Publié le 27 juillet 2020 par : M. Fuchs, Mme Gregoire, Mme de Vaucouleurs, Mme Mette, Mme Maud Petit, M. Hammouche, Mme Dubost, Mme Dubré-Chirat, Mme Charvier, Mme Morlighem, M. Touraine, M. Morel-À-L'Huissier.
I - À l’alinéa 2, supprimer les mots :
« ne peut être entrepris qu’à des fins médicales ou de recherche scientifique. Il ».
II - Après l’alinéa 13, insérer les dix-huit alinéas suivants :
« 1° Après l’article 16‑10 du code civil, il est inséré un article 16‑10‑1 ainsi rédigé :
« Art. 16‑10‑1. – I. – Par dérogation à l’article 16‑10 du présent code et aux articles L. 1131‑1 et L. 1131‑1‑3 du code de la santé publique, l’examen des caractéristiques génétiques d’une personne peut être entrepris à des fins de recherche généalogique, en vue de rechercher d’éventuelles proximités de parenté ou d’estimer des origines géographiques. Il est subordonné au consentement exprès de la personne, exprimé en langue française et recueilli préalablement à la réalisation de l’examen, le cas échéant sous format dématérialisé et sécurisé. Il ne peut donner lieu à la délivrance d’informations à caractère médical et ne peut faire l’objet d’une prise en charge par l’assurance maladie.
« Les examens des caractéristiques génétiques entrepris à des fins de recherche généalogique se conforment aux normes et référentiels d’assurance qualité en vigueur, au niveau international ou national, en matière de génotypage et de séquençage génomique.
« Ils respectent également les conditions suivantes :
« 1° Le traitement, l’utilisation et la conservation des données associées aux examens des caractéristiques génétiques entrepris à des fins de recherche généalogique est assuré dans le respect des règles applicables définies par le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 et la loi n° 78‑17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ;
« 2° Tout fournisseur d’un examen des caractéristiques génétiques entrepris à des fins de recherche généalogique met à la disposition de la personne concernée une information rédigée et en langue française et de manière loyale, claire, appropriée relative à la validité scientifique de l’examen, de ses éventuelles limites au regard des objectifs poursuivis et des risques associés à la révélation d’éventuelles proximités de parenté ou d’origines géographiques jusqu’alors inconnues de la personne ou à l’absence de révélation de telles informations ;
« 3° Tout fournisseur d’un examen des caractéristiques génétiques entrepris à des fins de recherche généalogique garantit à la personne concernée la possibilité de révoquer son consentement en tout ou partie, sans forme et à tout moment, à la réalisation de l’examen, à la communication du résultat de l’examen, à la conservation de l’échantillon à partir duquel l’examen a été réalisé, ainsi qu’au traitement, à l’utilisation et à la conservation des données issues de l’examen. Lorsque la personne le demande, il est procédé, dans un délai raisonnable, à la destruction de l’échantillon ou des données issues de l’examen.
« Les résultats d’un examen des caractéristiques génétiques entrepris à des fins de recherche généalogique sont présentés en langue française.
« La communication des données issues d’un examen des caractéristiques génétiques entrepris à des fins de recherche généalogiquee ne peut en aucun cas être exigée de la personne et il ne peut en être tenu compte lors de la conclusion d’un contrat relatif à une protection complémentaire en matière de couverture des frais de santé ou d’un contrat avec un établissement de crédit, une société de financement, une entreprise d’assurance, une mutuelle ou une institution de prévoyance, ni lors de la conclusion ou de l’application de tout autre contrat.
« Les informations et données tirées des examens des caractéristiques génétiques entrepris à des fins de recherche généalogique ne peuvent servir de fondement à des actions visant à établir ou infirmer un lien de filiation ou de parenté, ou à faire valoir un droit patrimonial ou extra-patrimonial.
« Le IV de l’article 16‑10 n’est pas applicable aux examens des caractéristiques génétiques entrepris à des fins de recherche généalogique en application du présent article. »
« III - Le chapitre VI du titre II du livre II du code pénal est ainsi modifié :
« 1° L’article 226‑25 du code pénal est ainsi modifié :
« a)Les deux occurrences des mots : « ou de recherche scientifique » sont remplacées par les mots : « , de recherche scientifique ou de recherche généalogique » ;
« b) Les mots : « l’article 16‑10 » sont remplacés par les mots : « les articles 16‑10 et 16‑10‑1 » ;
« 2° Après l’article 226‑28‑1, il est inséré un article 226‑28‑2 ainsi rédigé :
« Art. 226‑28‑2. – Le fait de procéder à un examen des caractères génétiques à des fins de recherche généalogique en méconnaissance des dispositions de l’article 16‑10‑1 du code civil est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. » ;
« 3° À l’article 226‑29, la référence : « et 226‑28 » est remplacée par les références : « , 226‑28 et 226‑28‑2 ».
L’objet de cet amendement est d’autoriser les examens des caractéristiques génétiques d’une personne entrepris à des fins de recherche généalogique, tout en installant un régime juridique d'encadrement, dans une rédaction proche que celle qui avait été votée par la commission spéciale du Sénat.
Ces examens permettent d’être renseigné sur la répartition géographique de ses origines génétiques ou sur d’éventuelles proximités de parenté. Les tests génétiques généalogiques ne sont pas conçus pour fournir des informations détaillées sur les conditions médicales ou les maladies.
Ces examens font l’objet d’un régime d’interdiction (aux codes civil, pénal et de la santé publique) qui ne fonctionne pas en pratique puisqu’on estime à plus de 100 000 le nombre de français qui réalisent ces tests chaque année auprès de firmes étrangères qui font leur publicité dans des médias français. Aujourd’hui, ces tests sont effectués en dehors de tout cadre légal français et européen et font l'objet d'une exploitation commerciale non-maitrisée.
Le présent amendement vise donc à autoriser ces tests en encadrant leur réalisation et commercialisation par un régime juridique basé sur le respect du consentement et sur l'obligation d’information au consommateur. Il vise aussi à protéger les données personnelles en soumettant l'exploitation des données au règles européennes du RGPD, à empêcher que ces tests soient réclamés en matière d’assurances, de crédits bancaires ou qu’ils soient utilisés dans le cadre d’actions en justice pour l’établissement d’une filiation ou de droits patrimoniaux ou extra-patrimoniaux.
La légalisation des examens à visée exclusivement généalogique est un véritable enjeu de souveraineté. Actuellement, le monopole des firmes étrangères sur les tests réalisés en France induit une fuite des données personnelles des consommateurs français. Ces données sont exploitées et commercialisés en dehors du cadre légal français et européen. Il y a une totale perte de contrôle sur les données de nos concitoyens. Les données génétiques ont un fort intérêt économique et scientifique pour les laboratoires. Dans une logique de souveraineté, il faudrait que des entreprises ou des acteurs français puissent exploiter ce potentiel scientifique.
Il y a aussi un intérêt économique majeur dans libéralisation des tests. Selon la Fédération française de généalogie, près de sept français sur dix s’intéresseraient à la généalogie, près de 4 millions tenteraient de reconstituer les ramifications de leur arbre familial et plus d’un million auraient déjà acheté ce type de tests en France. Il serait possible de faire émerger des acteurs français du test génétique et générer des milliers d’emplois. A cela, il faut ajouter la haute valeur scientifique des données récoltées et dont la France ne profite pas pour l'heure.
Cette levée de l’interdiction a d’ailleurs été suggérée par le Conseil d’État dans son étude « Révision de la loi de bioéthique, quelles options pour demain ? » de juin 2018.
Il précise « L’étude relève que cet interdit est lié à la sensibilité des données génétiques, difficiles à interpréter et qui peuvent en outre révéler des informations sur d’autres personnes que l’intéressé. Pour autant, cet interdit se heurte à l’idée que rien ne s’oppose à ce qu’un individu, au nom de l’autonomie de la personne, puisse avoir accès à ses caractéristiques génétiques. En tout état de cause, le groupe de travail estime qu’un éventuel assouplissement de la législation devrait rester sans incidence sur les autres interdits existants, et en particulier sur l’interdiction faite aux employeurs et aux assureurs de demander, et même de prendre en compte, les résultats des examens des caractéristiques génétiques. »
Enfin, dans l’Union européenne, seule la Pologne et la France interdisent totalement les examens génétiques sans but médical ou scientifique. La pratique comparée montre que les principes éthiques sont mieux respectés lorsqu’il y a autorisation et un encadrement des examens que lorsqu’il y a une interdiction totale qui fait l’objet de larges contournements, comme c’est le cas en France.
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