Nous examinons en nouvelle lecture un projet de loi visant à proroger l'état d'urgence sanitaire, parce que la commission mixte paritaire n'a pas abouti. Cela symbolise assez bien votre responsabilité dans l'échec de la gestion de la crise sanitaire. Personne ici évidemment ne conteste qu'il est difficile de demander à nos concitoyens de se confiner, de respecter un couvre-feu, de renoncer à réunir leurs proches pour les fêtes de fin d'année, de privilégier le télétravail en abandonnant les relations sociales qui participent à l'équilibre de la vie professionnelle, d'être empêchés d'aller au musée ou au cinéma ; d'imposer aux restaurateurs de fermer leur établissement pendant des mois, sans même une perspective de réouverture ; d'interdire aux stations de ski d'utiliser leurs équipements, alors même que, curieusement, l'enneigement était particulièrement favorable cette année. Cependant, pour que toutes ces décisions soient comprises et acceptées durablement, elles doivent être assorties de l'humble acceptation que vous n'avez pas toujours raison. Vos certitudes reposent sur les conclusions du Conseil scientifique : si l'on opère un raccourci, ce dernier vous dicte des décisions politiques qui appartiennent au Gouvernement, en concertation avec le pouvoir législatif.
Au fond, depuis le début de la crise, la question est de savoir jusqu'à quel point il est acceptable que les parlementaires renoncent à leurs prérogatives dans l'exercice quotidien de la démocratie, afin de permettre l'application de mesures exorbitantes du droit commun pour lutter efficacement contre la propagation du virus. Je ne vous fais pas de procès ; néanmoins, si nous avions adopté les certitudes que vous avez exprimées au début de la crise concernant les masques et la stratégie de déconfinement, ou celles que vous affichez aujourd'hui quant à la politique de vaccination, la stratégie ne serait pas la même ; la stratégie de vaccination serait différente sans les appels des élus locaux, relayés ici par les parlementaires, à ouvrir des centres de vaccination. À cause de vos certitudes sur les commandes de vaccins, une start-up française n'a pas été sollicitée par le Gouvernement à l'appui de cette stratégie.
Il n'y a qu'ici que nous pouvons débattre de tels sujets, à intervalles réguliers. Le ministre des solidarités et de la santé est lassé de devoir revenir, pour la vingt-troisième fois a-t-il dit, devant la représentation nationale, pour répéter sans cesse les mêmes arguments, qu'il présente comme des certitudes. Nous devrions alors ne pas discuter de la date butoir d'un état d'urgence prorogé, ni de celle de l'utilisation de systèmes d'information qui contreviennent pour partie à des principes fondamentaux, notamment le respect du secret médical ; nous devrions laisser le champ libre à l'exécutif, nous dessaisissant de nos prérogatives élémentaires, comme le contrôle de l'exécutif ! Doit-on considérer qu'un député qui adresse une lettre à un ministre remplit sa mission de contrôle de manière satisfaisante dans cette situation ?
Il est dommage que vous n'ayez pas pu faire en sorte que la CMP aboutisse et que vous reveniez nous demander de voter le texte initial. Le groupe UDI et indépendants aurait accepté de voter le texte adopté au Sénat, mais nous ne voterons pas celui que vous proposez.