Monsieur Son-Forget, votre question porte sur l'hypothèse de la reconstruction d'une filière de production nationale de munitions de petit calibre. Il est exact que, depuis la fermeture, en 1999, de l'usine de la société GIAT Industries située au Mans, la France ne compte plus aucun fabricant de munitions de petit calibre pour les armées. Au demeurant, la question a été soulevée en 2015, dans le cadre d'une mission d'information parlementaire sur la filière munitions.
Le ministère des armées, dans ses orientations stratégiques, distingue les munitions de petit calibre de celles de moyen et gros calibre. S'agissant des premières, il s'approvisionne auprès de divers industriels, européens pour la plupart. Les commandes sont effectuées par le biais de mises en concurrence de très nombreux fournisseurs. Vous avez cité l'entreprise RUAG ; nos armées ont également passé des marchés d'approvisionnement auprès de nombreux autres fournisseurs, tels que l'italien Fiocchi, le britannique Royal Ordnance Factories et l'allemand Metallwerk.
La production de munitions dans des conditions économiquement viables nécessite en effet des volumes très importants, que les seules commandes nationales ne permettent pas d'assurer. Dès lors, un projet de reconstruction d'une telle filière en France nécessiterait d'adopter un positionnement sur l'ensemble des marchés. Il impliquerait également des investissements significatifs des partenaires industriels concernés. À ce stade, un tel projet n'a pas vu le jour. Néanmoins, le ministère des armées accordera son attention à tout projet crédible et viable.
La production de munitions de moyen et de gros calibre, quant à elle, se trouve dans une autre situation. Dans ce domaine à la valeur ajoutée plus élevée, nous avons fait le choix de garantir notre autonomie stratégique. Ainsi, la France dispose d'un outil industriel complet, regroupant de nombreuses entreprises telles que Nexter Munitions, Thales LAS, Eurenco ou Étienne Lacroix. À la fin de l'année dernière, le ministère a apporté un soutien ponctuel à la filière, pour lui permettre de passer l'année 2020 sans perdre des compétences.
Monsieur Son-Forget, vous refusez d'entendre parler de souveraineté européenne. Mais à l'heure où nous tâchons d'obtenir des avancées sur le sujet essentiel de la défense européenne, il faut considérer, me semble-t-il, que l'Europe peut être une source d'approvisionnement en munitions de petit calibre suffisamment solide et pérenne. Je ne voudrais pas que la souveraineté européenne soit vécue négativement, comme vos propos le laissent entendre.