Publié le 22 octobre 2020 par : M. Person, M. Perrot, Mme Kerbarh, Mme Rilhac, M. Fuchs, M. Matras, Mme Duby-Muller, M. Sorre, M. Colas-Roy, M. Mis, M. Trompille, Mme Piron, Mme Rossi, Mme Racon-Bouzon, Mme Frédérique Dumas, Mme Hennion, M. Testé, M. Houlié, M. Chiche, M. Zulesi, M. Nadot, Mme Gayte, Mme Bagarry, M. Taché, Mme Sylla, M. Démoulin.
Le chapitre Ier du titre Ier du livre IV de la première partie du code général des collectivité territoriales est complété par un article L. 1411‑20 ainsi rédigé :
« Art. L. 1411‑20. – Durant la période pendant laquelle l’état d’urgence sanitaire est déclaré sur la totalité du territoire métropolitain en application des articles L. 3131‑2 et suivants du code de la santé publique, et sauf si la convention de délégation de service public en dispose autrement, toute modification dans la détention, directe ou indirecte, du capital d’une société délégataire qui entraine un changement de contrôle sur ladite société, au sens de l’article L. 233‑3 du code de commerce, autorise la collectivité, le groupement ou l’établissement délégant à prononcer la résiliation de la convention. Cette résiliation doit être décidée par l’assemblée délibérante au plus tard trois mois après que la société délégataire a notifié son changement de contrôle au délégant ou, si aucune notification n’a été effectuée au délégant, après que ce dernier en a pris connaissance, le cas échéant en interrogeant par écrit la société délégataire. La date de prise d’effet de la résiliation est déterminée par le délégant de manière à permettre l’organisation d’une procédure de sélection du nouveau délégataire. La société délégataire dont la convention a été résiliée en application du présent article a droit à une indemnité couvrant la part non amortie des investissements qu’elle a réalisés dans le cadre de la délégation. »
La situation sanitaire que nous connaissons depuis le mois de mars 2020 a fortement déstabilisé notre pays et, notamment, son économie. En effet, la crise que nous traversons a engendré une déstabilisation majeure des marchés financiers, fragilisant de nombreux secteurs et exposant certaines entreprises à des opérations agressives de prise de contrôle.
La crise a aussi révélé certaines fragilités de la souveraineté industrielle de la France, et la faiblesse des mécanismes de protection de l’État actionnaire.
Afin de faire face à l’ampleur de la pandémie, le gouvernement a dû prendre des mesures exceptionnelles restreignant les libertés fondamentales, et notamment la liberté d’aller et venir ainsi que la liberté d’entreprendre sur l’ensemble du territoire national. Avec ce projet de loi visant à étendre l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 16 février, l’État continue d’agir afin de lutter contre la propagation du virus et ses multiples conséquences néfastes.
Toutefois, aucune mesure n’a encore été envisagée afin de sauvegarder notre souveraineté industrielle en protégeant les entreprises face aux raids boursiers dont elles pourraient être victimes. Plus particulièrement, aucune mesure spécifique n’a été prise pour protéger les entreprises délégataires de service public qui subiraient ces assauts.
En atteste, une offre publique d’achat de la participation d’Engie dans Suez par Veolia qui a été acceptée le 5 octobre 2020 par le conseil d’administration d’Engie. Or, cette décision a été prise contre l’avis des administrateurs représentant l’État, qui ont été mis en minorité.
Il eût pourtant été légitime que l’État-stratège joue un rôle proactif et dual : celui d’actionnaire de l’entreprise cédante, et celui de garant de nos biens communs, en l’occurrence de l’eau et du traitement des déchets. En effet, il est à craindre que ce type d’opération ait des conséquences sur les prix dans les secteurs de l’eau et du traitement des déchets, mais aussi sur la qualité de service et la capacité d’investissement en infrastructures locales. La fusion pourrait donc compromettre l’exercice de missions de service public.
Il paraît donc urgent de légiférer afin que les collectivités territoriales, et en particulier celles qui avaient signé des contrats de délégation de service public, ne se retrouvent plus spectatrices d’une opération boursière qui les concerne au premier chef.
Cet amendement vise précisément, dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, à prémunir les collectivités territoriales d’OPA qui pourraient engendrer un changement de gouvernance d’une entreprise titulaire d’une délégation de service public, sans que la collectivité délégante ne puisse intervenir.
Si certains contrats de délégation de service public comportent des clauses permettant au délégant de mettre fin à la délégation en cas de changement de contrôle du délégataire, la plupart des conventions de DSP, sont muettes sur ce point. Cela prive les collectivités délégantes de toute capacité d’intervention si le délégant, qu’elles ont pourtant choisiintuitu personae, vient à changer par suite d’une prise de contrôle. C’est pourquoi, il est proposé d’inscrire dans la loi que pendant l’état d’urgence sanitaire, dans le silence du contrat, tout changement de contrôle d’une entreprise délégataire de service public permettra au délégant de mettre fin à la délégation si les conséquences de ce changement de contrôle ne lui conviennent pas.
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