Mission d'information sur la résilience nationale

Réunion du mercredi 23 février 2022 à 14h15

Résumé de la réunion

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La réunion

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MISSION D'INFORMATION DE LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS SUR LA RÉSILIENCE NATIONALE

Mercredi 23 février 2022

La séance est ouverte à quatorze heures quinze

(Présidence de M. Alexandre Freschi, président de la mission d'information)

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Cette dernière réunion de la mission d'information sur la résilience nationale a pour objet l'examen du projet de rapport rendant compte de nos travaux, puis le vote sur l'adoption de ce rapport.

Le projet vous a été adressé il y a plusieurs jours par voie électronique et une version papier est à votre disposition dans la salle.

Il est rare qu'une instance de l'Assemblée nationale se donne un objet d'étude aussi vaste que celui qui a été choisi par nos collègues du groupe Agir ensemble.

Entre juillet 2021 et janvier 2022, la mission d'information a entendu plus de 120 personnes au cours de 63 auditions. Elle a également effectué deux déplacements importants, l'un à Nice et dans la vallée de la Vésubie sinistrée par la tempête Alex, l'autre en Finlande.

Durant les sept mois qu'ont duré nos travaux, nous nous serons intéressés aussi bien aux constellations de satellites qu'aux câbles qui parcourent le fond des mers, au contre-terrorisme qu'aux banques alimentaires.

Nous avons porté notre attention sur les approvisionnements en énergie, en eau, en produits alimentaires, sur les enjeux de réindustrialisation du pays, mais aussi sur le rôle et les difficultés des transporteurs routiers ou des entreprises de pompes funèbres en temps de crise.

Nous avons réfléchi à la question des réserves, du service civique et du service national universel (SNU).

Nous avons aussi entendu tous les services, directions et opérateurs de l'État et des armées participant à la prévision, à la prévention et à la gestion des crises.

Des historiens, des juristes, des statisticiens, des économistes, des experts militaires, des politologues, des spécialistes des sciences de l'information ou des relations internationales, des psychiatres, nous ont apporté leurs éclairages.

Bref, peu de parlementaires auront eu la chance de procéder à un tel tour d'horizon dans un temps si réduit.

Je veux donc saluer et remercier notre rapporteur, Thomas Gassilloud, qui a été, en quelque sorte, l'homme-orchestre de cette séquence et dont l'énergie et l'enthousiasme n'ont jamais faibli.

Son rapport synthétise l'information très riche qui nous a été livrée tout en retraçant le cheminement de sa réflexion au fil des auditions.

Au total, nous avons, grâce à ce rapport, une idée beaucoup plus claire de ce qu'est la résilience pour notre pays dans le contexte actuel et des enjeux que cela emporte.

Au-delà des nombreuses mesures très concrètes qu'il propose, le rapporteur procède en réalité à un renversement de perspective considérable qui consiste à placer le citoyen au centre de l'action, ce qui doit nous permettre de rester maîtres de notre destin collectif.

Alors que la législature s'achève et que le pays entre peu à peu dans une phase électorale, ce rapport est un travail pleinement politique, au sens le plus noble du terme.

J'espère donc sincèrement qu'il nourrira les débats des prochains mois.

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Le rapport complète de nombreux travaux menés au sein de notre assemblée, par exemple par la commission de la défense : ce matin même, Mme Carole Bureau-Bonnard y présentait un rapport d'information sur les menaces nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (NRBC).

Il m'a semblé intéressant que nous prenions le temps d'étudier le concept de résilience nationale ainsi que les voies et moyens visant à la renforcer.

Nous avons beaucoup appris à l'occasion notamment du déplacement que nous avons effectué à l'initiative de Marine Brenier dans la vallée de la Vésub i e, qui nous a permis de mesurer avec quelle fulgurance nous pouvions y être confrontés dans notre vie quotidienne.

Lorsque nous nous sommes réunis en juin dernier, nous nous étions fixé une feuille de route qui consistait d'abord à définir la notion de résilience nationale en partant du constat que nous sommes confrontés à un environnement de plus en plus incertain ainsi qu'à une conjonction inédite de risques et de menaces, alors que notre résilience collective est plus faible notamment en raison de notre dépendance accrue à la technologie.

Nous avions l'ambition de faire un tour d'horizon des différents secteurs vitaux pour la continuité de la nation afin d'en apprécier les vulnérabilités et les atouts.

Enfin, nous voulions entendre l'ensemble des acteurs de la résilience, du citoyen à l'échelon étatique, en passant par les armées, les collectivités locales et les acteurs clés de la société civile.

Nous avions l'intuition que nous pourrions nous inspirer de l'exemple d'autres pays démocratiques qui ont, de manière volontariste, développé une stratégie de résilience. C'est dans cet esprit que nous nous sommes rendus en Finlande le mois dernier.

Si notre domaine d'étude était extrêmement vaste, nous nous étions fixé deux limites, et d'abord celle de ne pas refaire le match de l'analyse de la crise sanitaire dans ses moindres détails puisqu'une autre mission d'information avait déjà largement contribué à faire la lumière sur celle-ci.

Notre seconde limite était de bien nous positionner sur les questions de résilience au niveau systémique sans nous attarder à une analyse secteur par secteur.

Notre but était bien de déterminer les axes structurants, systémiques et transversaux, permettant de renforcer la résilience de la nation dans son ensemble. Je dis renforcer parce que, dans ce domaine, notre pays dispose d'atouts exceptionnels et nombreux.

Depuis la Seconde Guerre mondiale, il a une véritable ambition d'autonomie stratégique que l'on retrouve aussi bien dans l'esprit de la défense globale que dans le dimensionnement des armées, avec notre modèle d'armée complet, ou dans des secteurs très particuliers comme l'énergie, ce qui nous différencie bien de l'Allemagne notamment en matière d'autonomie énergétique.

Ces atouts s'appuient sur les forces vives, sur une certaine cohésion sociale et sur la capacité d'engagement de nos concitoyens.

Notre pays recèle également de grandes vulnérabilités, qu'elles soient d'ordre social, politique ou économique, qui ont été mises en lumière lors de la crise sanitaire.

Or chacune peut être exploitée par l'un de nos adversaires stratégiques – États aussi bien que groupes terroristes – au niveau mondial dans le cadre de menaces hybrides se situant en deçà du seuil de la guerre ouverte.

Il nous appartient donc d'analyser avec lucidité ces fragilités afin d'y remédier.

Si un axe structurant ressort, c'est la nécessité de fonder une stratégie de résilience en partant du citoyen.

Notre État centralisé et fort donne parfois l'impression de pouvoir tout faire et nous fait parfois considérer le citoyen comme un sujet sur lequel on produit des effets au lieu de le considérer comme un élément de résolution des crises.

Ainsi le Président de la République a-t-il, dans son discours sur le Sahel, dit pour la première fois qu'il fallait considérer ses habitants non pas uniquement comme des victimes du terrorisme, mais également comme des remparts contre celui-ci.

Dans les conclusions du rapport, nous appelons donc à un renversement complet de perspective en fondant une stratégie de résilience sur l'implication et sur la responsabilisation de tous les citoyens.

Cela implique une démarche d'humilité des pouvoirs publics qui doivent reconnaître leurs limites, notamment dans des conditions extrêmes, comme nous l'avons vu dans la vallée de la Vésubie où, dans un premier temps, citoyens et élus locaux ont dû se prendre en main et s'organiser.

Cela rejoint les stratégies de défense des pays nordiques.

Comment une telle intégration du citoyen peut-elle se faire concrètement ?

Premièrement, en développant la culture du risque au travers d'un discours clair et franc sur les risques objectifs auxquels nous sommes confrontés, pour que nous apprenions à vivre avec eux, à envisager leur survenue et à savoir collectivement réagir.

Le rapport propose ainsi de distribuer à tous les foyers de France un livret unique – certains, vivant, à proximité d'une centrale nucléaire doivent déjà en théorie en posséder un plus spécifique – sur la conduite à tenir en cas de crise, à l'instar du livret suédois qui est annexé.

Un tel livret inciterait chaque citoyen à disposer chez lui d'un minimum de réserve d'eau et de nourriture, ce qui n'a rien de honteux.

Le rapport propose aussi de créer une journée nationale de la résilience, qui pourrait se tenir en même temps que la journée du réserviste et au cours de laquelle nous pourrions sensibiliser sur les risques au niveau local, conduire des exercices de grande ampleur et mettre en avant ceux qui s'engagent, notamment les réservistes.

Le rapport insiste également sur les mesures qui permettent de développer l'engagement citoyen et le rôle central du maire pour mobiliser les citoyens autour des enjeux de résilience locaux.

Il s'agit également de dynamiser la force morale des individus, notion qui a été citée à plusieurs reprises lors de la récente présentation en commission de la défense du rapport d'information sur la préparation à la haute intensité.

Bien entendu, l'État a également son rôle à jouer dans cette nouvelle stratégie de résilience.

Il doit d'abord impulser une revue stratégique de l'ensemble des secteurs vitaux pour la nation, puisque la crise sanitaire nous a fait découvrir que de petits détails pouvaient être très dommageables pour notre résilience, y compris pour la fourniture d'eau potable.

Plutôt que de subir une prochaine crise, l'idée serait ainsi de disposer, secteur par secteur, de pistes en matière de capacités de production ou d'évolution de nos stocks stratégiques, le cas échéant en lien avec l'Union européenne.

La remontée en puissance de nos armées est également un facteur de résilience incontournable. On ne peut à cet égard que se féliciter des efforts faits depuis 2017. Le rapport formule plusieurs propositions visant notamment à accroître leur masse, c'est-à-dire leur capacité à réagir de manière simultanée à un défi important.

Si nos armées se sont depuis une vingtaine d'années organisées pour faire face à une moyenne d'engagement, elles ne disposent plus forcément de la capacité à mobiliser des moyens importants de façon simultanée, du fait par exemple de la rationalisation des parcs automobiles.

Il faut donc être sincère quant aux moyens que nous sommes en mesure de projeter pour faire face à un péril majeur.

S'agissant de l'État, il faut donner au SNU une nouvelle impulsion clairement orientée vers la résilience, la cohésion sociale n'étant pas une finalité opérationnelle en soi mais une externalité positive.

Dire à un jeune, où qu'il habite, qu'il est nécessaire à la nation constitue un fort ferment de cohésion nationale.

L'État doit également faire de la résilience une norme d'évaluation pour les acteurs privés et publics, au même titre que la performance ou que l'efficacité des politiques publiques.

Il doit aussi retrouver l'esprit de l'ordonnance de 1959 du général de Gaulle qui nous a fait passer d'une défense purement militaire à une défense globale associant l'ensemble des ministères.

Depuis la fin de la guerre froide, l'esprit de cette défense globale s'est un peu perdu et les ministères non militaires comptent souvent sur l'armée pour faire face en cas de crise majeure.

Or celle-ci ne dispose pas toujours, la crise sanitaire l'a montré, des moyens nécessaires. Le service de santé des armées, par exemple, représente moins de 1 % des moyens sanitaires du pays. Le ministère de la santé et celui de l'industrie doivent donc mener une réflexion sur leur fonctionnement dans une telle situation.

Enfin, l'objectif de résilience peut également être intégré par le Parlement dans les évaluations qu'il mène, et les budgets qu'il vote. Plusieurs recommandations du rapport nécessiteront en outre des mesures législatives pour être applicables.

Voici donc de belles perspectives pour le Président et l'Assemblée nationale qui seront élus au cours des prochains mois.

J'espère que nos travaux pourront utilement contribuer aux programmes des différents candidats, sachant que l'on peut tirer de cette stratégie de résilience nationale beaucoup d'externalités positives.

Plus globalement, associer les citoyens à une stratégie de résilience ne revient pas à les inquiéter en fermant les yeux mais au contraire à les rassurer sur notre capacité à faire face ensemble.

L'exemple des pays nordiques montre qu'une stratégie de défense inclusive, où la population est pleinement consciente des risques et responsabilisée, n'a pas du tout le côté anxiogène qu'on pourrait lui prêter. Ainsi la population finlandaise, très associée aux risques, se déclare parmi les plus heureuses du monde.

C'est un bon exemple d'externalité positive d'une stratégie de résilience : il faut associer tout le monde dans une politique publique ambitieuse pour que chacun soit plus serein et, finalement, peut-être, un peu plus heureux.

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J'ai adressé une contribution personnelle dans laquelle, en tant que professionnelle de santé, je m'intéresse particulièrement à la résilience en matière de soins.

En premier lieu, il faut procéder à une réforme pragmatique de la réserve sanitaire. Lors du premier confinement, nous avons en effet pu constater combien cet outil était sous-dimensionné et incapable de faire face à l'inscription de 14 000 soignants.

Il convient donc de réfléchir à un triptyque, tout d'abord, ordinal, puisque ce sont les ordres de santé qui sont les plus proches des professionnels et les mieux à même de recenser les compétences – langues parlées, etc. – permettant de concourir à la résilience ; opérationnel, ensuite, avec les préfets, puisqu'ils assurent les réquisitions ; régional, enfin, avec les ARS, les agences régionales de santé, mais aussi central lorsqu'une région doit en aider une autre, ce qui fut le cas lors de la crise du covid.

Il convient également de réfléchir à la fidélisation et à l'optimisation des ressources humaines – à l'instar de ce que font les armées – en particulier dans le domaine de la réanimation, par exemple en permettant aux soignants qui ont été confrontés à la mort de nombreux patients de profiter de « sas de vie ». Il faut également reconsidérer la formation continue des soignants afin qu'ils puissent actualiser leurs potentiels et tenir sur le long terme.

En second lieu, j'insiste sur la question de la logistique alimentaire, sur laquelle le rapport me paraît un peu léger.

En dernier lieu, je me suis intéressée à la question de la gestion des décès massifs, que j'ai étudiée de près en tant que réserviste à l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur. Mes préconisations, très concrètes, concernent la rapidité d'élaboration des certificats de décès grâce à la dématérialisation des procédures, la réintégration des opérateurs du secteur funéraire à la chaîne du soin et la stabilisation des procédures concernant la prise en charge des corps, essentielle du point de vue de la salubrité publique.

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Sur ce dernier point, votre contribution sera utile, les auditions ayant montré que les procédures en vigueur pouvaient être facilement débordées. Le rapport recommande d'ailleurs de refaire un point sur ce qui est ou non stratégique, certains secteurs ayant été considérés comme non essentiels – y compris la logistique – alors qu'ils sont décisifs au quotidien.

S'agissant de la logistique alimentaire, je prends note de votre remarque mais je rappelle que, tel que nous l'avons conçu, le rapport ne devait pas trop s'attarder sur les préconisations sectorielles. La continuité énergétique, par exemple, nécessiterait à elle seule bien des développements… Les seules recommandations sectorielles, en l'occurrence, viseront les domaines qui ont des répercussions systémiques. Par exemple, je me suis permis de recommander le développement d'une messagerie instantanée souveraine afin de ne pas dépendre de Telegram ou de WhatsApp.

S'agissant enfin de la réserve sanitaire, il me paraît important de revenir sur les crises de ces dix dernières années. Après l'épidémie liée au virus H1N1, les travaux des services de l'État et de notre assemblée ont débouché sur des recommandations concernant l'établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS), la réserve sanitaire, les stocks de masques. Les responsables politiques se sont presque vu reprocher d'en avoir trop fait, or lorsque la crise du covid-19 est survenue, nous n'étions pourtant pas totalement préparés. D'où la citation de Jean Monnet en épigraphe du rapport : « Les hommes n'acceptent le changement que dans la nécessité et ils ne voient la nécessité que dans la crise. » En tant qu'autorité publique, nous nous devons donc d'anticiper les crises et de garantir aux citoyens que le niveau d'assurance accepté et souscrit est suffisant pour faire face. Quelques années seulement ont suffi pour oublier ce qui s'est passé avec le virus H1N1… et ne pas avoir suffisamment de masques à distribuer. L'un des défis de la prochaine législature consistera donc à disposer des investissements nécessaires pour être prêts à affronter une nouvelle crise.

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Ce rapport n'est-il pas aussi éclairant face à l'actuelle crise ukrainienne ? Tous les Ukrainiens se mobilisent, s'entraînent, sont solidaires – malgré un rapport de force d'un à cinq avec la Russie –, bref, font preuve d'une véritable résilience. Dans un contexte comparable, qu'en serait-il chez nous ? Ne pourrait-on pas faire allusion à cette crise dans le rapport ?

Dans notre rapport d'information sur les réserves, Jean-François Parigi et moi-même avions rappelé que les réservistes canadiens peuvent arborer leur uniforme sur leur lieu de travail afin de valoriser leur engagement civique. Le travail est certes de longue haleine mais ne pourrait-on pas aller encore plus loin en insistant sur le patriotisme qui est au cœur de la résilience ?

En effet, les cérémonies commémoratives sont d'abord patriotiques. Ne pourrait-on donc pas supprimer le caractère férié du 8 mai, date de la célébration de la victoire sur l'Allemagne nazie, pour rappeler aux Français qu'il s'agit d'une journée patriotique ? Les enseignants rappelleraient aux élèves ce que sont les valeurs républicaines, le devoir d'engagement et de mémoire avant de les emmener aux cérémonies et d'accueillir les associations d'anciens combattants ainsi que des réservistes. Ces derniers, quant à eux, ne travailleraient pas mais leur journée serait payée et ils pourraient se rendre dans les entreprises, comme au Canada, pour valoriser leur engagement.

Enfin, le rapport devrait indiquer qu'à telle date, le SNU doit être effectif pour une classe d'âge. Nous devons instaurer une obligation de résultat, à mon sens à partir de 2025, afin de pouvoir mesurer cinq ans après ce qu'il en est vraiment. C'est ainsi que nous contribuerons à donner un nouvel élan au SNU.

En l'occurrence, nous sommes confrontés à des problèmes de locaux. Le service militaire volontaire (SMV) dispose de sept centres. L'État ne pourrait-il pas organiser des « SMV-SNU » pérennes dans chaque région ? Nous aurions ainsi treize centres SNU en métropole et nous bénéficierions d'une vraie dynamique entre État et régions au bénéfice de nos jeunes.

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Ce rapport bénéficie de tous les travaux qui ont été menés depuis le début de la législature et il remet en effet en valeur le SNU tout en proposant de le renforcer.

Je n'ai jamais caché mes doutes à propos de sa conception originelle, en 2017. Le SNU ne sera largement accepté que s'il a une finalité opérationnelle : la résilience. Le rapport préconise ainsi la discussion d'un projet de loi Engagement et résilience, qui pourrait inclure des dispositions sur le SNU et les réserves – l'acceptation de telles mesures par la nation passant par un débat contradictoire au Parlement.

Il est vrai que l'organisation du SNU souffre d'une certaine inertie alors que les menaces peuvent être fulgurantes. Sans doute ne faut-il donc pas trop tarder à prendre de telles mesures, qui produisent leurs effets dans la durée.

L'OTAN considère depuis longtemps que la résilience est un moyen de dissuasion – une réunion a d'ailleurs eu lieu la semaine dernière afin de réfléchir à la manière d'accroître la résilience ukrainienne. Une défense totale, y compris civile, montre à d'éventuels ennemis ce que serait le prix à payer en cas d'agression.

L'esprit patriotique est en effet décisif, d'où la nécessité de réfléchir aux symboles, au drapeau, aux cérémonies. Ainsi, je serais favorable au port obligatoire d'une tenue scolaire unique, alors que l'éducation nationale s'est toujours opposée aux maires qui ont souhaité l'expérimenter dans leurs écoles. Cependant, en cette période électorale, dans un rapport forcément très politique, j'assume avoir fait preuve de modération. Nous proposons donc que les maires, après concertation locale, puissent expérimenter le port obligatoire de la tenue. Faisons ensuite le point, dans quelques années, pour savoir ce qu'il importe de retenir. Nous connaissons tous le caractère « fédérateur » de la tenue pour accroître le sentiment d'appartenance à un collectif, comme nous le constatons d'ailleurs avec les jeunes du SNU.

J'ai également fait preuve de modération à propos du jour férié. Je suis favorable à la suppression de l'un d'entre eux pour que chaque salarié puisse prendre une journée afin de se mettre à la disposition d'un service lié à la résilience et piloté par le maire. Il s'agirait de transformer un jour férié en un jour « résilience » dont la date aurait été fixée par le maire, et lors duquel ferait appel à ses administrés. Compte tenu de la période électorale, nous avons amoindri nos exigences et proposons, dans la recommandation n° 21, d'« expérimenter un système incitatif permettant aux maires de faire appel à leurs administrés un jour par an pour mener à bien des projets de résilience locale ». Il est très important que les citoyens contribuent à la vie en société en s'engageant, pas seulement en payant leurs impôts. Tout un chacun, quelle que soit sa condition sociale, doit participer à une œuvre commune.

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Je tiens à vous féliciter, ainsi que les administrateurs, pour ce travail très précis et complet. Un livret distribué à la population serait très important, comme nous l'avons vu à Nice, est très important. Lorsque les risques, notamment NRBC, sont connus, il faut que la population sache comment réagir. Je pense aussi au terrorisme et à d'autres menaces aux conséquences potentiellement traumatisantes. On a tendance à ne pas vouloir expliquer précisément quelle est leur nature. L'actualité les met parfois sur le devant de la scène, mais une fois la crise passée, on n'en parle plus. La population doit aussi savoir qui est chargé du matériel, et ce à tous les niveaux administratifs. Il est important que les citoyens n'aient pas le sentiment d'être face à une absence de réaction et qu'ils soient bien préparés en amont.

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S'agissant du matériel, j'ai été assez épaté par les Finlandais. Il ne faut pas oublier que leur pays partage 1 200 kilomètres de frontière avec la Russie : ils n'ont donc jamais baissé la garde, d'autant qu'ils n'ont pas d'armes de dissuasion et qu'ils ne sont pas membres de l'OTAN. Ils ont à chaque fois montré leur capacité à réagir. Il faut dire qu'en matière d'organisation, la chose est plus simple car la Finlande compte autant d'habitants qu'une région française et que son histoire est un peu différente de la nôtre.

J'appelle votre attention sur la recommandation n° 32 qui vise à « étudier la mise en place d'une agence nationale d'approvisionnement d'urgence sur le modèle de la NESA finlandaise, dont le rôle serait de planifier, développer et maintenir la sécurité des approvisionnements, et de soutenir les opérateurs publics et privés pour l'identification de vulnérabilités ». Nous serions ainsi certains de disposer des matériels de base, dont la plupart sont par ailleurs très peu onéreux.

Vous constaterez que le livret suédois, présenté en fin de rapport, renferme beaucoup de dispositions. Il y est écrit que, si la Suède est attaquée, il faut une force de résistance ; un encart sur fond rouge précise que : « Si la Suède est attaquée par un autre pays, nous ne nous rendrons jamais. Toutes les informations ordonnant de cesser la résistance sont fausses. » Cela montre un certain état d'esprit et constitue, du reste, une forme de dissuasion. Un pays qui aurait des velléités d'attaque devra y réfléchir à deux fois : s'il arrive à bout de l'armée suédoise, il aura bien de la peine à maîtriser le pays !

La communication de crise et la confiance dans les autorités publiques apparaissent en filigrane dans le rapport. La crise sanitaire a montré que ces points méritaient d'être réinterrogés. De manière générale, et au-delà des questions de résilience, il est important de rétablir la confiance, à commencer par celle des élus locaux, qui doivent avoir plus de marges de manœuvre. On s'aperçoit bien souvent que, lorsqu'on les laisse faire, ils font tout aussi bien, voire mieux, car leur action est plus adaptée à la situation locale et qu'ils y mettent plus de sens.

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Je remercie les administrateurs et tous ceux qui nous ont accompagnés durant cette mission. D'autres engagements – je travaille actuellement sur la situation dans les EHPAD – ont fait que j'ai été moins impliquée ces derniers temps, je vous prie de m'en excuser. La synthèse et les quelques éléments du rapport dont j'ai pris connaissance montrent à quel point notre démarche a évolué. Au début des auditions, nous avions, sur ces questions de défense, la vision d'un État très centralisé. Progressivement, et notamment après la visite dans la vallée de la Vésubie, nous avons pris conscience de l'importance de mieux associer les collectivités territoriales. Je remettrai évidemment ce rapport au président de la métropole Nice-Côte d'Azur.

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Vous faisiez partie des députés les plus impliqués de cette mission… Il est vrai que nous avons abordé cette question de la résilience avec un certain biais, celui des sujets sur lesquels nous avions déjà travaillé : pour ma part, je m'étais penché durant la législature sur les moyens nationaux, notamment militaires. J'avais donc à cœur de travailler sur ce qui pouvait les compléter, d'autant que j'avais conscience que ces moyens militaires étaient limités – la force opérationnelle terrestre française peut tenir tout entière dans le Stade de France et les véhicules opérationnels sont en nombre tout aussi minime. Il serait insincère de faire croire qu'on peut compter sur les moyens nationaux face à certaines crises. Si l'État a su apporter une réponse après les événements survenus dans les vallées de la Vésubie et de la Roya, c'est parce que quelques dizaines de milliers d'habitants seulement étaient concernés et que les moyens y ont été fortement concentrés.

Ce rapport est très politique, dans le sens positif du terme. Nos préconisations, mais aussi le fait de parler de décentralisation, de responsabilisation des citoyens, ou encore d'objectifs de prospérité relèvent d'une philosophie assumée. Ce travail nous permet d'affirmer un certain nombre de convictions et nous espérons que nos réflexions serviront de base aux futurs choix en la matière.

Ma vision, très personnelle, est que nous arrivons au bout d'une démarche, celle qui consiste à impliquer à chaque fois les pouvoirs publics alors que 50 % du PIB sont déjà consacrés à la dépense collective. Au lieu de leur promettre qu'on fera mieux à leur place, il faut davantage impliquer les citoyens dans la réalisation d'objectifs communs.

La mission d'information adopte le rapport d'information à l'unanimité.

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Je tiens à remercier l'ensemble des administrateurs qui ont assisté cette mission d'information.

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Je m'associe à ces remerciements. Les administrateurs n'ont pas seulement travaillé d'arrache-pied, leurs expériences et leur approche personnelle ont parfois enrichi notre réflexion. Je remercie également toutes les personnes qui ont accueilli notre mission lors de ses déplacements.

La réunion se termine à quinze heures quinze.

Membres présents ou excusés

Mission d'information sur la résilience nationale

Présents. - M. Christophe Blanchet, Mme Marine Brenier, Mme Carole Bureau-Bonnard, M. Alexandre Freschi, M. Thomas Gassilloud, Mme Sereine Mauborgne