers du grand âge fera très rapidement l'objet d'échanges avec tous les partenaires impliqués dans le secteur en vue de déboucher sur un plan partagé et intégré dans la réflexion plus large sur la réforme du grand âge.
Merci pour cette mise en perspective. Il est néanmoins urgent d'agir dans la mesure où les aides à domicile font face à des difficultés : emploi à temps partiel, rémunérations très faibles, temps de transport qui n'est pas toujours rémunéré ou qui n'est rémunéré qu'en partie… Le sujet est d'autant plus important que, j'y insiste, la population vieillit. Si l'on veut améliorer la prise en charge de nos aînés, il faut renforcer l'aide à domicile et diversifier les hébergements en dehors des maisons de retraite. C'est un sujet de société qui me paraît majeur, d'où la question que je me suis permis de vous poser. Nous serons bien entendu attentifs à votre projet de loi sur la dépendance, à mes yeux essentiel.
La parole est à M. José Evrard, pour exposer sa question, no 1052, relative à l'organisation du système sanitaire.
Ma question concerne la faillite de notre système de santé et sa nécessaire réorganisation. Le drame que nous vivons est moins le fait du virus que de la gestion de l'épidémie par ceux qui en sont chargés : l'État, le ministère de la santé et les ARS – sur lesquelles l'État et le ministère se sont déchargés. Après trois quinquennats d'existence, les ARS ont montré, outre leur coût exorbitant et leur parfaite inutilité dans un contexte de pandémie, leur nuisance en matière de protection sanitaire de nos compatriotes. Les ARS sont une bureaucratie qui a amenuisé, découragé et paralysé la fonction de soigner. Pour des raisons d'économie et d'autres qu'on ignore encore, les médecins et les soignants se sont retrouvés sans les moyens matériels indispensables au combat contre le coronavirus et ont payé un lourd tribut à la maladie.
La tiers-mondisation du meilleur système de santé du monde, voulue par l'Union européenne, est en marche depuis longtemps, elle n'a pu rester cachée. Hôpitaux, lits, matériel de réanimation, médicaments, blouses, masques, gants, tests : tout manquait. Et comme tout manquait, il a été dit aux Français qu'ils n'en avaient pas besoin.
Dans ces conditions, que restait-il d'autre à l'exécutif, après la rude épreuve des gilets jaunes et la longue grève des urgences hospitalières, que le confinement, c'est-à-dire l'emprisonnement à demeure de tout un peuple ? Une gouvernance inédite est mise en place, une dictature administrative. Au Parlement, dans l'impossibilité de se réunir, on a voté, à quelques-uns, des dispositions exceptionnelles, des ordonnances par nature autoritaires. L'interdiction de circuler librement et des amendes de 135 euros pour ceux qui l'enfreignent viendront en premier. Pour couronner le tout, avec l'abandon du processus électoral municipal, les maires ont disparu ; c'est donc dans l'apparence d'un fonctionnement régulier de la démocratie et sans le courage de l'assumer que l'exécutif s'est accordé tous les pouvoirs à partir du 16 mars.
Ce coup d'État soft est surtout organisé pour faire face à la crise économique et financière montante que masque l'épidémie – réellement combattue, elle, par un personnel soignant applaudi tous les soirs par les Français confinés. Dans son obligation d'apparaître mobilisé, le pouvoir présente chaque soir l'hécatombe quotidienne, assortie d'informations incomplètes et tronquées, pour ne pas dire fausses, avec l'aval de scientifiques et de médecins que l'exécutif lui-même choisit et dont la mission est de caricaturer le seul médecin qui présente des résultats, le professeur Didier Raoult. L'épisode des masques de protection, déclarés inutiles avant d'être rendus obligatoires, comme la démolition systématique de la méthode du professeur Raoult resteront les marqueurs du quinquennat. Une commission d'enquête parlementaire et des juges judiciaires étudieront les faits troublants qui ont émaillé la période de la pandémie : chloroquine retirée de la vente libre ; masques insuffisants ou détruits, ou encore commandés sans jamais arriver ; le fameux essai clinique européen toujours en attente de résultats ; hôpitaux privés peu sollicités ; et, au bout, l'utilisation de produits euthanasiants.
La perspective d'une crise économique et financière dévastatrice n'est pas étrangère à la situation. Des mesures antisociales sont à venir, il faut préparer l'opinion. Cependant, la réorganisation du ministère de la santé est incontournable. En pleine pandémie, l'ARS Grand Est travaille encore à supprimer des lits ! La suppression de cette bureaucratie sera bénéfique pour les soignants, qu'il s'agisse des moyens ou des rémunérations. La France n'est pas un État fédéral, elle n'a pas besoin d'agences, mais d'un ministère transparent et efficace à tout moment, contrôlable par le Parlement, en lien avec les hôpitaux gérés démocratiquement et dirigés par un médecin. Madame la secrétaire d'État, c'est dans la tempête qu'on juge un capitaine !
M. Nicolas Dupont-Aignan applaudit.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé.
La question que vous posez, monsieur Evrard, n'appelle pas de réponse précise de la part du Gouvernement. Vous estimez que c'est dans la tempête que l'on juge un capitaine ; je crois, pour ma part que, quand bien même nous ne vivrions présentement qu'une accalmie, nous pouvons déjà saluer le travail des Français, des personnels soignants, des agents de l'État et des élus : ils ont tenu ! Nous ne pouvons qu'en être fiers.
Les agences régionales de santé ont joué un rôle indispensable. Sans leur action, l'épidémie aurait pu se répandre partout dans le pays dès le début du mois de février. Rappelons-nous, en particulier, le cas des Contamines-Montjoie. Votre question me donne l'occasion de saluer le travail des ARS mais aussi celui des agents de l'assurance maladie et de la sécurité sociale, qui se sont mobilisés, et continuent de le faire, dans tous les territoires pour trouver des solutions aux difficultés – parfois particulièrement épineuses.
Monsieur le député, le contrôle démocratique n'a jamais cessé. L'Assemblée nationale comme le Sénat ont siégé tout au long de la période. Je remercie d'ailleurs les services des deux assemblées d'avoir permis la continuité de la démocratie parlementaire pendant la crise sanitaire.
Pour ce qui est, enfin, de la gestion de la crise elle-même, plusieurs groupes parlementaires ont annoncé la création d'une commission d'enquête. Plus que la présente séance de questions orales sans débat, elle offrira un cadre approprié pour dénoncer, comme vous le faites, la manière dont le Gouvernement a fait face à la crise.
Je croirai le Gouvernement lorsque ses actes seront corroborés par des faits précis.
La parole est à M. Nicolas Dupont-Aignan, pour exposer sa question, no 1053, relative aux capacités en lits de réanimation.
Ma question porte sur les leçons à tirer de la débâcle sanitaire que nous avons malheureusement vécue en France, avec un nombre record de victimes. Je rappelle qu'avec l'Espagne et l'Italie, la France est l'un des pays qui ont connu le plus grand nombre de victimes, alors qu'un pays comme la Pologne en a déploré vingt fois moins par habitant, sans parler des pays du Sud-Est asiatique, d'Israël ou de la Russie.
De toute évidence, il y a eu des failles béantes. Quelles leçons pouvons-nous en tirer aujourd'hui, s'agissant, en particulier, des services de réanimation ?
Lorsque, pendant la conférence de presse sur le déconfinement, j'ai entendu le Premier ministre nous expliquer qu'il fallait désormais revenir à 5 000 lits de réanimation, c'est-à-dire à leur nombre d'avant la crise, j'avoue que j'ai été stupéfait. Dire que l'hôpital a tenu, c'est faux : s'il a tenu, c'est grâce au dévouement exceptionnel des personnels soignants, des médecins, des aides-soignantes, des infirmières, des anesthésistes, des ambulanciers, qui ont fait des miracles. Mais la représentation nationale et le pays auraient tort de croire que l'hôpital a tenu, comme le répète le Gouvernement. En vérité, s'il a tenu, c'est parce qu'on a refusé de soigner de très nombreuses personnes âgées à l'hôpital.
Ce que le Gouvernement a caché pendant des semaines apparaît aujourd'hui grâce à des témoignages courageux. La presse allemande a rappelé que, dès le mois de mars, en Alsace, les patients âgés de plus de 75 ans étaient refusés à l'hôpital, ce dont le chef des urgences de Mulhouse a lui-même témoigné. De même, Le Canard enchaîné a fait état d'une circulaire du ministère de la santé selon laquelle l'âge devait être pris en compte dans les critères d'admission à l'hôpital. Enfin, le journal Marianne a fait paraître hier une enquête très documentée présentant des témoignages sur la situation des EHPAD et démontrant que les personnes âgées de plus de 70 ans ont été refusées pendant plusieurs semaines dans les hôpitaux d'Île-de-France, de Bourgogne-Franche-Comté et du Grand Est.
Notre pays a le plus fort taux de prélèvements obligatoires de l'OCDE – Organisation de coopération et de développement économique – , des dépenses de santé élevées, un hôpital structuré, des personnels de santé au dévouement incroyable et, pourtant, on en arrive, sur le simple critère de l'âge, à laisser mourir nos concitoyens ! Nous devons nous interroger, rechercher les coupables et les responsables et, surtout, prendre les mesures nécessaires pour que cela ne se reproduise pas.
Madame la secrétaire d'État, quelles sont les intentions réelles du Gouvernement ? Envisage-t-il vraiment, comme l'a dit le Premier ministre, de revenir à seulement 5 000 lits de réanimation ? Nous savons pourtant aujourd'hui que s'il y a eu beaucoup moins de morts en Suisse, en Allemagne – quatre à cinq fois moins de morts en Allemagne qu'en France – , en Corée du Sud et au Japon, c'est parce que ces pays ont conservé, en nombre suffisant, des hôpitaux de proximité et des lits de réanimation et de soins aigus.
Un rapport de l'OCDE de 2019, très précis, montre qu'il y a en France 3,1 lits de soins aigus pour 1 000 habitants, contre 6 lits en Allemagne, 7,1 en Corée du Sud et 7,8, de mémoire, au Japon. Cela signifie que le bon dimensionnement des services de réanimation est l'un des critères majeurs pour déterminer la capacité d'un pays à affronter la crise sanitaire – outre, bien entendu, la gestion des masques et des tests, qui a fait l'objet de cafouillages scandaleux, sur lesquels vous devrez rendre des comptes.
Or ces services de réanimation, sous l'effet de décisions des gouvernements précédents, mais également du vôtre, et sous l'effet de la gestion bureaucratique des ARS – rappelée par notre collège Evrard et unanimement reconnue – , ont été drastiquement réduits au fil du temps, quand les hôpitaux n'ont tout simplement pas été fermés.
Résultat : 10 000 morts dans les EHPAD, alors que certains résidents – bien sûr, pas les plus âgés – auraient pu être réanimés : les résidents âgés entre 70 et 75 ans qui ont été refusés par les hôpitaux. Ces personnes auraient pu être sauvées ; c'est la secrétaire générale du syndicat professionnel des EHPAD privés qui l'affirme dans la dernière édition du journal Marianne.
Prendrez-vous enfin conscience des dégâts de votre politique ? Renoncerez-vous aux plans de fermetures décidés par les ARS ? Dans mon département, l'Essonne, la fermeture de trois hôpitaux est toujours envisagée. L'entêtement des ARS et du Gouvernement à fermer toujours plus d'hôpitaux ne se dément pas, en particulier dans la région Grand Est. Alors, madame la secrétaire d'État, pourriez-vous envisager de rouvrir des hôpitaux ?
Monsieur Dupont-Aignan, je vous prie de bien vouloir conclure, ou bien Mme la secrétaire d'État n'aura qu'une minute pour répondre…
J'avais moi-même proposé la réouverture de l'hôpital du Val-de-Grâce afin d'accueillir des malades pendant la crise.
Je terminerai par cette question on ne peut plus précise : le nombre de lits de réanimation restera-t-il à 5 000 ou passera-t-il à 10 000 pour égaler l'Allemagne ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé.
Le sujet que vous abordez est très vaste et le cadre des questions orales sans débat n'est pas approprié pour y répondre alors qu'une commission d'enquête parlementaire devrait être prochainement constituée.
Permettez-moi, cependant, de revenir sur l'un des points que vous avez évoqués. En effet, je ne peux pas vous laisser dire qu'il y a eu des tris de malades dans les EHPAD. Depuis le début de la crise, les résidents diagnostiqués positifs au covid-19 ont été hospitalisés, …
… dans des établissements de santé ou à domicile. Seules les formes sévères critiques ont fait l'objet d'une admission dans les établissements de santé. La décision de maintenir ou non la personne malade dans l'EHPAD a tenu compte de l'état de santé du résident – vous l'avez vous-même souligné – , des capacités d'accompagnement de l'établissement, de la volonté du résident et de la possibilité de le déplacer.
Le ministère des solidarités et de la santé a travaillé aux côtés des EHPAD tout au long de la crise. Ils n'ont pas été seuls dans le processus de décision médicale. Une astreinte sanitaire de proximité a été organisée pour les personnes âgées et concerne aujourd'hui la quasi-totalité des EHPAD. Nous avons mobilisé le maximum de ressources pour la prise en charge des malades par les établissements. Nous avons par ailleurs créé des filières d'hospitalisation directe pour les cas les plus graves, pour lesquels l'hospitalisation pouvait représenter un bénéfice réel. Enfin, nous avons fléché les nouvelles capacités en matière de tests PCR – réaction de polymérisation en chaîne – vers les EHPAD.
La parole est à M. Belkhir Belhaddad, pour exposer sa question, no 1033, relative au télétravail des frontaliers.
Madame la secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, je souhaite vous interroger sur les enseignements à tirer de la crise du covid-19 s'agissant du télétravail concernant les travailleurs frontaliers.
Des aménagements fiscaux ont été trouvés entre le gouvernement de la République française et celui du Grand-Duché du Luxembourg afin de permettre aux nombreux travailleurs frontaliers de travailler chez eux durant la crise sans modification de l'assujettissement fiscal. Des aménagements relatifs aux cotisations sociales ont également été décidés à l'échelle européenne pour conserver l'affiliation des salariés à la sécurité sociale luxembourgeoise quand bien même la totalité de leur travail était effectuée en France.
Si les aspects fiscaux ne constituent pas la principale entrave, compte tenu des taux comparables de part et d'autre de la frontière, le niveau des cotisations sociales au Luxembourg, les garanties qu'elles ouvrent et les prestations familiales auxquelles elles donnent droit offrent un net avantage aux salariés qui y sont assujettis. Cependant, la qualité des relations sociales et familiales, la fluidité, en France, des moyens de transport, la préservation de l'environnement et même – la crise l'a démontré – la productivité plaident pour le maintien de la possibilité de télétravailler en zone frontalière bien au-delà de 25 % du temps de travail.
Dès lors, je souhaite connaître les démarches entreprises par le gouvernement français auprès du gouvernement luxembourgeois d'une part, et de l'Union européenne d'autre part, pour favoriser l'extension la plus large possible du télétravail et répondre à cette aspiration légitime de plusieurs dizaines de milliers de télétravailleurs.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur Belhaddad, voici la réponse que Mme la ministre du travail m'a chargée de vous transmettre.
Parce que ce sont des citoyens très mobiles de l'Union européenne, les travailleurs frontaliers ont été directement touchés par la pandémie. Le Gouvernement a réagi très rapidement, en concertation avec les pays frontaliers, pour trouver des solutions concrètes à leurs difficultés. Il s'est également assuré de la préservation de leurs droits dans leur pays d'activité, en particulier qu'ils percevaient un traitement équivalent à celui des autres salariés, qu'il s'agisse du recours à l'activité partielle ou du bénéfice d'indemnités journalières. En ce qui concerne le télétravail, les effets éventuels d'un temps passé accru sur le territoire français ont été neutralisés.
Reste que la crise actuelle remet plus profondément en question l'organisation du travail, comme vous l'avez vous-même relevé. Le recours au télétravail repose sur les dispositions de chaque législation nationale. À cet égard, les ordonnances relatives au travail promulguées en 2017 ont fait de la législation française l'une des plus favorables à son développement en faisant du télétravail un véritable droit pour le salarié et en simplifiant considérablement ses modalités de mise en oeuvre, ce qui a permis à plus de cinq millions de salariés d'y recourir pendant la période de confinement.
Un guide opérationnel a récemment été publié pour faciliter son appropriation par les employeurs et par les salariés puisqu'il est toujours préconisé d'y recourir dans les semaines à venir. Les partenaires sociaux pourront également se saisir prochainement du sujet. Compte tenu de l'importance prise par ce mode de travail dans l'ensemble des pays concernés, il pourrait en être question au niveau européen en vue d'un traitement plus global.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de cette réponse. Vous l'avez dit, la crise sanitaire aura des conséquences sur l'organisation du travail sur lesquelles nous devons nous interroger. Je me félicite que le Gouvernement ait favorisé la solution du télétravail pendant le confinement, et nous devons aujourd'hui franchir une nouvelle étape, en particulier dans les territoires marqués par une forte activité transfrontalière.
Le nombre de travailleurs frontaliers sera multiplié par deux ou trois au cours des prochaines années. Nous devons donc anticiper ce phénomène, comme le font, résolument, certaines collectivités territoriales qui ont investi dans des espaces de télétravail. C'est pourquoi je compte sur le Gouvernement pour envoyer un signal fort en ce sens.
La parole est à Mme Anne-France Brunet, pour exposer sa question, no 1025, relative à la filière conduite et gestion de l'exploitation agricole au lycée Jules-Rieffel de Saint-Herblain.
Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, j'appelle votre attention sur la situation du lycée Jules-Rieffel de Saint-Herblain, dans le département de la Loire-Atlantique.
Fusionné en 2014 avec le lycée du Grand Blottereau, le lycée Jules-Rieffel constitue le seul établissement public local de formation professionnelle agricole. En juin 2018, cet établissement a adressé à la délégation à la formation professionnelle initiale et continue, ainsi qu'au service régional de formation et du développement, une demande visant à ouvrir une nouvelle formation professionnelle en conduite et gestion de l'exploitation agricole, support polyculture et élevage.
À ce jour, le lycée Jules-Rieffel n'a toujours pas obtenu de réponse de la part du ministère. Pourtant, cette nouvelle filière viendrait répondre aux besoins de la filière bovine laitière du département et permettrait son maintien – besoins aujourd'hui satisfaits par un établissement privé situé hors du département.
Elle répondrait également aux demandes de compétences et de qualifications nécessaires à la conduite d'exploitations dans un contexte changeant, marqué par la concurrence internationale et par des exigences environnementales et sanitaires accrues.
La filière est porteuse, on le sait : le taux d'insertion de ceux qui en sont issus avoisine 80 %. Les jeunes sont donc demandeurs. Or leur insertion professionnelle est notre priorité, et l'agriculture une nécessité.
Alors que les crédits du programme 143 ont augmenté de près de 7 millions d'euros dans la dernière loi de finances, les voyants, si j'ose dire, sont au vert pour l'ouverture d'une telle filière au lycée Jules-Rieffel. Je vous prie donc de bien vouloir considérer, ou plutôt reconsidérer, cette demande d'ouverture.
Madame Brunet, je vous sais très attachée à l'enseignement agricole, mais, si je puis me permettre, votre propos contient une erreur : le lycée a bel et bien reçu une réponse. Simplement, ce n'est pas celle qu'il espérait puisqu'elle est négative : nous lui avons indiqué que nous ne pouvons pas ouvrir cette section.
Comme vous l'avez souligné, la création d'une filière de baccalauréat CGEA relève d'une autorité académique, la DRAAF – direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt – , donc du ministère de l'agriculture et de l'alimentation, en lien étroit avec les services du conseil régional et du rectorat, ce qui est bien normal.
Je suis très attaché au dialogue social et je dis tous les jours à mes collaborateurs que l'évolution de la carte des formations proposées ne peut passer que par la concertation. Aussi la demande formulée par le lycée a-t-elle fait l'objet d'échanges nombreux, depuis deux ans, entre mes services et les délégués du personnel de l'EPLEFPA – l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole – Nantes terre atlantique. Mon ministère les a reçus à plusieurs reprises : le 20 juin 2018, à l'occasion d'une audience au sujet de l'évolution des formations dispensées par l'établissement ; le 30 janvier 2019, lors d'une réunion ; le 27 mars 2019, ils ont rencontré le directeur général de l'enseignement et de la recherche ; enfin, le 4 juillet 2019, ils ont rencontré la secrétaire générale, dans le cadre de la préparation de la rentrée scolaire 2019-2020.
Pour établir les priorités en matière d'ouverture de formations, la DRAAF des Pays de la Loire s'est fondée sur une analyse fine des besoins du territoire, au terme de laquelle elle n'a pas retenu la demande du lycée Jules-Rieffel.
Pour être tout à fait transparent, je rappelle que le recrutement des élèves dans la filière polyculture-élevage en Loire-Atlantique est en perte de vitesse quasi régulière depuis. En quatre ans, quarante élèves de moins l'ont choisie, soit un plus de l'équivalent d'une classe. L'offre en formation initiale est insuffisante, selon l'étude menée par la DRAAF et par nos services, et un redéploiement des moyens n'est pas envisagé par l'autorité académique.
Je m'attache depuis dix-huit mois à inverser la tendance de baisse des effectifs. Je le dis depuis mon entrée en fonctions, l'enseignement agricole doit redevenir un primo-choix au lieu d'être un choix par défaut. Voilà pourquoi j'ai lancé la campagne « L'aventure du vivant », voilà pourquoi nous avons agi sur diverses formations. À la rentrée 2019-2020, pour la première fois depuis dix ans, le déclin des effectifs s'est arrêté et environ 2 000 lycéens supplémentaires ont été recrutés.
Nous devons encore travailler à faire des orientations en filière technique agricole au lycée un primo-choix ; peut-être pourrons-nous, à cette condition, envisager l'ouverture de filière que vous souhaitez. En revanche, actuellement, l'effectif constaté sur votre territoire ne le permet pas.
Enfin, je vous remercie d'avoir observé que nous avons revalorisé le budget de la formation agricole.
J'entends votre analyse, monsieur le ministre. Je précise qu'il n'existe aucun établissement public agricole dans le département, …
ien sûr !
… seulement un établissement privé situé hors des limites départementales. Cela explique peut-être la situation que vous évoquez. Je vous remercie d'avance de suivre le dossier ; peut-être aurons-nous l'occasion d'en reparler.
Je le suis, soyez sans crainte.
La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour exposer sa question, no 1040, relative aux zones non traitées dans les Ardennes.
Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, je souhaite vous interroger sur le nouveau cadre réglementaire issu du décret du 27 décembre 2019 relatif aux mesures de protection des personnes lors de l'utilisation de produits phytopharmaceutiques à proximité des zones d'habitation. La nouvelle réglementation suscite une vive inquiétude dans le monde agricole, tout particulièrement parmi les agriculteurs de ma circonscription, déjà fragilisés par les sécheresses successives de 2018 et 2019, par des crises sectorielles et désormais par la crise sanitaire.
Compte tenu des nouvelles mesures, les représentants du secteur agricole ont rédigé une charte de bon voisinage avec les élus locaux et les habitants afin de leur garantir la sécurité tout en continuant de mener à bien leur activité.
L'utilisation de produits phytosanitaires étant déjà bien encadrée, était-il nécessaire de durcir la réglementation ? Et pourquoi choisir à nouveau un dispositif à sens unique, sans compensation du manque à gagner pour les agriculteurs ni réciprocité des mesures destinées à protéger les zones d'habitation ?
Dans les Ardennes, la surface concernée par l'application des nouvelles mesures s'étend sur 4 000 hectares, soit 3 % de l'ensemble des terres labourables du département, mais concentrés sur quelques exploitations : autant de zones où la productivité sera affectée et où les agriculteurs vont avoir de nouveaux problèmes techniques pour lutter contre les plantes adventices.
Les cellules destinées à mesurer et combattre l'« agribashing » dans les départements sont une bonne chose ! Arrêtons de rendre les agriculteurs responsables de tout. Les nouvelles obligations qui leur sont imposées font immanquablement peser sur eux des coûts de production plus élevés. Qui paiera ces surcoûts ?
Comment entendez-vous clarifier vos intentions, sans que les agriculteurs soient une nouvelle fois les victimes de votre politique ?
Madame Poletti, soyons clairs et précis : ce n'est pas le Gouvernement qui a pris la décision dont vous parlez, mais le Conseil d'État qui la lui a imposée.
Cela a son importance : quand la plus haute juridiction administrative se prononce, le Gouvernement ne peut que s'exécuter. Les agriculteurs doivent tous comprendre que le Gouvernement n'a pas voulu leur serrer encore plus la vis mais a agi à la demande du Conseil d'État.
Les textes réglementaires parus fin 2019 s'appuient sur les travaux de l'ANSES, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail. C'est dans ce cadre que le décret – pris après trois mois de concertation et 55 000 contributions sur internet, je le rappelle – , institue les zones de non-traitement à compter du 1er janvier 2020. Nous avons tout fait pour qu'elles soient créées en toute clarté et transparence, et en concertation avec l'ensemble des organisations professionnelles agricoles. Les distances minimales par rapport aux habitations, respectivement de 10 et 5 mètres pour les cultures hautes et basses, peuvent être ramenées à 5 et 3 mètres en fonction du matériel utilisé – en particulier les buses antidérive – et de la publication d'une charte de riverains.
En outre, au Salon de l'agriculture, le Président de la République nous a très clairement demandé de trouver des compensations financières pour les agriculteurs. Nous avions commencé à y travailler mais la crise du covid-19 nous a contraints à tout arrêter. De plus, ayant entraîné l'interdiction des rassemblements publics, elle a empêché les consultations publiques, donc la discussion et la mise en oeuvre des chartes de riverains, prévues ce printemps ; les tribunaux, saisis en référé par des ONG, des associations et des maires, viennent de donner raison à l'État à ce sujet. Voilà pourquoi nous avons dû prendre des dispositions en vue de reprendre la discussion au début de l'été.
Rassurez-vous : nous n'avons aucune intention de mettre un boulet aux pieds des agriculteurs. Je précise que les distances ne concernent pas les produits de biocontrôle et que mon ministère a déjà mobilisé une enveloppe de 30 millions d'euros pour aider les agriculteurs à se doter des matériels d'épandage les plus performants.
Nous pourrons bientôt discuter de tout cela tranquillement. De grâce, n'ajoutons pas – je ne parle pas de vous – à la pression et à l'excitation ambiante. Nous n'avons pas tout arrêté, contrairement à ce que prétendent certains, et nous ne voulons pas pour autant, je le répète, mettre des boulets aux pieds des agriculteurs. La fin de la dépendance aux produits phytosanitaires ne fait pas de doute : elle figure dans la loi EGALIM – pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable – et nous n'y reviendrons pas. Toutefois, agissons intelligemment et dans la concertation.
Vous l'avez compris, ma question ne visait pas à remettre en question qui que ce soit, …
Bien sûr !
… car nous devons collectivement oeuvrer à la diminution du recours aux produits phytosanitaires. Elle portait uniquement sur la compensation financière destinée aux agriculteurs, et je note avec satisfaction votre réponse sur ce point : le processus est engagé, bien que malheureusement ralenti par le coronavirus. J'observerai avec une grande attention la suite des événements.
La parole est à M. Xavier Breton, pour exposer sa question, no 1041, relative aux conséquences de la crise sanitaire sur la filière « volaille de Bresse ».
Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, je veux vous alerter au sujet des conséquences économiques sans précédent de la crise sanitaire sur la plupart de nos productions agricoles, notamment dans l'Ain. Elles viennent s'ajouter aux difficultés rencontrées depuis des années par le monde agricole. Malheureusement, c'est l'ensemble des filières qui ont besoin dès à présent de mesures de soutien afin de préserver leur activité et d'assurer leur pérennité. Des échanges ont déjà pu avoir lieu au niveau local, avec les services de l'État et des collectivités territoriales, afin d'identifier les besoins des secteurs durement touchés. Il faut aller plus loin et agir.
Dans cette perspective, je tiens à vous signaler la spécificité de la filière « volaille de Bresse », seule filière avicole au monde à bénéficier d'une AOCAOP – appellation d'origine contrôléeprotégée. Les conditions d'élevage de ces volailles favorisent leur épanouissement et leur confèrent le goût savoureux, raffiné et unique qui fait partie de la richesse de la gastronomie française. Nous devons préserver ce savoir-faire traditionnel, mais aussi avoir conscience du poids économique significatif de la filière pour nos territoires de l'Ain, de la Saône-et-Loire et du Jura. Au-delà des exploitations avicoles, sont également concernés les centres de sélection, les couvoirs, les abatteurs-expéditeurs, les vendeurs, les restaurateurs et bien sûr les consommateurs.
Or, dès le début du confinement, les représentants du CIVB – le Comité interprofessionnel de la volaille de Bresse – ont alerté sur l'impossibilité pour les éleveurs de commercialiser leurs volailles, du fait de la fermeture des restaurants et de l'arrêt d'activité des traiteurs. Au début de la crise, pas moins de 25 000 poulets étaient en phase de finition. Les éleveurs ont alors consenti de gros efforts financiers afin d'écouler ces volailles ; ainsi, le prix de vente aux professionnels de l'abattage et de la commercialisation a été divisé par deux en moyenne. Désormais, les abattoirs prennent le relais des éleveurs en réduisant à leur tour leurs tarifs. Faute de pouvoir être commercialisées, il faut surgeler de nombreuses volailles – selon les estimations, environ 61 000 l'auront été au 31 août – , alors que cette logique a ses limites.
Les pertes vont donc être élevées pour tous les professionnels de la filière « volaille de Bresse ». Il est par conséquent indispensable de prendre des mesures pour préparer, en concertation avec la profession, un plan de sauvetage de l'ensemble de la filière, pour l'aider à passer le cap de la crise et l'accompagner lors de la phase de reprise que nous espérons tous, afin que ce produit phare de notre agriculture et de notre gastronomie continue de rayonner et de faire la fierté de la Bresse et de tout le pays.
Alors que midi approche, monsieur Breton, vous entendre parler ainsi de la filière agricole « volaille de Bresse » nous donne à toutes et tous l'envie de déguster ce produit, tant il est d'excellence. Vous avez beaucoup de chance de vivre dans le département de l'Ain, entouré de tous ces élevages.
Vous avez commencé par évoquer l'ensemble des filières agricoles, toutes fortement touchées par la crise, notamment celles d'excellence. Quand on en évoque une en particulier, tous les députés souhaiteraient que l'on parle des leurs. Je me contenterai de répondre à votre question, mais je tiens à dire que je me suis entretenu avec les représentants de presque toutes par visioconférence. Il n'y aura pas de plan spécifique filière par filière, cela n'aurait pas de sens. Un plan d'ensemble a été instauré par le Gouvernement, et aussi bien les entreprises agricoles que les exploitations peuvent en bénéficier des mesures horizontales qu'il contient, qu'il s'agisse du fonds de solidarité ou des prêts – vous connaissez ces dispositifs par coeur.
Cela dit, il convient de tenir compte d'un certain nombre de spécificités. Vous l'avez très bien dit, l'élevage dans son ensemble, y compris la volaille de Bresse, s'est d'abord retrouvé dans l'impossibilité d'écouler ses produits. Il faut bien comprendre – je parle devant le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics – qu'il y a ceux, comme les restaurateurs, dont l'activité a été suspendue par décret du fait de l'état d'urgence sanitaire et ceux qui ont aussi été contraints de s'arrêter en conséquence et n'ont guère pu écouler leur production. Or la volaille de Bresse, de grande qualité, est distribuée dans les restaurants, sur les marchés ou en circuit court.
C'est pourquoi nous avons immédiatement réagi. J'ai demandé à l'INAO – Institut national de l'origine et de la qualité – d'étudier la situation de près et nous avons instauré une procédure rapide afin de permettre aux produits bénéficiant d'un signe de qualité d'adapter temporairement les critères de leur cahier des charges. Il s'agit pour eux de continuer à bénéficier de ces signes et de préserver ce qui fait la typicité de ces produits, tout en faisant évoluer les conditions de production en cette période de crise. La volaille de Bresse a bénéficié de ce dispositif, à l'instar des fromages sous AOP et de toutes les autres productions sous signe de qualité.
Et nous avons travaillé dans un souci de cohérence régionale, car la volaille de Bresse s'écoule certes à distance mais est aussi beaucoup distribuée au niveau local. Nous avons donc rouvert les marchés et je suis intervenu auprès des acteurs de la grande distribution.
Nous continuerons de suivre l'évolution de cette crise et de réfléchir aux moyens d'aider cette filière, qui en a bien besoin, à redémarrer, notamment au travers de la promotion. Vous le savez très bien, les choses ne se font pas en un jour et il convient d'objectiver la situation. Mais soyez assuré que le Gouvernement a bien à l'esprit la situation dramatique des éleveurs de volaille de Bresse.
La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour exposer sa question, no 1050, relative au financement de la rémunération des accompagnants des élèves en situation de handicap pendant le temps de cantine.
Nous resterons sur le thème du déjeuner puisque ma question, qui s'adresse à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées, porte sur le financement de la rémunération des accompagnants des élèves en situation de handicap – les AESH – durant la pause méridienne.
En 2019 a été lancé le chantier du nouveau grand service public de l'école inclusive, qui doit aboutir en 2022, et il est vrai que des améliorations ont vu le jour pour rendre l'école plus accessible aux enfants en situation de handicap. Mme la secrétaire d'État est venue le constater avec M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, lors de la dernière rentrée scolaire, dans ma circonscription, à Thiron-Gardais. Mais de nombreux obstacles persistent, vécus comme une double peine par les enfants et leurs parents.
La question du financement de la rémunération des AESH sur le temps de cantine est un serpent de mer illustrant parfaitement les difficultés auxquelles sont confrontées les familles. Deux jurisprudences du Conseil d'État, remontant à 2001, posent le principe d'une prise en charge par l'État des AESH sur le temps de pause méridienne, à condition que la maison départementale des personnes handicapées – MDPH – les ait prescrites. Or l'éducation nationale refuse presque systématiquement de financer l'accompagnement des enfants pendant le temps de la cantine, arguant qu'il ne s'agit pas d'un temps scolaire et renvoyant les parents vers les collectivités territoriales. À leur tour, nombre de ces dernières estiment qu'il ne leur revient pas d'assurer ce financement, en raison notamment de la jurisprudence existante. La question se pose aussi si l'enfant est scolarisé dans un établissement privé.
Il faut bien comprendre que l'accès à la cantine des enfants handicapés n'est pas un luxe, mais bien souvent une nécessité pour les familles, particulièrement lorsque les deux parents travaillent. Il est temps de clarifier la situation. À quelle date l'État publiera-t-il un arrêté ou une circulaire reprenant les termes de la jurisprudence pour que les services de l'éducation nationale prennent en charge le coût des heures d'AESH prescrites par les MDPH sur le temps de cantine ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Je vous prie, madame de La Raudière, de bien vouloir excuser Sophie Cluzel, qui m'a demandé de répondre à votre question.
L'accès à la cantine des élèves en situation de handicap n'est ni une option ni un « luxe », pour reprendre votre terme, mais un droit, qui s'impose à la commune ou à l'établissement proposant ce service. L'article L. 131-13 du code de l'éducation dispose en effet : « L'inscription à la cantine des écoles primaires, lorsque ce service existe, est un droit pour tous les enfants scolarisés. Il ne peut être établi aucune discrimination selon leur situation ou celle de leur famille. » De manière générale, le maire se doit, au titre du principe d'accessibilité, défini notamment dans la loi du 11 février 2005, de favoriser l'égal accès aux établissements recevant du public, parmi lesquels les écoles et les cantines, en assurant un accueil adéquat pour les élèves concernés.
Sans que cela puisse justifier un refus, les difficultés propres à un élève pour accéder au service public de la restauration scolaire doivent pouvoir trouver des réponses adaptées, en lien avec l'ensemble des acteurs contribuant à l'accueil et l'accompagnement de cet élève. Les AESH, chargés de l'aide humaine individualisée ou mutualisée, peuvent accompagner les élèves en situation de handicap à la cantine, dès lors que cet accompagnement est notifié par une décision de la CDAPH – commission des droits à l'autonomie des personnes handicapées.
Si cette disposition permet d'éviter toute rupture d'accompagnement de l'élève déjeunant à la cantine, la question de la responsabilité du financement n'a effectivement jamais été clairement établie dans la législation. Elle est source de contentieux, dont il convient de sortir dans l'intérêt de tous, qu'il s'agisse des élèves, des parents, des maires ou encore des autorités académiques. Vous avez fait référence à une jurisprudence du Conseil d'État de 2001 relative à l'intervention des assistants d'éducation sur le temps de cantine. Il se trouve que le Conseil d'État est de nouveau appelé à se prononcer sur cette question relative aux AESH, à la suite de décisions des cours administratives d'appel de Nantes des 15 mai et 25 juin 2018, et de Bordeaux du 5 novembre 2019, lesquelles renvoient à nouveau la responsabilité du financement aux autorités académiques.
La décision à venir du Conseil d'État sera riche d'enseignements : elle nous permettra de clarifier la responsabilité du financement. Jean-Michel Blanquer et Sophie Cluzel souhaitent s'appuyer sur cette décision pour avancer et faire en sorte que l'accueil des enfants dans les cantines soit assuré et que la responsabilité du financement soit clairement établie dans les semaines ou les mois à venir.
Nous attendons donc une troisième décision du Conseil d'État ; cela signifie que l'État ne tient pas compte des deux précédentes. Je comprends qu'il ait fait appel des décisions des cours administratives ; je trouve néanmoins incroyable qu'il n'applique pas les décisions précédentes du Conseil d'État. Connaissez-vous la date précise de son prochain jugement ?
La parole est à M. Patrick Hetzel, pour exposer sa question, no 1036, relative à la transférabilité des contrats d'assurance-vie.
Ma question, qui s'adresse à M. le ministre de l'action et des comptes publics, concerne l'épargne investie par nos concitoyens en assurance-vie. Cet investissement confère des avantages fiscaux, notamment en matière de transmission du patrimoine, dès lors que l'épargnant a souscrit le contrat avant l'âge de 70 ans. Se pose toutefois la question de la transférabilité des contrats. Pour l'heure, quelqu'un souhaitant transférer son contrat doit d'abord le racheter avant de le réinvestir dans un nouveau ; cela pose évidemment problème aux épargnants de plus de 70 ans, qui perdent ainsi tous les avantages fiscaux liés aux contrats pourtant souscrits avant cet âge.
Compte tenu de l'état des marchés financiers et de notre économie, ne pourrait-on pas autoriser ces épargnants à transférer leur contrat sans rachat préalable, pourvu qu'ils placent leur épargne uniquement en unités de compte, à l'exclusion de ce que l'on appelle « les fonds en euros » ? Cela représenterait un double avantage : d'une part, leur donner un peu plus de liberté dans leur gestion patrimoniale ; d'autre part, encourager les investissements dans l'économie réelle, qui, après la crise du covid-19, a bien besoin de financement et d'investisseurs. Le Gouvernement serait-il donc prêt à faire évoluer les règles en vigueur dans ce domaine, ce qui contribuerait à réinjecter de l'argent frais dans notre économie réelle ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Votre question, monsieur Hetzel, permet de préciser la position du Gouvernement sur les différentes options que vous avez évoquées et de rappeler les règles en vigueur pour les épargnants qui souhaitent transférer leur contrat d'assurance-vie. Il existe deux possibilités.
La première consiste à racheter son contrat puis à réinvestir les sommes récupérées dans un nouveau. Cela conduit à perdre les avantages fiscaux liés à l'antériorité du contrat, justifiés notamment par la volonté d'inciter à une détention longue de l'épargne, une assurance-vie étant un produit liquide dont le montant peut être retiré à tout moment. Permettre une transférabilité avec un changement d'assureur conduirait à accroître la liquidité des contrats de manière disproportionnée, ce qui amènerait, selon nous, les assureurs à limiter davantage leurs investissements en actions. Cette mesure irait donc à l'encontre de la loi PACTE – relative à la croissance et la transformation des entreprises – du 22 mai 2019, dont l'objectif est au contraire de développer l'investissement en actions. Elle irait également à l'encontre des travaux menés au niveau européen pour que la directive Solvabilité II soit moins pénalisante vis-à-vis des investissements en actions à long terme. Enfin, au niveau prudentiel, en cas de remontée des taux, la transférabilité viendrait dangereusement menacer le bilan des assureurs, qui s'en trouveraient exposés à des retraits potentiellement élevés dans le cas où leurs actifs perdraient de la valeur. Une mesure de transférabilité permettant de changer d'assureur, parce qu'elle ferait peser un risque sur la sécurité de l'épargne, n'est donc pas envisagée à ce stade.
Mais il existe une deuxième possibilité de transférer son contrat, qui consiste à le transformer en un nouveau contrat souscrit auprès du même assureur. L'article 125-0 A du code général des impôts, simplifié par la loi PACTE, permet à l'épargnant, par avenant au contrat ou souscription d'un nouveau contrat auprès du même assureur, de transformer son contrat tout en conservant son antériorité fiscale. Ainsi le nouveau contrat issu d'une transformation est réputé avoir été souscrit à la date du premier versement effectué sur le bon ou le contrat d'origine, avec toutes les conséquences attachées à cette antériorité, y compris pour l'application des articles 757 B et 990 I du code général des impôts relatifs au régime fiscal applicable en cas de décès.
Vous avez rappelé le droit en vigueur et la politique poursuivie par le Gouvernement, alors que je vous demandais si vous étiez prêts à faire évoluer les règles relatives à l'assurance-vie. Je retiens donc de votre réponse que non. Vous nous dites que la transférabilité comporte le risque d'obtenir encore moins d'investissements pour l'économie réelle. J'insiste sur l'argument que j'ai développé : l'idée n'est pas simplement de faciliter le transfert ; il s'agit de l'autoriser dès lors que l'on investit non plus en fonds en euros mais en unités de compte. Le problème que vous mentionnez serait ainsi résolu. Vous ne répondez donc pas à ma question. J'aimerais savoir si le Gouvernement ne pourrait pas envisager une telle évolution des règles : la transférabilité serait possible, mais à condition d'opérer une reconversion en unités de compte et non plus en fonds en euros.
La parole est à Mme Sarah El Haïry, pour exposer sa question, no 1044, relative aux mesures en faveur des dons dans le plan de relance.
Une hausse de 693 % : c'est l'évolution du montant des dons entre la première quinzaine d'avril 2020 et celle de 2019. Vous me direz qu'ils concernent la recherche ou les hôpitaux. Or l'étude d'iRaiser consacrée aux levées de fonds commandée par France générosités montre que l'ensemble des domaines ont profité de l'élan. Cette bouffée d'oxygène inattendue ne doit pas nous faire oublier les baisses successives des collectes de dons. Pendant la crise néanmoins, les Français qui le pouvaient ont été généreux, très généreux. Je veux ici rendre hommage à notre pays philanthrope : de la quête virtuelle pour une église aux dons pour le refuge pour animaux surpeuplé, en passant par le soutien à une association venant en aide aux femmes en détresse ou aux plus démunis – qui ne survivraient pas sans l'aide alimentaire – , l'ensemble du secteur caritatif a bénéficié de ce mouvement.
Monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, durant les heures difficiles que nous avons traversées, nous avons pu constater que des gestes philanthropes et de grand secours ont été effectués sans arrière-pensée d'optimisation fiscale. Un grand parc d'attractions a ainsi fait des dons alimentaires au profit des plus démunis, quelques heures après la décision de confinement, afin que les denrées stockées ne soient pas perdues. De même, de grands groupes français ont fait des dons de masques, au moment où la tension était à son comble et que nous reconnaissions humblement être dans l'incapacité de satisfaire les besoins immédiats. Les dons d'alcool ont permis de relancer la production de gel, à plein régime. Et je ne mentionne pas les petits dons de masques, de charlottes ou de surblouses que des concessionnaires automobiles, des entreprises de l'agroalimentaire et des TPE ou PME ont faits directement à l'ARS ou aux infirmiers libéraux.
Nous constatons donc que le levier du don est à la fois puissant et agile, tandis que les procédures de commande publique ne sont pas adéquates dans une situation de crise. Cette démonstration de force fera-t-elle évoluer le point de vue de l'administration, qui considère encore trop les dons comme une niche fiscale ? Envisagez-vous d'encourager les dons pour accompagner le plan de relance à venir, et par quels moyens ?
Permettez-moi de vous offrir un livre, qui retrace l'histoire des dons et des legs à l'Institut Pasteur. Notre espoir repose sur un vaccin et un traitement. L'Institut Pasteur, qui fait la fierté de la France, a été fondé grâce aux dons et aux legs, et continue à fonctionner en grande partie ainsi. La philanthropie constitue un outil formidable ; elle est tellement source d'espoir que nous devons la soutenir. J'ai hâte d'entendre votre réponse.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Madame El Haïry, je vous rejoins concernant l'importance des dons, en particulier dans la période actuelle, où notre pays est très rudement mis à l'épreuve. Vous avez cité de nombreux exemples, tous remarquables, et on pourrait en ajouter. Je pense ainsi aux entreprises qui ont accepté de participer, anonymement et sans contrepartie fiscale, au fonds de solidarité en faveur des TPE de moins de dix salariés. Il faut s'en réjouir, tout en rappelant que le Gouvernement a oeuvré activement pour soutenir les dons, qu'ils viennent des entreprises comme des particuliers. Vous l'avez très justement relevé dans le rapport sur la philanthropie à la française que vous avez remis au Premier ministre en janvier dernier : le dispositif français du mécénat est un des plus généreux au monde, et plusieurs mesures prises au cours du quinquennat, dont certaines en réaction à la crise actuelle, l'ont consolidé.
S'agissant des particuliers, les versements effectués au profit des oeuvres ou organismes d'intérêt général ou reconnus d'utilité publique ouvrent droit à une réduction d'impôt sur le revenu égale à 66 % de leur montant, dans la limite de 20 % du revenu imposable. L'article 200 du code général des impôts prévoit en outre une réduction majorée au taux de 75 % pour les dons de particuliers aux organismes fournissant gratuitement des repas ou des soins aux personnes démunies, ou favorisant leur accès au logement ; alors que ces dons étaient auparavant soumis à un plafond de 552 euros, la loi de finances rectificative du 25 avril 2020, adoptée à la faveur – si l'on peut dire – de la crise, a porté ce plafond à 1 000 euros.
Concernant les entreprises, la réduction d'impôt au titre du mécénat, prévue à l'article 238 bis du code général des impôts, procure un avantage fiscal pour les versements en faveur de certains organismes d'intérêt général : une réduction de 60 % de leur montant dans la limite de 10 000 euros, ou de 5 ‰ du chiffre d'affaires au-delà ; pour les versements supérieurs à 2 millions d'euros, l'avantage est de 40 %. Afin de favoriser le soutien au développement du mécénat des petites entreprises, qui atteignent plus rapidement que les autres la limite de 5 ‰ du chiffre d'affaires, l'article 134 de la loi de finances pour 2020 a porté le plafond des versements de 10 000 à 20 000 euros – vous y avez largement contribué.
Le plan de relance, que vous avez évoqué, est en préparation : les mesures qu'il contiendra sont à l'étude ; nous devons travailler pour qu'il soit transversal et efficace. Avec Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics, nous présenterons un projet de loi de finances rectificative dans les prochaines semaines ou les prochains mois, pour adopter des mesures d'urgence et pour anticiper et accompagner des plans sectoriels, en ayant comme objectif un plan de relance transversal à appliquer lorsque la situation sera pleinement stabilisée. Dans cette perspective, il sera intéressant de débattre pour déterminer comment inciter les entreprises et les particuliers à faire preuve de générosité – peut-être, si c'est faisable, en prorogeant les mesures récentes que j'ai évoquées. Nous serons extrêmement attentifs à vos propositions.
La philanthropie à la française est territoriale : elle s'exerce à proximité. Selon moi, il suffit de changer le regard de l'administration, qui la considère parfois trop comme une volonté d'optimisation ; elle doit se montrer un peu plus confiante.
La parole est à M. Hervé Saulignac, pour exposer sa question, no 1049, relative aux sinistrés du Teil.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, qui, il y a six mois presque jour pour jour, s'était rendu au Teil, commune victime du séisme le plus important que la France métropolitaine ait connu depuis quarante ans.
Alors que la vie reprenait ses droits, le confinement a ajouté une épreuve à l'épreuve. Les travaux ont pris un retard considérable, 700 familles restent à ce jour délogées, un quart des habitations sinistrées n'ont pas été expertisées et, dans 80 % des cas, les travaux n'ont même pas commencé. Tous les jours, on déplore des lenteurs voire – je suis tenté d'employer le mot – des cafouillages regrettables dans les procédures d'expertise, en raison du nombre des intervenants, d'une part, et du manque de pilotage de la part des assureurs, d'autre part. Certains experts admettent le caractère déterminant du séisme dans la survenance des dommages, tandis que d'autres le refusent ; s'ensuivent des propositions de réparation à géométrie très variable, d'un expert ou d'un assureur à l'autre. Désormais, la lassitude et parfois l'exaspération prennent le pas sur la patience ; ayant souvent l'occasion de croiser des Teillois, je peux malheureusement en témoigner. Ces retards aggraveront les difficultés du quotidien : les frais de relogement, pour les rares personnes qui en bénéficient, ne seront bientôt plus pris en charge par les assurances, et de nombreux sinistrés risquent d'être privés de l'indemnisation différée correspondant à la valeur à neuf.
Depuis des semaines, le Collectif pour les sinistrés du séisme du 11-11-2019, avec le soutien de la mairie et des services de la préfecture de l'Ardèche, tente d'obtenir des améliorations de traitement de la part des assureurs, mais les discussions avec la Fédération française de l'assurance n'aboutissent pas. Aussi, je sollicite ardemment votre appui pour faire pression sur les assureurs afin que cessent les légèretés, les traitements inéquitables et incompréhensibles. Je demande au Gouvernement d'intervenir le plus fermement possible, afin que les retards imputables aux assurances donnent lieu à des prises en charge de loyers. Surtout, je vous demande d'entendre les Teillois, qui ont besoin d'envisager rapidement un avenir meilleur et de savoir que le Gouvernement ne les oublie pas.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Monsieur Saulignac, le séisme du Teil, survenu le 11 novembre 2019, a causé de nombreux dégâts dans la vallée du Rhône, que vous connaissez bien, notamment dans le département de l'Ardèche, pour lequel nous avons un attachement commun. Une fois de plus, le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles a fait ses preuves, grâce à une réaction rapide : quarante communes ont été reconnues en état de catastrophe naturelle et plus de 13 000 sinistres ont été recensés dans ce cadre par les assureurs. Les dernières estimations, datant de février, font état de dommages supérieurs à 170 millions d'euros, dont environ la moitié seront pris en charge par la caisse centrale de réassurance.
Nous avons pleinement conscience des difficultés rencontrées par les assurés pour être indemnisés, aggravées par la crise des dernières semaines, mais consécutives au cumul de plusieurs facteurs de complication. Premièrement, comme les dégâts touchent souvent la structure des bâtiments, les expertises à mener sont nombreuses, ce qui a créé un goulet d'étranglement pour les bureaux techniques, d'autant plus que le confinement a empêché nombre de déplacements et de visites. Deuxièmement, dans la commune du Teil, les édifices sont souvent imbriqués ; par conséquent, avant de réparer un bâtiment sinistré ou de le démolir en vue de sa reconstruction, il faut prendre en considération les solutions envisagées pour les propriétés mitoyennes endommagées, ce qui contribue à ralentir les opérations et conduit à la multiplication des échanges entre compagnies d'assurances, au point qu'ils peuvent paraître incessants.
Comme vous l'avez indiqué, la préfecture anime un groupe de travail sur les assurances, auquel participe notamment un correspondant sur place de la Fédération française de l'assurance. L'État a déployé des moyens spécifiques, avec notamment la nomination d'une préfète déléguée, accompagnée de cadres de l'État, afin d'assurer le meilleur suivi possible des travaux.
Nous avons signalé la situation à la Fédération française de l'assurance : j'apporte une réponse positive à votre demande d'interpeller, d'inciter et d'accompagner les assureurs pour qu'ils prennent en considération les difficultés des Teillois. Nous espérons en outre que le déconfinement accélère le cours des événements et nous avons demandé aux assureurs de relancer activement les experts afin d'accélérer le lancement des travaux.
Enfin, vous évoquez le délai de reconstruction, limité contractuellement à deux ans. Le séisme n'étant intervenu qu'en novembre dernier, je ne crois pas que la situation exige, à ce stade, de l'allonger. Je précise toutefois que si de nouvelles difficultés émergeaient, la question se poserait, à l'image de ce qui a été fait pour certains sinistrés de l'ouragan Irma. Là encore, nous travaillerons avec la Fédération de l'assurance. Il est évident que les retards imputables aux assureurs ou au confinement ne doivent en rien porter préjudice aux assurés de Teil.
Pour conclure, je voudrais souligner que le Gouvernement est présent aux côtés des Teillois, comme vous le savez. Il a dégagé des moyens juste après le sinistre et créé la cellule de travail que j'évoquais.
En outre, conscients des conséquences particulièrement graves, nous avons pris des mesures fiscales, à propos desquelles vous nous avez interpellés il y a quelques mois. Les propriétaires et les locataires locaux ayant fait l'objet d'un arrêté de péril portant interdiction d'accès ou d'occupation ont bénéficié d'un dégrèvement de leur taxe foncière sur les propriétés bâties ainsi que de la taxe d'habitation, au titre de l'exercice 2019 ; dans la commune du Teil, plus de 1 300 locaux ont été concernés par cette disposition. Dans la même logique, les bailleurs ont pu solliciter un dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés bâties, en cas de vacance involontaire de plus de trois mois de leur logement destiné à la location. Nous avons adopté des mesures assez similaires pour les entreprises, avec des possibilités de dégrèvement de cotisation foncière des entreprises, notamment pour les mois restant à courir en cas de cessation totale d'activité. En outre, les acomptes de l'impôt sur les sociétés pour l'exercice 2019 ont été reportés et ceux de l'impôt sur les revenus ont été modulés. Nous resterons présents aux côtés des Teillois et nous continuerons à répondre aux sollicitations des élus locaux.
La parole est à M. Xavier Roseren, pour exposer sa question, no 1034, relative à l'industrie du décolletage dans la vallée de l'Arve.
Je souhaite vous interroger, monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, à propos de l'accompagnement, à moyen terme, des entreprises industrielles de la vallée de l'Arve, en particulier celles du décolletage. Comme le ministre de l'économie et des finances, Bruno Le Maire, l'a mentionné ce matin en commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, ce secteur produit des composants spécifiques, de faible diamètre, destinés à être assemblés dans des produits appartenant à des domaines très divers, comme l'horlogerie, l'automobile, l'aéronautique et le domaine médical. C'est donc un écosystème stratégique, intervenant dans un secteur d'activité de haute technicité, extrêmement innovant et qui exporte massivement ; il est constitué essentiellement de PME et de TPE, employant un capital humain doté de compétences susceptibles d'une réelle différenciation compétitive.
En 2017, la France comptait plus de 600 entreprises de décolletage, qui ont réalisé 2,4 milliards d'euros de chiffre d'affaires ; 437 d'entre elles se trouvent dans la vallée de l'Arve, berceau historique de l'activité, que M. Le Maire connaît bien. Ces dernières engendrent, à elles seules, 1,6 milliard d'euros et regroupent plus de 70 % des emplois du secteur. Or, déjà largement fragilisé par la mutation de la filière automobile, il est gravement touché par une baisse brutale de l'activité liée à la crise sanitaire. Malgré un large recours aux mesures d'urgences, il reste inquiet quant à sa capacité à parvenir à une reprise de l'activité à court ou moyen termes. Le cinquième rapport de l'Observatoire de la santé des entreprises du pôle de compétitivité Mont-Blanc industries, publié le 8 mai dernier, précisait que, parmi les entreprises encore en activité, 87 % ont recours au chômage partiel et 44 % aux emprunts de trésorerie.
Le secteur se mobilise et vous a réclamé un prolongement de ces mesures. Quel accompagnement spécifique est prévu, à court terme, pour les acteurs de la filière, soumise à une forte concurrence internationale ? L'État prévoit-il des prises de participation temporaires au capital des ETI et PME de cette filière stratégique ? Avant la crise du covid-19, le Gouvernement prévoyait la présentation d'un plan de relance de l'industrie liée à l'automobile en Haute-Savoie. Ce fonds de soutien et de transition se trouve-t-il remis en cause ou modifié ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Monsieur Roseren, la vallée de l'Arve, vous l'avez rappelé, concentre 800 entreprises industrielles, principalement des PME et des TPE familiales, dont une très large part sont spécialisées dans les domaines du décolletage et de la mécanique de précision. Environ 55 % du chiffre d'affaires de l'industrie du décolletage est lié au secteur automobile, en grande partie aux véhicules thermiques, dont le diesel ; viennent ensuite, à parts plus ou moins égales, l'aéronautique, les biens d'équipement, le médical, le sport et les loisirs.
Cette industrie a été fortement affectée par la crise de 2008-2009, vous êtes particulièrement bien placé pour le savoir. La vallée de l'Arve avait su rebondir, mais la décroissance du marché du diesel à partir de 2015 a mis en évidence les problèmes structurels du secteur : forte dépendance aux véhicules thermiques ; vieillesse relative d'une partie du système de production ; recherches de diversification encore trop modestes. C'est pourquoi a été évoquée à plusieurs reprises la nécessité d'un plan d'accompagnement pour la reconversion de la vallée.
La crise du covid-19 frappe très fortement les acteurs de la vallée de l'Arve : les entreprises tournent au ralenti, les incertitudes sont grandes, et une part très importante des entreprises ont fait appel au dispositif d'activité partielle ainsi qu'au report de charges sociales, fiscales et bancaires. La plupart anticipent une probable baisse de leur chiffre d'affaires annuel, de l'ordre de 20 à 40 %.
Si la crise actuelle aggrave encore la situation pour la vallée de l'Arve, elle ne doit pas faire oublier des considérations de moyen et long terme. C'est la raison pour laquelle, en complément d'un plan de relance du secteur automobile, nous poursuivons l'élaboration d'un plan d'action spécifique pour soutenir cette vallée, en relation avec l'ensemble des acteurs locaux. L'objectif est de proposer des mesures concrètes à prendre rapidement, qui permettront dès la sortie de crise de s'attaquer aux problèmes structurels de la vallée de l'Arve. Ce plan doit permettre de soutenir le repositionnement stratégique des acteurs, tout en identifiant des perspectives de diversification.
Pour répondre à la crise actuelle, qui touche plus durement cette industrie que d'autres secteurs de notre économie, les dispositions des deux projets de loi de finances rectificatives que vous avez adoptés continuent de s'appliquer.
Mme la ministre du travail a indiqué que la sortie du chômage partiel serait progressive, en fonction du niveau d'activité et des difficultés rencontrées. Nous avons aussi instauré différents dispositifs : le fonds de solidarité ; un fonds permettant à l'État de prendre des participations dans les entreprises les plus stratégiques quand c'est nécessaire ; le programme de prêts garantis par l'État permettant à toutes les entreprises qui rencontrent des difficultés de trésorerie d'être accompagnées par l'État, afin d'accéder à un financement bancaire – d'ores et déjà, plus de 70 milliards d'euros de prêts ont ainsi été accordés. Chacun de ces outils est évidemment mobilisé et mobilisable par les acteurs de la vallée de l'Arve, en attendant que le plan de relance de l'automobile annoncé par Bruno Le Maire et le plan spécifique pour la vallée de l'Arve soient prêts – ce devrait être le cas rapidement.
Les élus locaux, dont vous êtes un des représentants de tout premier ordre, seront évidemment associés à la définition de ce plan, et nous serons attentifs à vos propositions, parce qu'elles s'appuient sur votre expérience du terrain.
La parole est à M. Jean-Luc Lagleize, pour exposer sa question, no 1043, relative à la diversification de l'économie toulousaine.
Monsieur le ministre de l'économie et des finances, la filière aéronautique et spatiale est le moteur de l'économie de la région Occitanie, particulièrement dans le département de la Haute-Garonne et dans la métropole de Toulouse. L'Occitanie est en effet la plus grande région aéronautique d'Europe, avec comme fers de lance les sièges d'Airbus et d'ATR Aircraft à Toulouse, mais aussi plusieurs milliers d'entreprises et dizaines de milliers d'emplois directs qui font vivre et dynamisent le territoire.
Les forces de cette industrie, avant la pandémie de covid-19, à savoir la proximité des donneurs d'ordres et des sous-traitants ainsi que leur extraordinaire densité, révèlent, dans le contexte actuel, la dépendance de la région à une mono-industrie. L'interdépendance de la filière aérospatiale et du secteur aérien, actuellement à l'arrêt, nous entraîne vers un trou d'air phénoménal et donc vers une catastrophe économique, sociale et en matière d'aménagement du territoire.
Il est impératif de saisir l'occasion offerte par cette crise, qui pourrait durer plusieurs années, pour diversifier en profondeur l'économie du territoire. Cette transition économique répondrait à l'enjeu de souveraineté industrielle que la pandémie a tant mis en exergue. L'intelligence et les compétences des professionnels du secteur aérospatial constituent des ressources inestimables qui pourraient être valorisées dans d'autres secteurs stratégiques, tant pour la France que pour l'Union européenne.
La métropole de Toulouse a par exemple tous les atouts pour développer un pôle de compétitivité européen autour des transports et des mobilités du futur. Nous le savons, cette mobilité doit être plus économe en énergie, plus durable, plus intelligente et plus autonome. À Toulouse et dans ses environs, plusieurs entreprises s'attellent déjà à relever ces défis : EasyMile, dont les navettes autonomes électriques sillonnent déjà les routes du monde entier ; Hyperloop TT, dont les capsules supersoniques révolutionneront peut-être les déplacements ; Continental Automotive, qui travaille sur les logiciels qui équiperont les prochaines voitures autonomes ; Renault, qui a transformé un site d'Intel en un centre de recherche sur la voiture connectée et autonome.
Toulouse possède également des atouts indéniables dans les secteurs de la défense, de la santé, des sciences de la vie et du numérique.
Pour faire prospérer ces nouveaux pôles de compétitivité, il nous faut encourager toutes les entreprises, notamment celles du secteur aérospatial, à se diversifier et à investir massivement dans des programmes de recherche et de développement, par exemple en matière d'intelligence artificielle et d'automatisation des usines, dans le respect des objectifs environnementaux.
Monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, afin de sortir par le haut de cette crise inédite, comment comptez-vous soutenir et accompagner notre territoire dans sa nécessaire diversification économique ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Monsieur Lagleize, vous appelez l'attention du Gouvernement sur l'impact du coronavirus sur la filière de construction aéronautique. Si, à ce stade, il reste difficile de mesurer précisément les conséquences de la crise sur celle-ci, nous savons, au vu de la baisse majeure du trafic aérien mondial, qu'elles seront importantes.
Je tiens tout d'abord à vous assurer de la pleine mobilisation du Gouvernement en faveur de cette filière stratégique, qui représente plus de 300 000 emplois directs et indirects, et plus de 1 200 entreprises dans l'ensemble des régions, notamment dans le Sud-Ouest, dans votre région, l'Occitanie, ou en Nouvelle-Aquitaine. Dès le début de la crise, nous avons initié des échanges étroits avec chacune de ces entreprises, les grands groupes comme les PME, en coordination avec le ministère de la transition écologique et solidaire, et le ministère des armées.
Un comité stratégique de filière a été réuni il y a quelques jours au ministère de l'économie pour discuter de ces questions ; ce devrait être de nouveau le cas dans quelques jours, pour donner de nouvelles perspectives et réfléchir aux outils mobilisables. Il s'agit, dans un premier temps, de veiller à ce que de nouveaux modes d'organisation puissent garantir une reprise progressive du travail, dans les meilleures conditions sanitaires, en respectant les différentes fiches de conseils élaborées par le ministère du travail, en lien avec les branches professionnelles. Le travail mené par les acteurs de la filière en coordination avec les organisations syndicales doit être salué car il est extrêmement utile et productif.
Comme l'a annoncé le ministre de l'économie et des finances il y a quelques semaines, nous allons travailler à un plan de soutien spécifique à la filière, appuyé sur les travaux que je viens de citer, qui fera l'objet d'une présentation dans les prochaines semaines. Il est encore trop tôt pour vous indiquer quelles mesures de soutien seront prises, mais je peux partager avec vous nos objectifs.
Il s'agit d'abord de maintenir l'autonomie française en matière de construction aéronautique. Nous travaillons à préserver les entreprises et leurs compétences nécessaires à cette autonomie sur le territoire français. Cela concerne bien entendu les grands groupes comme Airbus, Safran, Thales ou Dassault aviation, mais aussi de très nombreuses ETI et PME qui maillent notre territoire et participent à la souveraineté industrielle. Dans un environnement concurrentiel mondial, nous cherchons à protéger ces PME et ETI critiques, notamment de possibles tentatives étrangères de captation d'un savoir-faire acquis dans la durée.
Par ailleurs, nous devons poursuivre ou accélérer nos efforts en faveur de la transition environnementale et placer le transport aérien sur une trajectoire compatible avec nos objectifs climatiques. L'industrie doit ainsi préserver ses capacités d'innovation pour concevoir et produire la future génération d'avions, plus efficace sur le plan environnemental. La filière française est en pointe dans ce domaine ; nous voulons l'accompagner pour qu'elle le reste.
Enfin, nous devons veiller à maintenir la compétitivité de nos entreprises, en poursuivant la modernisation de notre appareil productif, notamment grâce à la transformation numérique et environnementale des modes de production.
Je tiens à souligner, pour conclure, que le soutien de l'État et des régions à la transformation de toutes nos filières industrielles en industries du futur ne se dément pas, et ne sera pas démenti par les plans sectoriels et le plan de relance que j'ai évoqués.
Vous avez mentionné l'action du Gouvernement en faveur d'Air France, qui est, je tiens à le rappeler, un client important d'Airbus, auquel il a commandé de nombreux appareils, notamment l'A350 ; cela justifie d'intervenir sur chacun des maillons de cette industrie. Le soutien aux compagnies est aussi une manière de soutenir la filière aéronautique française ; c'est ainsi que nous l'envisageons, sous les conditions que j'ai évoquées, dans un contexte de transition.
Responsabilité sociétale des entreprises et des organisations
La parole est à M. Philippe Latombe, pour exposer sa question, no 1045, relative à la responsabilité sociétale des entreprises et des organisations.
La crise actuelle a mis le doigt sur des défaillances que nous avions plus ou moins occultées, par négligence ou facilité, à cause d'impératifs comptables de court terme, par manque de recul ou de vision. Elle s'inscrit de surcroît dans un contexte de crise environnementale annoncée, dont l'échéance semble devoir survenir bien plus vite que prévu : le temps nous est compté. Comme le ministre de l'économie et des finances l'a récemment écrit dans un ouvrage publié chez Gallimard : « Nous ne pouvons plus nous affranchir des règles du vivant. Nous, humains, nous vivons dans une cohabitation muette avec le monde animal et végétal, avec les océans, avec les lacs, les fleuves et les rivières, avec les nuages et le ciel. Nous avons domestiqué la planète. Nous devons apprendre à la respecter. »
Dans un tel contexte, la responsabilité sociétale, qui vise à faire converger l'intérêt des individus et des organisations avec celui de l'environnement, se retrouve par essence en première ligne. On parle souvent de responsabilité sociétale des entreprises, ou RSE. Il faudrait d'ailleurs préférer à cette appellation celle de responsabilité sociétale des organisations, ou RSO ; en effet, toutes les structures sont concernées, qu'elles soient publiques ou privées, à but lucratif ou non ; il serait trop facile de penser que l'effort à fournir incombe aux seules entreprises.
La RSE-RSO a été amplement définie et documentée ces dernières années. Elle reste malheureusement trop livrée à la bonne volonté des dirigeants, trop souvent utilisée comme une occasion de communication plutôt que comme un véritable outil stratégique, la norme ISO 26000, qui la définit, n'ayant aucune valeur de certification. On touche là les limites du volontariat.
Pouvez-vous nous dire, monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, si le Gouvernement envisage d'encourager une montée en puissance de la RSE dans les organisations publiques et, dans l'affirmative, de quelle manière ? Ne pensez-vous pas qu'il est important de rendre plus systématique la prise en compte de la RSE dans les opérations de commande publique, comme je le préconise dans une proposition de loi déposée en fin d'année dernière ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Monsieur Latombe, le Gouvernement aspire évidemment, comme vous, à placer la responsabilité sociale et environnementale au coeur de la stratégie des entreprises et des organisations. La loi PACTE, relative à la croissance et à la transformation des entreprises, adoptée le 22 mai dernier, concrétise cette aspiration à travers plusieurs mesures fondamentales.
En consacrant, dans la gouvernance des entreprises, la notion d'intérêt social, et en renforçant la prise en considération des enjeux sociaux et environnementaux inhérents à leur activité, désormais obligatoire pour toutes les entreprises, nous avons accompli un premier pas.
Dans le même esprit, nous avons introduit la possibilité pour chaque entreprise de se doter d'une raison d'être, c'est-à-dire de construire ou de préciser le sens de son projet entrepreneurial et de l'action de son collectif sur le long terme, et nous avons créé le statut d'entreprise à mission, permettant aux entreprises qui le souhaitent de s'investir plus qu'auparavant, en intégrant pleinement au sein de leur modèle d'affaires une démarche de transition sociale et environnementale.
Nous avons aussi créé un nouveau statut de fondation, celui de fonds de pérennité, qui permet de pérenniser le fondement et les valeurs d'une entreprise, y compris après le départ de son fondateur, mais aussi la mobilisation de ressources pour le financement d'actions diversifiées, voire d'intérêt général. Le décret d'application de ce dispositif est paru le 7 mai 2020.
En outre, la loi PACTE a permis des avancées sur des problématiques essentielles liées à la responsabilité des organisations : l'équité des salaires, l'égalité femmes-hommes ou le soutien aux entreprises de l'économie sociale et solidaire sont autant de champs sur lesquels nous avons progressé tous ensemble.
Il s'agit donc d'un point d'étape majeur dans l'effort de transformation durable de nos organisations et de nos entreprises, et nous sommes déterminés à mobilier l'ensemble de ces outils.
Vous l'avez dit, nous préparons un plan de relance transversal, qui devra accompagner notre économie dans la transformation numérique mais aussi la transition écologique et environnementale. La réflexion sur la responsabilité sociale des entreprises et des organisations aura toute sa place dans ce cadre.
Votre proposition de loi que vous avez mentionnée a notamment pour objectif la prise en compte systématique du critère de RSE pour les commandes publiques. Toutefois, dans l'état actuel du droit européen, l'introduction d'un tel critère n'est possible que lorsque ce critère est en rapport direct avec l'objet du marché, ce qui a pour conséquence de limiter le champ d'application de votre proposition. Ce débat devra être poursuivi, à la fois aux niveaux national et européen, afin d'aller plus loin voire de trouver les voies et moyens pour être plus efficace, malgré la règle communautaire.
Ma proposition de loi ne vise pas à rendre systématique la prise en compte du critère de RSE pour les commandes publiques, mais à permettre aux collectivités territoriales de l'inclure dans la stratégie régionale de commande publique.
Si la réglementation européenne crée certes une difficulté en limitant le champ d'application de ce critère, elle laisse précisément une petite marge de manoeuvre en autorisant la prise en compte des critères sociétaux pour les commandes publiques. La proposition de loi que j'ai déposée s'appuie sur cette possibilité.
Une collectivité comme Nantes Métropole, dont l'appel d'offres a fait l'objet du fameux arrêt du 25 mai 2018 du Conseil d'État, est très clairement en pointe. La plupart des collectivités territoriales souhaiteraient pouvoir intégrer le critère de la RSE dans leurs commandes publiques, au moins de façon marginale, ce qui constituerait une avancée. Je pense qu'il faut absolument que l'on accélère, les collectivités territoriales le demandent.
La parole est à Mme Aude Bono-Vandorme, pour exposer sa question, no 1031, relative à la mobilisation de la réserve de sécurité nationale pendant la crise sanitaire.
La loi du 28 juillet 2011 tendant à faciliter l'utilisation des réserves militaires et civiles en cas de crise majeure, a créé la réserve de sécurité nationale. Celle-ci permet de faire face à des événements majeurs qui, par leur ampleur ou leur durée, saturent les capacités des forces actives des armées et des forces de protection civile et de secours. Elle est constituée « des réservistes de la réserve opérationnelle militaire, de la réserve civile de la police nationale, de la réserve sanitaire, de la réserve civile pénitentiaire et des réserves de sécurité civile ».
Depuis le 7 mai 2015, le Premier ministre peut recourir à la réserve de sécurité nationale en convoquant par décret les réservistes, qui sont alors dans l'obligation de rejoindre leur affectation. La crise du covid-19 ne semble pas avoir justifié son recours. Pourquoi ? Sommes-nous véritablement capables de mobiliser notre réserve de sécurité nationale ? Par qui et sous le contrôle de qui sont tenus les fichiers des réservistes opérationnels, notamment de ceux relevant de la RO2, la réserve opérationnelle de deuxième niveau ?
J'ai la conviction qu'il faut s'interroger, à la lumière de cette crise, sur nos moyens d'action et donc de mobilisation. Notre droit a empilé les dispositifs : réserve de sécurité nationale, garde nationale, fichier des personnels des entreprises ayant bâti un plan de continuité d'activité. Tout contribue à nous faire penser que nous sommes armés pour faire face à une crise majeure. Face à une crise globale mettant en tension, la santé, l'éducation nationale, la sécurité des personnes et des biens, l'administration pénitentiaire, la sécurité civile mais aussi les gestionnaires de réseaux, notamment de communication, la réserve de sécurité nationale est évidemment la bonne réponse.
Pourtant, avons-nous la certitude d'être bien dotés d'une doctrine d'emploi global des forces de réserve, alors que celles-ci reposent, dans les faits, sur une multitude d'acteurs travaillant de manière isolée depuis des années ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées.
Comme vous l'indiquez, madame Bono-Vandorme, le dispositif de la réserve de sécurité nationale prévoit, depuis 2011 et de façon facilitée depuis 2015, de convoquer l'ensemble des réserves civiles et militaires lorsqu'une crise met en péril la continuité de l'action de l'État ou la capacité de survie de la nation.
Pour faire face à la crise sanitaire actuelle, différentes réserves ont été employées mais sans qu'il soit nécessaire de recourir au concept de réserve de sécurité nationale. Ainsi les ministères qui en avaient besoin ont mobilisé leurs propres réserves et ont fait face à la crise en basculant leurs efforts d'un territoire à l'autre ou d'une mission à l'autre. Par exemple, au ministère des armées, depuis le début de la crise du coronavirus, l'emploi des réservistes militaires a été adapté selon les besoins : jusqu'à 150 militaires de réserve du service de santé des armées ont été employés quotidiennement aux côtés de leurs camarades d'active, notamment au sein de l'élément militaire de réanimation de Mulhouse et dans tous les hôpitaux d'instruction des armées. Dans le reste du ministère, l'effort a porté sur l'appui aux opérations Sentinelle et Résilience ainsi qu'au renforcement des délégations militaires départementales, en appui aux préfets ; leur aide a été cruciale et continue de l'être. Il n'a pas été nécessaire de mobiliser la RO2, une réserve très particulière dont les effectifs sont suivis par la direction des ressources humaines du ministère.
Vous vous interrogez sur notre culture de mobilisation des réserves et l'absence d'une doctrine d'emploi global. Je voudrais vous apporter une précision sur ce point : il n'a jamais été envisagé de faire de la garde nationale, par exemple, une unité d'emploi, dotée de son propre commandement. La garde nationale est l'outil fédérateur qui manquait pour faire connaître les réserves des armées, de la gendarmerie et de la police, et pour susciter l'engagement.
La réserve doit répondre à une logique de besoin, nous le savons bien, au ministère des armées. De quelle spécialité a-t-on besoin ? À quel endroit et pendant combien de temps ? Les réservistes sont donc mobilisés en fonction de l'adéquation de leurs compétences aux besoins des unités à renforcer, mais aussi en fonction de leur capacité à y être intégrés. C'est aussi pour cette raison qu'une force de réserve ne peut pas se concevoir indépendamment des unités d'active dans lesquelles elle a vocation à opérer. Le dénominateur commun reste la souplesse de mise en oeuvre effective.
Dans cette crise sanitaire, les besoins ont été déterminés de façon nationale et interministérielle, par le conseil interministériel de crise. Celui-ci définissait les besoins, répercutés ensuite dans chacun des ministères, qui ont activé leurs propres réserves en fonction de la souplesse nécessaire pour faire entrer en vigueur ces différents dispositifs sur les territoires.
Un commandement unifié apporterait-il de la souplesse ? C'est une question qu'on peut se poser. Ce n'est pas toujours le cas, on l'a bien vu. Une articulation apporterait-elle une meilleure structuration ? On peut continuer à se poser ces questions. L'important est d'être le plus efficient possible à l'avenir ; le retour d'expérience de cette crise nous le permettra, je l'espère.
La parole est à Mme Anissa Khedher, pour exposer sa question, no 1027, relative aux crèches hospitalières.
Ma question s'adresse au ministre des solidarités et de la santé.
Infirmière et cadre de santé avant d'être députée, je suis particulièrement attentive, depuis le début du mandat, aux conditions de travail des personnels soignants. La France et les Français peuvent compter sur leur dévouement et leur engagement sans faille. Je tiens à témoigner à nouveau ma reconnaissance et mon profond respect à l'égard de mes anciens collègues.
Pour permettre aux personnels soignants de mieux concilier leur vie professionnelle avec leur vie personnelle et familiale, certains centres hospitaliers ont fait le choix ambitieux et pertinent de proposer une solution de garde intégrée pour leurs jeunes enfants. C'est le cas du centre hospitalier Le Vinatier à Bron, dans lequel j'ai exercé : il dispose depuis 1972 d'une crèche hospitalière, la crèche Clair de lune, d'une capacité d'accueil de soixante-dix berceaux.
Les crèches hospitalières offrent une large amplitude horaire d'ouverture et une grande flexibilité pour accueillir des enfants. En conséquence, leur fonctionnement est plus coûteux que celui d'une crèche classique et demande davantage de financements. Face à ce constat, la question se pose d'un accompagnement supplémentaire du ministère des solidarités et de la santé par l'intermédiaire de la CNAF – Caisse nationale des allocations familiales.
En période de crise sanitaire, l'existence de telles structures s'avère une ressource essentielle dans la prise en charge des enfants des personnels soignants mobilisés.
Le ministère envisage-t-il d'apporter un financement spécifique à ces établissements, afin d'en assurer la pérennité ? Envisage-t-il d'en développer dans d'autres centres hospitaliers, afin d'offrir aux personnels soignants un mode de garde adapté à leurs conditions de travail spécifiques ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées.
Vous l'avez dit, madame Khedher, la crise sanitaire a montré l'importance, pour les établissements sanitaires, de disposer de structures d'accueil des jeunes enfants des personnels soignants mobilisés. Ces accueils doivent être adaptés à la spécificité de leur travail, c'est-à-dire proposer bien souvent de larges horaires et des horaires décalés.
À l'instar du centre hospitalier du Vinatier, de nombreux établissements ont développé des capacités d'accueil de ce type, certains depuis très longtemps. La décision de proposer ce type d'accueil doit rester à la main des établissements. En effet, certains d'entre eux ont un besoin limité, du fait de la composition de leurs personnels ou de leur implantation territoriale – des capacités d'accueil en ville répondant aux besoins des salariés existent parfois à proximité. À l'inverse, d'autres établissements se doivent de répondre aux besoins de garde d'enfants du personnel paramédical et médical, en se dotant de ce type d'infrastructures, proposant des horaires atypiques.
Les établissements hospitaliers qui ont fait le choix de créer une crèche pour leurs personnels bénéficient tous du soutien financier de leur caisse d'allocations familiales, en particulier de la prestation de service unique – la fameuse PSU – , désormais calculée à l'heure et non plus sur la base d'une journée d'accueil standard ; cela permet de prendre en compte des amplitudes horaires élargies comme celles des crèches hospitalières. Un financement important de la CAF apporte aussi une aide adaptée et substantielle à ces crèches hospitalières. Celles-ci peuvent enfin mobiliser un fonds national spécifique, le fonds publics et territoires, qui soutient les porteurs de projets d'établissement ou de services proposant un accueil sur une plage horaire étendue ou à des horaires atypiques – en soirée, la nuit ou les dimanches et jours fériés. La CAF procure donc des financements importants, tant en fonctionnement qu'en investissement, qui sont tout à fait ouverts aux développements de crèches pour les personnels hospitaliers.
Il convient de laisser de la souplesse selon les territoires, en fonction de l'existence ou non de modes de garde adaptés. Il incombe aux directeurs d'hôpital ou d'établissement d'avoir un dialogue territorial avec leur environnement proche.
J'aimerais féliciter le collectif des crèches hospitalières pour le travail qu'il mène afin d'optimiser le modèle et la gestion au quotidien de ces structures. Je tiens à remercier particulièrement la directrice de la crèche Clair de lune du centre hospitalier Le Vinatier et toute son équipe, qui a été fortement mobilisée pendant cette période.
J'espère, dans la continuité de votre réponse, que le ministre des solidarités et de la santé portera une attention particulière au financement des crèches hospitalières.
La parole est à Mme Laurence Dumont, pour exposer sa question, no 1046, relative à la reconstruction du centre hospitalo-universitaire de Caen.
En 2015 était décidée la reconstruction du CHU de Caen, dont le bâtiment amianté n'aurait plus, à terme, été aux normes. Après plusieurs années de réflexion, un projet prévoyant une réduction capacitaire de 200 lits a été validé, et l'ensemble des démarches administratives lancées pour la reconstruction.
Si, en 2015, cette réduction du nombre de lits pouvait sembler délicate mais envisageable, notamment avec le développement de la médecine ambulatoire, elle se révèle désormais totalement inadaptée et inappropriée. En effet, avant même la crise du covid-19, l'établissement n'a pas pu, en cinq ans, entamer cette réduction ; quelques lits ont même été créés pour répondre aux besoins du bassin de population.
Pour faire face à la crise du covid-19 et libérer 200 lits, l'établissement a été contraint de déprogrammer, comme ailleurs, toutes les interventions non indispensables, alors même que notre région était beaucoup moins touchée que d'autres.
Constatant qu'il est impossible de réduire les capacités en lits de l'établissement, le Collectif inter-hôpitaux, soutenu par le maire de Caen, le président de région et les parlementaires, tire la sonnette d'alarme et demande un réexamen du projet de reconstruction. La crise actuelle a démontré avec violence l'insuffisance de notre système de soins, que les professionnels de santé ont compensée avec un dévouement incroyable et exemplaire. Le projet de reconstruction du CHU de Caen s'avère inadapté aux besoins. Il est encore temps de le corriger pour éviter à court terme de rencontrer des problèmes de prise en charge sanitaire de la population. Il est indispensable de le revoir afin de réajuster sa capacité en lits.
Sachez qu'en 1974, le jour même de l'inauguration du CHU de Caen – l'actuel, la fameuse tour – , les élus présents, ils s'en souviennent, regrettaient son sous-dimensionnement en nombre de lits. Ne réitérons pas la même erreur cinquante ans après.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées.
Madame Dumont, le projet de reconstruction de l'hôpital Côte de Nacre, site principal du CHU de Caen, a été décidé en novembre 2016. Il représente un investissement de 502 millions d'euros, soutenu par l'État à hauteur de 350 millions d'euros. L'ouverture du nouveau CHU est prévue en 2026. Cette reconstruction quasi complète est nécessaire car les locaux actuels se caractérisent par de lourdes contraintes en matière de sécurité incendie ainsi que par une forte présence d'amiante qui y limitent, de fait, toute évolution d'ampleur.
Le dimensionnement du futur CHU a été projeté en 2016, en référence aux pratiques constatées dans les établissements de taille et d'activité comparables. En se fondant sur les perspectives de développement des prises en charges ambulatoires et sur les taux d'occupation et les durées moyennes de séjour, le projet de reconstruction a établi un besoin en lits et en places d'hospitalisation inférieur aux capacités initiales. Je salue le travail accompli par l'ensemble de la communauté hospitalière pour bâtir un CHU moderne répondant aux enjeux de soins, de formation et de recherche.
À l'évidence, le travail d'anticipation des organisations futures se déroule en plusieurs phases. Dix années se seront écoulées entre la première version du projet en 2016 et la fin du chantier en 2026. Or, pour un projet de cette envergure, il est essentiel de prendre en considération les améliorations possibles voire nécessaires qui se précisent dans le temps, au regard des besoins de santé et de l'évolution des prises en charge. Les éléments du projet de 2016, notamment le nombre de lits et de places, ne sont donc pas figés. Début 2020, du reste, l'ARS – l'agence régionale de santé – a autorisé la création de quarante-cinq lits de soins de suite et de réadaptation, dont trente ouvriront dès le mois de juin, afin que le CHU dispose d'une offre renforcée de soins de suites d'hospitalisation, souvent lacunaire partout sur le territoire, on le sait.
Une consultation nationale devrait s'engager dans les prochains mois pour tirer rapidement les enseignements de la gestion de l'épidémie de covid-19, éclairer les décisions à prendre, mieux préparer notre système de santé aux enjeux de demain et refonder l'hôpital.
Après des semaines de mobilisation sans faille face au pic épidémique, les communautés hospitalières et tous les soignants, que je remercie comme vous, doivent tout à la fois prendre en charge les patients atteints du covid-19, accompagner les premières semaines de déconfinement et assurer la reprise de l'ensemble des activités afin de limiter les retards de soins. En un mot, l'heure reste à la mobilisation résolue et, quoi qu'il en soit, tous les plans de réorganisation sont suspendus.
Vous parlez, madame la secrétaire d'État, d'améliorations possibles voire nécessaires et vous dites que le nombre de lits n'est pas figé ; tant mieux, je vous en remercie. Tant mieux aussi si la consultation nationale permet d'avancer. Cependant, on ne saurait tout à la fois saluer jour après jour la mobilisation sans faille de la communauté soignante et ne pas écouter les médecins, car ce sont eux qui nous interpellent sur ce sujet.
La parole est à Mme Florence Provendier, pour exposer sa question, no 1032, relative aux villes labellisées « terres de Jeux 2024 ».
Fin décembre 2019, les villes de ma circonscription – Issy-les-Moulineaux, Boulogne-Billancourt et Vanves – ont été labellisées « terres de Jeux 2024 ». Ce label consacre l'engagement de chaque ville concernée en faveur du sport et permettra de faire vivre les valeurs olympiques partout en France jusqu'en 2024. C'est une chance concrète qui nous rassemble autour de trois objectifs communs : la célébration pour faire vivre l'émotion des Jeux ; l'héritage pour changer le quotidien des Français grâce au sport ; l'engagement pour que le projet profite au plus grand nombre.
Hélas, cet élan a été freiné par la crise sanitaire, qui a obligé la population à rester confinée chez elle et à réduire drastiquement sa pratique du sport. Au demeurant, avant le confinement déjà, la pratique d'une activité physique et sportive hebdomadaire ne concernait en Île-de-France qu'une personne sur deux. Le baromètre sport santé réalisé par la Fédération française d'éducation physique et de gymnastique volontaire en collaboration avec l'institut IPSOS révèle que 34 % des sondés n'ont pratiqué aucune activité sportive depuis le début du confinement. C'est d'autant plus inquiétant que l'Organisation mondiale de la santé préconise deux heures trente d'activité physique par semaine pour rester en forme physiquement et mentalement.
Les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 donnent un cap pour inciter un maximum de personnes à faire du sport après cette période où beaucoup sont restés immobiles. Les Jeux sont un moment de fête et d'émotion lors duquel les valeurs du sport s'incarnent. Nous devons saisir la balle au bond et faire perdurer l'héritage des Jeux malgré les contraintes liées à la pandémie. Il s'agit là d'un défi collectif pour tous les acteurs, publics ou privés, associatifs ou professionnels, afin de donner au sport ses lettres de noblesse et toute sa place dans nos vies.
Madame la ministre des sports, comment, selon vous, le label « terres de Jeux » permettra-t-il aux collectivités de redonner un élan sportif sur leur territoire, en lien avec le Comité d'organisation des Jeux olympiques et paralympiques, et les ministères concernés ?
Madame Provendier, le label « terres de Jeux » permet d'associer les acteurs du sport et les territoires à l'aventure olympique, de valoriser leurs actions lorsqu'ils font vivre le sport au quotidien dans la cité et à les impliquer dans la dynamique de Paris 2024. Nous avons octroyé les premiers de ces labels dès juin 2019, quatre ans avant la tenue des Jeux, pour associer par vagues successives les collectivités puis les fédérations, et demain les associations pourront également en bénéficier.
À ce stade, 741 villes ont déjà été labellisées, où vivent 15 millions d'habitants, ainsi que 7 régions, 76 départements et 36 fédérations sportives. L'objectif est de faire vivre les Jeux aux Français non seulement pendant mais aussi avant les Jeux. Cet objectif a plu au CIO – le Comité international olympique – , et c'est même la première fois que le mouvement olympique et paralympique autorise un tel dispositif, les retombées sociétales étant devenues une priorité pour le CIO.
Les collectivités et les acteurs du mouvement sportif qui ont été labellisés bénéficieront de plusieurs contreparties : l'accès à une marque dédiée, « terres de Jeux » ; l'accès à des outils et des contenus dédiés ; la valorisation de leurs meilleures actions locales ; l'accès à la communauté « Terres de Jeux », qui sera sollicitée pour accueillir les délégations étrangères dans les centres de préparation aux Jeux implantés sur les territoires concernés. Ils pourront également participer à des mesures liées à l'héritage, comme le dispositif sport-santé d'Issy-les-Moulineaux – dont il conviendra de poursuivre le développement au terme de la crise sanitaire, dans l'intérêt de la bonne santé psychologique et physique des Français. Je pense aussi aux dispositifs « savoir nager » et « savoir rouler » dès le plus jeune âge, coconstruits par l'Agence nationale des sports et pilotés conjointement par les collectivités, le mouvement sportif, les entreprises privées et l'État.
L'ensemble de ce réseau s'impliquera dans de nombreux projets susceptibles de faire bouger les lignes au bénéfice de l'éducation au sport dès le plus jeune âge et de la prévention des problèmes de santé, par exemple. L'objectif est unique et nous le partageons tous : renforcer la place du sport dans notre quotidien.
Le label « terres de Jeux » contribuera aussi à lutter contre le risque d'affaiblissement des associations et des clubs sportifs, auquel font notamment face les plus petites structures depuis plusieurs semaines. Nous sommes tous conscients du rôle que joue le tissu associatif dans l'animation de nos territoires et dans le lien social. Ce risque nous impose de mettre en oeuvre un plan de relance global et coordonné, auquel s'emploient actuellement plusieurs ministères avec leurs partenaires. Il complétera le dispositif SSCC – sport, santé, culture, civisme – , déjà mis en oeuvre en lien avec Jean-Michel Blanquer, ou encore le projet de vacances apprenantes prévu pour cet été, qui permettra de mobiliser les associations sportives et culturelles de sorte que les Français leur fassent de nouveau confiance dès la rentrée en y inscrivant leurs enfants. Ainsi, le sport continuera d'exister, sans doute pas comme avant, car il faudra peut-être respecter des règles de distanciation, mais toujours au profit du lien social, si nécessaire actuellement.
Je vous remercie pour ces précisions, madame la ministre, et pour ce projet fantastique qui nous rassemble. Outre la nécessaire place que le sport doit occuper dans nos vies, mon inquiétude est liée aux contraintes résultant de la pandémie. On ignore s'il sera possible de pratiquer à nouveau du sport avant la fin de l'année 2020, ce qui aura forcément des incidences sur la manière dont nous appréhendons les Jeux de 2024. Ma question visait donc à définir comment les ministères, les élus locaux et les associations réinventeront les Jeux après la pandémie.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour exposer sa question, no 1022, relative aux violences intrafamiliales.
Madame la secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, durant la période de confinement, les plateformes d'assistance ont reçu cinq fois plus de signalements que l'an passé. Ces données sont d'autant plus terrifiantes qu'avec le confinement et son huis clos, il a été encore plus difficile pour les victimes d'appeler à l'aide. Qu'il s'agisse des violences faites aux femmes ou aux enfants, que ces violences soient psychologiques, physiques ou sexuelles, la crise a été aiguë. Des femmes et des familles ont réussi à trouver refuge dans des logements ou des chambres d'hôtel mis à disposition, notamment par les collectivités territoriales, comme c'est le cas dans mon département, la Seine-Saint-Denis. Leur nombre, toutefois, est dramatiquement insuffisant. Quatre-vingt-dix points d'accueil ont été créés dans des centres commerciaux. En outre, les pharmacies ont été mobilisées afin de recueillir la parole de plus de 400 personnes et de les orienter. Je tiens à saluer ces mesures.
Cependant, les relais les plus essentiels sont les associations, les communes, les gendarmeries et les commissariats. Je le mesure dans ma circonscription, où je travaille en lien étroit avec eux lorsque me sont signalés des cas de violences intrafamiliales. Le planning familial alerte également au sujet de difficultés d'accès à l'IVG, l'interruption volontaire de grossesse.
Quels enseignements tirez-vous de cette période ? Le Gouvernement entend-il pérenniser et généraliser les nouveaux dispositifs et augmenter le nombre de logements destinés aux femmes victimes de violences ? Prolongera-t-il le délai d'accès à l'IVG ? À quelle hauteur portera-t-il le budget dédié au soutien aux associations qui luttent sans relâche pour prévenir les violences et protéger et accompagner les victimes ? Enfin, quel soutien financier apportera-t-il aux communes en la matière et aux départements concernant l'aide sociale à l'enfance ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame Buffet, Marlène Schiappa ne pouvant être présente, elle m'a chargée de vous répondre.
Nous le savons tous : pour qu'un dispositif soit efficace et que les victimes s'en saisissent, il doit être connu. C'est la raison pour laquelle, le secrétariat d'État chargé de l'égalité entre les hommes et les femmes, avec le ministère de l'intérieur, rappelle constamment l'existence des dispositifs d'urgence et d'alerte : le 17 a recueilli 30 % d'appels supplémentaires à la suite de violences conjugales ; 2 000 dossiers pour violences intrafamiliales ont été déposés par SMS au 114, dont 700 en vue d'une intervention urgente de la police ou de la gendarmerie ; la plateforme arretonslesviolences. gouv. fr, sur laquelle le nombre de tchats a doublé pendant le confinement, passant à plus de 3 000, dont 1 600 concernant des violences intrafamiliales ; plus récemment, l'Ordre national des pharmaciens et les officines se sont mobilisés pour ouvrir la possibilité de donner l'alerte en pharmacie. D'autres innovations relatives à l'alerte et à l'accompagnement des victimes ont vu le jour : le Gouvernement a ainsi noué des partenariats avec les groupes propriétaires de centres commerciaux et avec des associations. Quatre-vingt-dix lieux d'écoute ont été ouverts partout sur le territoire, permettant l'accompagnement de plus de 400 personnes, dont certaines ont été mises à l'abri, en raison de violences commises à domicile.
Si la crise a été soudaine, nous avons pris la mesure des risques que présentait le confinement pour les victimes de violences. Le plan d'urgence contre les violences conjugales durant la crise sanitaire fixe un objectif clair : multiplier les contacts avec les victimes, les protéger et les accompagner.
Vous l'avez dit, les associations, qu'elles soient nationales ou locales, jouent évidemment un rôle déterminant. Pour les aider à s'adapter à la période, nous avons créé un fonds spécial, financé par l'État, doté d'1 million d'euros. Il permet de verser aux associations des subventions complémentaires pour diverses actions : achat de téléphones portables et d'ordinateurs, aide au transport des femmes, information, matériel de téléconsultation et aide aux ressources humaines. À cette date, 210 actions associatives sont soutenues, à hauteur de 300 000 euros, et de nombreux autres projets sont en cours d'examen, partout sur le territoire.
Nous saurons quels effets ces nouveaux dispositifs et le soutien aux associations ont produit en matière de lutte contre les violences conjugales pendant le confinement, grâce à une mission d'évaluation confiée, le 26 mars, à la secrétaire générale de la mission interministérielle pour la protection des femmes contre la violence et la lutte contre la traite des êtres humains, Mme Élisabeth Moiron-Braud. L'objectif de cette mission est d'établir un suivi de la situation, de quantifier concrètement, sur la base de plusieurs indicateurs, la prévalence des violences pendant le confinement, et d'agir par la suite. Le premier volet du bilan doit être adressé au Gouvernement d'ici à la fin du mois de juillet. Avant, pendant et après cette crise, soyez assurée de notre détermination à ne rien laisser passer.
Je voudrais insister sur un point que vous n'avez pas évoqué : les logements disponibles. De nombreuses femmes victimes de violences ne souhaitent pas rester dans leur logement ni dans leur quartier, parce que des membres de la famille du mari violent peuvent y demeurer et faire pression sur elles.
La mise à disposition, en accord avec les bailleurs et les communes, de davantage de logements pour aider ces femmes à déménager rapidement me semble cruciale.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour exposer sa question, no 1023, relative aux stocks mobiles de matières dangereuses.
… vit dans l'incertitude depuis plusieurs années. Après l'accident de Toulouse et le classement en zone Seveso, la réduction des risques à la source avait libéré les habitants de l'incertitude. Je n'ai pas le temps de vous brosser l'histoire particulière de ce quartier, liée aux chantiers navals du Havre. La fermeture de ces derniers a libéré de grands espaces sur le quai qui jouxte Les Neiges, où se sont empilées des boîtes – nous appelons ainsi les conteneurs – , se rapprochant progressivement des habitations.
Hier soir, alors que ma demande date de plusieurs semaines, on m'a transmis le « porter à connaissance » du préfet : l'analyse des études de danger aurait abouti à la définition d'un périmètre de risque comprenant la moitié des habitations du quartier, avec des effets létaux significatifs. Marie-José, qui a interpellé le service des permis de construire de la mairie du Havre, a appris qu'aucun permis n'était délivré depuis le 1er janvier 2020. Elle pose les bonnes questions : pourquoi le préfet et la mairie n'ont-ils pas informé les habitants ? comment est-il possible d'agir ainsi ? pourquoi n'a-t-on pas mis en oeuvre une démarche de type PPRT, c'est-à-dire plan de prévention des risques technologiques ? Peut-être allez-vous me répondre que l'interdiction des permis de construire constitue la première étape de cette démarche !
Il faut une concertation avec tous les acteurs, de l'information et de la transparence ainsi qu'une recherche collective de solutions pour réduire les risques à la source ; à défaut, il conviendrait de prescrire des travaux de protection et de prévoir un accompagnement financier. Au pire, le rachat des biens à leur valeur avant le « porter à connaissance » s'imposerait. Le code de l'environnement, que vous connaissez bien, madame la secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, dispose pourtant, en ses articles L. 515-36 et suivants, que les pollueurs doivent être les payeurs.
Je mets à votre disposition une proposition de loi visant à traiter les installations abritant en permanence des stocks mobiles de matières dangereuses de la même façon que les installations classées soumises à PPRT : il faut protéger les travailleurs, les populations et les biens économiques et personnels, et garantir un financement à hauteur de ce que prévoit la loi créant les PPRT, dite « loi Bachelot ».
Ne pensez-vous pas que le temps du risque, des études de danger, du « porter à connaissance » et de la culture du secret soit révolu ? L'État dit aux gens : « Vous êtes en danger, vous êtes ruinés, mais circulez, il n'y a rien à voir ! » Si tel était le cas, ce serait une honte. Aux Neiges comme ailleurs, les citoyens méritent mieux. Nous n'en resterons pas là. Le temps est venu, peut-être allez-vous me le dire, de corriger le tir !
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire.
À travers l'exemple du Havre, vous interrogez Mme Élisabeth Borne sur la mise en place de plans de prévention des risques technologiques pour les installations abritant en permanence des stocks mobiles de matières dangereuses.
Vous le savez, la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages a instauré les PPRT pour toutes les installations Seveso seuil haut existant à la date de sa promulgation, afin de traiter les situations héritées du passé en matière d'urbanisme à leurs alentours.
Le classement Seveso d'un site s'apprécie au regard des quantités de matières dangereuses susceptibles d'être présentes dans l'installation. Conformément à la jurisprudence, les stockages mobiles récurrents, permanents ou quasi permanents au sein de sites industriels sont pris en compte pour le classement du site et la réalisation des PPRT : dans une usine chimique, par exemple, la présence de wagons de gaz toxiques entre dans l'analyse de la quantité de matières dangereuses.
D'autres ouvrages peuvent également abriter de façon récurrente des stockages de matières dangereuses, comme les infrastructures de transports, dans lesquelles peuvent s'opérer des opérations de stationnement, de chargement ou de déchargement de véhicules ou d'engins contenant des matières dangereuses. Ces infrastructures doivent faire l'objet d'une étude de danger, afin de vérifier la compatibilité des risques qu'elles présentent pour leur environnement. Au regard des conclusions de ces études de danger, des arrêtés fixant des prescriptions d'aménagement et d'exploitation des ouvrages d'infrastructures peuvent être pris par le préfet de département. Par ailleurs, lorsque nécessaire, des « porter à connaissance » sont transmis aux collectivités locales, vous l'avez mentionné, afin d'intégrer le risque dans les documents d'urbanisme et de maîtriser l'urbanisation future autour de ces installations.
Néanmoins, le législateur n'a prévu la mise en place de PPRT que pour les installations classées Seveso seuil haut.
Alors je persiste : c'est une honte ! J'invite mes collègues à être attentifs à cette question. Des matières dangereuses peuvent être stockées dans des gares de triage, sur des parkings, à bord de barges fluviales amarrées aux quais des rivières, sur des quais maritimes et sur des plateformes aéroportuaires. Ces espaces deviennent alors des zones Seveso dans lesquelles il n'est prévu aucune indemnisation ni aucun accompagnement des personnes victimes de ce que l'on peut appeler une pollution. C'est contraire aux valeurs du code de l'environnement et à la Constitution, selon lesquels il faut limiter à la source les risques environnementaux et indemniser ceux qui en subissent les conséquences.
Madame la secrétaire d'État, je vous invite à vous rapprocher de Mme la ministre Élisabeth Borne pour mettre autour de la table les différents acteurs, notamment les associations représentées au conseil supérieur de prévention des risques technologiques du ministère de la transition écologique et solidaire, de manière à trouver une solution acceptable pour les entreprises et les habitants exposés à ces risques.
La parole est à M. Gérard Menuel, pour exposer sa question, no 1038, relative à la capacité de production des centrales nucléaires.
Madame la secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, une communication récente d'EDF, en date du 13 mai, rappelle qu'il peut faire froid en hiver et que cela peut entraîner des pics de consommation d'électricité. Même si les hivers doux se sont succédé ces dernières années, personne ne peut exclure, comme EDF l'écrit avec raison, que la demande en électricité soit très élevée à certaines heures du soir en hiver.
Face à cette situation, ni certaine ni improbable, le potentiel de production des centrales nucléaires doit être absolument maintenu, afin d'éviter des coupures de courant ponctuelles dans les zones les plus fragiles, comme les régions Bretagne et Provence-Alpes-Côte d'Azur. La première précaution consiste à s'assurer qu'un maximum des cinquante-six réacteurs installés en métropole pourront produire de l'électricité. Or, en 2019 et 2020, un « grand carénage », comme on dit, était programmé pour une grande partie de ces réacteurs, en dehors des périodes de forte consommation.
La pandémie actuelle a perturbé le calendrier de certaines visites décennales, entraînant le décalage de certaines interventions. Dans mon département, par exemple, les interventions sur le deuxième réacteur de la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine ont été reportées au-delà de l'hiver. Est-ce partout le cas ?
Après la discutable fermeture de Fessenheim, pouvez-vous nous assurer que toutes les mesures de préservation du potentiel de production d'électricité des centrales sont prises pour l'hiver prochain ?
La pandémie actuelle aura-t-elle, à cause du report des travaux des visites décennales, des conséquences sur la production d'électricité ? Pour être clair, combien de réacteurs seront en état de produire de l'électricité durant l'hiver prochain et pour quel potentiel en térawattheures ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire.
Mme Élisabeth Borne ne pouvant être présente, elle m'a chargée de vous répondre.
La propagation du covid-19 a effectivement placé la France dans une situation inédite, qui a conduit le Gouvernement à prendre des mesures exceptionnelles de confinement de la population. Dans ce contexte, toutes les filières industrielles ont été exposées à des difficultés de maintien de leurs chantiers et de leurs activités d'exploitation, compte tenu des enjeux de protection des personnes intervenant sur les sites.
Pour la filière nucléaire, les grands donneurs d'ordres, en particulier EDF, ont déployé des actions concrètes, destinées à maintenir sur les sites une activité suffisante, dans de bonnes conditions de protection des entreprises intervenantes. Je tiens à saluer tous les acteurs des opérations d'importance vitale, qui, durant cette période, ont assuré la continuité des services publics essentiels, y compris celui de l'approvisionnement en électricité et en énergie.
Les mesures concrètes assurant la poursuite des activités en toute sûreté ainsi que la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, ont toutefois eu un impact, que vous avez relevé, sur le programme de maintenance des réacteurs nucléaires du parc d'EDF. Plusieurs centrales sont ainsi concernées par des retards dans leurs arrêts de tranche, notamment le réacteur no 2 de la centrale de Nogent-sur-Seine, en cours de visite décennale depuis février 2020 ; les travaux y sont certes ralentis du fait des contraintes sanitaires, mais le recouplage au réseau est toujours prévu cet automne.
Nous avons demandé à EDF d'optimiser son programme d'arrêts, afin de maximiser la disponibilité du parc pour l'hiver prochain et pour les périodes à venir. EDF a proposé des leviers d'action sur le planning d'arrêts, dont la compatibilité avec la sûreté nucléaire est en cours d'examen par l'Autorité de sûreté nucléaire.
Par ailleurs, Mme Borne a demandé à RTE de produire une analyse précise de l'équilibre entre l'offre et la demande à l'horizon de l'hiver, compte tenu de la situation du parc nucléaire. Sur cette base, le Gouvernement engagera toutes les actions nécessaires pour assurer la sécurité d'approvisionnement lors de la prochaine période hivernale.
J'aurais voulu obtenir plus de précisions sur le nombre de réacteurs en mesure de produire de l'électricité durant l'hiver prochain et sur leur potentiel en térawattheures. L'objectif est de sécuriser, l'hiver prochain, un niveau de production pouvant faire face à la demande en électricité.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Débat sur la souveraineté économique, écologique et sanitaire à l'épreuve de la crise du covid-19.
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures vingt-cinq.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra