Par votre intermédiaire, madame la ministre déléguée chargée des sports, je souhaite appeler l'attention du Gouvernement, en particulier de M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports sur la dépendance de l'éducation nationale à l'égard des GAFAM.
Dans le cadre d'un appel d'offres publié au mois d'août dernier, le ministère de l'éducation nationale va débloquer des budgets pour le renouvellement de licences pour des produits Microsoft et des services associés. Le montant total de cet accord est estimé à 8,3 millions d'euros pour une période initiale de douze mois, renouvelable tacitement jusqu'à quarante-huit mois maximum. Il s'agit d'équiper les agents des services centraux et déconcentrés des ministères, ce qui représente, d'après les évaluations du marché public, environ 800 000 postes de travail et 80 000 serveurs.
Force est de constater que l'éducation nationale s'enfonce ainsi un peu plus dans sa dépendance à l'égard des GAFAM. L'engrenage est enclenché depuis longtemps, et le débat n'est pas nouveau, puisque Classroom, iCloud, Facebook et Office 365 ont libre cours dans les salles de classe. La loi du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche prévoit que l'on utilise en priorité des logiciels libres mais, dans les faits, il n'en est rien.
Ces politiques d'acquisition de matériel et de logiciels sont déjà anciennes. Ce qui est nouveau, en revanche, c'est le recours aux clouds – nuages de données – des GAFAM. On leur confie les données personnelles et scolaires des élèves et des enseignants, qui sont, on le sait, particulièrement sensibles et nombreuses, et en disent beaucoup sur chaque élève et sur son histoire personnelle. Connaissant les pratiques commerciales des GAFAM, leur modèle économique – qui repose sur l'exploitation opaque des données – et leurs liens étroits avec la NSA, l'Agence nationale de la sécurité des États-Unis, il semble particulièrement naïf et dangereux de les leur livrer ainsi.
Le débat sur la dépendance de l'éducation nationale à l'égard de Microsoft n'a, je l'ai dit, rien de nouveau, mais des critiques similaires lui ont récemment fait écho au sujet du projet Health data hub ou du contrat Open bar, négocié il y a quelques années entre le ministère de la défense et la filiale irlandaise de Microsoft.
À ces critiques, il est souvent répondu qu'il serait trop cher ou trop compliqué de faire autrement. Pourtant, en Bulgarie, tous les logiciels d'État sont des logiciels libres – en open source. La France, sixième puissance mondiale, ne saurait-elle parvenir au même résultat ? Ne saurait-elle en outre disposer d'un cloud sécurisé ? En tant que rapporteur de la mission d'information sur la souveraineté numérique nationale et européenne, je m'inquiète particulièrement de cette situation et souhaite savoir comment le Gouvernement envisage d'y remédier.