Cela a été dit clairement par Mme la ministre déléguée, nous voilà réunis afin de répondre à la demande de prorogation des mesures de la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, dite « loi SILT ».
Je commencerai par évacuer un argument que nul, je l'espère, n'aura à coeur d'utiliser : la motion de rejet préalable que je défends ne signifie pas que le groupe La France insoumise souhaite désarmer le pays face au terrorisme. Mais nous pensons, précisément parce que la menace terroriste existe, que nous devons prendre le temps d'un débat raisonné, ici au Parlement, quant aux techniques que nous utilisons pour faire face aux actes de terrorisme. Les arguments d'autorité comme ceux qui ont pu nous être opposés depuis 2017 ne sont pas pertinents : il n'y a pas, d'un côté, ceux qui seraient lucides, les vrais défenseurs de la population, et, de l'autre, ceux qui auraient une attitude laxiste.
Je le dis, comme tout à l'heure M. le rapporteur, en ayant au coeur le souvenir de M. Samuel Paty, de Mme Simone Barreto Silva, de Mme Nadine Devillers et de M. Vincent Loquès, tombés récemment. Nous leur devons d'avoir ici une discussion sur la manière dont la République doit se défendre contre ceux qui l'attaquent.
Osons le dire : ces attentats qui ont eu lieu récemment ont été perpétrés alors que la loi dite « SILT » est en vigueur. On pourrait ainsi adopter un raisonnement inverse au vôtre en considérant que, malgré cette loi, présentée comme particulièrement efficace, nous ne sommes pas encore en mesure de nous défendre face à un certain type d'attentats. C'est lié notamment au manque de moyens humains, problème qui sert de fil conducteur aux critiques souvent formulées par La France insoumise.
Dans le cas de « l'affaire » Samuel Paty – si vous me permettez de l'appeler ainsi – , la plateforme PHAROS a manqué cruellement d'effectifs. La personne qui a commis l'attentat y avait été signalée, donc repérée, depuis plusieurs mois. Mais concrètement, dans les faits, seuls trente et un fonctionnaires avaient le devoir de surveiller ce qui se passait sur les réseaux sociaux. Fort heureusement, depuis lors, le ministre de l'intérieur a décidé de recruter cent personnes supplémentaires. On voit bien qu'il y a d'abord un besoin en moyens humains, et ne pas adopter cette loi ne signifierait pas que nous nous désarmerions face au terrorisme. Il existe d'ores et déjà des dispositifs législatifs pour l'affronter ; souvent, ceux qui sont sur le terrain nous disent que ce sont des moyens concrets et un matériel adéquat qui leur font défaut, que l'inflation législative ne répond pas au problème.
L'inflation législative est une réponse politique consistant à dire : « Nos prédécesseurs n'ont rien fait, agissons. » Mais la réalité est plus complexe, bien plus complexe !