Projet de loi de finances pour 2021 — Texte n° 3360

Amendement N° 908C (Rejeté)

Publié le 26 octobre 2020 par : M. Potier, Mme Rouaux, Mme Pires Beaune, M. Jean-Louis Bricout, Mme Rabault, M. Aviragnet, Mme Battistel, Mme Biémouret, M. Alain David, Mme Laurence Dumont, M. Faure, M. Garot, M. David Habib, M. Hutin, Mme Jourdan, M. Juanico, Mme Karamanli, M. Jérôme Lambert, M. Leseul, M. Letchimy, Mme Manin, M. Naillet, Mme Pau-Langevin, Mme Santiago, M. Saulignac, Mme Tolmont, Mme Untermaier, Mme Vainqueur-Christophe, M. Vallaud, Mme Victory, les membres du groupe Socialistes apparentés.

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Dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les financements accordés par l’État à des projets de méthanisation et les moyens mis en œuvre pour corriger certaines dérives, notamment dans le cadre du plan de relance.

Exposé sommaire :

Cet amendement du Groupe Socialistes et apparentés vise à attirer l’attention de la représentation nationale et du Gouvernement sur la nécessité d'encadrer la méthanisation agricole pour bénéficier pleinement des bénéfices de cette technologie énergétique qui est au cœur d'enjeux majeurs agro-alimentaires, économiques et environnementaux.

La méthanisation agricole a initialement été conçue comme une contribution positive à la transition énergétique et les lois et règlements adoptés ces dernières années ont visé, en lien avec les parties prenantes, à encadrer des projets afin de garantir leur ancrage territorial, leur dimension circulaire, l'équilibre agronomique et notre souveraineté alimentaire. Malgré ces efforts, la méthanisation agricole fait aujourd'hui l'objet de nombreuses controverses : risque de fragilisation de l'activité d'élevage, bilan écologique incertain des pratiques agricoles induites...

Que l'échelle des désordres pressentis soit l'écosystème territorial ou celui de l'équilibre planétaire, les questions ainsi posées méritent d'être examinées avec sérénité dans le débat public. Les sources des conflits latents telles qu'elles sont observées sont de deux ordres.

La première est évidemment l'autorisation donnée entre 2011 et 2015 à quelques entreprises qui, profitant du vide juridique, ont mobilisé l'essentiel des ressources végétales vers la méthanisation plutôt que vers l'alimentation humaine et animale. Au regard des effets déstructurants au niveau local, notamment sur le marché foncier, il convient d'étudier toutes les limites envisageables pour arrêter le plus rapidement possible ces pratiques dévoyées.

La seconde dérive concerne la nouvelle génération de méthaniseurs à partir de 2017. Elle est plus systémique et se traduit de multiples façons. Premièrement, les acteurs qui émergent sur ce marché sont les plus puissants sur le plan économique. La programmation pluriannuelle de l'énergie prévoit une baisse de plus de 30 % des tarifs d'achat du biométhane en injection, ce qui risque d'entraîner une massification de la production sur quelques structures pour réduire les charges de production. Ce type de structures concentre beaucoup de financements publics, laissant peu de disponibilité budgétaire aux projets plus intégrés. Deuxièmement, la carte des réalisations et des projets correspond ainsi davantage à la sociologie des acteurs qu'à celle des ressources territoriales, notamment en effluents d'élevage. Troisièmement, la limite fixée en matière de production végétale méthanisable n'est pas respectée par certains opérateurs, faute d'un contrôle effectif. Ainsi le décret du 7 juillet 2016 fixant le seuil maximal des cultures alimentaires et énergétiques cultivées à titre principal et incorporées dans les méthaniseurs à 15 % est très facilement contournable. Quatrièmement, l'effet inflationniste sur les matières premières végétales exacerbe les tensions avec le monde de l'élevage, notamment dans le cas des pénuries de fourrage liées aux épisodes de sécheresse. Enfin, les pratiques d'épandage sur certains bassins versants peuvent induire des pollutions significatives faute de contrôles efficaces. Ainsi, la méthanisation telle qu'elle est pratiquée aujourd'hui ne semble pas garantir systématiquement une compatibilité avec l'équilibre alimentaire et l'écologie, tant par les intrants que par l'épandage, du fait de contournements de la réglementation ou de manque de contrôles effectifs.

Un véritable développement de la méthanisation à la ferme ne peut s'envisager qu'à travers la mise en place d'un tarif de rachat de l'énergie supérieur pour les petites unités, afin que celle-ci soient plus compétitives et puissent ainsi plus facilement se financer. Il est devenu urgent de poser à nouveau les termes du débat en tirant parti des leçons de l'expérience allemande et de ses excès. Par ailleurs, il conviendrait de s'inspirer d'initiatives telles que la charte des bonnes pratiques en méthanisation à travers laquelle les Agriculteurs Méthaniseurs de France confirment leur engagement mutuel pour un développement vertueux, raisonné et harmonieux de la filière.

Afin de ne pas fragiliser ce qui doit rester une contribution significative à la transition énergétique du pays, l’État doit renforcer les modalités et outils concrets de prévention et de sanction en cas de non-respect des équilibres attendus sur les plans économiques et environnementaux. Enfin, il conviendrait de mettre en place d'un label « méthanisation verte » qui permettrait aux autorités compétentes de se prononcer en toute connaissance de cause sur les attributions d'urbanisme et d'aides publiques pour les projets de méthanisation.

Cette évolution de la méthanisation agricole passe par l’établissement d’un système de contrôle efficient, qui fait totalement défaut aujourd’hui.

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