Intervention de éric Dupond-Moretti

Séance en hémicycle du lundi 15 février 2021 à 16h00
Justice pénale des mineurs — Présentation

éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice :

Je suis particulièrement honoré d'être devant vous pour, je l'espère, l'adoption définitive par l'Assemblée nationale d'un texte consacrant une avancée historique pour la justice pénale des mineurs en France, celui ratifiant l'ordonnance du 11 septembre 2019. Demain, ce sera au tour du Sénat de se prononcer sur les conclusions de la commission mixte paritaire – laquelle, je ne peux que m'en féliciter, est parvenue à un accord. Ce sera l'aboutissement des débats qui nous ont animés de longues heures ici même, mais aussi de plusieurs années, voire décennies, de travail, comme je l'ai souvent dit devant vous.

Je ne peux commencer mon propos sans rendre un hommage appuyé au travail de ma prédécesseure, Nicole Belloubet. Les conditions particulières de l'amorce de cette réforme ne laissaient pas présager un tel succès. Ce résultat est votre oeuvre commune, la sienne, mais, j'ai l'immodestie de le croire, également un peu la mienne. Je veux donc lui dire et vous dire ma fierté et mon émotion de faire aboutir les engagements du Gouvernement dans une construction qui, je le crois, fera date.

Si le consensus obtenu montre le travail et l'implication de toutes et de tous, il met surtout en lumière notre capacité à enjamber les clivages lorsque l'essentiel – l'avenir de nos enfants – est en jeu. Vous avez été convaincus par les nécessités de cette réforme et, en tenant compte des attentes fortes de nos concitoyens à l'égard de la justice des mineurs, vous avez su dépasser des positions parfois historiquement ancrées. C'est pourquoi vous pouvez être fiers d'adopter un texte qui, au-delà des caricatures, modernise radicalement la justice pénale des mineurs en lui donnant le cadre qu'elle attendait depuis longtemps, renforçant la primauté de l'éducatif tout en permettant une réponse pénale cohérente et encadrée dans des délais de procédure.

Je garde en mémoire les vifs débats autour de la notion d'intérêt supérieur du mineur, désormais introduite dans l'article préliminaire du code de la justice pénale des mineurs. Je tiens d'ailleurs à souligner que les débats parlementaires, ici comme au Sénat, ont grandement enrichi le texte, alors que des craintes d'un débat muselé s'étaient exprimées : il n'en fut donc rien. Là encore, je dois vous remercier, monsieur le rapporteur Jean Terlier, pour votre infatigable engagement auquel la réussite de ce texte doit beaucoup, et je remercie pour la même raison Mme la députée Alexandra Louis.

Je me permets aussi d'envoyer un salut particulièrement appuyé à tous les membres du groupe de contact, qui ont exprimé, pendant de longs mois, la voix de leur groupe politique, rendant ainsi possible la convergence que nous appelions tous de nos voeux. Je retiens en effet de nos échanges la volonté commune de renforcer la confiance dans la spécialisation des professionnels de l'enfance, notamment celle des juges des enfants qui a fait l'objet de débats intenses. L'un d'entre eux a eu pour objet la compétence du tribunal de police, limitée finalement aux seules infractions de faible gravité.

Vous avez également fait le choix de l'équilibre entre spécialisation et impartialité du juge, en transférant au JLD la compétence du placement en détention provisoire du mineur avant le prononcé de la culpabilité.

Je rappelle enfin l'importance des débats sur la présomption de responsabilité à treize ans, question complexe qui, là aussi, a désormais trouvé une réponse équilibrée, à savoir le maintien d'une présomption simple qui laisse au juge spécialisé l'analyse du discernement au cas d'espèce et selon une définition reprise désormais dans la partie législative du code de la justice pénale des mineurs.

S'ouvre maintenant une nouvelle étape, celle de la mise en oeuvre de la réforme : son entrée en vigueur a été, à la fin de la navette parlementaire, reportée au 30 septembre 2021. Soyez assurés que ce délai supplémentaire sera mis à profit par tous les services du ministère de la justice pour former les acteurs de terrain. Des moyens supplémentaires ont été alloués en amont et la mission d'accompagnement de l'inspection générale de la justice se poursuivra durant les prochains mois auprès de tous les tribunaux.

Le signal de votre adhésion au texte est le premier pas essentiel pour la réussite de la mise en oeuvre de la réforme. Je m'engage ici solennellement à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour que nous puissions prochainement saluer ensemble les effets bénéfiques de cette réforme historique pour les juges, les éducateurs, les parents et, surtout, nos enfants.

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