Intervention de Bruno Questel

Séance en hémicycle du jeudi 3 décembre 2020 à 9h00
Prééminence des lois de la république — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBruno Questel :

Après que celle-ci a été largement rejetée par la commission des lois de notre assemblée, nous sommes réunis ce matin pour débattre de la proposition de loi constitutionnelle de nos collègues du groupe Les Républicains, laquelle ne vise à rien moins qu'à « garantir la prééminence des lois de la République ».

Lors de sa lecture au Sénat, cette proposition de loi a certes été adoptée par 229 voix, mais 119 sénateurs n'avaient pas souhaité participer au scrutin. La séance s'est tenue deux jours après le lâche assassinat de M. Samuel Paty par un islamiste animé d'intentions multiples et variées, toutes reliées par un sentiment assumé : la haine de la France, de notre histoire, de notre culture et de notre République. À la lecture des débats sénatoriaux, on mesure l'émotion légitime de tous nos collègues, alors même que l'hommage national au professeur victime de la barbarie islamiste n'avait pas encore été rendu par le Président de la République, et à travers lui par la nation tout entière.

À nos collègues du groupe Les Républicains, je dois avouer la surprise que j'ai éprouvée à la lecture attentive de l'exposé des motifs de la proposition de loi qu'ils défendent aujourd'hui, comme des débats du Sénat et du rapport de Mme la rapporteure. L'image que je me faisais des institutions de la République était celle d'une Constitution certes révisée vingt-quatre fois depuis 1958, mais que j'imaginais, manifestement à tort, à vos yeux sacralisée dans ses grands équilibres. Malheureusement, tout se perd, et nous déplorons que vous considériez qu'il faille encore y revenir, comme par inadvertance ou par ennui.

Soumettre, comme vous nous le proposez, le texte constitutionnel aux aléas – si dramatiques soient-ils – de l'histoire contemporaine revient à renoncer à réformer le pays avec nous, comme nous l'entreprendrons dans quelques semaines avec le projet de loi confortant les principes républicains. Nous pourrons alors légiférer concrètement, et non pas de manière incantatoire comme vous nous le proposez ce matin. Nous pourrons adopter les dispositions à même de garantir le respect des principes républicains et de renforcer le libre exercice des cultes, dans le respect de nos institutions. Nous renforcerons, sans qu'il soit besoin de le graver dans le marbre constitutionnel, la prééminence des lois de la République.

Nous regrettons la posture adoptée par nos collègues du groupe Les Républicains. Madame la rapporteure, vous n'avez pas manqué de déclarer dans une récente interview que « la Constitution peut être révisée sous l'effet des évolutions de la société ». Pour sa part, le général de Gaulle, dans le discours de Bayeux du 16 juin 1946, déclarait au contraire qu'« il est nécessaire que nos institutions démocratiques compensent par elles-mêmes les effets de notre perpétuelle effervescence ». Rendant hommage au formidable héritage institutionnel que nous lui devons en cette année de triple anniversaire, nous nous inscrivons dans cette lignée.

De même, nous ne pouvons que souligner le formidable enthousiasme inconscient qui vous anime, et qui vous porte à prétendre porter un message d'union nationale, comme vous l'avez indiqué en commission, tout en reconnaissant qu'il ne s'agissait là que d'un acte symbolique. Il est révélateur, chers collègues du groupe Les Républicains, que vous vous contentiez désormais d'agiter des symboles alors que nos compatriotes attendent de nous que nous sachions travailler ensemble et sur le fond.

Vous l'aurez compris, le groupe La République en marche ne votera pas votre proposition de loi constitutionnelle, dont l'unique but est d'alimenter votre agenda, …

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