Publié le 6 novembre 2019 par : M. Woerth, M. Aubert, Mme Bonnivard, M. Carrez, M. Cornut-Gentille.
Supprimer cet article.
Cet amendement des députés Les Républicains vise à supprimer l’article 50 du projet de loi de finances qui apporte des modifications inopportunes et mal conçues au régime fiscal issu de la « Loi Aillagon » du 1er août 2003. Loin d’être une mesure de « rationalisation » du régime fiscal du mécénat des entreprises, il s’agit en réalité d’une mesure de complexification et de démotivation.
Après seize années de mise en œuvre, rien ne justifie de fragiliser un régime fiscal qui constitue un des rares atouts de la France pour renforcer les secteurs d’intérêt général : près de 77 000 entreprises ont utilisé ce dispositif en 2018, contre seulement 6 500 en 2005. La France comptait 2 364 fondations en 2017, contre seulement 1 109 en 2001, et compte désormais près de 2 500 fonds de dotation alors qu’il n’en existait aucun il y a quinze ans.
L’augmentation régulière de la dépense fiscale depuis 2003 est la conséquence logique de la lisibilité et la stabilité du dispositif. Loin d’être massive et incontrôlée, elle est contenue depuis trois ans : 930 millions d’euros en 2016, 902 millions d’euros en 2017 et 817 millions d’euros en 2018. Il n’y a donc aucune urgence à en limiter l’impact budgétaire.
Par ailleurs,le régime fiscal actuel estneutreselon les montants de donsavec une simple limitation globale de la réduction d’impôt à 0,5 pour mille du chiffre d’affaires ou à 10 000 euros, qui est suffisante pour éviter toute dérive budgétaire.Le régime fiscal actuel est également neutre selon les différentes causes financées : la seule exigence est que les entreprises financent des causes d’intérêt général. Ceci est un élément de liberté et de responsabilité, l’État ne s’immisce pas dans les choix de soutiens opérés par les acteurs de la société civile.
Or le Gouvernement veut revenir sur ces deux dimensions fondatrices en différenciant l’avantage fiscal en fonction des montants des dons et en fonction des causes aidées.
Diminuer de moitié le taux de la réduction d’impôts pour les dons au-dessus d’un « plafond » de 2 millions d’euros revient à dissuader les entreprises mécènes de consacrer un effort plus important au mécénat.Cela revient à dire qu’en France, le mécénat est pleinement soutenu jusqu’au montant de 2 millions d’euros…mais qu’il l’est nettement moins au-delà de ce montant
La cohérence du régime fiscal actuel est atteinte : en maintenant la réduction à 60 % au-dessus de 2 millions d’euros pour la fourniture de repas ou le logement de personnes en difficulté,le Gouvernement introduit une concurrence et une rivalité entre les causes. Cette incohérence revient d’ailleurs à admettre que le plafonnement aura un impact défavorable sur le mécénat ; le Gouvernement cherche ainsi à en limiter les effets sur les secteurs de l’urgence sociale où les conséquences d’un plafonnement seraient immédiatement visibles.
Enfin loin de constituer une perte de recettes, le mécénat d’entreprise allège les charges de l’État et lui permet de modérer ses concours financiers sur crédits budgétaires.Il y a donc une incohérence d’ensemble à fragiliser une ressource extra-budgétaire des partenaires de l’État alors même que les marges de manœuvres budgétaires sont limitées et que les différents ministères fixent des objectifs de sollicitation du mécénat à leurs grands opérateurs !
Réduire l’avantage fiscal pour le mécénat, c’est aussi toucher à l’éducation et plus spécifiquement, à certaines politiques en faveur de l’égalité des chances. En effet, 20 % environ des fonds collectés via le mécénat par les écoles d’enseignement supérieur sont utilisées pour abonder des bourses, qui viennent en complément des bourses publiques, et qui permettent à des étudiants d’horizons moins favorisés de se former.
L’enjeu, ce sont aussi les très grands dons pour les établissements d’enseignement supérieur et de recherche. Construire et promouvoir notre compétitivité, c’est aussi attirer les grands donateurs pour notre système d’enseignement supérieur et de recherche qui, globalement, a de plus en plus vocation à trouver ses propres ressources financière, dans une compétition pour le financement qui est aujourd’hui mondiale.
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