Nous voyons un peu plus chaque jour la parole se libérer dans les livres, sur les réseaux sociaux, dans les familles. Les mots sortent, directs, parfois crus, pour traduire toute la souffrance, la violence subie, tant physique que psychologique. Les victimes dénoncent, elles se défendent désormais, pour se réparer un peu, beaucoup, mais jamais totalement. Aider à réparer, à se reconstruire, à surmonter la honte, la douleur, à redonner du sens à la vie quand l'enfance a été niée, piétinée, volée, violée : tel est notre devoir de législateur. Mais nous devons aussi prévenir, empêcher la commission de ces actes sur lesquels des générations d'enfants brisés n'ont pas pu mettre de mots tant ils étaient incompréhensibles, indicibles, innommables.
J'ai eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises : le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés travaille depuis longtemps sur ce sujet douloureux et extrêmement important. Il y a trois ans, lors de l'examen de la loi Schiappa, nous avions d'ailleurs clairement appelé à un débat de fond sur les violences sexuelles faites aux mineurs. J'avais notamment insisté sur la nécessité de prévoir un seuil de non-consentement pour les mineurs de 15 ans. Nous devons maintenant être à la hauteur des circonstances. Notre sens de la justice doit nous permettre de surmonter les obstacles qui, hier, ne nous ont pas permis de légiférer avec audace quand la nécessité le commandait. C'est pourquoi nous nous réjouissons d'avoir aujourd'hui l'occasion, grâce à la proposition de notre collègue sénatrice Annick Billon, de poursuivre le travail engagé en 2018.
En commission, à l'Assemblée nationale, des amendements ont été adoptés pour ajuster, préciser et renforcer les dispositions issues de la lecture au Sénat. C'était indispensable pour élaborer un texte à la hauteur des enjeux et nous préserver le plus possible d'une éventuelle inconstitutionnalité sur le seuil de non-consentement à 15 ans. L'écart d'âge de cinq ans va dans ce sens ; c'est pourquoi notre groupe soutient totalement cette mesure.
Il était également indispensable de mentionner l'inceste dans ce texte, et c'est ce que nous avons fait.
Notre groupe a déposé des amendements pour poursuivre en séance publique le travail constructif engagé en commission.
Je voudrais, à ce stade de mon intervention, saluer le travail de concertation qui a été à l'oeuvre dans le cadre de l'examen de cette proposition de loi. Merci, monsieur le garde des sceaux, d'avoir été à l'écoute et d'avoir su restituer nos attentes dans vos amendements. Merci également à Mme la rapporteure pour la collaboration que nous avons pu instaurer. Après les dysfonctionnements constatés lors de la discussion de la proposition de loi de Mme Santiago, il était essentiel de nous rassembler pour aboutir à un texte consensuel, pertinent, juste et bien écrit.
C'est donc sur la base de ce travail en commun que notre groupe a déposé huit amendements. Parmi eux, l'un vise à corriger une omission dans la rédaction de l'article 1er en précisant que le viol est également constitué lorsque l'acte de pénétration sexuelle ou bucco-génital est effectué par le mineur. Un autre amendement prévoit qu'il est également constitué, même en cas de faible différence d'âge, si les relations sexuelles ont lieu dans un cadre prostitutionnel. Un troisième distingue l'agression sexuelle sur mineur de 15 ans et l'agression sexuelle incestueuse sur un mineur de 18 ans, comme la commission l'a fait pour les viols. Un quatrième, enfin, est relatif au délit de « sextorsion » à la définition duquel Mme la rapporteure travaille depuis longtemps.
Nous avons aussi déposé un amendement visant à améliorer les dispositions adoptées en commission des lois relatives à la prescription des crimes et délits sexuels commis sur des mineurs.
Par ailleurs, il nous paraît indispensable de modifier le titre de la proposition de loi afin qu'il fasse mention des délits sexuels et de l'inceste, conformément aux dispositions que notre assemblée a adoptées.
Mes chers collègues, nous devons protéger les mineurs et punir fermement tous ceux qui viendraient briser leur innocence. Le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés sera au rendez-vous de cette responsabilité.