Intervention de Karine Lebon

Séance en hémicycle du lundi 15 mars 2021 à 16h00
Protection des jeunes mineurs contre les crimes sexuels — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaKarine Lebon :

Douloureuse à tous égards, la question des crimes et délits sexuels contre les mineurs est également complexe. Nous devons concilier émotion légitime, aspiration citoyenne et technique juridique si nous voulons adopter un texte fondateur destiné à protéger les plus jeunes contre ce fléau trop longtemps ignoré.

J'ai la conviction que, dépassant nos clivages, nous pouvons y parvenir et que cette loi pourrait constituer un remarquable pas en avant. J'émets donc le souhait que nos séances soient l'occasion de renforcer certaines dispositions et d'en évoquer de nouvelles.

Les débats des semaines précédentes ont déjà permis des avancées. L'instauration du seuil de 15 ans assurera une plus grande protection des mineurs dont le consentement ne sera dorénavant plus discuté. L'interdit est clair. Il s'impose à tous. Un enfant qui se construit est vulnérable. La loi doit protéger cette fragilité si particulière.

De même, l'inceste prend enfin place au coeur de nos travaux. À l'instar des crimes et des délits sur mineur de 15 ans, l'inceste deviendra une infraction autonome et non plus une surqualification pénale. En réponse à une forte attente, le seuil de non-consentement est fixé à 18 ans.

Quinze ans, 18 ans : à eux seuls, ces deux seuils légaux révèlent combien le regard de notre société a profondément évolué sur les violences sexuelles subies par les enfants. Pendant longtemps, celles-ci ont été minorées et passées sous silence, sans compter la folle croyance de ceux qui considéraient que les enfants étaient capables dès leur plus jeune âge de s'ouvrir à une sexualité consentie avec des adultes. Il nous appartient de veiller à ce que, plus jamais, une telle régression des mentalités ne soit permise.

La proposition de loi présente malheureusement quelques lacunes. Un tabou demeure dans notre société, celui de la sexualité des personnes atteintes d'un handicap et des agressions dont elles sont victimes. C'est un impensé. Force est de constater que, pour l'heure, ni nos débats ni ce texte ne contredisent ce constat. Pourtant, selon l'Organisation mondiale de la santé, les mineurs porteurs d'un handicap ont près de trois fois plus de risques d'être victimes de violences sexuelles Ce chiffre monte à 4,6 lorsqu'il s'agit d'un handicap mental. Pour les femmes autistes, les chiffres sont édifiants : elles sont 88 % à avoir été victimes de violences sexuelles, dont un tiers avant l'âge de 9 ans. Je continuerai donc à défendre un amendement interdisant une relation entre un mineur atteint de handicap et une personne majeure. Je souhaite qu'à une vulnérabilité accrue nous répondions, dès à présent, par une mesure de protection renforcée.

Une inquiétude persiste également sur la disposition relative à l'écart d'âge de cinq ans entre un mineur et un jeune adulte. Loin de vouloir criminaliser ce que vous avez appelé, monsieur le ministre, dans une formule qui a déjà fait florès, les amours adolescentes, nous nous interrogeons encore sur les failles d'une telle condition.

Le texte est, pour l'instant, muet sur la prostitution des mineurs alors que ce phénomène prend une ampleur considérable dans notre pays.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.