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Monsieur le ministre, pour la qualité de notre débat, je propose que certains arguments soient définitivement écartés. Vous ne pouvez pas continuer à agiter le spectre d'une pénurie de sucre, alors que la récolte de l'année 2020 va être à peu près équivalente à celle de l'année 2015, dont la moitié avait été exportée. Par ailleurs, vous avez dit à plusieurs reprises que la loi de 2016 avait mis fin à 92 % des usages des néonicotinoïdes, alors qu'elle les a totalement interdits. Elle a même été complétée par la loi de 2017 : au cours de son examen, Jean-Baptiste Moreau avait justement...
...nanimes pour dire que les néonicotinoïdes sont une catastrophe pour l'environnement 7 000 fois plus puissante que le DDT, qui a été interdit en France il y a des années. C'est une véritable bombe atomique, puisque seulement 20 % du produit reste dans la plante et que les 80 % restants partent dans les sols, l'eau et les nappes phréatiques. L'association interprofessionnelle de la betterave et du sucre (AIBS) a indiqué, dans le plan de prévention qu'elle a remis le 22 septembre, que les pertes représentaient 15 % de la production. Cela signifie que 85 % des cultures ne sont pas impactées. C'est donc pour préserver 15 % des cultures seulement que nous allons introduire une véritable bombe dans nos sols, sans nous soucier des générations futures ? Les 65 % d'aides de l'État ne suffiraient-elles p...
...adre du plan de relance, ainsi que d'autres investissements industriels permettront de sortir de cette crise par le haut et que nous pourrons arriver à 100 % de compensation et d'accompagnement pour cette filière. Le courage, ce pourrait être de continuer à chercher une solution d'accompagnement économique qui soit digne des producteurs – et je ne fais pas de distinction entre les producteurs des sucreries et les producteurs de betteraves eux-mêmes. Pour revenir au plan Écophyto, la mise à l'écart des parlementaires n'est pas le seul problème. Ce qui est problématique, c'est que l'on imagine de créer des comités ad hoc dès qu'il y a un problème – hier avec le glyphosate, aujourd'hui avec les néonicotinoïdes – alors que nous avons un plan stratégique global. Il faut réinstaurer une gouve...
... de compenser les pertes, il faut bien avoir à l'esprit que l'outil industriel de la betterave est assez spécifique. Si l'on a des pertes dans la culture du blé, on peut les compenser, car le blé se transporte très bien, étant relativement peu volumineux. La betterave, en revanche, est très difficile à transporter et doit donc se trouver à proximité de l'outil industriel. Si, dans un secteur, les sucreries disparaissent, alors la culture de la betterave disparaîtra, elle aussi.
Monsieur le ministre, ce ne sont pas les emplois que vous défendez, mais bien les intérêts des industriels du sucre. Lorsque des emplois ont été supprimés dans les quatre sucreries françaises qui ont fermé du fait de la disparition des quotas européens, je ne vous ai pas entendu crier. Où sont les engagements des industriels du sucre quant au maintien des emplois, en contrepartie de votre projet de loi sur les néonicotinoïdes ? Nulle part ! Ce sont de faux engagements, comme ceux de General Electric par le pa...
Madame Batho, je n'ai jamais dit que le Parlement était inutile. Je dis simplement que depuis 2016, nous avons vu le mur se rapprocher. Nous savions que la filière betterave-sucre allait connaître des difficultés. Nous avons tous été alertés. Mais il faut regarder la vérité en face : nous ne l'avons pas accompagnée. Madame de Courson, je vous rejoins totalement : nous avons bel et bien une différence de points de vue. Mon objectif, en tant que rapporteur du texte, est de ne pas répéter les erreurs du passé, ce qui suppose de déterminer comment accompagner les agriculteurs...
Ce débat est très intéressant. Je soutiens le projet de loi, mais c'est très respectueusement que j'écoute les arguments de ceux qui s'y opposent. Madame Batho, je suis, au fond, tout à fait d'accord : on peut reprocher à la filière betterave-sucre de n'avoir pas suffisamment anticipé la fin des quotas. Elle en paie le prix aujourd'hui, car les scientifiques, ceux des instituts techniques comme ceux de l'INRAe, ne peuvent encore promouvoir des techniques alternatives faute de les maîtriser suffisamment. Certaines formules, telles que la rotation des cultures, font florès. En réalité, le changement de modèle suppose aussi que chaque entrepr...
...é, il faut des actes. J'affirme donc que les parlementaires qui envisagent, comme c'est leur droit, de voter pour le présent projet de loi sont pour le rétablissement de l'autorisation des néonicotinoïdes en France. On ne peut pas dire qu'on est contre les néonicotinoïdes si l'on vote le texte. Ensuite, il est inexact d'affirmer que rien n'a été fait depuis 2016. En réalité, la filière betterave-sucre était opposée à la loi de 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Et comme elle savait qu'il y aurait des élections de 2017, elle espérait bien qu'elle serait supprimée. C'est si vrai qu'un avant-projet de loi avait été rédigé en juin 2017 : il s'agissait de miser sur un nouveau produit, le sulfoxaflor. Du reste, lors des auditions que vous avez menées, Monsieur ...
...ngtemps. Par exemple, les colliers antipuces destinés aux animaux de compagnie regorgent de néonicotinoïdes ; les insecticides destinés à éradiquer les fourmis des maisons également. Les néonicotinoïdes sont donc encore largement utilisés. Sans vouloir faire offense aux promoteurs de la loi biodiversité, j'estime qu'elle est imparfaite, comme de nombreuses lois applicables à la filière betterave-sucre. La situation actuelle résulte du fait que nous avons assigné à la filière des objectifs d'abandon des produits phytopharmaceutiques, notamment ces fameux néonicotinoïdes, sans l'accompagner ni aller plus loin. À présent, nous tentons de recoller les morceaux afin d'éviter qu'elle ne meure, ce qui nous contraindrait à importer des milliers de tonnes de sucre par supertankers, avec toute la pollut...
... du vivant. Le modèle agro-écologique que nous défendons, c'est par exemple celui des exploitations des producteurs de betteraves bio que nous avons auditionnés : ils emploient deux fois plus de personnes que les exploitants conventionnels, et dégagent 80 à 85 euros à l'hectare, contre 20 euros pour les autres. Certes, ils sont soumis à plusieurs freins, tels que la date des semis exigée par les sucreries et le coût de la main-d'œuvre. Il faut les lever, mais on ne peut pas affirmer qu'un tel modèle n'existe pas. Des solutions alternatives existent, nous l'avons vérifié.
...s d'un système mutualiste, la compensation d'un producteur à l'autre, d'une région à l'autre. Vous avez en effet bien expliqué ces déplacements de pucerons est-ouest et nord-sud qui affectent les productions de manière totalement aléatoire. Je suis convaincu que cette solution serait un bon investissement pour assurer la transition écologique qui, adossée à une montée en gamme de type HVE sur le sucre français, nous mettrait en situation d'ici un ou deux ans de conquérir un marché spécifique à valeur ajoutée. À défaut, nous devrons nous contenter de rejoindre nos concurrents sur un marché mondial où nous pouvons demain être écrasés, même après avoir réintroduit des solutions chimiques.
L'avis est défavorable. Sur la baisse de rentabilité, qui serait de 15, 20 ou 30 %, il faut bien comprendre qu'une sucrerie a un rendement, un résultat net, extrêmement faible de l'ordre de 2 ou 3 %. Or ces industriels ont des coûts fixes, des charges fixes par définition incompressibles. Il leur a été demandé d'avoir une démarche RSE, de faire des plans de rénovation, de réduire leur consommation énergétique. Ces exigences, auxquelles ils se sont pliés, ont un coût qui est amorti sur 15 ou 20 ans. Il est donc diff...
Quant à une assurance publique, encore faut-il pouvoir la financer. Et, de toute façon, il ne peut y avoir de prise en charge à 100 %, ce qui conduira certains agriculteurs à arrêter de planter, et on retrouve la spirale infernale : la réduction des matières premières qui risque de mener droit dans le mur l'industrie complète du sucre en vingt-quatre à trente-six mois. Le texte a pour unique objectif d'arrêter cette spirale. Vous avez évoqué l'agriculture biologique. Les représentants de la filière que nous avons reçus en audition veulent tous s'engager pour le bio et multiplier par deux, trois ou quatre le nombre de parcelles cultivées en bio. Cependant, quand vous décidez de faire du bio dans une sucrerie, vous êtes obligés...
...née dernière. Très vite va se poser la question des réensemencements pour l'assolement de 2021. Et s'il faut prendre le risque de produire 50 tonnes de betteraves à 23 euros la tonne au mieux, puisque le cours mondial ne remonte pas ou très peu, le calcul sera vite fait, et les exploitants vont immédiatement changer de production. En effet, dans les systèmes non coopératifs, les contrats avec les sucreries sont à échéance d'un ou trois ans, et le plus souvent d'un an, ce qui permet au paysan de reculer tout de suite. Dans ce cas, les fermetures d'usines seront elles aussi immédiates.
Une usine sucrière tourne au mieux quatre mois par an. En dessous de cent dix jours, l'équilibre financier est rompu, en calculant sur la base d'un prix du sucre à la tonne de 400 euros sur le marché international. Or il est tombé à 300 euros, contre 500 euros en 2017 à la fin des quotas. Une usine qui tourne cent vingt jours par an ne parvient pas à gagner de l'argent avec un sucre à 300 euros la tonne. L'approvisionnement en betteraves est fondamental pour qu'une usine puisse tourner cent vingt jours. En 2019, il y avait 480 000 hectares de betteraves, ...
...Il y a plus de dix ans, à cette table, M. Michel Barnier parlait déjà d'agriculture écologiquement intensive, tout comme M. Stéphane Le Foll il y a huit ans. Qu'on soit éleveur, céréalier, ou maraîcher, on doit comprendre que ce ne sont pas que des mots. Il faut trouver une solution pour celle et ceux qui sont dans l'impasse. On l'a compris, les betteraviers, la filière sucrière et l'industrie du sucre sont dans l'impasse. Monsieur le ministre, vous nous proposez de sortir de cette impasse. Pour ma part, j'aurais souhaité une dérogation très encadrée, limitée à une année d'évaluation, puis un débat pour voir si l'ITB a fait des propositions, et comment l'ANSES et l'ensemble des acteurs avancent sur le sujet. Je trouve la proposition de la commission du développement durable raisonnable. Ce qui...
...to est effectivement resté en rade. Il faut le réactiver et l'amplifier. Cela dit, il a donné quelques résultats puisque certaines molécules ont été interdites. Les volumes globaux n'ont pas diminué dans les proportions attendues, mais on a enlevé certaines molécules efficaces pour les remplacer par d'autres dont l'utilisation nécessite des concentrations beaucoup plus faibles. Les problèmes des sucreries ne se résument pas à la libéralisation et à la fin des quotas. Ce qui les affecte, c'est aussi le changement climatique. Si la sucrerie de Bourdon, à côté de Clermont-Ferrand, a fermé l'année dernière, c'est parce que les betteraviers ont été incapables de cultiver des betteraves à cause de la sécheresse qui a sévi du mois de mai au mois de septembre. Le changement climatique est effectif et ...
... membres de ce conseil exerceront leurs fonctions à titre gratuit – il est important de le signaler. Il serait inscrit dans la loi que ce conseil comprendra quatre députés et quatre sénateurs désignés par les commissions permanentes compétentes en matière d'agriculture et d'environnement de l'Assemblée nationale et du Sénat. Le conseil comprendra aussi le délégué interministériel pour la filière sucre et des représentants des ministères chargés de l'environnement et de l'agriculture, du Conseil économique, social et environnemental, des associations de protection de l'environnement, des syndicats agricoles, des filières de production et de transformation concernées, de l'Institut technique de la betterave et des établissements publics de recherche. Il se réunira trimestriellement pour assurer ...
Je me félicite du dépôt par le rapporteur de cet excellent amendement. C'est un point qui tient à cœur aux commissaires du développement durable, en particulier à ceux du groupe La République en Marche : assurer non seulement le suivi, mais aussi le contrôle du dispositif. Une question toutefois, Monsieur le ministre : l'amendement mentionne le délégué interministériel pour la filière sucre parmi les membres du conseil. Or la création de ce poste est une promesse que le Président de la République a faite à la filière. Rien ne dit qu'il sera maintenu jusqu'en 2023. N'est-il pas problématique de l'inscrire dans la loi ?
...prérogative du Parlement. Troisièmement, si l'objectif est de créer une structure afin de réunir les acteurs concernés, cela peut se faire par voie réglementaire. Dans la mesure où que je suis opposée à la réautorisation des néonicotinoïdes, je ne peux pas être pour le comité de suivi. En revanche, je serais favorable à la création d'un comité stratégique sur l'évolution de la filière betterave-sucre – mais cela ne relève pas du domaine de la loi.