Intervention de Naïma Moutchou

Séance en hémicycle du mardi 8 décembre 2020 à 21h00
Parquet européen et justice pénale spécialisée — Article 8

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNaïma Moutchou, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Je voudrais convaincre nos collègues socialistes, ceux qui ont eu l'audace de créer la CJIP, qui, à l'époque, ne faisait pas non plus l'unanimité. C'est un pas supplémentaire que de l'ouvrir aujourd'hui au droit de l'environnement.

Cette procédure permet de contourner un aléa qui existe dans le procès, celui de la longueur de la procédure. Même en matière criminelle, l'issue d'un procès n'est jamais certaine.

Le projet de loi propose de transposer la CJIP en matière environnementale, avec une politique de dissuasion, puisque l'amende pourra représenter 30 % du chiffre d'affaires. Je pense que Lafarge, que vous citiez tout à l'heure, y réfléchira à deux fois avant d'aller polluer à nouveau les eaux ou les sols.

Surtout, vous négligez un point important de la CJIP qui, à mon avis, prend toute son envergure en matière environnementale : le programme de mise en conformité, qui permettra à des inspecteurs d'aller dans l'entreprise, de sensibiliser aux enjeux environnementaux non seulement les représentants légaux mais l'ensemble des personnels. Ce qui nous manque aujourd'hui en matière de droit de l'environnement, c'est cette accoutumance. Cet outil qui n'existait pas aura, à mon sens, une efficacité que le procès ne permet pas.

Enfin, la CJIP permettra la réparation des préjudices – le préjudice écologique bien sûr, ainsi que le préjudice de la victime – dans des temps qui, il faut l'avouer, ne sont pas ceux du procès. J'ai du mal à comprendre vos objections. Un procès qui dure dix ans si le groupe invoque des nullités de procédure – c'est le jeu – est-il préférable à une transaction qui sanctionnera plus rapidement les mauvais comportements et permettra de réparer les préjudices subis ?

Les exemples qui ont été cités par M. Bernalicis montrent que parfois le CJIP a pu aboutir à des amendes moindres que celle prononcée à l'audience. C'est vrai, mais parlons aussi des procès qui aboutissent à des non-lieux et des relaxes, ou à des condamnations mais bien des années plus tard, et avec des sanctions qui ne sont pas proportionnées ou en tout cas qui ne paraissent pas telles à une opinion publique qui y est très attentive.

Nous avons suffisamment encadré la CJIP en matière environnementale pour qu'elle produise demain de bons résultats, comme elle la fait jusqu'à présent en matière financière. Je suis donc défavorable à ces amendements identiques.

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