Intervention de Valérie Six

Séance en hémicycle du mardi 28 septembre 2021 à 15h00
Ratification de l'ordonnance relative aux modalités de représentation des travailleurs indépendants recourant aux plateformes — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Six :

Le présent texte vise à instaurer le dialogue social entre les plateformes et les travailleurs qui y recourent. L'arrivée des plateformes sur le marché du travail a bouleversé notre conception du travail et nos modes de consommation. On ne peut nier que les plateformes, qui entendent valoriser le travail indépendant et permettent à un public très éloigné de l'emploi d'y accéder, créent un nouveau modèle économique et un nouveau modèle d'emploi.

Durant la crise sanitaire, notamment durant les confinements les plus stricts, les applications de livraison de plats à emporter se sont démocratisées. Le click and collect et la livraison de commandes à domicile sont de nouveaux modes de consommation très prisés. Il en va de même pour le transport, avec l'essor du VTC dans les grands centres urbains, où tout est fait pour diminuer la circulation de voitures particulières.

Si les travailleurs de ces plateformes sont considérés comme des indépendants, force est de constater qu'ils ne sont pas des indépendants comme les autres. C'est d'ailleurs ce qu'a mis en lumière la Cour de cassation dans son arrêt du 4 mars 2020, en rappelant que le travailleur « ne constitue aucune clientèle propre, ne fixe pas librement ses tarifs ni les conditions d'exercice de sa prestation de transport. » Le juge a d'ailleurs considéré que le faisceau d'indices dont il disposait tendait à caractériser le lien de subordination entre le travailleur et la plateforme, donc à démontrer l'existence d'un contrat de travail.

Or nous considérons qu'il revient au législateur de déterminer la nature de ce lien. En outre, si ces particularités doivent être prises en compte, ce ne sera certainement pas par la requalification du contrat qui lie le travailleur à la plateforme en contrat de travail. Certains de ces travailleurs ne souhaitent pas devenir des salariés des plateformes : ils veulent rester indépendants.

Toutefois, la nature singulière de leurs relations avec la plateforme commande qu'ils soient davantage protégés. Cela pose la question d'une participation plus importante des plateformes dans le financement de la protection sociale. Cela pose également la question du lien entre le niveau des prestations, celui des cotisations et celui du revenu. Une meilleure prise en compte de ces spécificités peut passer par le dialogue social, auquel le groupe UDI et Indépendants est d'ailleurs très attaché. C'est ce que le Gouvernement propose au travers de l'ordonnance soumise aujourd'hui à ratification. Mais faut-il légiférer pour instaurer le dialogue social ? Nous ne le croyons pas, car la solution se trouve manifestement ailleurs.

Pour réguler ce dialogue, il est en outre question de créer une énième agence, l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi. C'est un mal français : à chaque problème sa commission ! Nous avons interpellé le Gouvernement à plusieurs reprises sur le nombre et la prolifération des agences de l'État – ainsi notre collègue Guy Bricout a-t-il posé plusieurs questions au Gouvernement sur ce point. En France, on compte plus de 1 200 agences et autres autorités de l'État. Nous ne pouvons plus continuer à fonctionner de cette manière ! Combien de fois, dans cet hémicycle, parlons-nous de simplification des procédures et des démarches ? Combien de fois nous étendons-nous sur la complexité et le poids de l'administration ? Ne tombons pas, une fois encore, dans le vieux réflexe de la multiplication des autorités pour réguler, encadrer, complexifier et finalement décourager ! En somme, il nous faut trouver un équilibre permettant d'améliorer la protection de ces travailleurs sans dénaturer le service proposé par la plateforme. Notre groupe considère que ce projet de loi ne l'instaure pas, pour les raisons évoquées. Nous défendrons donc des amendements de suppression d'article et voterons contre ce texte.

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