Publié le 25 mars 2021 par : Mme Kerbarh, M. Baichère, Mme Charrière, M. Colas-Roy, Mme Dupont, M. Fugit, Mme Le Feur, Mme Le Peih, Mme Marsaud, Mme Meynier-Millefert, Mme O'Petit, M. Paluszkiewicz, M. Perrot, Mme Piron, Mme Riotton, Mme Rossi, Mme Sarles, Mme Sylla, Mme Tiegna, M. Trompille, Mme Vanceunebrock, M. Vignal.
Après le quatrième alinéa, insérer l’article suivant :
« IV. - Après le III. de l’article L.225-102-1 du Code du Commerce, insérer deux nouveaux alinéas :
« IV. La déclaration de performance extra-financière présente, face à chaque information sur la manière dont la société prend en compte les conséquences environnementales de son activité, les dépenses financières correspondantes. Ces dépenses financières concernent tant les dépenses engagées au cours de l’exercice passé, issues des comptes annuels, que les dépenses budgétées pour les exercices à venir. »
« Un décret en Conseil d’Etat précise les modalités de présentation, contenu, méthodologie et publication de ce rapprochement entre informations environnementales et dépenses financières, selon que la société relève du I de l’article L.225-102-1 ou de l’article L. 22-10-36. Ce décret fait la distinction entre les dépenses pour la gestion des impacts environnementaux de l’activité de l’entreprise et les dépenses pour une évolution écologique du modèle d'affaires. L’application du présent article entre en vigueur au 1er juin 2023. »
Le présent amendement vise à faire évoluer la déclaration de performance extra-financière (DPEF) vers une déclaration de performance intégrée (DPI) en rendant obligatoire la publication par les entreprises des informations sur les moyens financiers qu'elles mobilisent pour la préservation de l’environnement.
Les réglementations européenne et française obligent les grandes entreprises à publier un certain nombre d'informations concernant leurs politiques environnementales et sociales. En l'état, les informations environnementales divulguées sont décorrélées des informations financières et ne permettent ainsi pas :
a) de véritablement rattacher le modèle d’affaires – reposant sur des bases financières – à des données extra-financières (comme pourtant demandé par la DPEF) ;
b) d’estimer l’engagement réel des sociétés au regard des politiques en matière d’environnement ;
c) de formuler une analyse financière « intégrée » des sociétés ; or sans ce type d’analyse, il est difficile de concevoir une évolution des pratiques d’investissement ;
d) de mettre en évidence des pratiques vertueuses ou non en termes d’investissements et de budgétisations d’actions en faveur de l’environnement ;
e) de mettre en place des mécanismes incitatifs efficaces (notamment fiscaux) en faveur de la transition écologique.
Une telle évolution de la DPEF vers une DPI doit permettre à la fois de faire la transparence sur les coûts environnementaux engagés par les entreprises sur leur exercice passé (vision rétrospective) et de fournir des informations sur les coûts environnementaux budgétés pour les exercices à venir (vision prospective).
Ces coûts environnementaux devront recouvrir à la fois les dépenses environnementales, soit les dépenses mobilisées par l'entreprise pour prévenir, réduire ou réparer les dommages qu'elle cause à l'environnement, et les dépenses en faveur de la transition écologique, soit les dépenses visant à réorienter écologiquement son modèle d'affaire et permettant, par-là, de réduire ses impacts environnementaux.
Ces propositions s’appuient en grande partie sur des recommandations du Conseil National de la Comptabilité et de l’Autorité des Marchés Financiers. Ces recommandations formulées en 2003 étaient, lors de leur parution, trop avancées par rapport aux pratiques des entreprises en matière de reporting. Elles n’ont, de ce fait, pas ou peu été mises en pratique. Aujourd’hui, avec la généralisation et l’amélioration considérable des divulgations extra-financière, avec les appels à la convergence entre données financières et extra-financières (rapport Notat-Sénard, rapports du CESE, etc.) et avec la multiplication des initiatives volontaires réussies de comptabilité “intégrée” ou “multi-capitaux”, ces recommandations constituent la continuité naturelle du mouvement de fond initié par la France en 2001 avec la Loi n°2001-420 sur les Nouvelles Régulations Économiques.
La non-financial reporting directive (NFRD), à l’origine de la DPEF et actuellement en cours de révision au niveau européen, ne rentrera en vigueur en France qu’en 2024, au plus tôt. En raison de la maturité très contrastée des Etats membres en matière de reporting, cette réglementation ne traitera pas de la convergence entre information financière et extra-financière.
Une telle évolution à court terme du reporting ne pourra donc avoir lieu qu’au niveau national. Elle renforcerait le leadership que la France détient depuis 20 ans sur ce sujet, et doterait le pays d’un instrument fondamental pour le pilotage et l’avènement d’une authentique transition écologique de son économie.
Cet amendement est issu de travaux menés conjointement par le WWF France, la Chaire Comptabilité écologique, l’association OREE, le Conseil supérieur de l’ordre des experts-comptables, et la Société Française des Analystes Financiers, avec la participation d’observateurs de l’Autorité des Normes Comptables et du Commissariat Général au Développement Durable.
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