Publié le 25 juin 2018 par : M. Gouttefarde, M. Baichère, Mme Cattelot, Mme Françoise Dumas, Mme Gaillot, Mme Lazaar, M. Pichereau, Mme De Temmerman.
Au premier alinéa du Préambule de la Constitution, les mots : « de l'Homme » sont remplacés par les mots : « humains ».
Historiquement, le mot « homme » dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen française a longtemps servi à exclure juridiquement les femmes comme sujet de droit et particulièrement à les exclure du droit de vote, et de la vie de la cité.
Cet amendement, conforme à la recommandation n°2 de l'avis du HCE relatif à la révision constitutionnelle, vise ainsi à remplacer une expression désuète et exclusive par une expression neutre et inclusive de toutes les personnes humaines, y compris les femmes.
Jean-Yves LE DRIAN, à l'occasion de son discours du 8 mars 2018, s'est positionné en faveur de l'usage de l'expression « droits humains » ; Il a alors mentionné : « J'ai une interrogation. Sur la question des droits humains, droits de l'homme, il faut mettre un terme à cette confusion. Je suis partisan de dire désormais définitivement droits humains. Si du moins Marlène SCHIAPPA me soutient. Elle me soutient. »
Dans une société qui se veut égalitaire, il est urgent d'abandonner cette expression qui ne désigne que la moitié de la population et en exclut l'autre moitié.
Cette expression « Droits de l'homme », symbole de l'attachement à l'usage d'une expression héritée d'une Histoire qui a longtemps exclu sciemment les femmes, en particulier des droits consacrés par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, pose question. Désormais acquise, l'inclusion et la prise en compte du sexe féminin par l'expression « droits de l'Homme » marquée par le « H » majuscule est, en plus d'être inaudible à l'oral, en pratique souvent évacuée comme un détail orthographique sans importance. L'utilisation de l'expression « Droits humains » à la place est beaucoup plus appropriée. En effet, l'utilisation du mot « homme », même avec une majuscule, n'est pas neutre. Il exclut les femmes et participe de l'idée erronée selon laquelle le masculin serait le neutre.
Il est d'ailleurs intéressant de noter que l'alinéa 1 du préambule de la Constitution utilise un « h » minuscule en déclarant que « Le peuple français proclame son attachement aux Droits de l'homme ».
Olympe de Gouges, pionnière du féminisme français pendant la Révolution de 1789, a rédigé la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne en faveur des droits civils et politiques des femmes, ce qui lui a d'ailleurs valu un passage sous la guillotine. Le 19 octobre 2016, son buste a été installé dans la salle des Quatre-Colonnes du Palais Bourbon et constitue la première représentation d'une femme politique parmi les œuvres présentées dans l'édifice.
Il serait progressiste de passer des symboles aux gestes concrets en reconnaissant les droits des femmes à même la Constitution, en adoptant cet amendement et donc l'expression de « Droits humains ».
Malgré le recours de plus en plus fréquent à l'expression « droits humains », la France continue à employer dans sa terminologie officielle l'expression « droits de l'Homme », se démarquant ainsi de plusieurs autres pays dans le monde qui utilisent désormais une expression inclusive de l'ensemble des citoyennes et des citoyens.
Cette expression est d'ailleurs utilisée dans les versions en langue anglaise des conventions internationales, comme par exemple la CEDH qui en anglais s'intitule « European convention for the protection of human rights and fondamental freedoms ». La traduction française de « Human rights » par « Droits de l'homme » est donc linguistiquement erronée au prix d'un attachement, résistant, à une certaine histoire française volontairement exclusive des femmes.
Les rédacteurs de la Déclaration universelle de 1948 voulaient, eux aussi, utiliser l'expression « Man Rights » et ce fut Eleanor Roosevelt, seule femme présente, qui se battit pour qu'ils adoptent l'expression « Human Rights », afin de couvrir également les droits des femmes.
Par ailleurs, au Canada, par exemple, l'instrument juridique le plus important pour la protection des citoyennes et des citoyens se nomme « La charte canadienne des droits et libertés ». Elle est intégrée directement dans la Constitution et n'emploie pas une seule fois l'expression « droits de l'homme ». La loi visant à compléter la législation en matière de discrimination se nomme d'ailleurs la « Loi canadienne sur les droits de la personne ».
Au Québec, l'instrument le plus haut dans la hiérarchie des normes se nomme la « Charte des droits et libertés de la personne ». À l'international, le Québec utilise plutôt l'expression « droits de la personne humaine », plus inclusive encore.
Dans le préambule de la Constitution d'Haïti, on peut également lire : « Pour instaurer un régime gouvernemental basé sur les libertés fondamentales et le respect des droits humains, la paix sociale, l'équité économique, la concertation et la participation de toute la population aux grandes décisions engageant la vie nationale, par une décentralisation effective. »
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