Ce projet de loi prévoit en effet un état d'urgence qui ne dit pas son nom. L'amendement de suppression vise à éviter que nous n'entrions dans la zone grise où vous voulez nous mener. Vous avez instauré l'état d'urgence sanitaire le 23 mars ; il a été prorogé le 11 mai pour une durée de deux mois. À l'époque, nous avions déjà formulé de nombreuses critiques : aucune mesure sociale n'est prévue alors que la crise économique bat son plein et que près de 500 000 emplois ont été supprimés au premier trimestre. Incapable de planifier le déconfinement, le Gouvernement organise le confinement des libertés. Il a décidé de ne pas prolonger officiellement l'état d'urgence sanitaire au-delà du 10 juillet mais ce projet de loi doit permettre au Premier ministre, hors état d'urgence sanitaire, de restreindre les libertés jusqu'au 30 octobre.
Quel est l'intérêt de créer ce nouveau régime alors que le droit commun, en l'occurrence l'article L. 3131-1 du code de la santé publique, offre déjà au ministre de la santé de très larges pouvoirs en cas de circonstances exceptionnelles ? Encore une fois, vous créez une zone grise entre l'état d'urgence et le droit commun.
Pourquoi créer cet entre-deux sinon pour restreindre la circulation des personnes et empêcher les rassemblements ? Par cet article 1er ne sont prolongées hors état d'urgence que les mesures de restriction des libertés. C'est une habile façon de s'octroyer la possibilité d'interdire les manifestations, notamment les manifestations contre les violences policières et celles des soignants, qui nourrissent quelques griefs à votre égard.