Connaissez-vous la Camargue, monsieur le ministre ? Si tel n'est pas le cas, je vous encourage vivement à la découvrir. Ce vaste et magnifique territoire, embrassé par le delta du Rhône et ses pourtours, vit et vibre au rythme de ses traditions taurines. Cette terre est un espace précieux, à la biodiversité remarquable, et elle attire des populations du monde entier. Elle recèle un patrimoine inestimable mais fragile, façonné et préservé par la sueur et le sang de femmes et d'hommes, gardians et éleveurs de taureaux et de chevaux – manadiers, comme on les appelle – , dont le savoir-faire est reconnu par-delà les frontières.
Aujourd'hui, les manadiers, comme d'autres, se trouvent dans la tourmente à cause de la crise sanitaire. La survie de leur entreprise est devenue un véritable enjeu pour la conservation d'un écosystème exceptionnel, d'un petit bout de France qui constitue un véritable joyau de l'humanité. Comprenez-moi bien : on ne parle pas ici de l'élevage de viande bovine ou chevaline destinée en premier lieu à la consommation. On parle d'un monde, celui de la bouvine, qui s'inscrit dans une histoire de plusieurs siècles, une identité culturelle qui fait la fierté de tous, un berceau de traditions ancestrales : abrivados, encierros, fêtes votives et courses camarguaises.
Tout cela participe du lien social de tout un peuple et fait vivre l'économie locale. Tout cela ne peut exister sans les manadiers. Si je devais citer le poète Frédéric Mistral, je dirais que : « C'est là le signe de famille, C'est là le sacrement qui unit le fils aux aïeux. L'homme à la terre ! C'est là le fil Qui tient le nid dans la ramée. »
En Camargue, à l'heure où nous parlons, et avec toutes les incertitudes qui planent encore, les 116 manades existantes pourraient enregistrer une perte sèche de 3 millions d'euros. Il est donc primordial que l'État intervienne rapidement au secours de nos manades et de nos traditions. Comme je vous l'ai indiqué par courrier, il me paraît indispensable de créer un fonds d'aide d'urgence pour les charges d'exploitation et de geler les charges de structures.
Ma question est simple, monsieur le ministre : que comptez-vous faire ?