Publié le 30 septembre 2020 par : M. Besson-Moreau, M. Pellois, Mme Motin, M. Descrozaille.
Le deuxième alinéa du III de l’article L. 441‑1 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée : « Dans le cadre de cette négociation, les parties peuvent convenir de conditions particulières de vente, justifiées par des contreparties réelles, vérifiables et proportionnées du distributeur, qui ne sont pas soumises à l’obligation de communication prévue au II ».
La loi EGAlim du 30 octobre 2018 reposait entre autres sur le pari que la majoration de 10% du seuil de revente à perte, en améliorant mécaniquement la marge des enseignes de distribution, conduirait à une détente sur les prix d’achat permettant elle-même une meilleure rémunération de l’amont agricole. Le gouvernement envisage de reconduire cette mesure expérimentale dans le cadre de l’article 44 de la présente loi.
L’objectif de l’amendement est de faire un pari si ce n’est différent, au moins complémentaire, qui consisterait à renforcer la protection tarifaire et les prix nets de cession, afin de rendre aux industriels, fournisseurs de la grande distribution, le contrôle de leurs ressources et la capacité de rétrocéder une partie de la valeur créée à l’amont agricole et ainsi d’atteindre le but fixé par le législateur en 2018. Car hormis dans le secteur des produits laitiers, les négociations 2019 et 2020 se sont traduites pour les fournisseurs de la grande distribution, quelle que soit la catégorie de produits, par de nouvelles baisses des prix auxquels ils vendent leurs produits aux enseignes. Dans ces conditions, revaloriser les prix auxquels eux-mêmes achètent à leur amont agricole relève d’une équation économique insoluble. Le déséquilibre majeur à l’aval de la filière reste prégnant avec le maintien de super-centrales d’achat, basées en France ou à l’étranger, qui réduisent le pouvoir de négociation des fournisseurs, quelle que soit leur taille.
La préoccupation des distributeurs reste de pouvoir vendre à bas prix pour attirer le consommateur dans une enseigne plutôt qu’une autre, ce qui se traduit par des pratiques abusives des distributeurs à l’égard de leurs fournisseurs pour se voir octroyer des avantages permettant d’acheter les produits à un prix toujours plus bas, sans tenir compte des difficultés et enjeux de la filière alimentaire.
La plus grande difficulté des industriels, fournisseurs de la grande distribution, réside dans le fait qu’ils ne sont pas suffisamment protégés vis-à-vis des demandes de baisses de prix de la grande distribution, systématiques et déconnectées du contexte économique dans lequel se situe leur fournisseur. Cette situation vaut encore plus lorsque l’industriel négocie face à une centrale d’achat ou alliance de distributeur qui pèse plus de 20% du marché, ce qui accentue encore le déséquilibre du rapport de force).
L’absence de maîtrise par les industriels de leur prix de vente ne leur permet pas de financer leurs besoins, notamment faire face à la volatilité de la matière première, procéder aux investissements nécessaires pour mieux répondre aux nouvelles attentes du consommateur et pour améliorer les conditions de rémunération des producteurs agricoles. Plus généralement il s’agit pour les industriels d’d’accélérer la modification de leur modèle et faire advenir les transitions alimentaires ou environnementales auxquelles elles veulent et doivent participer.
La proposition d’amendement vise ainsi à clarifier la notion de négociabilité du tarif du fournisseur, qui n’est pas remise en cause, mais qui doit être justifiée par des contreparties réelles, vérifiables et quantifiables, afin de garantir une juste proportionnalité entre d’une part les avantages financiers consentis par le fournisseur et d’autres parts les obligations et services consentis par les distributeurs en contrepartie.
Il ne s’agit pas par ailleurs de revenir au système du « ligne à ligne » qui consiste à individualiser un montant en face de chaque contrepartie, et qui est une source de rigidité et de complexité. Les réductions de prix peuvent parfaitement être globalisées en face d’un ensemble de contreparties, pour autant que le descriptif de celles-ci soit précis.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.