Depuis le célèbre arrêt Rogie de 1990, lorsque l'employeur commettait une irrégularité dans la motivation ou la procédure de licenciement, celui-ci était considéré comme sans cause réelle et sérieuse. C'est cette jurisprudence que les ordonnances mettent à mal. Désormais, si la cause réelle et sérieuse peut être ultérieurement établie, l'employeur ne versera qu'une indemnité pour irrégularité, qui ne pourra dépasser un mois de salaire.
De plus, vous renvoyez au salarié la responsabilité de demander à l'employeur de rectifier les motifs retenus pour son licenciement. C'est un point crucial, car ces motifs fixent les termes du litige en cas de contentieux : le juge ne pourra rendre sa décision que sur ces seuls motifs. Si le salarié n'en fait pas la demande, l'insuffisance de motivation ne suffira plus à elle seule pour que licenciement soit reconnu comme étant sans cause réelle et sérieuse.
Une telle modification ne nous paraît pas acceptable. Ce coup de canif porté à l'énoncé de la lettre de licenciement va, comme l'ont souligné plusieurs personnalités qualifiées, mettre le juge en difficulté. Pourquoi ? Parce que le juge devra apprécier la cause réelle et sérieuse du licenciement au regard d'éléments qui ne figurent pas directement dans la lettre, alors que c'est elle qui fixe les termes du litige en cas de contentieux.
De nombreuses personnalités qualifiées ont dénoncé ces dispositions, en invoquant notamment le fait qu'elles risqueraient d'enfoncer les victimes de harcèlement – ce que, je n'en doute pas, personne n'imagine. En effet, aujourd'hui, un seul acte de discrimination dans une lettre de licenciement permet de déclarer que le licenciement est nul de plein droit. Avec vos dispositions, le juge devra examiner tous les motifs de licenciement. Dès lors, pour une victime licenciée au motif qu'elle est harcelée et incompétente, le juge ne pourra plus annuler d'office le licenciement, mais il devra examiner tous les reproches d'incompétence formulés.