Publié le 10 novembre 2021 par : M. Labaronne, Mme Verdier-Jouclas, M. Pellois, Mme Hérin, Mme Park, M. Saint-Martin, M. Paluszkiewicz, Mme Daufès-Roux.
Supprimer cet article.
Le sujet de l’assurance emprunteur (ADE) est étroitement lié à la politique d’accès à la propriété des Français. La situation actuelle permet déjà au client de changer d’Assurance Emprunteur, au bout d’un délai d’un an, à chaque date anniversaire du contrat d’ADE. Or, en instaurant la résiliation infra annuelle, l’article 1 de cette proposition de loi favorise clairement les profils les moins risqués en termes d’âge, de CSP et de santé au détriment des profils les plus fragiles, en créant un accès à l’ADE et au crédit immobilier à deux vitesses.
Actuellement, la particularité des contrats assurances dits « contrats Groupes », à la différence des contrats proposés par les Assureurs Alternatifs, est de pouvoir proposer des offres accessibles à tous et notamment aux plus fragiles par un dispositif de mutualisation des risques entre les « bons » profils et les profils « plus risqués » (mécanisme naturel dans une assurance) :
À titre d’exemple, pour un ouvrier de 60 ans fumeur souhaitant assurer un prêt de 100 000 € sur 20 ans, le coût de l’Assurance Emprunteur est trois fois plus élevé chez un assureur alternatif (1256 euros par an en moyenne) que dans un contrat groupe bancaire (415 euros par an en moyenne (Rapport 2020 du Comité Consultatif du Secteur Financier qui regroupe les associations de consommateurs, les pouvoirs publics et les professionnels du secteur).
Ce type de « contrats Groupes » est notamment assis sur la longévité des périodes d’assurance adossées à celles des crédits. En d’autres termes, permettre de résilier à tout moment le contrat d’ADE engendrera une instabilité disproportionnée par rapport à la durée de l’Assurance des emprunteurs et poussera à la fin de ce modèle de mutualisation.
Ce risque de démutualisation au détriment des plus fragiles est bien réel comme le souligne le rapport le rapport du CCSF de 2020 : « On constate ainsi une baisse très significative des tarifs (de 13 % à 26 %) sur les profils représentant le plus grand nombre de contrats et les plus jeunes (25‑45 ans), et sur lesquels la pression de la délégation/substitution d’assurance est par ailleurs la plus significative. Au contraire, les tarifs des profils plus âgés, essentiellement associés à la garantie DC/PTIA (au-delà de 55 ans), ont vu leur tarif augmenter jusqu’à + 33 %. Si cette hausse est le corollaire de la baisse des tarifs sur les plus jeunes, ce serait alors une première évolution allant d’une péréquation tarifaire à une discrimination tarifaire (« démutualisation » au sens courant du terme). »
Enfin, comme le rappelait la Ministre de l’Industrie Agnès Pannier-Runacher le 2 octobre 2020 à l’Assemblée nationale, lorsque la résiliation infra annuelle de l’ADE a été proposée : « A force de resserrer ainsi la pression, on peut craindre que les mauvais risques ne soient plus assurés convenablement. Les fintech de l’assurance se mettront »en chasse« des personnes considérées comme de « bons risques », à savoir des personnes jeunes en bonne santé. Quant aux personnes jugées comme constituant de « mauvais risques », on ne leur proposera pas ces offres, ce qui créera, à l’évidence, un déséquilibre. La péréquation entre « bons risques » et « mauvais risques », mécanisme naturel dans une assurance, ne se fera plus. »
Particulièrement, si cet article venait à être adopté, les banques en seraient réduites à ne traiter que les personnes considérées comme « mauvais risques », ce qui ne manquera pas d’augmenter le coût de l’assurance emprunteur. Cela pourrait donc avoir, in fine, un effet pervers : les personnes les plus vulnérables se verraient payer beaucoup plus, tandis que les personnes en bonne santé qui ont la vie devant elles et ont un bon emploi paieraient moins.
Pour éviter ces risques, cet amendement prévoit de supprimer cet article.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.