Publié le 8 octobre 2018 par : Mme Rossi, M. Orphelin, M. Buchou, M. Fugit, M. Haury, Mme Marsaud, Mme Park, Mme Pompili, Mme Riotton, Mme Sarles, M. Thiébaut, Mme Tuffnell, Mme De Temmerman, M. Zulesi.
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° La section V du chapitre IIbis du titre IV de la première partie du livre Ier est complétée par un article 976bis ainsi rédigé :
« Art. 976 bis. – Est exonéré le foncier non bâti. » ;
2° Au premier alinéa de l'article 979, après le mot : « que », insérer les mots : « des revenus fonciers ruraux et ».
II. – La perte de recettes pour l'État résultant de l'instauration de ces exonérations est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Le présent amendement vise à supprimer l'IFI sur le foncier non-bâti, dans une logique de lutte contre l'artificialisation des sols. Pour rappel, l'ISF a été supprimé dans la LFI pour 2018 et un nouvel impôt, l'IFI, a été créé dans cette même loi. Il est codifié à l'article 964 du CGI. Selon les estimations issues du PLF, il rapportera 1,53 Md€ en 2019.
Le foncier rural, type de bien dont le rendement est le plus faible, bénéficiait, jusqu'ici, d'un taux d'imposition à l'ISF inferieur aux autres biens (application des taux de l'ISF sur 25 % de la valeur pour certains bois et forêts et sur 50 % de la valeur pour les terres agricoles données à bail à long terme (sauf 25 % sur les 100 000 premiers euros)).
Le Conseil constitutionnel a toujours justifié ce régime particulier par la faible rentabilité et la faible liquidité de ce type de biens. Il a indiqué expressément que les dispositions de l'article 885 H du CGI « instituent des exonérations partielles sur la valeur de certains biens ruraux au titre de l'assujettissement à l'ISF, afin d'inciter à l'acquisition et à la détention de ce type de biens » (Conseil constitutionnel, Décision n° 2014‑707 DC du 29 décembre 2014). Le régime de l'IFI, institué par la LFI pour 2018 ne permet plus « d'inciter à l'acquisition et à la détention de ce type de biens ». Au contraire, il les pénalise puisqu'il conserve un assujettissement à l'IFI de ces biens, alors qu'il en exonère la quasi-totalité des autres. Pour conserver une incitation « à l'acquisition et à la détention de ce type de biens » comme l'avait décidé le législateur et pleinement justifié le juge constitutionnel, malgré leurs loyers administrés et très bas et les sujétions exorbitantes du droit commun auquel leur statut soumet le bailleur, le présent amendement propose d'exonérer les biens ruraux d'IFI.
Force est de constater qu'aujourd'hui la taxation globale du foncier non-bâti est très élevée (taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB), taxe pour frais de chambres d'agriculture, DMTO et droits annexes, plus-values immobilières, impôt sur le revenu à un taux progressif, prélèvements sociaux et IFI - allant de 0,5 à 1,5 %). La France fait partie d'un des pays de l'OCDE où les impôts fonciers sont les plus élevés (6 % des prélèvements obligatoires, versus 3,3 % dans le reste de l'OCDE).
D'un côté, le foncier non bâti est fortement taxé - rendant sa rentabilité après impôts quasi nulle, voire négative (comme démontré par le Conseil des impôts). De l'autre, les revenus du patrimoine hors immobilier, donc sous forme de valeurs mobilières ou encore de parts sociales, ne sont taxés qu'à hauteur de 30 %. Cette absence de rentabilité du foncier non-bâti et une taxation moindre des actions poussent ses détenteurs à l'artificialisation pour échapper à ce rendement négatif. En effet, si on effectue une comparaison entre les différents types de biens, on remarque que la taxation des terrains agricoles, forêts et espaces naturels est anormalement élevée :
Outre l'impact sur l'artificialisation des sols, le présent amendement est aussi un signal positif pour les agriculteurs retraités. En effet, la location de la terre pour le fermage leur apporte un revenu complémentaire. Or, avec le paiement pour l'IFI et l'impôt sur le loyer de 62,2 %, ce complément devient quasi nul. Les agriculteurs retraités dont les retraites sont très faibles conservent souvent la propriété des terres agricoles qui leur appartiennent pour s'assurer un complément de retraite via le fermage. Mais une fois retraités, ils perdent le statut d'exploitant agricole et deviennent donc soumis à la fiscalité de droit commun (IFI, TFNB, IR, PS). Le revenu net après impôts des fermages qu'ils perçoivent est donc très faible et ne permet pas véritablement d'améliorer leurs retraites.
Le présent amendement vise également à ce que soient exclus de l'assiette de l'IFI pour le calcul du plafonnement les revenus des biens ruraux (sinon, ces revenus ruraux seraient, de fait, taxés à 75 %, ce qui reviendrait à les conserver soumis à l'IFI).
Cette modulation de taux sur critère géographique répond à un critère objectif et rationnel correspondant à un objectif d'intérêt général de lutte contre l'artificialisation des sols, 65 000 hectares étant artificialisés chaque année, et de lutte contre le changement climatique.
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